Iron Fist – The Living Weapon par Kaare Andrews
Un article de : JP NGUYEN
VO : Marvel
VF : Panini
1ère publication le 06/06/16- MAJ le 13/05/24
Iron Fist : The Living Weapon est une maxi-série en 12 numéros, écrite et illustrée par Kaare Andrews, publiée en 2014-2015 sous le label Marvel NOW. Elle a été compilée en 2 TPB respectivement intitulés Rage et Redemption.
En VF, le titre ressort le 15 mai en Deluxe.
Si tu peux accepter de lire quelques spoilers
Sans que leur divulgation ne gâche ton plaisir
Si tu peux pardonner des emprunts à Kipling*
Afin de légender des collages de comics
Si tu peux tolérer les jeux de mots de ma pomme
Même s’ils ne te feront pas toujours te fendre la poire
Alors poursuis ta lecture de cet article.
Iron Fist. Voilà un personnage dont l’étoile aura brillé par intermittence dans le ciel Marvel. Un peu à l’image d’un Moon Knight, il a toujours été plutôt apprécié par le lectorat mais de manière insuffisante pour porter sa propre série sur le long terme, subissant ainsi moult mini-séries et relaunchs, avant même que cela ne devienne la norme chez la « Maison des Idées ». L’historique de publication de l’homme au poing de fer est donc jalonné de coups éditoriaux plus ou moins inspirés. De sa création en 1974, qui surfait sur la « kungfuxploitation » à son relaunch de 2006 par Brubaker/Fraction/Aja dans la série Immortal Iron Fist. Cette dernière itération avait d’ailleurs conféré un caractère dynastique au titre de Iron Fist, porté de génération en génération, à l’instar de certains personnages DC (Green Lantern, Flash, Starman…) ou de l’héritier du Hokuto dans Ken le Survivant.
Après l’arrêt de sa dernière série régulière en 2009, Iron Fist a fait des apparitions dans d’autres séries, notamment les Avengers et, en 2014, faisait son retour dans un nouvel opus, écrit, dessiné, encré et colorisé par Kaare Kyle Andrews, qui s’est donc occupé de tout, sauf du lettrage.
L’auteur démarre son récit en opérant un retour aux sources. Il ne niera pas les apports du run de Brubaker/Fraction/Aja mais se concentrera sur le personnage Danny Rand, n’évoquant qu’avec parcimonie l’héritage des Iron Fist. Dans le premier numéro, Danny est attablé avec Brenda, une jolie journaliste, dans un restaurant. Il lui raconte ses origines : son expédition dans l’Himalaya alors qu’il était enfant, en compagnie de ses parents et d’Harold Meachum, l’associé de son père.
Un accident, une trahison et un jeune orphelin perdu dans la neige qui sera recueilli par un peuple mystique vivant dans la cité extra dimensionnelle de K’un Lun, puis élevé et entraîné pour devenir une arme vivante : tous ces éléments sont archi-connus des fans d’Iron Fist mais Kaare Andrews va les revisiter à sa manière pour introduire de légères variations, effectuant ainsi autant de « retcons » (modifications rétroactives de la continuité).
Cependant, ces altérations ne sont pas gratuites et plutôt au service de l’histoire, à l’inverse d’un, disons, au hasard, Brian M. Bendis, pour qui les retcons sont davantage sources de « shock value » sans véritable exploration pertinente de leurs ramifications.
Déroulant son histoire sur trois périodes temporelles différentes (l’enfance de Danny, la soirée du rendez-vous avec la journaliste, les évènements ultérieurs), Andrews va raconter une intrigue trépidante et confronter Iron Fist à une horde d’ennemis redoutables : des ninjas menés par son vieil ennemi Davos, mais aussi son père, Wendell, revenu d’entre les morts sous une apparence très singulière et enfin Zhu-Kong, immense dieu du feu, avec dans la balance le destin des cités de K’un Lun et de New York !
Au cours de l’aventure, Danny Rand devra affronter son passé et accepter certaines vérités longtemps refoulées. Il se retrouvera les poings brisés et le corps fracassé, privé de son pouvoir de concentrer le chi mais avec l’aide de nouveaux alliés, il remontera la pente pour repartir à l’assaut. Dans l’ensemble, un schéma plutôt classique.
Mais qu’est-ce qui fait le sel de cette énième mouture des mésaventures de l’homme au tatouage de Dragon et aux tongs jaunes ? Tout simplement l’approche toute personnelle de Kaare Andrews, homme-orchestre, au four et au moulin, au scénar et aux dessins.
