Kid Eternity, de Grant Morrison & Duncan Fegredo
VO : DC Comics
VF : Urban Comics
Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre qui ne nécessite aucune connaissance préalable du personnage. Il regroupe les 3 épisodes double initialement parus en 1991, écrits par Gant Morrison, et peints par Duncan Fegredo.
Sur une scène noire, avec un éclairage violet, Jerry Sullivan, un humoriste, fait son entrée et pose sa canette à terre. Il retrousse les manches de sa veste et s’approche du micro. Il déclare qu’il pense à la mort. Dans les urgences d’un hôpital, des brancardiers poussent une civière sur laquelle repose un individu qui vient d’avoir un grave accident de la route : Jerry Sullivan. Il a été repêché dans la East River, et il présente des fractures au crâne, un pouls faible et irrégulier, des hémorragies internes. Quelque part dans un appartement de New York à une soirée, Jerry a décidé de faire une partie de Scrabble avec Denise. Il pose un E au-dessus d’un T. Ailleurs, Bob Goodfellow conduit en chantant, et en buvant du whisky. À l’hôpital, l’agent d’accueil est en train de faire un mot croisé derrière son comptoir. Il cherche un mot qui se termine par Y et dont la définition est un bonsaï dérangé qui veut vivre pour toujours. Jerry a posé deux lettres de plus : E et un R, sous le T. Dans son appartement, une femme arrose son bonsaï. À la soirée, les yuppies parlent culture contemporaine et gains financiers. Jerry a remarqué une jeune femme qui lui a tapé dans l’œil : Val Hoffman. Elle lui lance un regard coquin. À Las Vegas, Bob Goodfellow joue avec une pièce qu’il lance en l’air d’une pichenette et qu’il rattrape : il se sent chanceux. Il rentre dans un casino.
Dans son appartement, la dame au bonsaï entend toquer, elle va ouvrir pensant que c’est son ami Richard : pas de chance. L’agent d’accueil a trouvé le mot correspondant à la définition. Dans la soirée, Jerry a également complété ce mot : Éternité. Tout d’un coup, juste sous le tableau de Pablo Picasso, sur la table où était posé le plateau de Scrabble se trouve Kid Eternity. Avec lui sont apparus un templier et un gangster des années 1930. Il se tourne vers eux en les prévenant que le Shichiriron les a suivis. Gordon, le responsable de la soirée, se tourne vers le kid pour lui demander ce qu’il fait là mais sa gorge est transpercée par derrière par une griffe. En fait ce sont ses propres vêtements qui sont en train de le tuer. Carmina Burana continue de retentir dans la stéréo. Le personnage dans la peinture de Picasso s’anime et sort du cadre. Il s’en prend à Michelle et la lacère : elle fait un bruit comme Marie-Antoinette. Jerry a fini par réagir et il pousse tout le monde vers la porte pour sortir de l’appartement. Mais il se retourne comme Orphée et il ne parvient pas à détacher son regard du Kid. Il ressent comme un éclair dans son esprit, comme du bruit blanc. Son nez saigne. Il a un goût de métal dans la bouche. Il parvient à se retourner et à courir dans les escaliers. Ils descendent. D’autres ont préféré prendre l’ascenseur : les lumières s’éteignent dans la cabine, et ses parois deviennent brûlantes.
En 1989, Grant Morrison s’impose dans le monde des comics avec une histoire de Batman à nulle autre pareille : ARKHAM ASYLUM avec Dave McKean. Non seulement, il a réussi une histoire provocante et complexe, mais en plus la narration en peintures ne ressemble à rien d’existant auparavant, ou peu s’en faut. Les lecteurs sont donc à l’affut de tout produit qui y ressemble de près ou de loin. Cette histoire répond à ces critères : narration visuelle en peintures, événements brutaux, personnages dérangés. Le lecteur est assailli de ressentis : ce comédien seul sur scène peut-être sans autre spectateur que le lecteur, parlant de mort, cette entrée fracassante aux urgences, l’accident de voiture, un prêtre au casino, une femme qui arrose son bonsaï, et pourquoi pas une partie de Scrabble tant qu’on y est ? L’approche visuelle évoque à la fois des éléments de Dave McKean en moins radical, une touche de Bill Sienkiewicz période ELEKTRA: ASSASSIN (1986/1987) avec Frank Miller, et enfin Paul Johnson par exemple dans MERCY: SHAKE THE WORLD (1993) de JM DeMatteis. Couleurs expressionnistes, silhouettes aux contours imprécis ou tranchés, tâches de couleur pour le sang, les traînées des phares de voiture, mélange de peinture et de traits encrés, effets visuels (par exemple pour les néons des casinos), cases en biais, nombre de cases différent à chaque page, cadrages inhabituels, etc. C’est original et prenant. C’est déstabilisant et éprouvant à la longue.
