I hate Fairyland 1 – Madly ever after par Skottie Young
ParPRESENCE
VO : Image Comics
VF : Urban
Ce tome est le premier d’une série indépendante de toute autre. Il contient les épisodes 1 à 5, initialement parus en 2015/2016, écrits, dessinés et encrés par Skottie Young, avec une mise en couleurs de Jean-François Beaulieu, et un lettrage de Nate Piekos.
Skottie Young est connu pour ses couvertures mode enfant ou bébé pour Marvel, pour son adaptation des romans de L. Frank Baum (The Wizard of Oz, avec Eric Shanower), pour ses parodies des héros Marvel (Giant-Size Little Marvels: AVX), et pour avoir écrit la série mensuelle de Rocket Raccoon.
À 6 ans, alors qu’elle était en train de jouer dans sa chambre avec ses oursons en peluche, une fausse couronne de reine et une fausse baguette magique, Gertrude a été aspirée par sa moquette rose et transportée au royaume féérique (Fairyland). Elle est accueillie par la reine Cloudia et cette dernière lui explique qu’elle doit retrouver la clef pour ouvrir la porte qui la ramènera chez elle. Pour pouvoir mener cette quête à bien, Gert (abréviation de Gertrude) bénéficie de l’aide d’un petit gugusse vert minuscule avec des ailes, appelé Larrington Wentsworth III et surnommé Larry.
27 ans plus tard, Gert est toujours à a recherche de cette fameuse clef, toujours avec l’aide de Larry. Sa quête est commentée en temps réel par la Lune dont le visage arbore un air désabusé et lassé. Ni une, ni deux, Gert perfore la Lune avec une énorme pétoire, et obtient une audience avec le Seigneur des Limaces. Ce dernier lui indique une nouvelle marche à suivre pour localiser la fameuse clef. De son côté, la reine Cloudia est lassée des accès de colère de Gert. Elle passe un contrat avec Bruud le brutal pour qu’il assassine Gert. Puis elle passe un autre contrat avec la sorcière Horribella.
La couverture donne une bonne idée du contenu : des créatures féériques dignes des plus bels albums pour la jeunesse (pour enfants de 6 ans), une mignonne petite fille de 6 ans, avec un rictus sadique et meurtrier, une hache dégoulinante de sang, et une hécatombe parmi les gentilles et mignonnes créatures. Les 2 premières séquences permettent de constater que Skottie Young a bien prévu un scénario, que les créatures de ce pays féérique exsudent la bonté et la gentillesse, et que Gertrude n’a pas pris un centimètre en 27 ans.
Dès la première page, le lecteur est emporté par l’exubérance des dessins, qualité qui reste au plus haut niveau jusqu’à la fin avec une inventivité visuelle jamais démentie. Pour commencer, l’artiste n’hésite pas à manier les conventions du mignon et kawaï avec entrain et premier degré. Cela commence avec les murs peints en rose de la chambre de Gertrude, sa moquette pelucheuse rose également, sa jolie petite robe rose, ses draps roses, l’abat-jour rose de sa lampe de chevet, sans oublier son collant à rayures roses. Ses cheveux sont d’un vert fluo du plus bel effet, même s’il s’agit d’une licence artistique car il n’y a pas d’explication pour cette couleur inattendue.
Les rétines du lecteur sont à la fête car Skottie Young est en grande forme. Il y a les expressions impayables des personnages : les grands yeux expressifs de Gert, sa grande bouche dans laquelle il manque quelques dents (la petite souris a dû passer). En cours de route, il apparaît une jeune demoiselle encore plus jeune que Gert, avec des yeux encore plus grands et encore plus ronds, avec les reflets dans les yeux. Le visage de la reine Cloudia s’anime d’expressions blasées, railleuses, moqueuses, cyniques, irrésistibles et adultes. Larry n’est pas mal non plus, en sycophante, sans grand espoir que sa maîtresse réussisse dans sa quête. Young est tout aussi en forme pour créer des personnages mignons et hauts en couleurs : un gros barbare à la tête plus petite que les poings, une sorcière pustuleuse, des étoiles dans le ciel, avec une paire d’yeux et une bouche, une belle poupée de chiffon avec des yeux boutons, sans oublier une licorne, rose bien sûr.
