PRÉSENCE
Le retour de Cromwell Stone par Andréas
VF : Delcourt
Ce tome est le deuxième d’une trilogie. Il vaut mieux avoir lu le premier Cromwell Stone avant pour saisir les implications des allusions faites à la vie passée de Cromwell Stone. La trilogie complète a été rééditée dans Cromwell Stone, intégrale. Il s’agit d’une bande dessinée en noir & blanc de 46 pages, écrite et dessinée par Andreas.
Plusieurs années après le premier tome, Phil Parthington a décidé de se rendre aux États-Unis, en faisant le voyage à bord d’un transatlantique, en compagnie de Marlène son épouse. Ils sont installés dans la suite présidentielle car Parthington est devenu un riche entrepreneur. Dès l’embarquement il repère monsieur Van Koor qui le dévisage avec insistance. Lors de la traversée, la cabine de Parthington est cambriolée, le vol état interrompu par Cameron, le garde du corps de Parthington. La nuit, d’étranges créatures semblent rôder dans les flots noirs, autour du navire.
Le premier tome était placé sous le signe d’une citation d’Howard Phlips Lovecraft, celui-ci débute par une citation d’Harlan Ellison (auteur célèbre, entre autres de Dérapages, Hitler peignait des roses ou Dangereuses visions).
La citation : « Car nous sommes de minuscules créatures dans un univers ni bienveillant, ni malveillant… Il est simplement énorme et n’a pas conscience de nous, sauf en tant que maillon de la chaîne de vie. » – Harlan Ellison
Pour cette suite, Andreas base son intrigue sur un développement organique du tome précédent, reprenant les mêmes personnages : Cromwell Stone, Phil Parthington, et même le préposé au quai de la gare de Loatham. Parthington a décidé d’emmener la clé de l’autre côté de l’Atlantique révélant ainsi qu’elle n’est pas perdue à ceux qui la recherchent. Cette forme de course-poursuite avec affrontements imprime une dynamique au récit, l’inscrivant dans le genre « Aventures ».
Le thème sous-jacent du premier tome était l’impossibilité pour l’individu d’appréhender la réalité dans son entièreté, dans toute sa complexité. Ce deuxième tome met en scène l’indifférence de l’univers vis-à-vis de l’humanité. Il s’agit d’un point de vue athée, qui intègre la possibilité de l’existence de créatures supérieures (dans leur développement) à l’homme.
Andreas surprend par l’intelligence de la conception des créatures extraterrestres associées à la clé. Il ne s’agit pas d’une menace venue du Dehors ou d’un Ailleurs à la Lovecraft, encore moins d’une race de démiurges humanoïdes, ou de vieillards chenus à la longue barbe blanche.
Andreas a conçu une race extraterrestre à la forme différente des humains, aux motivations étrangères à l’humanité, aux capacités de création qui n’ont rien à voir avec le principe anthropique (que l’univers tournerait autour de l’humanité). Cette composante du récit est à l’opposé d’une science-fiction ou d’un fantastique bon marché, ceux qui réduisent toute créature extraterrestre ou surnaturelle à l’état d’ennemi à 4 bras ou de gros monstre baveux, uniquement destiné à être massacré par le héros.
Très rapidement, le lecteur prend également conscience que les différents personnages évoluent dans une situation dépassant le clivage basique bien/mal.
Cette richesse thématique n’obère en rien le niveau de divertissement et la qualité du spectacle visuel. Andreas utilise son riche vocabulaire visuel, et sa maîtrise de la grammaire spécifique de ce médium pour réaliser des séquences à couper le souffle, qu’elle qu’en soit la nature.
Parmi les éléments graphiques les plus remarquables, il y a sa minutie quasi obsessionnelle dans certains dessins. Celui représentant l’embarquement du couple Parthington à bord du transatlantique occupe une demi-page, avec des dizaines de figurants. Celle du débarquement (page 24) est tout aussi impressionnante dans sa représentation de la foule débarquant, suivant des chemins canalisés et logiques.
Dans le cadre de ce récit d’aventures, Andreas réalise des dessins grand spectacle d’une force et d’une ampleur à couper le souffle. Il y a un déraillement de train d’une force inouïe, dont la représentation échappe à tout stéréotype visuel (planche 20).