Chaque épisode est découpé en deux chants (Canto) comme si le scénario avait été écrit pour une parution en fascicule mensuel habituel. Arrivé à la fin des deux premiers chants, le lecteur est épuisé, n’a pas compris grand-chose et en a pris plein les yeux. Il se rend compte que le scénariste s’est complètement approprié le personnage créé par Otto Binder & Sheldon Moldoff en 1942, ne conservant que le principe d’un jeune homme (et plus un enfant) qui peut appeler des personnages historiques dans le temps présent, et de Monsieur Gardien (Mister Keeper) une sorte de chaperon qu’il faut aller rechercher dans les enfers. L’artiste s’inspire vaguement de l’apparence de Morrison pour le kid. Mais bon, les situations sont imprévisibles, dérangeantes et dégageant un malaise empreint de poésie, et puis l’intrigue progresse de manière perceptible. Il ne reste plus qu’à faire confiance aux auteurs et à se laisser porter en s’accrochant. Le lecteur profite du voyage avec des images saisissantes : Kid Eternity allongé sur le dos sur une table et réajustant ses lunettes rondes, la silhouette d’un tableau de Picasso prenant vie, Jerry continuant son numéro sur scène, un prédicateur sous une pluie de billets verts, un navire marchand explosé par une torpille, un escalier vers les Paradis, l’inconcevable silhouette du tribunal qui juge les âmes des défunts, des araignées ayant élu domicile dans la chevelure en choucroute d’une serveuse, une catabase spectaculaire et inventive, la vision de la cité de Dis, etc. Cela semble sans fin : le scénariste aligne les idées à un rythme effréné, et l’artiste se lâche de plus en plus pour des visuels plus entreprenants, plus téméraires.
Duncan Fegredo est tout feu, tout flamme tout du long. Il adapte son découpage de pages à chaque séquence, et parfois à chaque page : découpage traditionnel en cases alignées en ligne, illustration en pleine page, disposition en drapeau avec une case de la hauteur de la page sur la partie gauche et des cases comme accrochées sur ce mat, cases en trapèze pour rendre compte de la vivacité d’un mouvement ou d’une surprise venant bouleverser un individu, planche avec uniquement des cases de la largeur de la page, ou uniquement des cases de la hauteur de la page, cases en insert sur un dessin en pleine page, cases en spirale, etc. Il utilise la peinture pour composer des camaïeux expressionnistes en fond de case, mais aussi pour les textures, les effets spéciaux, le décalage entre des éléments matériels et des éléments surnaturels, etc. Il faut un peu de recul au lecteur pour prendre conscience de ce que l’illustrateur apporte au scénario, comment il donne à voir des concepts ébouriffants, de vraies visions qui ne devaient qu’être qu’évoquées dans le script. De son côté, le scénariste semble animé par une succession intarissable de visions et de concepts, nourris par les gros titres des faits divers et par des références culturelles parfois ésotériques, telles celles aux Séphiroth et aux Qliphoth de la Kabbale. Il invente les Shichiriron, ces êtres aux trousses de Kid Eternity.
Dans le Canto II, le lecteur découvre que Grant Morrison connaît très bien ce personnage puisqu’il en reprend les origines avec son oncle et le bateau coulé, à la lettre. Puis au cours des canto III & IV, il commence à comprendre comment les pièces du puzzle s’assemblent. Les deux derniers canto expliquant clairement ce qu’il vient de se passer, dans une intrigue logique qui aboutit à un dénouement clair. Les éléments les plus hétéroclites trouvent parfaitement leur place : la partie de Scrabble, Pablo Picasso, le sous-marin en 1942, les légendes urbaines devenant réalité, la recherche d’une carte des enfers, les maîtres de l’Ordre et les seigneurs du Chaos, et même les chaosphères. La dimension ésotérique du récit, elle-même, fait sens avec la découverte des réels responsables des événements, et leur motivation parfaitement intelligible et compréhensible. En filigrane, le lecteur peut également saisir une métaphore sur les traumatismes subis par Kid Eternity dans son enfance, et voir dans les éléments surnaturels du récit, l’expression de son syndrome de stress post traumatique, par exemple Monsieur Gardien en doudou, le comportement de son oncle comme celui d’un prédateur, et Jerry comme un individu normal devenant une sorte d’ancre pour le kid. Le lecteur est récompensé au-delà de ses espérances : son investissement dans une lecture très sensorielles aboutit à un récit bien construit et poignant.