En prêtant attention, le lecteur constate également que Skottie Young intègre des petites blagues visuelles, comme le Seigneur des Limaces avec sa grosse chaîne en or autour du coup (comme un rappeur), le pistolet-caméléon qui tire la langue, la Lune avec ses bandages, le mariage durant 2 pages de Larry, etc. D’une manière générale, le lecteur ne peut qu’être sensible à l’attention portée aux détails. Ainsi il apprécie le changement de texture et de couleurs de la chevelure de la reine Cloudia. Comme son nom l’indique, elle est liée aux nuages (cloud), et sa chevelure peut être blanche et pure comme un nuage dans un ciel d’été, puis sombre et chargée d’électricité comme un nuage d’orage. Il observe que le lettreur Nate Piekos joue avec la forme des lettres quand la déclaration d’un personnage le justifie, sans abuser de ce dispositif, avec modération.
Skottie Young décrit un environnement à la guimauve pour jeunes enfants, plutôt de sexe féminin. Cela lui permet de jouer à fond sur le décalage avec les expressions adultes et méchantes de Gertrude, et sur les dommages occasionnés qu’ils soient matériels ou humains. Afin de montrer la vitesse de la chute dans le monde féérique, l’artiste montre les yeux de Gert sortant partiellement de leur orbite. Sur la cinquième page, le lecteur peut constater la violence de l’atterrissage de Gert en voyant que son bras gauche présente une fracture ouverte, avec un os sortant de la plaie. Lorsque Gert tire sur la Lune, celle-ci explose comme s’il s’agissait d’une boîte crânienne avec le cerveau projeté en dehors. Le corps complètement fracassé de Gert n’est pas beau à voir, après avoir essuyé une décharge d’énergie arc-en-ciel.
Le lecteur se régale donc du début à la fin avec une narration visuelle excellente, drôle, moqueuse caricaturale, mariant exagération et absurde avec une grande inventivité. Jean-François Beaulieu réalise une mise en couleurs en phase avec la tonalité du récit : des couleurs pétantes et vives liées à l’enfance, un habillage discret des surfaces qui ne supplante par les dessins. Il a le grand plaisir de voir que le scénario est aussi inventif et farfelu que les dessins. Le point de départ est d’une rare simplicité ; une femme est enfermée dans un corps de fillette qui ne grandit pas, et elle a beau déployer des efforts depuis 27, elle est incapable de retrouver cette fameuse clef pour sortir de ce monde d’enfant.
Le lecteur suit donc Gertrude et Larry alors qu’ils se rendent dans quelques lieux aux habitants toujours exceptionnels. Il voit Gert à l’œuvre dans ses agressions brutales, dépourvues de toute empathie pour ces habitants. Le scénariste prend la peine d’expliquer la règle qui fait que Gertrude résiste à tous les coups et se remet de toutes les blessures. Le lecteur ressent les émotions de Gertrude, grâce aux dialogues et aux expressions de son visage : une colère inextinguible dirigée contre ces créatures trop mignonnes et trop enfantines, une frustration sans fond du fait de sa situation (impossibilité de regagner son monde, impossibilité de grandir physiquement, obligation de vivre dans un monde infantile).
Skottie Young a également inclus une intrigue qui repose sur l’irruption d’un élément exogène qui remet en cause la possibilité de Gertrude de regagner son monde d’origine. Le lecteur a donc la bonne surprise de voir qu’une fois la situation de départ établie, le scénariste n’a pas l’intention de s’installer confortablement dans cette situation pour les 5 ans à venir. L’arrivée de Gertrude dans le pays féérique est racontée en 5 pages, et l’histoire passe directement à 27 ans plus tard pour entrer dans le vif du sujet. Le lecteur voit Gertrude et Larry se lancer dans une nouvelle phase pour localiser cette clef, et en même temps il voit la reine Cloudia se démener pour mettre un terme définitif au carnage qui dure depuis plus de 20 ans. Il voit apparaître cet élément exogène qui bouleverse les règles du jeu et qui introduit une échéance à très court terme. Le scénariste mène son intrigue à son terme et termine son récit avec une situation nouvelle.