Les planches 12 & 13 comprennent un dessin en double page représentant le transatlantique cerné par une flotte fantomatique, là encore avec une minutie dans l’encrage (une myriade de traits innombrables) qui oblige le lecteur à détailler ce dessin, scrutant ces formes, comme le font les marins sur le navire. Les pages 40 & 41 comprennent également un dessin double page, avec une vue du ciel d’une cité, où tous les bâtiments sont représentés avec une minutie maniaque.
En termes de composition de page, Andreas utilise à nouveau l’approche consistant à rompre avec les cases rectangulaires sagement juxtaposées, lorsque la nature de la séquence le justifie. Il y a ce passage où Parthington n’arrive plus à s’exprimer, sa raison se fragmentant, les cases semblent s’écrouler les unes sur les autres, perdant leur caractère bien ordonné, et leur forme bien cadrée. Il y a également cette progression de plusieurs personnages dans une végétation dense, où les bordures de cases sont faites de feuillages, et ont perdu leur rectitude pour montrer que la troupe progresse suivant une trajectoire sinueuse gênés dans leur cheminement par la végétation dense.
Comme dans le premier tome, Andreas réalise également des séquences muettes, d’une lisibilité exceptionnelle, avec une tension narrative née de la gestion de l’écoulement du temps entre chaque case, et de la manière dont les postures se répondent d’une case à l’autre. C’est le cas de la fuite éperdue de Marlène dans la nature, pour échapper à son poursuivant armé de grands morceaux de verre effilés.
Avec cette deuxième partie de la trilogie (réalisée 10 après la première), Andreas prouve son épanouissement artistique, à la fois en tant que scénariste et en tant qu’artiste. À la lecture, il y a une fusion parfaite entre Andreas scénariste et Andreas artiste. Il étend le récit du premier tome de manière organique et naturelle, tout en élargissant le champ du thème principal et des techniques narratives visuelles.
Il subsiste l’influence de Lovecraft (dans la présence d’une énorme créature étrangère à l’humanité) et de Bernie Wrightson (dans la technique d’encrage pour rendre compte du volume des surfaces et de leur éclairage), ce qui fait bien de cette deuxième histoire, la suite de la première.
En découvrant l’intrigue, le lecteur apprécie l’intelligence du propos d’Andreas sur la place de l’humanité dans l’univers, et l’intelligence de la manière dont il la raconte. Andreas ne sacrifie en rien l’aspect visuel du récit, que ce soit en spectaculaire, en divertissement, ou en suspense narratif. Andreas est également l’auteur complet de 2 séries à suivre : Arq (à commencer par Ailleurs, débutée en 1997) et Capricorne (à commencer par L’Objet, également débutée en 1997).
Une BD dont j’ai pas mal entendu parler.
Bizarre de commencer par le tome 2 quand même, non ? Je pensais que le premier tome était chroniqué sur le blog…mais non.
Du coup quand tu mentionnes que le tome 2 s’inscrit bien dans la continuité du tome 1…ben…ok si tu le dis^^ Mais il parlait de quoi le tome 1 ?
En tous cas, sans avoir bien compris de quoi ça parle, le graphisme est impressionnant.
« Le thème sous-jacent du premier tome était l’impossibilité pour l’individu d’appréhender la réalité dans son entièreté, dans toute sa complexité. Ce deuxième tome met en scène l’indifférence de l’univers vis-à-vis de l’humanité. »
C’est vrai que ça fait pas mal Lovecraftien comme thèmes.
J’ai souvent hésité à me procurer cette BD mais je n’ai jamais franchi le pas. Il faut dire aussi que sans rivaliser avec Tornado, je commence à avoir une pile de lecture conséquente aussi.
Bizarre de commencer par le tome 2 – Il s’agit d’un article que j’ai envoyé à Bruce en juin 2014. Si je devais le refaire aujourd’hui, j’ajouterais effectivement un petit mot sur le tome 1.
J’avais lu cette bande dessinée à une époque où j’empruntais beaucoup de BD en médiathèque et je n’avais jamais eu l’occasion de lire la dernière partie. Quant Tornado a réussi à me convaincre à me remettre à lire de la BD franco-belge, j’ai sauté sur la très belle intégrale pour relire les 2 premiers tomes, et découvrir le dernier. Les images que j’avais récupérées sur internet à l’époque ne rendent pas bien compte de la beauté des planches.