Une autre histoire peinte par l’auteur d’ARKHAM ASYLUM : une pépite oubliée ? Au début, le lecteur ressent la force visuelle des situations, tout en se disant que le scénariste a écrit au fil de l’eau avec comme seul inspiration la volonté de créer des séquences surprenantes et bizarres, et que l’artiste aurait peut-être dû opter pour une narration sage et descriptive afin de compenser. Très rapidement la force des compositions transporte le lecteur ailleurs dans des montagnes russes émotionnelles, sollicitant à plein ses sens.
Petit à petit, l’intrigue devient intelligible, tout en conservant son impact émotionnel, et son sens du péril. Étant moins accessible que ARKHAM ASYLUM et sans Batman, il est compréhensible que ce récit n’ait pas marqué les esprits de la même manière, pour autant c’est du Grant Morrison en pleine forme, avec un bon artiste qui ne ménage pas sa peine. Après cette aventure qui l’a ramené au temps présent, Kid Eternity a eu droit à une série mensuelle de 16 épisodes écrites par Ann Nocenti et dessinée par Sean Phillips en 1993/1994.
Dire qu’il fut un temps où je ne voulais lire que des choses comme ça. Diantre que ce temps est révolu désormais ! 😅
C’est vrai que les planches (un bug pour les deux dernières, identiques ?) ressemblent furieusement à celles d’ARKHAM ASYLUM. Si j’avais cette BD aujourd’hui (KID ETERNITY), je pense que je me laisserais juste porter par les peintures, sans plus chercher à décrypter le scénario. En tout cas dans un premier temps.
Je n’ai pas réussi à identifier de quel tableau de Picasso il s’agissait. Et je n’ai pas reconnu la figure qui en sortait.
Il me reste encore quelques comics de cet acabit dans ma bibliothèque que je n’ai encore jamais lu, comme MYSTERY PLAY.
Je n’ai pas cherché à identifier le tableau de Picasso : un petit coup de paresse de ma part.
Lire sans chercher à décrypter le scénario : pas facile, parce que la suite d’images ne raconte pas quelque chose d’intelligible sans le scénario, les deux sont très intriqués, et on sent que Fegredo a la lourde tâche de donner à voir les visions de Morrison, avec une forme de collaboration qui ne lui permet pas forcément de suggérer des modifications ou des améliorations narratives au scénariste.
PS : l’image a été rétablie.
Si c’est une seul volume, je pourrais me laisser tenter…
Je ne suis pas un grand fan de Morrisson, mais je l’apprécie dans sa relecture de DC comics, il se pose souvent enf aux rebelle qui tente par des moyens détournés de rendre hommage à des trucs assez confidentiels quand même…
là le propos semble s’inspirer de l’histoire de l’art avec ces « canto » « ces peintures et cet artiste de stand-up…
reste à savoir qu’il y a une histoire construite ou si c’est juste un délire gratuit
la BD peinte à la transition 80-90, il y a eu une véritable explosion à ce niveau là, non?
Grant Morrison rend hommage à un personnage très confidentiel, en tout cas que je n’avais quasiment jamais vu.
Reste à savoir qu’il y a une histoire construite ou si c’est juste un délire gratuit : à titre (très) personnel, je ne suis jamais tombé sur un récit de Morrison de type délire gratuit.
Sa version de Kid Eternity est une véritable réinterprétation, avec un traumatisme très adulte. Par la suite, le personnage a eu droit à une série de 16 épisodes, également une interprétation très personnelle, par Ann Nocenti & Sean Phillips.
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La BD peinte à la transition 80-90, il y a eu une véritable explosion à ce niveau là, non ?
