All Star Superman par Grant Morrison et Frank Quitely
AUTEUR : BRUCE LIT
VO: DC
VF: Panini / Urban
All Star Superman est une mini série de 12 épisodes publiée par DC entre 2005 et 2008, scénarisée par Grant Morrison et illustrée par Frank Quitely.
Le concept All Star était inspiré de celui de Ultimates de Marvel: pouvoir raconter des histoires débarassées de la continuité classique pour-c’est une obsession parfois un peu pénible que Morrison avait brillament raillé dans son Xmen Manifesto– attirer de nouveaux lecteurs.
Le concept est inspiré des 12 travaux d’Hercule avec une épreuve par épisode. Il s’agit ici de raconter les douze derniers mois de Superman avant sa mort Il s’agit en tout cas d’un récit auto-contenu. Enfin, ce n’est pas si simple… Ceux, outrés par le traitement réservé une fois de plus à Gland Morrison par votre serviteur, se rabattront sur l’éloge écrit par Tornado sur le même album.
Résumé: Superman est mourant ! Piégé par Lex Luthor, notre héros a vu sa physiologie altérée par le soleil et obtenu une victoire à la Pyrhus: ce qu’il a gagné en pouvoirs supplémentaires et en intelligence vont progressivement diminuer son espérance de vie. Sentant que sa fin est proche, son premier réflexe est de dévoiler son identité à Loïs Lane. Puis de sauver le soleil, répondre à une question sans réponse, guérir le cancer, affronter Bizaro….
Lorsque l’on commence la lecture de All Star Superman, on ne peut que comprendre pourquoi cette mini série a été bardée d’Eisner Awards et autres médailles en chocolat: l’osmose entre le scénariste et son dessinateur est totale avec un Frank Quitely au sommet de son art, une histoire ambitieuse où Morrison parvient à doser ce qu’il faut de fan-service avec l’apparition de la plupart des acteurs de la mythologie Kryptonienne (sauf Batman).
C’est indéniable: Grant Morrison connait la continuité de l’homme d’acier sur le bout des doigts. Mieux que ses X-Men en tout cas, celui-ci avouant n’avoir lu des mutants que le run Claremont-Byrne, une méconnaissance qui fera la différence entre son travail pour DC et Marvel.
Conçue immédiatement après ses New X-Men, on retrouve dans ce All Star Superman pas mal d’idées déjà évoquées chez les mutants ainsi que certaines obsessions chères à l’auteur: tout d’abord l’angoisse du corps comme réceptacle de la maladie et de la mort.
Comme King Mob des Invisibles ou Jean Grey dans le premier arc E for Extinction, Superman est victime de la trahison de son corps qui le condamne à une mort certaine. Cette mort est activée après une exposition au Soleil, exposition que même un être suprême comme Superman ne peut affronter sans conséquence, tout solaire soit-il. On se rappelle aussi que sa Jean Grey y succombait avant de se métamorphoser une dernière fois en Phénix. Marvel et DC. Superman et Phénix. Dieu et Déesse. La littérature comparée entre ses deux oeuvre de Morrison est furieusement intéressante.
Tout comme celle de Lex Luthor et John Sublime, Prométhées pervers qui tentent de voler la flamme aux Dieux afin de satisfaire leurs égos blessés par la perfection de ces surhommes les renvoyant à leurs failles. Cette même perfection qui finira par détourner Scott Summers du Phénix Jean Grey.
Le meilleur épisode de la série reste celui où Clark Kent rencontre Luthor en prison. Alors que beaucoup repprochèrent à Morrison d’écrire des personnages out of characters pour ses X-Men, force est de constater que sous sa plume Superman reste jusqu’au bout fidèle à sa personnalité curieuse et bienveillante envers cette humanité imparfaite.
Lorsque Clark Kent se trouve face à celui qui a causé sa perte, il n’éprouve aucun sentiment de vengeance ou de rage envers son assassin. Mais de l’incrédulité, beaucoup d’empathie pour la personnalité de Luthor, piégé dans son propre ego malgré son immense intelligence. Une empathie qui fera dire à notre héros que Superman et Luthor avait tout pour être amis.
Un ego n’étant pas sans rappeler celui de son scénariste, à tel point qu’il est amusant de rapprocher Morrison et Luthor: deux chauves spirituels et cyniques, intellectuellement brillants qui ont tué Superman, l’un en tant que scénariste, l’autre en tant que vilain. Deux génies qui souvent se plantent malgré des plans les mieux ourdis…
Car personnellement, toute l’intelligence de ce scénariste a toujours échoué à me toucher. Ici comme ailleurs, l’écriture de Morrison est pénible : hyperactive, dispersée, déstructurée malgré les apparences, il semblerait que l’écossais soit toujours impatient de caser tout ce qu’il a lu, découvert, supposé dans toutes ses oeuvres. Ce qui donne un fouillis lassant à la longue.
Et ce All Star Superman ne fait pas exception à la règle. Les adeptes de l’écriture de Morrison, de ses ellipses brutales et de ses références cachées seront en terrain conquis. Les autres, dont votre serviteur, constateront que le mégalochauve se plante dans les grandes largeurs.