Woah ! 2014 ! Bruce laisse des trucs au fond des tiroirs pendant un moment dis donc.
Le fait est que je lui adresse beaucoup plus d’articles que ne peut en absorber le blog, et que je lui fais entière confiance pour choisir dans le tas.
Et dire que je n’ai toujours pas craqué pour l’intégrale de Cromwell Stone… il faudra bien, puisque j’adore Andreas et que dans ton commentaire transpire toute l’admiration que tu as pour cette série : je retrouve un peu le ton que tu as lorsque tu parles du Vagabond.
Ce qui est perturbant pour moi, c’est que comme je te l’ai dit, je viens de terminer Une brève histoire de temps et mû par un besoin inassouvi, j’ai enchaîné avec la relecture de Lovecraft. Je suis en plein Démons et merveilles, et je crois bien ne pas l’avoir lu en entier un jour. Or on pourrait aisément rapprocher la présentation de Hawking aux écrits de Lovecraft tant cet espace inconnu et immense n’a rien à voir avec nous. Toi-même tu utilises le terme d’anthropique pour nous faire comprendre combien nous avons tendance à penser autour de notre situation.
Mais il n’y a pas de BO du jour ?
La BO du jour : Bruce a préparé les articles à l’avance, et il n’avait pas de BO sous la main pour tous. Il y en aura donc une partie sans BO.
Je viens de regarder les dates, et effectivement j’avais lu Une brève histoire du temps 2 mois avant cette BD. Je suppose que cette question du point de vue anthropique m’est restée en mémoire et a influencé mon commentaire de Cromwell Stone. 🙂
Comme Tornado, dès que Arq ou Capricorne sort en intégrale, je saute le pas.
Je suis également très étonné que tu proposes un article uniquement sur le tome 2, et non sur les trois tomes, à savoir le contenu de l’édition intégrale qui est celle que l’on trouve désormais, et qui constitue un tout cohérent et indissociable malgré la variété des planches étant donné que les trois tomes sont sortis à des années d’écart.
Sinon, je confirme que c’est de la très grande bande-dessinée. J’attends d’ailleurs une réédition en intégrales de la série Capricorne, maintenant qu’elle est achevée.
Avec le recul, j’aurais sûrement intégré un ou deux paragraphes évoquant le premier tome, ainsi que les dates de parution. Mais je pense que je me serais quand même focalisé sur le tome 2, mon préféré de la trilogie.
Vivement une réédition en intégrale de Capricorne et Arq !
Tiens bah au fait Tornado, c’est pas compliqué à la comprenure Cromwell Stone ?
Ah non, pas tellement dur.
Au fait, je ne sais pas si Bruce vous a laissé les clés de toutes les portes du blog, mais curieusement mon dernier article sur le manga de Junji Ito n’apparait pas dans la rubrique mangas mais apparaît dans la rubrique « comics ».
Just saying…
Sinon Arq et Capricorne…18 et 20 tomes…il y a peu de chances que je lise ça un jour. La durée des séries devient un critère d’élimination pour moi. Oui, je sais, vous allez trouver ça bête. Mais Tornado lui il veut pas lire du manga à l’envers ou des formats à l’italienne !^^ On a tous nos caprices pour éviter de remplir trop vite nos étagères. Moi c’est surtout que les séries très longues je les relis rarement, c’est un gros investissement, et ça prend une place folle.
Je suis toujours prêt à faire une exception (qui confirme la règle), mais alors il faut vraiment que je sois super emballé.
Cromwell Stone, tiens bah je vais peut être me le faire offrir puisque j’ai pris une année de plus aujourd’hui.
Joyeux anniversaire Mattie Boy ! Capricorne est une série qu’il faut relire à chaque tome tellement c’est tordu…
Bon anniversaire Matt !
Bruce ne nous a pas confié les clés du blog (heureusement). Ils nous a juste laissé la responsabilité de communiquer sur facebook au jour le jour, pour informer sur l’article quotidien. Pour le classement manga, le mieux est de lui signaler à son retour, en le laissant profiter de ses vacances jusque là.