Ce premier tome constitue un chapitre complet, avec une résolution satisfaisante. Le lecteur est emporté dès la première page dans l’univers graphique de Skottie Young, avec une verve visuelle incroyable qui ne faiblit pas de bout en bout. Non seulement, le lecteur sent son visage s’orner d’un sourire franc qui ne le quitte pas jusqu’à la dernière page, mais en plus il découvre une intrigue digne de ce nom, avec un vrai suspense. Skottie Young joue avec un grand savoir-faire sur l’opposition entre un monde infantile et mignon, et une jeune demoiselle au comportement négatif, critique, voire méchant. Gertrude est autant une victime des circonstances, que l’individu à abattre du fait du chaos qu’elle génère partout où elle passe, sortant ainsi de la dichotomie bien/mal.
Le massacre perpétré contre les mignonnes créatures de vient cathartiques pour les adultes, voyant ces stéréotypes sucrés, aseptisés et insipides éventrés, perforés, étripés, écartelés. La quête de Gertrude devient celle de l’adulte qui essaye de s’émanciper du monde des enfants, de se soustraire à l’influence du culture infantile et infantilisante, l’empêchant de grandir de devenir un adulte.
Derrière le massacre jouissif et vengeur, se joue la nécessité de grandir, la difficulté de laisser derrière soi un monde rassurant et inoffensif, de décider par soi-même, d’abandonner les valeurs du passé, de tuer les personnes refuge, de briser les objets transitionnels, de faire le choix conscient d’abandonner cet environnement protecteur. Derrière les aventures colorées et brutales de Gertrude, se cache le récit d’un individu captif du monde de l’enfance, et faisant tout pour en sortir. Skottie Young utilise à son compte les apparences les plus infantiles de la narration visuelle, pour réaliser un récit sur la nécessité de grandir, paradoxal mais honnête.
« Ouais, Bruce Lit, tu nous as enquiquinnés toute la semaine avec tes histoires d’adoption, de bons sentiments et de Pokémons. T’es gentil, mais on est pas chez les bisournous (sic), on veut du Trash ! »
Amis, lecteurs, je vous ai compris ! Présence, envoie leur le « Fairyland » de Skottie Young !
La BO du jour : Une Alice qui se réveille au pays du Trash sans pouvoir en sortir ? Oui, on a ça en magasin !http://www.dailymotion.com/video/x318skt…
Bon, il se trouve que je l’ai lu. Et je reste admiratif des capacités de PRésence et de Neil Gaiman à trouver des qualités à ce genre de trucs. Visuellement, c’est rigolo, c’est indéniable, mais un peu lourdingue dans la longueur. C’est du trash oui, mais sans nuance, sans grande qualité d’écriture. On passe d’un tableau à l’autre en fonction de l’hystérie épuisante de Gertrude.
Sans grande qualité d’écriture – Ce qui m’emballe dans ces épisodes, c’est la qualité d’écriture graphique. Skottie Young se livre à un jeu de massacre jouissif et inventif. Il ne se contente pas de dessiner rapidement des archétypes de personnages mignons et infantiles, il leur donne une consistance unique qui dépasse les modèles en termes de saveur et il les fait vraiment souffrir. Il y a du sadisme dans ses dessins, une combinaison de méchanceté brutale destinée à faire mal, et d’exagération comique qui masque cette méchanceté bien présente. Gertrude en train de bouffer ces champignons anthropomorphes, elle ne fait pas semblant ! Elle extermine ces simili schtroumpfs avec un maximum de violence, sans les estourbir avant, c’est du cannibalisme !