Tout d’abord, parce que pour une série censée fédérer anciens et nouveaux lecteurs, la moitié de ce All Star Superman est purement et bonnement incompréhensible. La pédagogie et l’humilité n’étant pas le propre de Morrison, certains chapitres pour qui débarque dans l’univers de Superman, notamment celui avec Bizarro et l’échappée de l’Underverse sont insupportables, le néophyte n’ayant aucune balise pour s’accrocher.
Certains plaideront que lire du Morrison renvoie finalement le lecteur à sa propre liberté individuelle : celle de s’informer tout seul pour courir après un auteur qui n’a pas le temps de regarder derrière lui. Pour ma part, il s’agit tout simplement de je-m’en-foutisme- qui fera que Morrison sera toujours à la traîne dans le peloton des plus grands: les Alan Moore, les Neil Gaiman ou Garth Ennis. Des auteurs qui n’ont rien à lui envier en terme de culture encyclopédique mais restent soucieux du plaisir partagé entre lecteurs et créateurs sans y voir une quelconque entorse à leur intégrité artistique.
Lorsque Garth Ennis écrit Battlefields, il fait montre d’une impressionnante érudition historique en laissant à son public les repères nécessaires pour comprendre les enjeux du conflit.
Lorsque Neil Gaiman développe de profonds concepts métaphysiques ou philosophiques pour Sandman, il met toujours en scène, des personnages moins affranchis permettant au lecteur d’être au même niveau d’informations que ses personnages.
Lorsque Alan Moore écrit From Hell ou Lost Girls, il entraîne son lecteur dans d’impressionnants labyrinthes psychologiques tout en laissant des clés ou des annexes pour que le lecteur ait plaisir à y trouver du sens en plus de son chemin.
Lorsque Peter Milligan écrit son Human Target, il est possible de s’installer confortablement dans les aventures torturées de Christopher Chance sans ne rien connaître de sa mythologie éditoriale.
Morrison, lui, est un horrible fat qui se gausse de la réputation qui lui a été faîte et laisse la plupart de ses lecteurs sur le bord du chemin pour faire plaisir à sa nombreuse fanbase. Et tant pis si les autres, pas forcément moins intelligents ou érudits, restent sur le carreau en ne comprenant rien de ce qu’il raconte. C’est oublier qu’en qu’auteur, il est censé toucher à la fois l’intellect et l’émotion de son lectorat.
Or, sauf à de rares moments, Morrison ne réussit ni l’un ni l’autre. Il y a bien quelques jolies scènes entre Loïs et Clark, mais que tout cela est froid, dénué de toute humanité ou d’empathie ! On parle quand même d’une série qui aura mis 3 ans à être finalisée sans que en 12 épisodes ne transparaisse l’angoisse profonde de Superman face à la mort. Bien loin de l’élégiaque et sensible du Whatever Happened to the man of Tomorow ? d’Alan Moore.
Tout ceci est finalement bien décevant venant d’un auteur qui au moment de ses Invisibles promettait que sa série permettrait de connaître le sens de la vie et de la mort. Il y a dans un seul épisode de Sandman plus de profondeur et de consistance que tout ce fatras de machins éparpillés, de personnages qui se redessinent les cils en parlant ou se travestissent sans aucune raison de le faire. Bien loin aussi de l’humilité de Steven Seagle qui parlait lui aussi brillamment de la confrontation de l’homme d’acier face à la maladie et la mort.
Et puis, quand La Mort de Captain Marvel, tout old school et superficiel soit-elle abordait avec une certaine justesse les différentes étapes du processus d’acceptation de la mort et de la maladie, on se dit que Morrison, rappelle ces élèves brillants qui récupéraient leurs copies plein de rouge partout avec la mention: très intéressant mais hors sujet….Un de plus….
« Chaos, confusion, savon » 4/6
Superman va mourir ! Et c’est à Grant Morrison et Frank Quitely qu’il livre ses dernières volontés ! All Star Superman, chef d’oeuvre ou frime de plus pour Le fils de Maurice ?
La BO du jour : Toutes ces rumeurs sur ma santé….Superman comme Renaud est increvable…. https://www.youtube.com/watch?v=uv37yxc51bE
Grant Morrison connait la continuité de l’homme d’acier sur le bout des doigts. – Ce n’est rien de le dire. Il la connaît tellement bien que je ne connaissais pas un bon tiers des références incluses dans ce récit. Du coup pour moi aussi, certains passages sont restés muets. D’habitude, j’apprécie quand les auteurs sont capables d’intégrer les éléments les plus kitchs de la mythologie d’un personnage dans une narration cohérente, mais là 2 épisodes consacrés à Bizarro ont eu raison de ma patience.
Par contre, je n’ai pas éprouvé le même ressenti que toi quant à la structure narrative. Je pense que dans sa soif de connaissance et de compréhension Grant Morrison s’est intéressé aux différentes structures narratives qui ont vu le jour dans les romans du vingtième siècle et que cela l’a conduit à s’intéresser à la théorie des graphes (notion mathématique). Ma propre expérience est que les récits de Morrison sont très structurés, mais pas de manière linéaire, même pas sous une forme de plusieurs fils narratifs entrecroisés. Des fois ça passe à la lecture, des fois fois ça ne passe pas. Tes constats rejoignent ceux de Matt sur le choix de l’auteur de rendre son récit accessible ou non. J’ai beaucoup aimé comment tu as développé cette dimension au regard des attentes du lecteur et des obligations de l’auteur.