Oui, ais comment savoir si une série longue va te plaire sans l’avoir essayée ? Une solution : Bruce me prête les Walking Dead au fur et à mesure. C’est gratuit et ça ne prend pas de place sur mes étagères. Pour Arq et Capricorne, je les avais empruntés à la médiathèque. Mais je me suis arrêté quand j’ai replongé dans les comics.
Merci pour l’anniv ! Mon message n’était pas du tout une manière déguisée pour récolter des formules de politesse^^
Nan mais j’vous jure, hein…
Ce qui peut me convaincre d’essayer une longe série ? Ben une chronique ici par exemple, mais il faut aussi que le thème de base me parle. Si on me vendait une série exceptionnelle qui parle de mythologie ou autre sujet qui me plaît, je serais plus facilement affaibli par les arguments^^ Et puis évidemment si on me prête la série c’est mieux.
J’ai acheté Scalped en me laissant convaincre. Tu vas me dire qu’avec 10 tomes, ce n’est pas la plus longue série mais n’oublions pas que 60 numéros de comics de 20 pages, c’est davantage que le nombre de pages de 20 tomes franco-belges. Donc pour moi c’est déjà une série longue.
Comme je le disais ailleurs, il y a aussi les éditions « budget » (intégrale à moindre prix) qui peuvent me convaincre d’essayer. Comme celle de Bone à 55€. Gain d’argent ET de place.
Il y a aussi, si tu me permets cette suggestion, les médiathèques.
Cela permet de tester à moindre frais, voire de lire la totalité d’une série pour un faible coût.
Ça fait 30 ans que je les fréquente assidûment, et j’y ai trouvé plus que mon compte (conte ?).
Et je ne parlerai pas du gain de place. [-_ô]
Bon anniversaire Mattie-Boy !
Je suis sûr qu’Emma se joint à nous pour te le souhaiter !
http://bishoujostatues.com/wp-content/uploads/2011/01/marvel-comics-emma-frost-white-queen-bishoujo-statue.jpg
Pour l’article du jour, je n’ai pas poursuivi la série Capricorne au delà du tome 4 ou 5, alors qu’elle est dispo dans ma médiathèque. Mais je m’y replongerais peut-être un jour. Le graphisme d’Andreas est hors norme mais les persos ne sont pas très attachants.
Pour Cromwell, je ne sais pas. Le choix du noir et blanc et le fourmillement de traits, malgré une maîtrise évidente, me séduisent moins que la couleur avec un trait un peu plus épuré…
Typiquement, Andreas, que je ne connaissais pas il y a quelques années, dont je salue humblement la maestria mais dont l’oeuvre ne m’a pas (encore ?) parlé…
Ah justement je te demandais si tu avais continué dans l’autre article, car je n’avais pas vu ton commentaire (depuis un an et demi !)… Les personnages ne sont pas attachants ? Je trouve qu’ils sont intrigants et dans l’action. Ils évoluent tous énormément au fil de la série et il est vrai que Andreas a un ton détaché et est avare en dialogues. Peut-être t’intéresseraient-ils plus dans la série Rork, dont le cinquième tome (qui doit être dans la seconde intégrale) voit la première apparition de Capricorne, Ash et les autres…
Mon grain de sel :
en série courte, chez Andréas, y a Rork, qui de plus est une bonne intro à Capricorne (certains personnages s’y retrouvent).
En one shot, essayez Coutoo, un truc très étrange et très Millerien sur une possession baladeuse et un tueur en série dans les rues de New York.
Sur le fait de commencer par le tome 2, c’est pas mal, parce que si en son temps le premier avait été une énorme claque pour moi (et pourtant, j’étais déjà fan d’Andreas, depuis Rork, justement), la suite de la série m’a toujours semblée plus anecdotique (la force du premier, c’est qu’en dépit de tout son non-dit et de toutes ses zones d’ombre, il tenait très bien tout seul). Mais je ne l’ai lue qu’une fois, et faudrait que je lui redonne une autre chance.
Sur Lovecraft, plutôt que des éditions genre Démons et Merveilles dont la traduction présente quand même quelques problèmes, ne pas hésiter à aller du côté d’éditions plus récentes, avec des traductions plus solides, genre les deux tomes de David Camus chez Mnemos, ou celles de François Bon chez Points.