Hystérie épuisante – C’est le moins qu’on puisse dire, un peu comme on peut ressortir lessivé d’un album de Metallica, à fond du début jusqu’à la fin
Hé hé une lecture qui promet. Les dialogues ont l’air drôles sur les qq illustrations. Le risque avec l’exagération permanente et le jeu sur le transgressif est la lassitude. L’auteur arrive t il à éviter l’hystérie permanente et la surenchère?
Il ne l’évite : il choisit sciemment d’être dans l’hystérie permanente. C’est son parti pris narratif et il tient ses promesses. A mes yeux, il n’est pas tant dans la surenchère que dans la diversité pour éviter de tourner en rond. Il sait à la fois être dans un registre comique et absurde à chaque page, et garder le fil d’une intrigue bien construite.
Merci pour ta réponse et ton analyse. Je trouve la comparaison avec le style musical du métal éclairante. Merci.
J’ai pris le métal parce que c’est ce qui me vient le plus spontanément à l’esprit, mais j’aurais également pu prendre le jazz, où l’auditeur vient chercher une forme de dextérité parfois démonstrative (Charlie Parker), ou de refus du tiède (par exemple Miles Davis), ou une surenchère dans la sophistication (Keith Jarrett) ou la volonté d’expérimenter de nouveaux territoires (à nouveau Miles Davis ou John Coltrane).
Je dis chapeau aussi. Je ne pensais pas au premier abord qu’il pouvait y avoir quelque chose de plus profond dans ce genre de BD. J’aime bien le dessins mais je crains aussi la surenchère ou le ras le bol.
Au risque de passer pour un bisounours justement, la violence exacerbée de ce genre ne me fait marrer que si elle est présente avec parcimonie à des moments inattendus ou en guise de chute à une situation. Comme sur le scan de la négociation de Larry. En voir à toutes les pages risque de me lasser.
Mais je trouve le style de dessin très joli. Disons qu’il colle bien à l’univers. Je ne sais pas si j’apprécierai dans un autre contexte mais là c’est joli.
C’est joli. – Je pense que c’est toute la perversion qu’évoque Tornado par la suite : de jolis dessins mignons en apparence, vicieux en substance. Pour moi, il naît de ce décalage, un humour énorme et absurde.
La surenchère – Comme vous êtes plusieurs à en faire la remarque, je me demande si l’on ne pourrait pas qualifier ce genre de narration d’Heavy Metal, dans le sens où l’auteur réalise des séquences qui frappent fort de manière systématique, avec une réelle virtuosité dans leur exécution graphique, mais aussi dans le rythme des gags. A nouveau je présume que j’y suis plus réceptif à cause de mon goût pour la musique forte et rapide.
« La couverture donne une bonne idée du contenu : des créatures féériques dignes des plus bels albums pour la jeunesse (pour enfants de 6 ans), une mignonne petite fille de 6 ans, avec un rictus sadique et meurtrier, une hache dégoulinante de sang, et une hécatombe parmi les gentilles et mignonnes créatures ».
Dès le départ, je sais que ce truc n’est pas pour moi. Il y a vice de formes.
Je conçois cette toile de fond, cette parabole sur la difficulté de grandir, mais ce qui me gêne c’est que, justement, il y a malgré tout une volonté d’infantilisme qui entre totalement en contradiction avec ce postulat. Je ne trouve pas ça honnête, moi…
Pourquoi la moindre couverture de comics où l’on voit Captain America bébé avec une sucette ou Wolverine entrain de chouiner crée une émeute ? Comment tous ces adultes peuvent-ils à ce point se ruer sur cet étrange concept de Marvel babies ? J’avoue que ça me laisse songeur.
Je l’ai déjà écrit un milliard de fois : Je trouve ça suspect (et comme le faisait remarquer Coluche, « suspect » c’est grave, c’est pire que lèche-cul…). Pour moi, ça veut dire que le lecteur veut lire un « état d’esprit » plus qu’une histoire. Et ça, pour moi, c’est fétichiste. Et même si on est d’accord que tout le monde est libre de lire ce qu’il veut, ça me gonfle parce que, en réalité, ça nivelle par le bas. Ça me gonfle parce que ça ramène les comics dans la sphère infantile dont il a été si difficile de les extraire à coups de Watchmen. Oui, parce que, bien entendu, j’aime les super-héros chez Alan Moore autant que je les déteste chez Stan Lee, où je me sens (souvent) pris pour un débile attardé coincé à un âge mental de 6 ans.