C’est quoi la théorie des graphes ?
Un dessin vaut mieux qu’un long discours : regarde les schémas dans la partie typologie des graphes, et imagine que chaque nœud (ou point) correspond à un chapitre, et que chaque lien (ou segment) correspond à un fil narratif (par exemple le suivi d’un personnage). De mémoire, The Filth est bâti sur un graphe qui ne se lit par de gauche à droite avec 2 ou 3 fils narratifs entremêlé, mais sur une structure multipolaire. Du coup, le lecteur s’en retrouve désorienté parce que la structure n’est pas apparente, donc pas lisible (exactement ce que tu évoques avec le manque d’effort pour se faire comprendre), et il appartient au lecteur de jouer le jeu pour déceler les liens entre les séquences (ou entre les chapitres).
C’est un pari risqué de la part de l’auteur. (1) Il exige que le lecteur fasse preuve d’un investissement significatif dans sa lecture, pour rétablir ou déceler les liens de causalité. (2) Il sait d’avance qu’une partie du lectorat de pourra pas percevoir la structure sous-jacente. Cette partie s’amusera des séquences rigolotes ou des séquences d’action, mais perdra un niveau de lecture du récit.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_des_graphes
Grant Morrison n’a pas inventé cette façon d’envisager la structure d’un récit. Il l’a apprise à partir des mouvements littéraires du vingtième siècle et il la transposée aux comics, ce qui n’est pas une mince affaire. C’est en partie ce que je disais pour sa série Doom Patrol : il y a testé des techniques narratives différentes, plus sophistiquées, plus intellectuelles.
Ton article n’est pas choquant car il est bien argumenté. Mais il s’agit quand même d’un concept magnifique, ce « All Star Superman ». 12 épisodes, 12 travaux, une année de publication, pour régurgiter plusieurs décennies de mythologie et d’évolution éditoriale. Pour finalement permettre au lecteur profane de découvrir les étapes de cette histoire éditoriale (les moments-clés), sans avoir à lire les oldies. Le tout avec classe.
Comme le dit Présence, avec Morrison, des fois ça passe et des fois non. Et je pense que le « passage Bizarro » est plutôt raté. Mais je n’en veux pas trop à Morrison parce que ce personnage est une vraie purge. Disons qu’il n’aurait pas dû lui offrir 2 épisodes.
Pour le reste, j’avais trouvé l’ensemble au contraire très fluide, très linéaire pour du Morrison. Et parfois émouvant, même si tu as raison de dire que l’émotion n’est pas toujours présente, loin de là. Mais il faut dire que, même si je n’avais pas lu les épisodes de l’âge d’argent, je connaissais bien le personnage et sa mythologie, pour avoir lu un bon paquet de choses ici et là qui reprenaient le pitch des anciens épisodes classiques. Car il semble que ce personnage soit condamné à revivre en boucle les mêmes histoires. C’est ce que Morrison dit dans ce « All Star Superman » et c’est ce qu’il va répéter en insistant carrément dans son « Action Comics » de la période New 52…
Du coup, je suis allé relire mon article. Et… Hem. Il n’est pas top. C’était la copie d’un ancien commentaire pour un des premiers articles du blog et ce n’est pas assez fourni.
En revanche, ça m’a permis de me souvenir de deux choses :
1) J’avais adoré l’adaptation en dessin animé de « All Star Superman » que j’avais même préféré au comics ! Grâce à un surplus d’émotion et un premier degré assumé qui venait contrebalancer la froideur du concept « homme de papier » engagé par Morrison.
2) La mise en couleur de « All Star Superman » est atroce. Un agglomérat d’effets photoshop d’une froideur qui ne fait pas du bien au récit selon Morrison, et qui accentue l’effet d’épure choisi par Quitely, pour un résultat trop aseptisé.
@Présence : merci pour ces explications qui ont deux effets immédiats; le premier est de savoir ce qu’est la théorie des graphes. Le second qui me conforte que cet auteur m’est décidément totalement antipathique et à mes yeux peu doué en pédagogie, car il y aurait mille façon d’élever son lecteur par le haut via ses découvertes.
@Lionel: oui…en vacances disponible et détendu, je me disais que c’était le moment de redonner une chance à cet auteur majeur de Comics…Le bilan est clair: que ce soit pour Happy linéaire et intelligible à ce Superman fantastique à regarder mais irritant au scénario, l’écriture de Morrison m’est définitivement odieuse….