Ou, c’est le souvenir que j’en garde : Marvel Comics se dit que c’est la nouvelle poule aux œufs d’or. Du coup, les responsables éditoriaux mettent en chantier de nombreux comics peints, certaines initiatives excellents, d’autres moins pertinentes (dans cette dernière catégorie ; Havok / Wolverine: Meltdown dont je ne garde pas un bon souvenir malgré Jon J. Muth & Kent Williams).
Oui c’est plus l’histoire qui est plan/plan que les planches mauvaises…
J’ai lu RUINES récemment qui dans le sillon de MARVELS a fait pas mal de one-shots peints…. c’est pas mal…
Dans les histoires peintes qui laissent à désirer, j’ai lu récemment un recueil Avengers: Tales to astonish, avec des récits conçus pour mettre en avant le fait qu’ils étaient illustrés à la peinture et… ça ne fait pas tout. En particulier deux histoires superficielles par James Robinson & Colin MacNeil, par Peter David & John Estes, pourtant des scénaristes et des artistes avec une solide expérience professionnelle.
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Le Marvel récent me fait un drôle d’effet, on a l’impression de voir une somme de talent incroyables qui tentent de reproduire une recette qui a été perdue on ne sait quand..
il courent après un truc et personne ne semblent savoir vraiment quoi…
je vois des personnages qui ressemblent à ceux que je connais mais qui lorsqu’ils parlent, n’ont rien à voir…
C’est la vie…
et oui j’ai déjà vu des trucs graphiquement très « ambitieux » ou vendu comme tels mais qui une fois lu aurait bien pu être dessiné par Mark Bagley ou Sal Buscema ( pas de vanne mais je veux dire un artiste maison très mainstream) Je pense notamment aux bds de Mike Delmundo ou de Kaare Andrews…
ça a toujorus un gout de « c’est sympa mais il n’y a pas de quoi se réveiller la nuit… )
😀😀😀: Un Morrison comme j’aime ! Au sommet de son art👍.
Il nous emmène manifestement dans quelque chose qui se mérite. Je suis prêt à lui prêter toute mon attention et ma concentration, puisque tu dis que l’on est récompensé en fin de récit.
Un peu de gymnastique intellectuelle ne fait de mal à personne.
Je suis friand…. Cela va changer de toutes ces histoires de super-héros mainstream que je lis de moins en moins.
On peut reprocher beaucoup de choses à Morrison, mais pas celle d’innover !
Lorsque tu dis:
« En 1989, Grant Morrison s’impose dans le monde des comics avec une histoire de Batman à nulle autre pareille : ARKHAM ASYLUM »
Je suis d’accord, je crois que je n’avais rien lu de pareil auparavant.
Oui, ça se mérite. Il faut accepter que tout ne s’emboîte pas avec évidence dès le 1er chapitre.
Arkham Asylum : un comics qui, je trouve, n’a rien perdu de sa force après plusieurs décennies.
Bonjour Présence,
merci pour cette review d’un titre sorti il y maintenant quelques année en VF (septembre 2015 chez Urban).
Bien que sensible à ton style et à des arguments parfaitement mis en évidence, tu ne m’as pas fait changer d’avis sur cet album que j’ai revendu récemment après finalement une seule lecture qui me fut pénible
C’est déstabilisant et éprouvant à la longue => cela résume parfaitement mon expérience de lecture
Voilà ce que j’en disais à l’époque :
« Grant Morrison. Je ne suis jamais insensible aux récits de l’écossais sauf que celui là je le classe parmi les recalés.
Autant j’apprécie son Batman: Arkham Asylum car j’y voie un véritable propos à l’intérieur autant sur Kid Eternity je me suis senti floué à partir du troisième épisode.
Le #1 est très compliqué car on suit plusieurs histoires.
Dans le #2 on comprend comment cela s’emboite et on lit à nouveau le #1 (pourquoi pas).
Et puis au #3 cela se gatte car Morrison part dans ces délires habituels avec plein de textes pompeux qui ne signifient parfois pas grand chose ou du moins ralentissent grandement la progression du lecteur en plus de lui donner légèrement mal à la tête.
Mais ma plus grosse déception c’est de voir qu’au final il s’occupe de la reprise d’un personnage oublié (il est coutumier du fait) pour finalement le délaisser et nous proposer à peine une aventure sur près de 140 pages et 6 épisodes*. En fait Kid Eternity lui sert de faire valoir et je n’aime pas trop cette façon de faire.
