Uncannny Avengers 4 par Rick Remender et Daniel Acuña
AUTEUR : PRÉSENCE
VO : Marvel
VF : Panini
Ce tome fait suite à Ragnarok now (épisodes 12 à 17) ; il faut impérativement avoir commencé la série par le premier tome : The red shadow. Le présent tome comprend les épisodes 18 à 22, initialement parus en 2014, écrits par Rick Remender, dessinés, encrés et mis en couleurs par Daniel Acuña.
Le récit s’ouvre avec une page noire dans laquelle un narrateur non identifié s’adresse à sa fille Katie. La séquence suivante montre Havok (Alex Summers) courant dans une foule, cherchant à échapper à Blob (Fred J. Dukes) et Magneto, dans un décor futuriste. Il rejoint Wasp (Janet van Dyne).
Leur objectif reste inchangé : détruire le générateur de tachyons. Alors que leur mission semble vouée à l’échec, Kang le conquérant vient leur proposer son aide, avec sa propre troupe d’Avengers. Cette dernière est composée d’Ahab, Stryfe, Doom 2099, Deathkok 2055 (un croisement entre Abomination et Deathlok), Venom Earth X, Magistrate Bettsy Braddock, et Iron Man 2020 (Arno Stark).
Rick Remender continue de jouer avec les futurs alternatifs, les réalités alternatives, et les voyages dans le temps, avec une dextérité maîtrisée. Son histoire fait mouche sur plusieurs niveaux. Pour commencer, il a conçu une intrigue qui met en jeu la réalité et le futur de la Terre 616 (la principale de l’univers Marvel), et qui nécessite donc la puissance de feu d’une équipe d’Avengers. Cette intrigue recèle son lot de moments impressionnants et imposants de par l’ampleur de ce qui survient. Le lecteur qui a accepté les énormités du tome précédent (événements trop gros pour pouvoir durer longtemps) accordera le même niveau de suspension consentie d’incrédulité pour ceux de ce tome.
Remender a trouvé une accroche émotionnelle imparable avec l’existence de Katie, la fille de 2 superhéros. Bien sûr que le retour inéluctable à la normale l’effacera des mémoires, mais en attendant elle fournit un point d’ancrage d’une efficacité redoutable. Il a également trouvé une accroche sensationnelle avec cette équipe improbable et impossible d’Avengers temporels menés par Kang. Bien sûr ces différents gugusses parleront plus à un lecteur régulier de l’univers partagé Marvel, qu’à un lecteur occasionnel.
Enfin Remender utilise les paradoxes temporels et les réalités alternatives, d’une manière très habile. Certes les changements induits sont trop énormes pour pouvoir perdurer. Mais en attendant, le scénariste fait ce que les autres n’osent pas faire. En maltraitant la structure du temps, il finit par raconter une histoire avec des superhéros Marvel de premier plan (bon, de second plan pour certains) en les faisant évoluer de manière drastique. Remender ne promet pas au lecteur que ces personnages resteront changés à tout jamais ; il les change tout en sachant pertinemment qu’ils reviendront au statu quo en fin de série.
Soit le lecteur s’accroche à la continuité et refuse d’un bloc ce mode narration, comme étant trop exagéré et pas assez réaliste (une approche un peu bizarre dans le cadre d’une histoire qui parle d’individus qui s’habillent en costume moulant et qui sont capables de projeter des énergies destructrices générées par leur corps, ce qui est très réaliste en effet).
Soit il accepte cette liberté que s’octroie Remender et il profite sans complexe de ces histoires débarrassées de la chape de l’immobilisme forcé induits par l’usage de héros récurrents (de surcroît propriétés de l’éditeur). Dans cette deuxième approche, il s’embarque pour un récit haut en couleurs, dense, rempli de péripéties inventives et surprenantes, de hauts faits à couper le souffle, et d’un vent de fraîcheur qui prend des proportions d’ouragan.
Pour ces 5 épisodes, le lecteur retrouve les dessins à l’infographie de Daniel Acuña. Cet artiste utilise pleinement les capacités de son outil pour réaliser des dessins dans lesquels chaque élément fusionne avec son voisin pour se compléter. À chaque fois que le lecteur a l’impression que les visages sont un peu grossiers avec des traits trop épais, il se rend compte que le travail sur les couleurs compense cette apparence.
Avec cette technique élaborée, Acuña réalise des dessins savamment composés, tout en restant immédiatement lisibles. Un feuilletage après lecture remet en mémoire nombre de scènes hallucinantes. Acuña réussit à donner une apparence crédible et impressionnante à Blob (avec l’aide de répliques bien senties). La vision de la ville du futur présente une architecture d’anticipation impressionnante sans être stéréotypée.
La réalisation totale à l’infographie permet une intégration complète des effets spéciaux dans les dessins, leur donnant plus de force. La gestion directe des camaïeux par Acuña permet d’éviter l’effet « remplissage d’arrières plans vides ». Les nombreux personnages disposent tous d’une forte identité graphique, qui permet de les identifier immédiatement.
Avec cette série, Rick Remender et Daniel Acuña proposent une alternative aux séries de superhéros sclérosées par l’impossibilité d’évolution. Leur parti pris narratif peut déplaire aux lecteurs attachés à la plausibilité (toute relative) des événements trop lourds de conséquences, dans le carcan des règles implicites de l’univers partagé Marvel. Pour les autres lecteurs, ils découvrent des superhéros pouvant évoluer en toute liberté, dans une histoire dense sans être indigeste, avec des dessins personnels sans relever de l’art moderne.