@Tornado: A la relecture, j’ai trouvé ton article très….court 😉
J’avais bien aimé le dessin animé expurgé de toutes les Morrissonneries….Un comble si l’on y pense…
Tout ceci est très intéressant (l’article et les compléments de Présence sur les techniques de narration employées)
Du haut (ou plutôt du bas) de ma faible connaissance des récits de Morisson, je ne peux pas comprendre ce problème de narration que je n’ai pas ressenti dans ses New X-men (à part quelques ellipses brutales mais rien d’incompréhensible) ni dans son « Joe l’aventure intérieure » (dans celui-ci j’ai juste regretté le manque d’implication émotionnelle due au fait que…ben…les personnages n’existent pas. Comprendra qui aura lu ce comics)
Cela dit ça me fait penser que Morisson (et autres auteurs à la narration complexe) ce n’est pas pour tout le monde. Et je pense que selon la manière de raconter, cela sera plus ou moins complexe à appréhender selon les lecteurs et le fonctionnement de leur esprit.
Après j’ai du mal à voir comment vous sentez dans une narration si l’auteur est du genre à se gargariser de ses effets tordus et complexes sans faire d’effort, ou s’il est humble et cherche à faire découvrir des choses aux lecteurs/spectateurs comme Bruce me l’a dit pour Lynch. Vous vous basez sur des interviews que vous avez lues ? Ou Est-ce que ça transparait tant que ça que c’est égocentrique et pontifiant comme narration ?
Parce que moi, ne connaissant pas la personnalité des auteurs (je ne lis pas d’interviews) j’aurais du mal à ressentir ça. Tout au plus, comme je l’ai dit, je vais être frustré de ne rien comprendre et lire autre chose. Ou à la limite, quand certaines habitudes gagnent en importance au fil des parutions chronologiques de l’auteur, on peut en déduire qu’il s’amuse de plus en plus à nous perdre volontairement.
Je me suis retrouvé comme toi à la lecture de Joe l’aventure intérieur, à savoir une absence d’empathie pour Joe, trop héros d’une aventure, sans que son histoire personnelle ne se reflète dans ses pensées ou ses émotions. Cet ouvrage a bénéficié d’un article sur le site.
http://www.brucetringale.com/je-suis-une-legende/
Le ressenti d’une narration – Pour reprendre les exemples de Bruce et de Tornado, quand on lit From Hell, on sent qu’il y a plusieurs niveaux de lecture, plus ou moins accessibles en fonction de sa culture. Il est possible d’y accéder par les notes en fin de volume ou une consultation un peu longue de wikipedia. Pour The Filth (commentaire également présent sur le site), Grant Morrison ne donne pas de clef de lecture. Il faut alors essayer de relever les mots de vocabulaire qui appartiennent à un même registre, ou alors se lancer dans une recherche d’interview de l’auteur, de critiques de lecteurs érudits (c’est ce que j’avais fait pour la série The Invisibles), et encore après consulter wikipedia. De ce point de vue, Moore est plus soucieux d’aider son lecteur que Morrison.
D’accord. Merci.
Je dois dire que je ne me considère pas comme fan de Morrison, mais ce que j’ai lu en tous cas ne posait pas de problème de compréhension. Je lirais surement d’autres choses de lui par curiosité (mais sans doute pas The Filth vu sa réputation). Ainsi que vos articles.
Bonjour,
Merci pour cet article très intéressant.
Personnellement j’ai beaucoup aimé ce All Star Superman, les épisodes concernant Bizarro sont ratés mais l’ensemble reste bon à mon avis.
Le problème ici c’est qu’en plus de devoir connaitre les histoires marquantes de Superman pour apprécier, il faut connaitre l’auteur et avoir l’habitude de son écriture.
Je pense que pour apprécier Morrison si l’on n’est pas habitué à son écriture, il faut se tourner vers Animal Man qui est vraiment très bon et où il prend le lecteur par la main pour expliquer ses concepts.
Je dois avouer qu’il fait parti de mes auteurs préférés.
Bonne journée.
@Matt : J’avais trouvé au contraire que Morrison abusait du principe de l’ellipse dans tout le milieu de ses « Nex X-men », où il fallait accepter de ne rien comprendre d’un épisode, mais s’en souvenir quand même pour trouver l’explication plusieurs épisodes en aval ! Une technique reprises ces dernières années par des cadors comme Hickman dans ses Avengers, ou Remender dans les premiers tomes de « Black Science ».
Je dois avouer que je déteste ça. Même si ces lectures passées me procurent au final de bonnes sensations (à part les Avengers de Hickman que j’ai lâché en cours de route) car la suite a été au top.
Pour Lynch, c’est encore une autre histoire. Il fait ce qu’a fait Kubrick avec « 2001 » : Il n’y a rien à comprendre. Seulement un « trip » à ressentir. C’est une réalisation très impressionniste qui n’a rien de réaliste. Ceci entendu, j’avais adoré « Mullholand Drive » pour lequel je m’étais dit : « j’ai rien compris, mais je ne me suis pas ennuyé et je me suis régalé ». Parce que les sensations étaient envoûtantes. Uniquement les sensations ! Du coup, quand j’ai eu la chance de voyager à Los Angeles, j’ai tenu absolument à me retrouver sur les routes de Mullholland Drive (sur les hauteurs d’Hollywood), et de nuit, pour retrouver ces sensations. Ça c’est ce que j’appelle du cinéma ! 🙂
@Tornado : Yeah !!!!! Mulholand Drive !
@Bastien: au moins Morrison aura fait revenir un lecteur fidèle du blog. Tout n’est pas perdu. Je ne suis pas prêt de relire quelque chose de sitôt de lui, mais je retiens Animal Man.