Merci Alex pour les conseils sur les traductions récentes de Lovecraft. Mais pour le moment, je crois que je vais relire mes vieilles éditions jaunies de Présence du futur et 10/18.
Je me suis fait offrir les dernières éditions Bragelone sur l’intégrale de Lovecraft. Mais je ne les ai pas encore lues!
Pareil ! Les « Cthulhu le mythe »
Sauf que j’ai lu le premier tome. J’ai même découvert Loveraft avec ce premier tome qui a été réédité récemment avec les 2 suivants mais dont la première édition date de 2012. Le dessin de couverture change. La première édition c’était celle-ci :
https://www.noosfere.org/icarus/livres/niourf.asp?numlivre=2146581590
J’ai remplacé mes éditions de poche des autres nouvelles par les 2 autres tomes.
Je ne peux pas juger de la qualité de traduction, n’ayant jamais lu les textes en VO, mais c’est une édition de qualité agréable à lire. « Celui qui chuchotait dans le noir » m’avait fait forte impression la première fois.
Je me réveille (longtemps) après la bataille mais après la lecture de cet article je ne dirais qu’un mot « Waow » !
Du mystère, de la tension, un graphisme gothique en diable (sans même parler de la prose de Présence of course)… bref en un mot comme en 100 cette BD est pour moi !
Et Paf un truc de plus à acheter !
Pfff les mecs vous voulez vraiment ma ruine !
En outre, les images que j’ai insérées sont de mauvaises qualité (problème de résolution) et donnent une piètre idée de la finesse des traits et de la méticulosité de l’artiste. C’est un spectacle grandiose.
On est deux… et dire que je dois absolument acheter Strangers In Paradise ce mois-ci…
Enfin procuré l’intégrale de cette série.
Il ne reste plus qu’à trouver le bon moment pour la lire^^
Je dis ça parce que j’ai Metropolis de Lehman depuis quelques mois, et pas encore lu non plus.
Roooh je t’envie. Autant pour Cromwell Stone que pour Metropolis.
Chacun des 3 Cromwell Stone ne représente pas une lecture très dense, en termes de phylactères et de cellules de texte. Par contre, ça vaut le coup de passer du temps sur les dessins.
…
y’a quelqu’un ?
Eh ben à chaque fois que le boss part en vacances, on dirait que tout le monde disparait.
J’ai donc enfin lu cette BD, l’intégrale.
Et c’est vraiment très bien.
J’ai été un peu dérouté par le dessin du premier tome, plus fou dans ses cadrages dans le sens ou on se demande parfois ce que ça représente, et comment on a pu passer de la case précédente à cette nouvelle case. On manque de repères dans l’espace, et donc les cadrages qui esquissent à peine les décors ou les tordent avec des ombres démesurées, ça n’aide pas trop à comprendre où on est.
Mais je pense que c’était voulu puisque le premier tome est le plus axé sur l’atmosphère avec la découverte de phénomènes étranges.
C’est cela dit plus reposant pour les yeux par la suite avec les tomes 2 et 3^^
Très chouette tome 2, même si l’ellipse scénaristique (avec un Cromwell Stone vieux qui a tout compris à ce qui le laissait complètement perplexe dans le tome 1) est un peu déroutante aussi.
Et un tome 3 plus calme, moins foufou qui propose une atmosphère différente.
C’est clairement de la BD d’ambiance qui nécessite un temps de cerveau, pas pour le scénario mais pour la façon dont c’est raconté et le dessin expressionniste très travaillé.
Globalement une bonne lecture pour une expérience étrange et originale.
Bien sûr que c’est bien, Cromwell Stone !
J’avais écrit le commentaire à ma zone et je disais à peu-près la même chose que toi.
Tu peux enchaîner d’emblée sur RORK, c’est tout aussi bon dans le même genre, voire meilleur.
En ce moment, je m’achète les intégrales CAPRICORNE en noir et blanc (la 3ème sur 4 sort en septembre). Je suis plus réservé pour ARQ. Ça a l’air nettement plus perché que le reste de son oeuvre.
Bonjour Mattie,
Oui, il y a quelqu’un, mais sans ordinateur et a l’etranger. Content que cette lecture t’aie plu.