Pourquoi la série sur le magicien d’Oz a-t-elle également créé une émeute ? C’est d’une nullité affligeante, qui raconte platement l’histoire avec des encarts de texte comme un livre illustré. Mais là encore, les lecteurs n’ont vu que « l’état d’esprit » des dessins de Skottie Young.
Je ne dis pas que le type n’est as bon. Au contraire, il est très bon. Mais c’est cet état d’esprit infantile régressif qui m’insupporte.
Durant les années Marvel Knights, j’ai cru naïvement que les super-héros en avaient définitivement terminé avec cette sphère infantile. Je me suis fait avoir, et ça me gonfle.
Ben voilà, je viens de jouer mon rôle de grognard. J’espère que je l’ai bien fait, et je me casse avec le doigt levé à la Iggy Pop… 😀
Cher Tornado,
tu m’avais entièrement convaincu pour la méthode Skottie Young appliquée au superhéros, avec une forme de fétichisme un peu schizophrène. Mais là, pour le plaisir de la discussion, je le suis moins.
Pour commencer, je ne vois ni le rapport avec les superhéros (il n’y en a aucun dans cette série), ni avec le Magicien d’Oz, ou tout du moins sa forme puisque l’adaptation était le fait d’Eric Shanower, sans aucun doute celui qui a imposé la forme académique avec les pavés de texte (il n’y a qu’à ouvrir son adaptation de l’Iliade (l’Âge de Bronze) pour s’en assurer.
Parabole sur la difficulté de grandir – Je n’y ai pas vu une telle parabole, plus un défouloir, une volonté de salir les archétypes de l’industrie de l’enfance, les personnages tièdes, consensuels et mignons. Je rattacherais cette série plutôt à cette scène qui m’avait beaucoup marqué dans le film Les valeurs de la famille Addams. Debbie fait envoyer Mercredi et Pugsley dans un camp d’été. Ayant été punis, ils se retrouvent obligés de regarder des dessins animés de Walt Dinsey qui, dans ce contexte, sont le symbole de la quintessence du conformisme, de la bienpensance et de la nunucherie. Gertrude est l’adulte prisonnier de l’infantilisme.
… et fuck le Kawaii de merde !!! 😀
Des fois j’ai un peu de mal à saisir ce que tu qualifies d’infantile. N’es-tu pas toi-même fan de récits d’aventures « pulp » avec dinosaures, jolies filles etc ? Des trucs divertissant qui ne volent pas forcément bien haut mais qui sont plaisants (enfin…pour certains)
Je ne prends la défense de rien, je n’ai pas lu ce Fairyland. Mais qu’est-ce qui te fait dire que c’est si infantile que ça ? Le côté bourrin violent ? Je ne suis pas certain d’aimer non plus mais je ne sais pas si c’est forcément infantile.
Enfin…je ne fais que m’interroger, je ne pense pas pouvoir vraiment cerner ce comis sans le lire.
Par contre je ne suis pas sûr d’être d’accord avec l’idée de reprocher à ce genre de BD de porter la responsabilité d’un retour dans la sphère infantile des comics.
Techniquement, il est injuste de reprocher à une BD de se faire un petit plaisir coupable avec un truc qui ne vole pas bien haut juste par peur que ça entraine une mode, ou que les gens fassent des généralités et déclarent là dessus que les comics c’est con. C’est un peu aux gens de cesser de faire des amalgames aussi.
Tout d’abord, le retour de Relektor :
« Le massacre perpétré contre les mignonnes créatures de vient cathartiques pour les adultes, »
-> « devient cathartique » (on corrige tout seul mais c’est pour la beauté formelle et éternelle du blog, qui n’en sera que plus sublime avec quelques coquilles en moins…)
Sinon, encore une belle chronique Présencienne, comme de coutume… Ce doit être la première fois que je lis « sycophante » dans une review VF… Et j’ai enfin eu la curiosité de rechercher le sens de ce mot…
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sycophante
Malgré le talent du dessinateur, je n’aime pas son style. Je trouve certaines planches trop chargées et trop gore. Je passe donc mon chemin.