@Matt: en musique, Dylan ou Neil Young ont prouvé que c’était à l’auditeur de s’adapter. Via l’écriture je trouve ça extrêmement méprisant. Je ne lis que rarement d’ITW d’auteurs-dessinateurs. Mais le peu que j’ai lu de Morrison souvent en postface ou en bonus, ainsi que son écriture ne me le rend vraiment pas sympathique….
Article prévu pour la rentrée : le procès de Grant Morrison et ses New Xmen coécrit avec Tornado !
@Tornado : C’est marrant, je ne me souviens pas du tout m’être heurté à ça dans New X-men. La lecture m’a semblé assez fluide. Il faudrait que je les relise. Pour moi le plus douloureux restait la partie graphique gérée par Igor Kordey (mes yeux ont saigné) Enfin il parait qu’il est bon ailleurs Kordey mais que là c’était une question de délai ou je ne sais quoi. Il n’empêche que berk !
Sans doute que Lynch ne me touche pas assez pour que je me contente des sensations. Après c’est subjectif tout ça.
Il est étrange ce Morrison…et peu commun…J’ai aimé les New X-men globalement mais j’ai cordialement destesté son Batman que je n’ai jamais fini…Au delà de son style narratif parfois déconcertant c’est sa manière d’agencer ses dialogues avec les planches qui m’interpelle, car peu importe le dessinateur qui l’accompagne il y a souvent ce côté « brouillon », déconstruit de la mise en scène graphique. Je ne me suis jamais renseigné à ce sujet c’est juste une constatation (qui ne se vérifie pas du tout avec les scans de l’article !). Sa seule grande oeuvre à mes yeux date un peu c’est son Arkham Asylum plus clair que le reste (marrant avec McKean de parler de clarté tiens !) Je suis plutôt de ton avis Boss sur Morrison…Je m’en rends compte maintenant quand je vois son nom sur une série je me barre illico…et j’essaie de m’y interesser plus tard…ou pas du tout suivant le planning souvent chargé des sorties BD. J’aime réfléchir et m’instruire…encore faut-il que le guide ne soit pas une espèce de père Fouras…
Morrison, lui, est un horrible fat qui se gausse de la réputation qui lui a été faîte et laisse la plupart de ses lecteurs sur le bord du chemin pour faire plaisir à sa nombreuse fanbase.
Euh… je ne fais pas partie des ultra-fans de Morrison mais il a écrit des trucs qui m’ont plu : JLA : Earth 2, Arkham Asylum, son run de JLA avec Howard Porter… et aussi ce Superman All Star !
Du coup, je ne pense pas qu’on puisse simplement diviser les gens entre adorateurs de Morrison et le reste du lectorat qui trouverait son oeuvre inaccessible. D’ailleurs, pour citer Asterios Polyp : « Le monde se divise en deux catégories : ceux qui divisent tout en deux catégories, et les autres… »
Il est vrai que les premières oeuvres sus-mentionnées étaient plus abordables que ce All Star qui se savoure davantage lorsqu’on est familier du mythe de Superman… N’ayant qu’un niveau moyen en Supermanologie, j’avais passé un bon moment de lecture, aidé par les chouettes dessins de Quitely, et au passage, je ne trouve pas forcément les couleurs dégueux …
Et pour faire mon Bizarro jusqu’au bout, j’avais trouvé que l’anime était moins réussi, avec une impression plus forte encore de narration disjointe, tandis que la lecture permettait une meilleure immersion.
@yuanda : J’aime réfléchir et m’instruire…encore faut-il que le guide ne soit pas une espèce de père Fouras… hey, mais le look du père Fouras, c’est celui d’Alan Moore !
Le problème lorsque l’on écrit et que l’on sait que les copains vont lire c’est de trouver les mots justes sans les blesser parce que les premières versions étaient plus hargneuses….
sa nombreuse fanbase. Le succès de Morrison m’est tellement étranger, que je ne peux pas imaginer qu’on ne puisse faire autre chose que l’adorer ou le détester…. Je ne peux pas imaginer de modération le concernant ! Sorry JP !
Et je continue de penser que Morrison est un fat….
Et pourtant, je suis le premier à dire qu’il ne faut pas avoir d’idole 🙂 J’adore Morrison, mais jamais je ne serai un fan énamouré qui va te dire que tu es à côté de la plaque car tu n’aimes pas ce qu’il fait. J’adore Dave Grohl, c’est un type formidable. Mais les Foo Fighters, c’est de la daube. Même si j’aime trois disques, sans les adorer.
Je suis d’accord avec JP, sur Morrison, qui lui (JP) ne fait rien que d’insister qu’il n’est pas d’accord avec moi sur ASS ! 😀
Ce qui fait que j’ai préféré l’anime : Morrison prend le parti d’un second degré pour son approche : Ses personnages sont des personnages de papier. Ils ne sont pas vivants et l’on peut leur faire dire et faire ce que l’on veut, ce n’est que du papier. L’anime opte au contraire pour le premier degré habituel (on est dans un monde qui est « vrai »). Du coup l’émotion est directe, franche. Et c’est d’une honnêteté sans faille (en plus d’être de bonne qualité).
