CHRONIQUE DE L’ERE XENOZOÏQUE par Mark Shultz
Un article MATTIE-BOY
VO : Dark Horse
VF : Akileos
1ère publication le 20/09/18- MAJ le 02/10/22
L’article d’aujourd’hui portera sur la série CHRONIQUE DE L’ERE XENOZOÏQUE (XENOZOIC TALES) de Mark Shultz, datant de 1988 et publiée chez Akileos en France.
Alors c’est quoi XENOZOIC TALES ? Eh bien c’est une série d’aventures se situant dans un futur post apocalyptique dans lequel les dinosaures ont resurgi. Pendant 600 ans, les humains se sont cachés dans des villes souterraines à cause de multiples catastrophes naturelles et de la pollution qui ont ravagés la surface. Au terme de cette période, ils ont réinvesti la surface mais le monde était redevenu plus primitif. Puisque pas mal de générations ont passé, peu de gens savent exactement ce qui est arrivé à notre monde puisque les rares vestiges de l’époque où l’humanité était à son apogée (le XXème siècle) sont éparpillés ou détruits, certains oubliés dans des bibliothèques. Dans ce monde où la technologie est limitée, les bricoleurs et mécaniciens sont considérés comme très utiles.
C’est une série très inspirée des comics pulp des années 50/60 avec un contexte de futur ravagé, des voitures, des dinosaures, une jolie héroïne, etc. (pour info, un titre alternatif de la série est CADILLACS & DINOSAURS) Le tout dessiné dans un superbe noir et blanc semblant sortir d’une autre époque (dans le bon sens du terme puisque le dessin est magnifique et rappelle un peu les BD des années 50/60) La série a eu son petit succès puisqu’elle a donné naissance à un jeu-vidéo sur arcade et un cartoon.
On suit les aventures de Jack Tenrec, mécanicien, et Hannah Dundee, scientifique. Cette dernière débarque au début de l’aventure en tant qu’ambassadrice de la tribu de Wassoon qui vit plus loin au-delà de la mer (on apprend petit à petit que dans cette époque, des sortes de clans se sont formés, chacun ayant sa ville à gérer)
La série se découpe en courtes aventures d’une dizaine de pages qui se suivent. Au début cela commence simplement avec un groupe de braconniers qui veulent s’en prendre à Hannah qui sera sauvée par notre héros Jack Tenrec. Pourtant loin d’être une demoiselle sans défense, Hannah tissera des liens d’amitiés avec Jack même si des tensions naîtront entre eux à plusieurs reprises.
Les premières histoires mettent en scène des dinosaures qui terrorisent des mineurs, des bandits qui essaient de s’en prendre à nos héros, avant que se dessine une intrigue un peu plus complexe au fur et à mesure.
Alors que Hannah obtient l’accès à la bibliothèque de la ville où elle s’est invitée, elle tombe sur un secret d’un ancien temps : une bombe. D’autres personnages font également des recherches pour revenir aux mœurs des anciens (donc notre population actuelle du XXIème siècle, pleine d’armes et de pollution) Le personnage de Wilhelmina Scharnhorst qui tient une place au conseil de la ville va se faire élire gouverneur et comme elle voit Jack Tenrec et ses idées écologistes comme une menace, ce dernier va devoir fuir sa ville en compagnie de Hannah.
Ajoutons à cela une race d’hommes reptiles qui peuvent communiquer par télépathie avec les dinosaures, et vous obtenez une série assez originale qui se paie le luxe d’avoir un message écologique derrière puisque durant leurs aventures, nos héros vont être confrontés à des réalités ou des comportements (surtout ceux des méchants) qui leur rappelleront pourquoi le monde a fini ainsi et pourquoi il est important d’apprendre des erreurs du passé.
Le duo de personnages est attachant. Jack est un peu le héros classique mais sa relation avec Hannah est sympa puisqu’elle se débrouille souvent très bien sans lui alors qu’il veut souvent jouer les héros machos protecteurs.