Merci Relektor. C’est vraiment une catastrophe, je n’arrive pas à voir mes fautes (et pourtant je laisse passer au moins une journée avant de me relire, et j’en trouve plusieurs lors de la phase de relecture).
Ayant appris à mes dépends à me méfier des mots pour faire le malin que je crois connaître, j’avais vérifié sa signification sur wiktionnaire, avant d’étaler ma science. C’est un mot qui m’est resté du lycée où une professeure de français avait traité l’un d’entre nous de sycophante (et avait été obligé d’expliquer ce que c’est, du fait de notre inculture).
On croirait voir du gore à la Happy Three Friends version comics.
Merci pour cette référence. Je ne connaissais pas Happy three friends, c’est également bien trash et gore, avec un esprit qui se rapproche de Fairyland, avec l’exception du personnage de Gertrude, vraiment en souffrance psychique.
@Matt :
Enfantin : Du monde de l’enfance.
Infantile : Péjoratif. Qui manque de maturité. Fait régresser à un bas âge.
Le pulp n’a rien à voir avec ça, à mon avis.
Beaucoup de choses enfantines ont un aspect universel et peuvent s’adresser à un adulte (Walt Disney, Miyasaki, etc.). Pour moi, la plupart des comics de superslips old school ne jouent pas dans cette catégorie. Mais ce n’est pas un scoop…
@Présence :
Cher Présence.
C’était pour rire ! Je pensais que tu comprendrais !
Etant donné que tu me taquines tout le temps avec Skottie Young, j’ai joué le jeu à fond en faisant le mec trop en colère !
Même si je pense tout ce que j’ai dit, je ne démontais pas cette BD, mais juste Skottie Young. Parce que c’est devenu un sport, quoi… 🙂
Sur le retour des comics de super-héros dans une sphère infantile :
C’est un sentiment personnel. Skottie Young n’y est pour rien. Ses BD et ses couvertures encore moins. C’est le lectorat qui est coupable. Si le lectorat n’avait acheté que les séries matures de l’époque MK, en snobant les crossovers pourraves, en ne se ruant pas comme des groupies sur le moindre dessin qui ressemble à un graffiti pour ado, on pourrait encore lire des trucs fantastiques dans le domaine du mainstream.
C’est pénible d’être regardé comme un attardé quand on lit un comics dans le train. Il y a forcément une raison à ça.
Encore une fois ne vous inquiétez pas. Je ne vise personne ici. Nos discussions sont suffisamment claires pour savoir que personne ici n’est un lecteur décérébré. N’empêche que si aujourd’hui les comics de super-héros mainstream sont redevenus majoritairement si mauvais, si tristement racoleurs, que les adaptations cinés sont aussi ineptes, c’est qu’il y a un gras du public pas bien malin derrière. Non ?
Si j’étais consensuel je ferais comme JP en disant que malgré le talent du dessinateur, je n’aime pas son style. Mais comme je sens qu’il y a derrière son style et son succès quelque chose de suspect, je dis ce que je pense. Et si j’ai tort, je m’en excuserais sans soucis. 🙂
Oups ! J’étais effectivement complètement à côté de la plaque dans ma réponse.
Le retour dans la sphère infantile – Avec les années qui passent, voire les décennies, je finis pas penser que c’est l’état naturel des comics : des produits fabriqués à la chaîne pour une consommation de masse. De temps à autre, un créateur plus talentueux réussit à s’élever au-dessus du niveau de base pour une histoire sortant du lot.
Un gras du public pas bien malin – Je reprendrais plutôt l’idée exprimé par Matt il y a quelques jours : tout le monde n’a pas des attentes aussi élevées que nous quant à ses divertissements, des occupations qui divertissent, qui détournent de ce qui préoccupe en amusant (merci wiktionnaire pour la définition).