Ajoutez au comics qu’il est, en plus, colorisé de manière très clinique, très aseptisée (avec des dessins de Quitely souvent épurés), et vous obtenez un résultat très froid. Le dessin animé est à la fois plus directement sincère, et beaucoup plus chaleureux (avis strictement personnel et subjectif).
Je ne suis pas un fan de Morrison. Je n’aime pas son côté elliptique et déstructuré, et les récits trop denses (hypercompressés). Mais comme Lionel, je préfère un récit auto-contenu, conceptuel et original qui propose de la nouveauté et de l’audace, plutôt qu’un truc mainstream de base qui flatte le beauf à la Deadpool (souvent-c’est-le-cas-pour-Deadpool-et-c’est-l’exemple-qui-m’est-venu-tout-de-suite-à-l’esprit).
Ah oui, je suis également d’accord avec ce précepte, j’ai oublié de le dire : ce récit est complètement auto-centré, et il se suffit vraiment à lui-même, en dehors de toute considération hors bd tel que la mode, les oeuvres de ses auteurs ou le mythe de Superman.
J’aime bien ta citation, JP. « ceux qui divisent tout en deux catégories, et les autres… » Elle est vraiment pas mal, je la ressortirais.
Peut être n’ai-je pas assez lu de Morrison, mais je ne me considère ni comme un fan, ni comme un détracteur. J’ai aimé ses New X-men, sans les trouver extraordinaires comme on veut souvent nous le faire croire (mais ça c’est un effet de mode, inutile de descendre davantage l’œuvre sous prétexte que des moutons ont fait monter la hype)
Et un peu déçu par son Joe l’aventure intérieure que j’ai trouvé trop froid et sans implication émotionnelle (mais c’est pas non plus une bouse, c’est sympathique à lire)
Sans doute faut-il que j’en lise davantage, mais même si je tombe sur des bouses illisibles, je ne vois pas pourquoi cela viendrait changer mon avis sur ce que j’ai déjà lu. Je peux donc déjà dire à l’avance que je ne déteste pas tout de lui, sans pour autant l’adorer^^.
Je remercie Présence pour avoir mis mon article sur Joe l’aventure intérieure (si vous le lisez, vous vous rendrez compte à quel point on s’est améliorés, sur ce blog, enfin moi pour sûr…) : c’est vrai qu’il est aussi assez froid, mais à la relecture, tout devient limpide et les personnages attachants.
Ben j’ai justement un peu de mal à m’attacher aux personnages qui n’ont pas d’existence propre et qui sont juste issus de l’imagination du garçon. D’ailleurs Morrison ne se donne pas trop la peine de leur donner une personnalité à cause de ça. Mais le résultat est donc plutôt froid.
Tu vas me dire que Joe est aussi un « faux » personnage issu de l’imagination de Morrison. Oui…mais dans la diégèse du comics, il est réel alors que les autres sont donc doublement faux.
Mais que penses-tu de Tyler Durden dans ce cas ? J’ai justement revu Fight Club avec mon fils hier soir (il voulait le voir), et c’est toujours aussi bien, et on adore toujours ce personnage.
C’est encore différent. Il est l’expression de ce que le personnage pense réellement. Un côté « obscur » exacerbé. On ne peut pas dire qu’il n’a pas d’existence. C’est tout de suite plus difficile de s’attacher à plusieurs personnages différents qui ont moins de personnalité. De plus, il n’est révélé qu’à la fin que Tyler Durden n’est pas réel (enfin son côté sombre incarné par Brad Pitt) Du coup on s’est fait avoir, on y a cru. Dans Joe, on a la sensation de lire les pensées d’un garçon sans croire un instant que les personnages qu’on croise sont autre chose que des « amis imaginaires » ou des fantasmes. C’est comme une histoire dans une histoire. Qui n’a donc que peu d’impact et dont les persos sont voués à disparaître, on le sait depuis le début. C’est du moins ce que j’ai ressenti.
Alors, je vous ai tous lus, j’ai relu le commentaire de Tornado (je me suis surpris à ne pas l’avoir commenté, honte à moi), et j’ai une tonne de choses à dire mais je crois que je vais en oublier…
Je rejoins les avis de Tornado, Présence, Lionel et JP sur bien des points : la couleur de ce All Star Supermen est un brin froide, la lecture n’est pas aisée, l’émotion n’est pas facile à ressentir, les épisodes avec Bizarro sont ratés, mais cela reste super bien pour d’autres choses. J’ai également relu les commentaires sur l’article de Tornado, et je vous invite à relire l’avis de Marti, car je le trouve extrêmement pertinent.