Alors pourquoi seulement 3,5 étoiles me direz-vous ? Hummm…parce que la série est restée inachevée. Tout simplement. Eh oui, c’est bien dommage. L’ouvrage publié par Akileos publie la totalité de la série, mais cette dernière, un peu comme un BATTLE CHASERS de Joe Madureira, n’a jamais eu de fin. En gros après que le conflit éclate entre Jack et le conseil de sa ville, Hannah et lui vont devoir fuir dans la tribu de Wassoon d’où vient Hannah, qui semble être un clan concurrent (ils ne se font pas la guerre…mais on sent qu’il faudrait peu de choses pour que ce soit le cas) Et en gros la série s’achève alors que Jack commence à connaître de nouveaux personnages de cette nouvelle cité, certains louches (notamment un mec jaloux de Jack qui semble convoiter Hannah), et…euh…ben voilà. On sent qu’il va se préparer quelque chose. Que Hannah ou Jack vont être en danger…mais on ne sait pas trop pourquoi.
Alors évidemment c’est franchement dommage. Mais d’un autre côté, sur les 14 épisodes contenus dans cette intégrale, on peut dire que les 11 premiers forment un premier arc, avant que Jack et Hannah fuient pour un nouveau refuge chez un autre clan. Les 3 derniers épisodes semblent préparer le terrain pour une autre intrigue mettant en scène de nouveaux personnages secondaires, mais celle-ci s’arrête d’un coup.
C’est dommage, mais puisqu’on peut tout de même savourer une bonne partie des aventures de notre duo de choc jusqu’à ce second arc, il m’est impossible de me séparer de cette BD que je trouve vraiment plaisante.
La partie graphique, comme je l’ai déjà dit, est vraiment magnifique. Le trait assez réaliste rappelle les comics dessinés par les artistes officiant chez Warren Publishing.
Mark Shultz semble s’éclater à dessiner des dinosaures interagir avec des humains, et il ne se prive pas non plus de nous dessiner la jolie Hannah Dundee dans des situations mettant en valeur sa silhouette. Dis comme ça, dinos + jolie fille + bagnoles, ça semble faire un peu « beauf » comme comics, mais c’est en réalité plus intelligent qu’il n’y paraît avec son message environnemental. Evidemment ce n’est pas non plus un traité de philo, cela reste une BD de divertissement inspirée des séries d’aventures de l’ère des magazines pulp, mais le comics contient également une dose suffisante de second degré avec des touches d’humour bienvenues qui prouve que l’auteur est surtout là pour se faire plaisir à nous dépeindre un monde assez délirant proche d’un MAD MAX avec des dinosaures.
J’ai passé un très bon moment de lecture, et cela malgré la fin qui n’en est pas une.
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La série a donné dans l’adaptation dessin animé et jeu d’arcade : Mattie Boy vous fait découvrir Xenozoid Park chez Bruce Lit.
La BO du jour : d’autres dinosaures du rock…
J’ai le vague souvenir du cartoon, et Marti m’avait prêté la BD ; mais je n’avais pas aimé. À l’aune des éléments évoqués et qui me parlent beaucoup aujourd’hui (Pulp, écologie), je vais surement retenter !
J’ai toujours été très tenté. Mais un de mes amis m’avait dissuadé de le lire. Il avait été tellement déçu et frustré de l’arrêt prématuré de l’histoire qu’il voulait bazarder l’intégrale ! Il me l’avait prêtée mais je l’ai seulement feuilletée en définitive.
Etant donné que ma pile de lecture touche les cieux, j’ai préféré me tourner vers d’autres horizons. Mais c’est sûr que c’est franchement dommage que l’auteur n’ait pas fini sa série. D’autant qu’elle est devenue culte avec le temps. Il aurait pu s’y remettre…
Honnêtement je n’ai pas été frustré comme ça.
Mais le truc, c’est que je savais avant d’acheter que c’était inachevé. Ton ami le savait-il ou est-il tombé des nues à la fin du bouquin ?^^
Quand on sait à quoi s’attendre, il y a tout de même des histoires à apprécier.