Être consensuel – En l’occurrence, dans le cas particulier de cette série, j’éprouve la sensation de ne pas être du côté du consensuel, ce qui participe à mon manque de recul, et à ne pas avoir su détecter le second degré dans ta réponse. Quoi qu’il en soit, je suis ravi de pouvoir échanger sur Skottie Young avec des lecteurs ayant un autre point de vue pertinent et argumenté. Sans tes observations, je pense que je n’aurais pas su définir la nature de cette contradiction (mignon en surface, méchant en substance) qui a un goût si comique pour moi.
Avoir tort – Je vois pas les choses comme ça. Plusieurs lecteurs = plusieurs sensibilités = plusieurs sensibilités. En philosophie, le postmodernisme consiste à voir que la vérité n’est pas unique et que plusieurs personnes peuvent avoir raison à la fois sur le même sujet, même si elles ne disent pas la même chose. Du coup cette discussion enrichit ma lecture, et me fait découvrir des angles de vue que je n’aurais été capable d’adopter tout seul.
Tiens, une définition du mot infantile :
« Souvent péj. [En parlant d’un adulte] Digne d’un enfant, dont les caractéristiques physiques ou intellectuelles sont comparables à celles d’un enfant. Comportement, soumission infantile. C’était un bandit salace et ivrogne, un tyran sanguinaire et jovial; mais il était de cervelle infantile et d’esprit faible (Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 187).
− Emploi subst., PSYCH. Adulte resté enfant, débile. Il subit un arrêt de développement physique et intellectuel, de sorte qu’à 16 ans l’aspect était celui d’un infantile, très anémique ».
Des fois on a droit à enfantin = synonyme d’infantile…
Je vois la différence que tu fais.
Après je pense aussi qu’au delà des séries adultes et matures et les crossovers infantiles mal foutus, il y a du mainstream basique, sans réflexion profonde, mais bien raconté. Quelque chose qui ne pousse pas forcément à la réflexion mais qui n’a rien de régressif non plus. Juste divertissant. Et pour beaucoup de gens, sans que ce soient des cons, ça leur suffit, ça les fait s’évader. Parfois même ça me suffit aussi. Le pulp rentre peut être plutôt dans cette catégorie. ça peut paraître léger pour des lecteurs exigeants qui cherchent des paraboles sociales, des réflexions existentielles etc, mais ça n’en fait pas de la merde pour autant.
Je ne sais pas si on revient tant que ça dans la bouse infantile. Ce Fairyland à lui-seul n’est pas représentatif d’une tendance régressive qui sévit, si ? Faut dire que je ne suis plus trop les nouvelles sorties Marvel ou DC.
Après pour moi le caractère difficile à juger de ce comics c’est son côté humoristique. Parce que l’humour c’est très subjectif. On en avait déjà parlé mais même si je déteste l’humour de Bigard…je ne peux pas qualifier ses fans d’idiots. J’ai déjà vu des gens intelligents avoir un humour qui…m’échappe on va dire pour rester gentil. Tout comme des gens insensibles à l’humour noir, etc.
Du coup l’humour un peu bête et régressif…bah c’est pas aussi facile de le pointer du doigt que des réflexions sérieuses qui tombent à côté de la plaque. Pour ma part j’aime l’humour cartoon (mais sans le gore), l’humour absurde comme Excel Saga (une série animée qui est…bah…c’est n’importe quoi avec de l’humour ultra référentiel, parodique etc)
Et^à côté de ça, j’ai un mal fou avec l’humour trash de Garth Ennis comme je l’ai déjà dit.
L’humour et le rire, c’est compliqué. Il suffit d’avoir fait une fois l’expérience de demander à quelqu’un en quoi une blague le faisait rire, de préférence une blague que l’on a également trouvé drôle. Le résultat est proprement incroyable. Généralement la réponse n’a rien à voir avec notre propre réaction.