Oui une tuerie visuellement mais moins personnel. Cela va trop sur du Dave McKean ou du Bill Sienkiewicz et la colorisation n’arrange pas la lisibilité de certaines planches. Je suis en admiration devant la façon de dessiner mais elle ne m’a pas semblée la plus adéquate pour comprendre le récit à certains moments (la fameuse re lecture du #1). C’est parfois sombre également. Mais quelle maitrise quand même pour cet artiste caméléon aux styles variés.
Au final je préfère largement Enigma (qui possède deux épisodes de plus) à tout les points de vue. Je ne suis pas sur non plus qu’il faille comparer les deux récits qui ont des buts différents.
Déception donc. Reste le plaisir des yeux ….. »
*erreur de ma part Il y a 3 numéros. Comme il y a 6 chapitres dans le recueil d’Urban j’ai cru à six numéros. (donc vous remplacez # par chapitre).
Je n’avais pas ressenti cet ascenseur émotionnel et pas de récompense non plus comme décrite par ta plume.
D’une manière générale j’ai tendance désormais à rejeter les comics de Grant Morrison. Le scénariste m’a laissé sur le bas côté depuis un moment déjà.
Toi aussi tu est un convalescent du chauve écossais…
ça doit faire parti du profil de poste… ^^
Même son All-Star Superman, pourtant encensé de partout, m’est tombé des bras : revendu rapidement.
Un Bullshit Detector pour toi http://www.brucetringale.com/super-cheri-ou-supercherie/
3 numéros, 6 chapitres : je présume que Morrison a écrit l’histoire comme un comics traditionnel de 20 ou 22 pages, et que la décision éditoriale de le publier en Prestige Format est venue après, ce qui pourrait expliquer ce découpage.
Des arguments parfaitement mis en évidence : je reconnais bien volontiers que je les ai développés en pensant à quelqu’un en particulier (son nom commence par B et finit par ruce) en me disant que c’est typiquement le genre de lecture qui l’insupporte.
Merci beaucoup d’avoir partagé ton article car c’est enrichissant de pouvoir ainsi regarder ce comics par les yeux d’un autre lecteur avec un avis différent tout aussi construit.
Kid Eternity lui sert de faire-valoir : une manière intéressante de l’exprimer, et dans le même temps j’attends de Morrison qu’il réalise une œuvre d’auteur, donc ça ne me choque pas trop qu’il interprète le personnage. Dans le même temps, il en reprend les caractéristiques originelles.
La façon de dessiner pas la plus adéquate pour comprendre le récit à certains moments : je vois qu’on a eu le même ressenti sur cet aspect visuel.
Je garde un souvenir d’Enigma comme d’une lecture plus exigeante que Kid Eternity.
https://www.amazon.fr/gp/customer-reviews/RZY7IDEAV2SYF/ref=cm_cr_dp_d_rvw_ttl?ie=UTF8&ASIN=2365776493
@Fletcher Arrowsmith
Concernant l’accessibilité des récits de Grant Morrison, j’avais trouvé que The Filth était un défi bien plus exigeant et complexe que Kid Eternity.
http://www.brucetringale.com/etat-de-conscience-superieur/
THE FILTH, ça porte vraiment bien son nom… c’est horrible à lire dans tous les sens du terme je crois bien….
Quand je l’avais lu puis commenté, j’étais passé à côté du sens du titre : de l’argot pour désigner la police.
Il me semble que The Filth était le concept retravaillé d’une proposition de série « Nick Fury » rejetée par Marvel ? Il faudra que je relise pour voir s’il y a du Steranko dans les idées visuelles.
J’ignore tout de cet élément de la genèse de cette histoire.
Idem. Je pense avoir accordé à ce scénariste largement assez de temps de cerveau pour passer à autre chose aujourd’hui.
Enfin… je dis ça mais dans ma bibliothèque il me reste quand même à lire MYSTERY PLAY, MULTIVERSITY et… tout son run de Batman (9 tomes, quand même…) 😓
(et j’ai vraiment aimé ALL STAR SUPES, par contre).
On a déjà causé de Multiveristy?