Dans un texte publié en postface du 1er TPB VO, l’auteur évoque le souvenir d’un de ses premiers comicbooks, Nick Fury par Jim Steranko, lui-même un auteur complet. Décrivant l’aspect un peu frustrant de la taylorisation des tâches dans les comics (scénario, dessin, encrage, colorisation) comme une « machine » dont l’artiste n’est qu’un simple rouage, il ambitionnait, en endossant tous les rôles de devenir la machine. Tâche qu’il savait peu aisée mais qui l’enthousiasmait au plus haut point.
C’est cet enthousiasme qui transparaît dans les pages de Living Weapon et qui donne à cette lecture une saveur particulière. « Il faut encore avoir beaucoup de chaos en soi pour enfanter d’une étoile qui danse », disait Nietzsche. En parcourant la série, on perçoit cette énergie, ce magma bouillonnant dans lequel il a puisé son inspiration pour nous livrer ce qui aurait pu n’être qu’une simple resucée de l’histoire d’Iron Fist et qui est devenu bien plus, grâce à la passion de l’auteur, qui a réussi à livrer une œuvre très personnelle sur un personnage ne lui appartenant pourtant pas.
Il fait d’ailleurs don à la franchise de nouveaux personnages comme Brenda, la journaliste blonde ou encore Pei, petite fille détentrice d’un grand pouvoir et Fooh, vieil excentrique au passé mystérieux, tous deux originaires de K’un Lun. Mais il réutilise aussi le personnage de Sparrow, fille de Lei Kung le Thunderer, créée par Ed Brubaker et Matt Fraction, en étoffant le passé commun cette dernière avec Danny. Si on ajoute l’importance du rôle joué par la mère de Danny dans les flashbacks, on réalise la prééminence du casting féminin dans une série et un récit pourtant bourré de testostérone. Mère, fille, sœur ou amante, toutes participent au cheminement d’Iron Fist vers l’illumination.
En effet, au début de l’histoire, Danny Rand est un peu paumé. Riche désœuvré, il ne sait plus vraiment à quoi consacrer son existence. Andrews va creuser le paradoxe de l’enfant élevé pour devenir une arme ultime, dans le but de venger ses parents, et n’ayant jamais pu assouvir cette vengeance car le coupable désigné était déjà vaincu lorsque Danny revint le trouver. En brossant un portrait moins manichéen d’Harold Meachum, Kaare Andrews va donner un rôle plus trouble à la mère de Daniel Rand, que ce dernier ira retrouver dans l’au-delà avant de revenir parmi les vivants.
Choisir la vie plutôt que la mort, c’est un message simple mais fort qui s’impose au fur et à mesure d’un récit aux accents oedipiens et qui, ajouté à tout un tas d’aphorismes ou de digressions avec lesquels Kaare Andrews a parsemé son comicbook, dénote une volonté de raconter plus qu’une simple super-baston de kung-fu.
De l’action, donc, « y’a pas que d’ça, mais y’en a » et à nouveau, on perçoit dans les illustrations de Kaare Andrews qu’il a pris son pied à dessiner tous ces jeux de mains, loin d’être vilains. Les combats sont dynamiques et s’enchaînent parfois à un rythme endiablé, rappelant les films de Bruce Lee, auquel l’auteur adresse un hommage direct dans la dernière partie du récit, en faisant revêtir à Danny Rand une tenue dérivative de celle du Jeu de la mort (avec juste une inversion entre le jaune et le noir) et un arsenal que n’aurait pas renié le Petit Dragon, en particulier une paire de nunchakus jaunes !
La série bénéficie d’une identité graphique très forte, grâce au trait de Kaare Andrews, qui possède un style à la fois épuré et contrasté, ayant comme une filiation avec celui de Frank Miller mais possédant une personnalité propre. Les couleurs renforcent la cohérence de l’ensemble, ne venant jamais atténuer l’impact du clair-obscur mais le compléter. Les mises en page sont toujours lisibles et privilégient plutôt les grandes cases.
Le dessinateur se montre assez inventif et audacieux dans les designs, pour l’appareil d’entraînement d’Iron Fist pendant sa convalescence, l’apparence du père ressuscité de Danny ou encore le look colossal du dieu Zhu-Kong. La démesure graphique atteint son apogée dans le numéro 10, où Kaare Andrews se paye le luxe de montrer un seul et unique magistral coup de poing sur une sextuple page !
Pour les flashbacks, le dessinateur a adopté une convention graphique plutôt originale, en tramant ses couleurs façon « photogravure » et en rajoutant par ordinateur des effets de papier usé et plié.
Est-ce à dire que cette série est parfaite ? Les sages de K’un Lun répondraient que la perfection n’est pas de ce monde. Et si on peut louer l’énergie débordante que l’auteur a investie dans son projet, par moment on peut craindre que l’histoire ne parte dans tous les sens et ne tienne toutes ses promesses. L’auteur est également contraint par les limites éditoriales d’un personnage comme Iron Fist, condamné à plus ou moins long terme à un retour au statu-quo. L’avant-dernier chapitre s’achève d’ailleurs par une réflexion sur la nature cyclique des choses, qui résonne aussi comme un méta-commentaire sur les comics mainstream.