Puisqu’on se dit tout : Bigard, j’en avais la même image de gros beauf bien démago, pas très fin, pas très évolué. Après avoir regardé un de ses spectacles en DVD, j’ai dû reconnaître que j’y avais pris beaucoup de plaisir et que j’avais ride bon cœur et sans arrière pensée. J’avais été emporté par son abattage énorme, sa force de conviction, le côté palpable des scènes qu’il raconte, et l’empathie pour les émotions interprétées. Je me suis souvenu également d’un humoriste (je crois que c’est Coluche, mais je n’en suis plus sûr) qui expliquait que jouer un rôle dramatique était plus facile pour lui que de faire rire. Je partage sans réserve ton avis sur la subjectivité du rire.
Je ne vois pas Bigard comme un crétin peu évolué. ça, on est tenté de le penser quand on trouve son humour beauf. Mais la personne derrière n’est pas un imbécile. Il n’empêche que je ne supporte pas son humour. Mais il a aussi dit des trucs sympas du genre « si dans leur cœur, les hommes avaient pour leur prochain 1/4 de l’amour que leur chien ont pour eux, ce serait la paix dans le monde » Et toc !
Oui. Comme dit plus haut, je ne m’en prenais pas à « I hate Fairyland », mais à Skottie Young par sport et private joke, parce qu’il représente un lectorat qui m’agace très souvent (mais pas toujours, puisque Présence est mon ami !).
Et tu as raison, Matt, il y a du bon et du mauvais partout. Je suis d’accord avec toi aussi sur le divertissement léger mais bien foutu. C’est cool. Par exemple, cela fait longtemps que j’ai envie de faire un article sur « Shanna reine de la Jungle » de Frank Cho. C’est du pur fun, il n’y a aucune toile de fond, c’est complètement léger et décomplexé, mais ce n’est ni infantile, ni débile. Et en plus c’est super beau et sexy !
Ah oui, j’ai lu ça. C’est sympa en effet.
Tu connais les chroniques de l’ère Xénozoique de Mark Schultz ? J’ai une petite envie de me les acheter mais bon parait qu’il n’y a jamais eu de fin…
Parait que c’est ambiance « pulp » aussi (même si j’ai toujours pas bien saisi ce que ce mot désigne. Ou plutôt il a l’air de désigner un peu trop de choses)
Ah tiens c’est marrant. J’étais à un festival de BD il y a deux semaines. L’intégrale des « Chroniques de l’ère Xénozoique » était là sous mes yeux et j’ai hésité à me l’acheter. Et puis paf ! Mon pote Fred se l’achète sous mes yeux ! Du coup je l’ai feuilleté et c’est vraiment très beau (tout en NB). Il me le prêtera un de ces quatre. Mais pour le moment, je ne l’ai toujours pas lu…
Pour l’anecdote, j’ai rencontré Jean-Yves Mitton sur le festival. C’était chouette !
Oui, c’est la grande classe visuellement. Des grosses bestioles préhistoriques dans un monde post-apo , des personnages dessinés dans un style rappelant un peu les EC comics (avec une femme ravissante aussi…ahem) Tout ça sent bon le divertissement léger. Enfin parait que ça cause un peu écologie.
Je tenterais surement l’achat prochainement.
Encore un bel article qui va toujours plus loin que ce qui semble prévu. Je ne connais pas Skottie Young mais j’adore ces dessins, et tu m’as presque convaincu de tenter cette bd, Présence.
Je comprends la réaction de Tornado et sa volonté de ne pas se laisser avoir par la production, et je suis admiratif de sa croisade. J’apprécie. Mais cela ne semble pas s’adapter au cas présent.
Quelques jours off et de retour avec ce joyeux massacre en préambule et qui ne fait pas dans la bagatelle chère à Céline, quoique….
Au vu de tes scans et du contenu de la fable sanglante, l’allusion de Pierre N à Happy tree friends est judicieuse et l’expression de Gertrude sur la vignette finale rappelle également les personnages de Gotlib quand ils deviennent incontrôlables.
Un conseil saugrenu de lecture pour une pyjama party trop sage:-)