ça m’étonnes que tu aimes, parce que c’est vraiment une ode au mainstream dans tous ses excès
J’ai beaucoup aimé perso
en fait j’ai déjà dit mais Momo,je le suis sur ses délires DC et pas du tout sur ses Marvels et j’avoue que je ne comprends pas grand chose à ses creator owned, souvent je soupçonne un peu d’esbroufe inutile pour embrouiller un truc et le rendre « trop intelligent pour toi »…(mais je peux avoir tort et je devrais d’ici ma retraite m’y remettre posément)
Oui, on a causé de Multiversity.
http://www.brucetringale.com/le-multivers-dans-toute-sa-diversite/
Mystery Play ça se lit tout seul, et vite. MULTIVERSITY m’attend… et je dois relire les FINAL CRISIS d’abord, qui contiennent les 7 SOLDIERS OF VICTORY… son run sur Batman, tu connais déjà le tome 0, Gothique.
Je viens de dire que je n’ai pas encore lu MULTIVERSITY, hein… 🙄
J’ai lu 7 SOLDIERS et FINAL CRISIS (vous le savez déjà puisque j’ai fait les articles), ainsi que son ACTION COMICS. Donc il me parait logique que je boucle la boucle avec MULTIVERSITY et BATMAN.
Jusqu’ici j’entretiens avec tout ça une relation un peu schizo : Je n’aime pas du tout cette écriture opaque et hypercompressée, ultra-emphygourique et pénible. Mais d’un autre côté j’ai été fier de relever le défi et de combler tout un pan de ma culture. En gros : Je lis tout, je fais les articles, et je revends tout ensuite… 😅
oups, yes j’ai lu trop vite…
Un article impeccable comme d’habitude, sur une bd dont j’ai oublié l’histoire mais pas l’impact graphique. Je ne connais pas du tout le Kid originel mais cela ne m’avait pas dérangé à l’époque. Je n’ai toujours pas vu MERCY par contre j’avais trouvé ça plus facile à lire que le ELEKTRA ASSASSIN.
Je vais donc la relire avant de me refaire ENIGMA afin d’écrire enfin dessus ! Merci Présence d’avoir amorcé le travail 😉
Bon courage pour Enigma : j’avais beaucoup aimé, mais une lecture qui m’avait demandé de bien m’accrocher.
https://www.babelio.com/livres/Milligan-Enigma/498227/critiques/765330
J’avoue ne pas être client du tout de ce genre de BD, avec ce type de graphisme.
J’aime les mises en pages originales mais il y a des limites. Si ça me donne l’impression d’être un paléantologue qui essaie de déchiffrer des peintures mésopotamiennes et chercher leur sens de lecture,…bah non merci.
Jolie image que celle du paléontologue déchiffrant des peintures mésopotamiennes : 🙂 🙂 🙂 J’ai bien rigolé. Merci.
« Il ne reste plus qu’à faire confiance aux auteurs et à se laisser porter en s’accrochant. » Non, impossible.
« Cela semble sans fin : le scénariste aligne les idées à un rythme effréné, et l’artiste se lâche de plus en plus pour des visuels plus entreprenants, plus téméraires. » Du Morrison pur jus qui éjacule toutes ces idées, un vrai journal de bord pour qui aime cet énergumène.
» Séphiroth et aux Qliphoth de la Kabbale. Il invente les Shichiriron, ces êtres aux trousses de Kid Eternity. » Erreur système.
« Puis au cours des canto III & IV, il commence à comprendre comment les pièces du puzzle s’assemblent. » Non, je laisse ça à mes enfants les Puzzles.
» le scénariste a écrit au fil de l’eau avec comme seul inspiration la volonté de créer des séquences surprenantes et bizarres » Ben, du Morrison quoi….
Ah bon ? Quelle drôle de réaction. J’étais sûr de réussir à te convaincre avec cet article. 😀 😀 😀 😀 😀
Y aurait pas eu l’article d’hier, j’aurais parié que Bruce avait programmé une semaine d’articles pour s’auto-flageller ! 😀
Et du coup il aurait dû mettre celui sur Coldplay vendredi… 🤪
Je lui en ai également envoyé 2 ou 3 autres de nature à nourrir ses prédispositions masochistes. 😀 😀 😀 😀 😀
Je ne savais pas que Duncan Fegredo avait dessiné dans ce style.
C’est chatoyant mais ça ne colle pas forcément à tous les récits. Et si c’est du Morrison classique tendance cryptique parce que quand personne ne comprend on garde une chance de paraître intelligent ben… je crois que je vais passer mon tour…
Un autre client satisfait 🙂 : il a suffi que tu lises l’article pour que tu saches que ce n’est pas pour toi. 🙂
Je vais rester humble et reconnaître (de mauvaise grâce) que je n’ai peut-être pas tout compris.