Y a moi en visite quotidienne. Mon PC est en train de rendre l’âme donc jusqu’à ce que j’en ai un nouveau, je serai moins présente.
Andréas est l’un des auteurs qui me bluffe le plus par sa mise en scène en franco-belge.j’adore se mise en page. dans Capricorne, il a des idées de fous à la fois narrativement et aussi dans l’esthétique ou dans les partis pris….
le truc c’est que ça manque un peu d’émotion je trouve…
ARQ…j’en ai trouvé il y a longtemps et c’était complètement éclaté comme narration….
j’aimerais les retrouver…
Toujours pas trouvé Cromwell Stone, ni investi dans Arq, mais j’ai pris le dernier Andreas en date, L’Argentine. J’espère que ce sera bien.
https://www.planetebd.com/dynamicImages/album/cover/large/39/47/album-cover-large-39470.jpg
Je suis en train de stocker les intégrales de Capricorne dans ma pile de lecture.
YEAH !
Ah ben la dernière intégrale (la quatrième) sort demain !
Andreas est un MONUMENT de la BD !
Le gars démarre comme assistant d’un autre -parcourt classique- et se fait la main sur un strip enfantin (!) avant de pondre la première aventure de « Rork » : pleine d’ellipses et de non-dits, complètement hors-époques et catégories (… Fantastique, mais pas seulement ?!). C’est irrégulier dans le travail (il débute : normal) et absolument sans références évidentes niveau stylistique -déjà plus surprenant et prometteur. Aussi : c’est très maitrisé dans le récit, et le découpage sur la planche apporte en dynamisme ce qui manque au dessin proprement dit. Le temps de créer quelques historiettes à la suite et on se retrouve, dés le troisième album « Le Cimetière De Cathédrales » confronté à un artiste de BD presque accompli qui a transformé ses faiblesses (rigidité et singularité des personnages (tout en angles !), emphase systématique de la mise en scène, stylisation maximale tous azimuts,…) en points forts tant plus aucun de ces réflexes originels intrinsèques à son dessin ne gène la lecture -au contraire !
Déjà parfaitement maitre dans l’art du « séquençage » des cases, il commence alors à alléger son travail en fonction de l’importance des scènes : nouveau coup d’accélérateur à la facilité d’assimilation de chaque planche -pourtant loin d’être vides !- de cette aventure en pleine jungle, au sujet et à la transcription uniques en leurs genres. On a définitivement la confirmation de la qualité principale de l’auteur/artiste : l’originalité (de ton et de style). Une liberté quasi automatique et une grande volonté d’excellence : c’est un bosseur, il n’y a aucun doute.
Ensuite, fort de sa nouvelle aisance, il se laisse porter par son imagination et, de « Lumière D’Étoile » à « Descente », c’est un foisonnement d’idées, aussi bien graphiques (illustrations ET découpages !) que scénaristiques, avec une confiance en soi qui va jusqu’à laisser une énorrrme place à l’interprétation du lecteur : Ô jouissance !
Le dernier tome « Retour » clos la saga (vingts années d’évolution, entre le premier et le dernier opus, si je me souviens bien ?!) en feu d’artifice : ayant prévu dès les premières aventures de finir l’histoire en sept album, il se retrouve obligé de limiter ses envolées lyriques esthétiques pleine-page et de multiplier le nombre de cases par planche. Le résultat démultiplie la puissance de son point fort principal -si rare dans la BD Franco-Belge…- à savoir le dynamisme de son découpage.
Comme lire un Comic-Book qui aurait été réalisé sans soucis de délais de publication… Le rêve.
Entretemps, de « La Caverne Du Souvenir » à « Cootoo », de Cyrrus/Mil à « Le Triangle Rouge », « Raffington Event-Détective » ou « Aztèques », et même deux albums dont il n’assume (toujours incroyablement libre !) que le dessin « Dérives » I et II, il nous régale de ses expérimentations purement graphiques qui, non contentes d’innover (encore !) dans le domaine pourtant très fourni de la BD, lui permettent de développer une « patte » unique et proprement spectaculaire, qui voit son apogée -pour l’instant…- avec le cycle « Cromwell Stone ».