De plus, le scénario n’arrive pas toujours à maintenir l’équilibre entre tragédie et comédie. Certaines touches d’humour sont bienvenues tandis que d’autres paraissent un peu pataudes. Enfin, le dessin de Kaare Andrews est très personnel et ne plaira pas à tout le monde.
Mais au final, le positif l’emporte largement et ce lecteur est ressorti le sourire aux lèvres de cet aller-retour à K’un Lun. En postface du second TPB, Kaare Andrews avoue qu’il avait au départ une autre fin en tête et que la fiction a fini par prendre une vie propre pour le conduire vers une conclusion différente de celle qu’il avait imaginée.
Comme souvent, le voyage importe davantage que la destination, aussi je vous invite, si ce n’est déjà fait, à lire cette série, œuvre d’un auteur possédant le feu sacré pour fusionner arts martiaux et arts graphiques dans un comicbook très… au poing !
* : traduction du poème « If » (1910) de Rudyard Kipling par André Maurois (1918).
Je suis pas fan de se genre d’univers j’ai jamais vue un film avec Bruce Lee et j’ai de plus en plus de mal avec le Marvel now (déçu par les gardiens de bendis , iron man et ses foutu all new X-Men) les seul série que J’aime encore dans cette collection sont Deadpool et star lord (j’aime surtout le perso mais il est trop raccord a celui du film…) alors voir une aussi bonne critique me donne envie de tenter le coup dans un monde que j’apprécie peu ! Et puis si netflix nous ponds une série je la regarderai alors autant lire avant de voir !
Tout pareil que JP et Presence,
j’adore!
Bon…après avoir lu le run de Brubaker (et l’avoir fort apprécié), il faudrait peut être que je tente cette série courte.
Et sinon quelqu’un a lu les premiers épisodes des intégrales par Claremont ? (à part Eddy qui en a lu une partie^^)
J’aime bien le personnage mais je le connais mal. Et apparemment sa première série est courte aussi, publiée en 2 tomes « intégrale » chez Paninouille.
Après je crois qu’Iron Fist revient avec Luke Cage dans une série en duo. Mais bon je ne cherche pas non plus à TOUT lire. Juste savoir si la première série vaut le coup dans son ensemble.
Histoire que je me décide entre les 2 intégrales ou juste un échantillon avec le volume Hachette « à la recherche de Colleen Wing »
Attention ce message n’est pas destiné aux réfractaires des comics old school^^
Je viens de lire les 2 intégrales Iron Fist + les épisodes de « power man & iron-fist » publiés dans le volume Hachette dédié à Power Man (Luke cage)
Et j’ai vraiment trouvé ça sympa^^
Oui oui c’est du old school, mais j’ai trouvé ça très agréable à suivre avec des personnages assez cool comme les filles du dragon, et Iron fist est un perso sérieux, presque un peu trop « hors du temps » et pas adapté à la vie occidentale et c’est sympa.
J’ai remarqué tout de même qu’entre les débuts entre les mains de Roy Thomas et l’arrivée de Claremont, que Claremont est bien plus bavard et utilise bien plus les bulles de pensées datées que Thomas qui utilisait la voix off durant des combats silencieux avec des persos qui ne parlent et ne pensent pas.
Après les thèmes et les persos de Claremont sont toujours sympas, et Byrne au dessin c’est mieux que Gil Kane (et surtout mieux que les 3 horribles épisodes dessinés par un certain Arvell Jones)
Après les couleurs c’était approximatif à l’époque hein. Colleen Wing devient brune le temps d’un épisode avant de redevenir rousse…et depuis elle est plutôt devenu châtain m’enfin bon…
ça peut paraitre bête mais à l’époque on différenciait les persos à leur couleur de cheveux parce que franchement tu prends Mary Jane ou Jean Grey…tu changes la couleur de cheveux et ça peut être qui tu veux.
Bref sinon…qu’il y ait quelques clichés ou approximation sur les peuples étrangers ne m’a pas dérangé. ça donen un côté fantasy qui ne colle pas forcément à notre réalité mais bon…faudrait être un couillon bienpensant pour s’en offusquer^^
complètement passé à côté de cette itération du personnage. faut que j’aille voir, du coup.
et sinon, meilleur titre.
Il faudrait que je me fasse ce tome. J’adore Kaare Andrews…graphiquement. ses histoires ne sont pas hyper originales, mais bon. ça fait le job aussi. comme des films.
si on excepte Miller, on repère un peu de Crying Freeman dans le délire…