Et si Grant Morrison était l’enfant illégitime de James Graham Ballard et Brian Aldiss ? Même s’il y a un gros morceau de Philip Dick dans « The filth » par exemple.
Parce qu’il y a chez Ballard et Aldiss, entre autres, des textes laaaargement plus perturbés que les scénarios de Morrison. Mais je sens, chez ce dernier, comme un écho de cette vague anglaise née dans « New Worlds ».
Sur ce, je vais aller prendre des nouvelles de Joe Chip.
Une filiation intéressante, merci beaucoup pour cet éclairage.
Lecture tardive : et bien je dois avouer être soulagé que personne n’ai rien compris à ce comics car à l’époque j’avais mis en doute ma compréhension : Morrison ne peut quand même pas écrire n’importe quoi hein ^^
Si si.
Comme tu le dis j’avais été emporté par le vertige graphique tout en étant laissé de côté par l’histoire… Un curieux mélange.
A noter qu’à la décharge de Morrison la série mensuelle qui a suivi n’était guère plus convaincante !
Cependant rendons à César ce qui lui appartient : le personnage a ouvert la voie (pour moi) à une série autrement plus captivante : Shade the chaning man !
Je pense que ça ne va pas te surprendre : j’avais bien aimé la série d’Ann Nocenti & Sean Phillips. La version courte :
Cette première partie des aventures de Kid Eternity déstabilise complètement le lecteur. Il se souvient qu’Ann Nocenti a expliqué à plusieurs reprises qu’elle imagine ses scénarios à partir d’un concept qu’elle développe ensuite sous la forme d’une histoire. Il découvre un récit de prime abord décousu, sautant du coq à l’âne avec des dessins un peu frustes. Au fur et mesure qu’il progresse, il a l’impression que la scénariste oublie ses fils narratifs d’une séquence à l’autre, et que le dessinateur perd pied une séquence sur deux. Il lui faut un peu de concentration, mais aussi de souplesse, pour lâcher un peu prise et apprécier ce qui s’apparente à une discussion à bâton rompu, intelligente et poétique, avec une mise en images inventive, sur la base d’un dosage délicat entre visuels concrets pour ancrer la narration, et visuels métaphoriques pour laisser la narration prendre son envol. 3 étoiles pour un lecteur venu chercher un récit traditionnel, 4 étoiles pour un lecteur ne pouvant se départir d’un point de vue cartésien. 5 étoiles pour un lecteur prêt à papoter avec des créateurs cultivés et non conventionnels. Finalement les errements de l’intrigue et de la pensée de Kid Eternity sont ceux des auteurs qui sondent les archétypes sociaux, les évidences psychologiques, l’irrationalité de la réalité, l’absurde de la condition humaine et la nécessité d’essayer quand même.
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Je viens de la relire : ton article est un parfait résumé autant qu’une description parfaite de ce que l’on peut ressentir en la lisant. Je ne m’en souvenais vraiment que vaguement. Il faut vraiment s’accrocher mais c’est graphiquement beau (j’ai trouvé que certains personnages, notamment le jury et des personnages des enfers, ressemblaient beaucoup aux extra-terrestres en guerre dans le run de Morrison de la Doom Patrol), inventif, en effet très proche de McKean et Arkham Asylum et au final plutôt original dans l’histoire. Certains moments sont pourtant limpides, et j’aime bien la personnalité du Kid, nonchalant et déterminé.
Et maintenant je vais relire Enigma.
Certains moments sont pourtant limpides : ce fut une lecture moins compliquée que ce à quoi je m’attendais. L’explication du traumatisme du Kid est finalement très simple et horrible, avec des conséquences très directes diminuant d’autant le côté merveilleux.
Dans mon souvenir, Enigma était plus dure à la lecture, ne serait-ce que parce que la pagination est plus importante. 🙂
En y repensant, je crois cependant que je n’ai pas encore réussi à remettre toute l’histoire de Kid Eterniity en forme, dans une bonne chronologie, avec la place de chaque personnage. J’en garde une version un peu confuse, tronquée, comme un cercle où au final il n’y a pas de vraie déroulement, une autre lecture sera sans doute nécessaire. Alors que pour certains passages, notamment la fin, tout est très clair.