« Capricorne » lui fournit un terrain de jeu où s’illustre, sans fioritures inutiles ni ostentation paralysante, toutes ces qualités désormais attachées à son œuvre. Hommage très classe à l’univers des Pulps et Comic-Books, la série, volontairement moins expérimentale (au début, en tous cas…!) offre en sus les moments les plus émouvants parmi ses récits, depuis la dernière scène de « Rork », inoubliable à tous les niveaux. À noter que, pour « Capricorne », il a rapidement recourt à une coloriste ; ce qui parachève sa démarche « hommage » citée plus haut -mais en diminuant la nature « oeuvre d’art » purement personnelle.
… Commencer Andreas par l’intégrale « Cromwell Stone », c’est prendre le risque manifeste de devoir réajuster ses perceptions (et appréciations…) quant aux coups de coeur qui auront défini nos goûts depuis nos premiers Mikey/Tintin/Spirou/Spiderman… Je conseillerais l’allumette, déjà éblouissante dans ce cas précis, avant d’aller directement contempler l’astre du jour en plein midi ; ne serait-ce que pour en apprécier d’avantage toute la beauté de cet accomplissement, véritablement impressionnant.
Aussi : n’hésitez pas à le chercher sur le Tube : l’interview chez Kaboom vaut le détour ! Le Géant est parfaitement normal -et super sympathique, en plus.
Houlàlà ! Je me suis étalé grave. Pardon : dans les « modernes » francophones « sérieux », c’est probablement mon préféré.
Merci pour les conseils et les analyses, Bruno ! Il va falloir que je me dégote quelques Andreas encore car je ne les ai pas tous lus.
As-tu lu son Donjon ?
Merci pour cette exégèse de la carrière singulière d’Andreas.
Hé bé non !
J’ai un peu démissionné -depuis plus de quinze-vingts ans, déjà !- des circuits de vente. Avec l’âge, j’ai un peu perdu la capacité à « embrasser » la case en entier, quand je lis une BD ; ce qui est quand même la manière d’appréhender ce médium parfait de la façon la plus efficace. C’est quand le cerveau reçoit toutes les informations à la fois que l’alchimie s’opère et que le plaisir est véritablement « complet ». Je m’en suis aperçu au fur et à mesure de l’achat de longues séries : une fois lues, il me fallait y revenir pour vraiment assimiler la richesse de telle ou telle scène ; exercice absolument inutile jusque là. Je pense aussi qu’une forme de flemme mentale (trait intrinsèque de ma personnalité (!)) m’a amené à ignorer encore un peu plus la faible curiosité que j’ai traditionnellement toujours eu envers la nouveauté (BD ou autre).
Depuis la fin des « vrais » festivals (par chez moi) et l’avènement d’Internet, j’ai plus ou moins comblé ce qui me semblait être des manques importants à mon âme -en fait des « fixettes » de jeunesse en rapport avec des trucs alors introuvables ou ratés au moment de leur sorties ; et, une fois le tour d’horizon achevé -car tout a une fin-, j’ai constaté que les rêves ont la peau plus dure que ce de quoi ils sont faits : frustration, frustration, frustration.
Du coup, du haut de ma montagne (c’est très relatif !) de BD, Comics et Manga soigneusement sélectionnés -sinon les trésors stupides de ma jeunesse…-, je me contente de lectures surtout nostalgiques -à quelques exceptions près : les Exceptions, justement.
J’ai bien l’intention d’y revenir un jour -c’est quand même un des rares truc qui m’ait passionné dans la vie !- mais, d’abord, faut que je mette un peu d’ordre dans mon quotidien bordélique…
Genre : les bureaux de la rédaction, par Franquin, c’est chez moi -j’ai même une souris depuis deux ans qui me bouffe les canalisations d’eau !
J’aurai tendance à dire que c’est le contraire : avec le temps, j’ai besoin de plus de temps, de concentration, pour lire une bd. Parce que je pense que je suis plus exigeant et que mon cerveau ne fonctionne plus comme celui de mon enfance : enfant, tu dévores, tu veux savoir, tu crois. Adulte, tu peines, tu critiques, tu vois les failles, les ficelles. La magie a en partie disparu.
Je comprends pour les fixettes, j’en ai aussi.