Ton article est vraiment bon, Bruce, mais tu n’y évites pas deux erreurs qui font que je ne suis pas d’accord avec ton propos. Sur les parties positives que tu recèles, aucun problème, on est totalement d’accord : l’épisode de l’évasion de Luthor est fantastique, et Morrison écrit un ensemble de personnages qu’il aime de tout son coeur, et ça se sent. L’épisode de la mort de Pa Kent est fantastique également, et plein d’émotion, mais cela dépend également du lecteur. Personnellement, je ne connais vraiment pas grand chose du mythe et de l’histoire de Superman, et pourtant, j’adore cette bd. Je l’ai lue plusieurs fois, d’abord parce que je ne comprenais pas tout, ensuite parce que je l’ai trouvée proche de la perfection, pleine de cadeaux, de respect, de modernité. L’épisode sur Jimmy Olsen est une ode au personnage, avec une vision Morrison – Quitely très marquée, que l’on peut un peu retrouver dans le Jupiter’s Legacy de Millar et Quitely.
Tes erreurs, c’est en premier lieu de donner une intention volontaire d’arrogance à Morrison quand il laisse le lecteur se débrouiller : c’est peut-être le cas, mais tu mélanges alors l’oeuvre et l’auteur, ce qui n’est jamais bon. Tu compares cette bd à des oeuvres bien plus compliquées à lire (Sandman, From Hell), et je ne vois pas en quoi ces derniers donnent plus de clés aux lecteurs : les annexes de From Hell sont bien la preuve qu’elles sont nécessaires pour appréhender l’oeuvre, et non pas une volonté de l’auteur, sinon il aurait intégré ces notes ailleurs, ou aurait opté pour une bd de 1500 planches. Donc oui, ASS est ardue, mais pas plus que celles que tu cites (je rappelle que je ne connais rien à Superman).
L’autre écueil, c’est que tu pas sur un a priori sur l’auteur. Comme hier, si le nom de Morrison n’était pas écrit sur la couverture, mais celui de Moore, par exemple, aurais-tu ressenti la même chose ? Aurais-tu eu autant de réticences ? Ou aurais-tu lu une autre histoire ?
J’adore Morrison même si je reconnais ses défauts que vous listez bien mieux que moi, mais comme Tornado, je suis là pour des sensations. Et on en a plein dans ASS, on s’amuse, on ne s’ennuie jamais. Et de plus on a les dessins de Quitely, bien plus agréables que la plupart de ceux de Sandman ou que ceux de Eddie Campbell.
On rejoint la discussion avec Matt sur les intentions des auteurs. Sur The Filth, Morrison nous prévient : cette bd use et abuse de la métaphore. A nous de les trouver. Ici, l’histoire est relativement simple, c’est la structure narrative qui est complexe et demande de l’investissement. Pour ma part, tout comme Lionel, j’ai adoré son Batman (et j’inclus Batman Gothic édité en volume 0 chez Urban) même si je ne connais rien à Batman : j’ai l’impression qu’on me bouscule tout en ne voulant pas forcément être obscur, mais en mettant en avant une suite de sensations ou de thèmes plutôt qu’une chronologie. D’ailleurs, dans les bonus du dernier tome de Grant Morrison présente Batman, toutes les histoires y sont remises dans un ordre chronologique afin d’aider le lecteur à remettre les choses en ordre. Et pourtant, je ne me suis jamais ennuyé.
Mais bon, il y a toujours le ressenti du lecteur ou du spectateur. Je n’ai toujours pas revu Mulholland Drive, mais en sortant du cinéma, j’avais tout compris. Je connaissais tellement Lynch que tout m’a paru évident, que Lost Highway donne bien plus d’interprétations possibles, que MD est un pendant féminin et grand public de Lost Highway.
Bref, heureusement que Présence est là pour aller chercher des choses que je n’ai jamais le courage de chercher moi-même et de nous expliquer des concepts inconnus, et un jour, je percerai les mystères de ces auteurs cryptiques. En attendant, j’adore les lire même si je ne comprends pas tout. Et toi Bruce, tu te laisses aveugler par ton aversion pour un personnage public réel pas forcément sympathique… Mais Lou Reed n’était pas très cool non plus non ?
Tu évoques un point intéressant en parlant de l’aversion qu’on peut ressentir envers un personnage réel et son œuvre. C’est difficile de s’en détacher si on a lu des interviews des auteurs et qu’on s’est rendu compte qu’on ne les aime pas. Et c’est pour cela que je préfère ne pas trop en apprendre sur les auteurs. On m’a dit que Frank Miller avait des idées politiques TRES discutables, le racisme et la misogynie de Lovecraft transpire dans ses récits. Seulement voilà…est-ce si important ? Lovecraft vivait à une époque où 80% des gens devaient penser comme ça. Et du moment que les auteurs contemporains ne cherchent pas à faire de la propagande pour des idées tordues dans leurs œuvres, a-t-on besoin de savoir qu’ils sont favorable au port d’arme ou à la peine de mort alors que nous mêmes, peut-être, déplorons ces choses ?
Des gens peu fréquentables peuvent être doués en peinture, écriture, etc. Et s’ils ne font de mal à personne et qu’ils ne se servent pas de leurs œuvres pour faire de la propagande façon Mein Kampf, ça ne devrait pas entrer en ligne de compte pour juger leur travail.
Mais ça se comprend aussi qu’on puisse avoir du mal à oublier ces choses si on s’est un peu trop renseigné. Et peut être voir des sous-entendus dans leurs œuvres là où il n’y en a pas forcément. ça revient en effet à ce que je disais sur le regard qu’on porte sur une œuvre en fonction des connaissance qu’on a de l’auteur. Et pour moi, il n’y a pas que de bons effets de trop connaître un auteur.