Rick Remender n’oublie pas de continuer de développer la thématique sur la différence des mutants. Son récit suggère la voie de la coexistence et de l’entraide, évoquant le principe d’une interdépendance entre tous les êtres humains. Son recours aux voyages dans le temps et aux futurs alternatifs met en lumière la richesse de l’univers partagé Marvel et la myriade de possibilités qu’il recèle. Le lecteur découvre que chaque personnage (au travers de ses différentes variations) contient un potentiel d’évolution et d’histoire, sans limite.À noter que parmi l’une des 8 couvertures variantes collectées en fin de volume, se trouve un dessin réalisé par Rob Guillory (le dessinateur de la série Chew), consacré à Deadpool. Traduction et maquette Panini impeccables.
« X-Men d’hier et d’aujourd’hui » 2/4
L’affrontement contre les jumeaux Apocalypse touche à sa fin et les Uncanny Avengers ont fort à faire pour rattraper leurs bourdes. Une conclusion qui a hautement convaincu Présence.
La BO du jour : Comme Kang, il ne fait pas bon être un conquérant, surtout chez Neil Young : https://www.youtube.com/watch?v=m-b76yiqO1E
C’est sûr que la plausibilité et Rick Remender, ça fait deux ! De « Fear Agent » à « Frankencastle », il faut bien admettre que le bonhomme ne joue pas là dessus ! Il parvient toutefois, grâce à son talent de conteur, à faire passer la pilule de manière élégante.
Je vois ce que tu veux dire quand tu parles de « potentiel narratif sans limites » que permet la notion de mondes parallèles et autres futurs alternatifs. Je reste toutefois assez allergique à ce procédé, sans doute parce qu’il a déjà été manipulé avec beaucoup d’abus, principalement dans la continuité liée aux mutants.
Mais là aussi, tout dépend du talent de celui qui s’en occupe.
… et du talent Rick Remender en a. Il utilise cette liberté que procurent les réalités alternatives pour mettre ces superhéros dans des positions inédites, tout en développant le thème de la responsabilité parentale (un thème qui lui est cher et qui revient régulièrement dans ses œuvres).
Un assemblage aussi hétéroclite d’Avengers me donne envie de voir.
« What If? » avait introduit cette notion du remix,personnellement je trouve que cela reste encore sous-exploité…
@Farid : bienvenue !
@Présence : oui, la protection de l’enfance est au coeur des écrits de Remender. Pour une fois qu’un auteur Marvel a quelque chose à dire, je ne vais pas m’en plaindre. Sur cet histoire j’en suis ressorti un peu déçu. C’était couru d’avance. Après une belle caractérisation des personnages, place à l’action, des dizaines de personnages alternatifs avec un tout beau costume qui viennent faire coucou puis s’en vont. Et le retour au Statu Quo. Entre temps tout le monde s’est bien amusé. Sauf que tout ça a le goût un peu amer de la gueule de bois. Mais, je reparle de tout ça dans l’article de demain.
Question ? y’a t’il une conclusion à cet arc ou embraye t’on directement sur Axis ?
Une conclusion ? – L’épisode 23 sert d’épilogue aux aventures extradimensionnelles, les épisodes 24 & 25 assurent la transition avec Axis, et ce dernier tome comprend également 2 épisodes (9 & 10) de la série Magneto, ainsi que le numéro annuel avec Mojo (assez réussi).
Le teaser de Présence :
« X-Men d’hier et d’aujourd’hui » 2/4
Des superhéros Marvel imbibés de continuité et libérés de la continuité : Rick Remender a résolu la quadrature du cercle de manière élégante, et en plus il a quelques chose à dire sur la responsabilité parentale. Uncanny Avengers tome 4, dessiné par Daniel Acuña.
J’aime bien les futurs alternatifs. Je préfère encore ça aux retcons. D’ailleurs, j’aimais bien la série Exiles.
Pour la présente série présentée par Présence (sic), j’aurais bien envie d’essayer mais les persos mis en avant ne me tentent pas plus que ça et les dessins de Acuna me laissent froid, malgré le vibrant plaidoyer de Présence…
J’ai l’impression que Rick Remender a choisi sciemment des personnages pas trop populaires, pour éviter de trop secouer la barque, et pour pouvoir être tranquille dans sa série. Le cas de Daniel Acuña est tangent. Il y a certaines cases (celles avec uniquement un visage) qui peuvent être assez laides. Lorsqu’il prend ou dispose du temps nécessaire, il compose des images d’une qualité largement au-dessus de la production industrielle mensuelle.
100% d’accord.
Je ne comprendrai sans doute rien à cette histoire mais les scans et ton article sont alléchants. J’avoue que la couverture alternative de Guillory est superbe ! J’aimerai adorer ça mais je serai sans doute trop perdu. Cependant, ta conclusion est un espoir pour tous les lecteurs de comics mainstream de super-héros, et rien que pour ça, Remender a l’air d’être un numéro gagnant.
Trop tard ! Rick Remender et Jonathan Hickman sont partis s’occuper de leurs séries chez Image, laissant un grand vide chez Marvel (remplacés pour la relance de cet hiver, par Charles Soule et Cullen Bunn).
Alors suivons-les chez Image !