Je me doute que peu de gens vont tenter parce que le simple principe que ce soit inachevé va rebuter la plupart des gens, mais moi je garde la BD ! Je sais pas trop comment l’exprimer mais c’est un peu comme Vampirella. Tu bazarderai le volume Delirium si on te disait qu’ils ne publieront jamais la suite et que tu doives t’arrêter au moment où Dracula débarque et que tu ne sais pas ce qu’il va se passer ?
Moi je pense que non. Il y a des courtes histoires avant qui sont appréciables.
Génial : exactement l’article dont je rêvais sur cette série. Sans avoir à faire d’effort, j’ai enfin l’information sur le lien entre Xenozoic Tales et Cadillacs & Dinosaurs (ça peut paraître bizarre mais je pensais qu’il s’agissait de 2 séries distinctes du fait de la publication VO décousue).
Le choix des planches est remarquable et je comprends enfin pourquoi Mark Schultz jouit d’une telle réputation. J’y vois un successeur de Frank Frazetta, mâtiné d’Al Williamson et d’autres dessinateurs majeurs des EC Comics. Ton article permet de comprendre que c’est à la fois un hommage appuyé aux récits SF de EC, mais également une œuvre personnelle. Du coup, je suis à nouveau très tenté de me lancer dan cette lecture.
Je te remercie de préciser les dessinateurs auxquels il te fait penser. Faut croire que j’étais un peu fatigué quand j’ai écris l’article et je n’arrivais pas à mettre le doigt sur les dessinateurs similaires, et mon regret sur cet article est de balancer quelques généralités « ça ressemble à des trucs des années 50 » ^^
Je ne sais pas pourquoi Schultz n’a pas terminé cette série. ça me fait penser à Madureira et son BATTLE CHASERS. Le mec a depuis pas mal bossé dans le jeu vidéo en étant le directeur artistique des jeux Darksiders, et récemment il a participé au jeu-vidéo du même nom BATTLE CHASERS NIGHTWAR, qui propose une histoire inédite du comics. Mais à ma connaissance, il n’a toujours pas repris le comics.
Bon je ne suis pas spécialement un fan de BATTLE CHASERS, mais c’est pour faire une comparaison. Schultz a peut être participé aussi aux adaptations de son comics mais n’a pas repris la BD…
Encore une perle des Editions Comics USA signée Fershid Barushka dans les années 80-90. De beaux albums et des récits très nostalgiques avec une ambiance « on refait le monde après la fin du monde ». Plus un zeste de Jurassic Park.. Savoureux. Merci pour cette retrospective, Mattie-Boy.
Ah ben merci à toi aussi de parler de ce monsieur Fershid Bharucha. Je ne connaissais pas et je viens de voir sur wiki qu’il a connu Dionnet et a fait connaître pas mal d’auteurs dans l’Echo des savanes, comme Will Eisner, Mark Schultz, Rand Holmes, Shary Flenniken, Berni Wrightson, Wallace Wood, Jeff Jones ou encore Richard Corben.
Et d’ailleurs, je me demande s’il n’a pas aussi fait connaitre Magnus dont je parlais dans un article sur la bd érotique, puisque Necron et les 110 pilules ont été publiées dans L’Echo des savanes et chez Albin Michel.
Et comme de son côté Dionnet avait publié Les brigands du même Magnus dans Metal Hurlant…
Bref…
Je crois que j’ai fait connaissance avec ce dessinateur via ses illustrations de Conan pour un des recueils publiés par les éditions Bragelonne.
son style me plaisait bien et je dois même avoir le « Modern Masters » qui lui a été consacré.
Je regarderai dedans si les raisons de l’arrêt de la série sont évoquées.
Pour ma part, je n’en ferai probablement pas l’achat mais, en médiathèque, pourquoi pas…
il y a un modern masters sur Mark Shultz?
my god!
très bonne idée Matt de reparler de cette série qui visuellement une merveille.
Sur la chaine youtube RaD adventures network, l’auteur a été interviewé, et apparemment il a prévu de raconter une histoire parallèle qui se passerait aux alentours de l’épisode 9. L’auteur de la chaine précise dans un commentaire datant d’il y a 5 mois :
« This new story takes place somewhere around issue 9 of the original series. If this book is successful, Mark hopes to then do another book that picks up after issue 14 of the original series and continues from there. »
Bon, d’après ce que j’ai compris de l’interview de Modern Masters, voilà l’explication donnée par Mark Schultz à l’arrêt de la série :
Le cartoon tiré de la série n’avait pas bien marché, pas plus que les produits dérivés. Du coup, l’éditeur original, Kitchen Sink, n’offrait pas un gros support à la série et de plus, l’artiste ne produisait pas assez rapidement. Du coup, ce travail ne lui permettait pas de bien gagner sa vie. Il se tourna dans vers d’autres boulots (illustrations, comics sous licences) mieux payés.
Mais dans l’interview, qui date de plus de 10 ans, il considérait déjà que la série n’était pas arrêtée mais suspendue (« on hiatus »), c’est une oeuvre qui lui tenait manifestement à coeur. Tant mieux si il parvient à produire une suite après toutes ces années…
Autre info lue dans Modern Masters, il existe une version couleurs de certains épisodes (les 6 premiers, ré-édités chez Epic) mais Schultz n’est pas très satisfait car, même en ayant supervisé leur colo, il n’avait pas prévu le coup et manquait aussi d’expérience dans l’exercice…
Ok.
C’est vrai que des fois on râle sur des trucs inachevés, mais on ne pense pas à l’éditeur qui ne suit pas forcément. Là c’est pareil, il semble vouloir d’abord préparer un récit complet pour voir si ça plait et ensuite, en fonction du succès, reprendre sa série.
Bon le truc c’est qu’il ne faut pas trop retenir sa respiration non plus, il a 63 ans le mec. Manquerait plus qu’il claque avant de finir sa série.
Je ne connais pas du tout mais je trouve cela bien alléchant ! Si l’édition VF de Akileos n’est pas hors de prix, je pourrai me laisser tenter : je trouve le dessin pas mal du tout, et le monde plutôt original. Merci Mattie !
La BO : faut que je réécoute. Aucun souvenir de ce titre. De toute façon je ne connais pas vraiment AIC.
Avant toute chose, j’aimerais saluer l’initiative d’Akileos, une parmi tant d’autres, de re-proposer cette série au public français. Cette petite structure, comme Delirium ou Mosquito, possède un très beau catalogue de BD vintage. Contrairement à la soupe philosophique opportunément écolo des productions US (je pense notamment au Avatar de James Cameron), cette série, tout comme le Concrete de Paul Chadwick fait montre de sincérité. la préservation de la planète n’est pas un ingrédient rapporté qu’on ajoute à une recette marketing. Cerise sur le gâteau, Mark Schultz possède un magnifique coup de crayon, rehaussé par un noir et blanc qui – à mes yeux – rendrait toute édition couleur redondante, voire parfaitement inutile.
Concernant le côté inachevé de l’oeuvre, ce ne doit pas être un obstacle. En découvrant certaines nouvelles de R.E. Howard dont la fin manquait, j’ai d’abord connu une certaine frustration, laquelle me parut préférable aux conclusions offertes par d’autres auteurs, plus ou moins inspirés. On prendra l’exemple des mangakas qui poursuivent leurs histoires parce qu’elles ont du succès, alors même qu’ils n’ont plus rien à dire. Qui plus est, on a quand même un story-arc conséquent, des personnages bien campés, un univers qui repose sur des fondations solides et, derrière les tropes, une réflexion intelligente sur l’écologie. Sans oublier, une fois encore, le trait inspiré de Mark Schultz.
En l’état, Chroniques de l’Ère Xénozoïque est un album qui mérite de trôner dans une bibliothèque, contrairement à Battle Chasers dont l’absence de fin ne m’empêchera pas de dormir.
Eh bien je suis tout à fait d’accord^^
Et c’est en effet une BD pour laquelle une mise en couleurs me laisserait de marbre. C’est très beau comme ça.
J’aime bien aussi la catalogue Akileos. J’ai 8 tomes des EC comics, et j’essaie de me retenir d’en acheter plus, parce que voilà quoi…faut garder de la place pour autre chose.