Pour le dessin animé All Star :
Je l’ai regardé avec Madame, alors que j’avais déjà lu la BD. Elle ne lit quasiment jamais mes comics mais elle regarde volontiers les dessins animés…
De mémoire, sa réaction fut : « On ne rentre pas trop dedans… On dirait des bouts d’histoire collés ensemble… » Et je n’avais pas grand chose à lui opposer, ne retrouvant pas dans le DA la « magie » de la BD.
Et pas-désolé Tornado et Bruce si ce soir Bizarro-JP toujours d’accord avec eux.
Bizarro-JP toujours recommencer.
(punaise, c’est dur de causer le Bizarro, on ne sait pas où mettre les négations et les contraires…)
@Bruce – Puisque Jyrille en a rajouté une couche, il me semble que tu avais été un peu moins dur envers Morrison dans ton article sur son livre Supergods.
@tous mes Morissonesques contradicteurs :
Il était évident qu’en adoptant provoc’ et sarcasmes, je m’exposais à de-gentilles- remontrances.
Pour repréciser : j’aime la simplicité en tout, que ce soit dans les relations humaines ou dans mon rapport à l’art. Ou pour trouver un meilleur terme, puisque simple peut évoquer simplisme ou simplet, j’aime ce qui est accessible.
Prenons la musique : les Beatles, le Floyd, Dylan, Neil Young, Leonard Cohen. Voici des chansons immédiatement plaisantes qui cache derrière leur simplicité des arrangements travaillés et plein de niveaux de lectures. Dylan, par exemple pour qui il faut largement une vie pour faire le tour de l’œuvre. Mais c’est séduisant, et donc pas de souci.
Lire pour moi est comme rencontrer une femme, construire une intimité avec elle. Toutes les femmes de ma vie ont été rencontrées sur un coup de foudre. La séduction, le charme, le langage des yeux, tout ça me donne envie d’en savoir plus. D’explorer. Lorsque j’ai rencontré la mienne aucun des deux ne parlait la langue de l’autre. On a dû s’adapter.
Et ben, Morrison, c’est pareil, ce qu’il écrit ne m’épate pas, ne me touche pas, ne me séduit pas mais m’irrite beaucoup. Derrière, il y a plein de choses, mais je n’ai pas envie d’y aller, de courtiser quoique ce soit parce que l’accessibilité n’est pas adaptée à ma norme. Parce qu’il y’a un rapport de soumission du lecteur à son public qui doit subir son érudition. Zappa, Beefheart voici des gens sûrement épatants mais pour lesquels il faut s’adapter pour jouir de l’œuvre. Et ben j’aime pas. Pour les mêmes raisons que je ne supporte ni LOST ni GOT : l’idée qu’il faille prendre des notes, faire des fiches pour savoir qui est qui, qui fait quoi, c’est insupportable. Je préfère et de loin la spontanéité, la fraîcheur, la simplicité d’une idée compliquée.
Alan Moore sait très bien faire ça : il est possible de jouir de Vendetta, de Watchmen, de la Ligue des Gentlemen sans ne rien connaître à l’anarchisme, aux héros DC ou au mythes littéraires. La lecture simple de Watchmen = un super héros assassiné, un complot, une enquête me convient tout à fait. C’est à moi de creuser et d’y revenir si ça m’a plu. Et d’y voir autre chose….Comme la deuxième chanson des Sucettes de Gainsbourg cachée derrière la première. Ou le message politique poignant de Lennon derrière le sucre d’Imagine.
Avec Morrison, nous sommes dans un rapport quasi mathématique à la lecture : il s’agit pour le lecteur d’accepter un jeu de piste, une équation où les indices sont disséminés un peu partout et où il faut trouver les inconnus à l’équation. Ceci réveille évidemment ma nullité et ma détestation des mathématiques qui m’ont gâché ma scolarité. Et je retiens que parmi vous, fans de Morrison, vous exercez tous dans un milieu plutôt tourné vers les sciences…
Enfin, le rapport de l’homme à l’œuvre : Lou reed était un vrai connard mais a fait des choses magnifiques. Comme Klaus Kinski ou Brando, de vraies ordures aussi pour leurs proches. Mais je ne suis pas toujours convaincu de cela…Sainte Beuve Vs Proust, tout ça….Si l’on prend l’exemple de Dieudonné par exemple, il m’est impossible de dissocier le néo facho de l’humoriste qui tient des congrès FN à lui tout seul….
Tout ça pour dire que j’aime tout ce que Morrison ne fait pas, ne sait pas faire. Son attitude me déplaît mais je ne sais rien de l’homme. Et je m’en fiche…
Mais du coup d’après ce que tu écris, je ne comprends pas tellement pourquoi tu aimes Lynch. Si chez Lynch, il ne faut pas s’adapter à lui, farfouiller parmi les multiples indices disséminés et suivre un jeu de piste, ben je ne sais pas ce qu’il te faut…
Est-ce lié au medium ? ça te gêne davantage dans la lecture qu’au cinéma ?
Je ne compare pas, hein, je ne veux pas que mes paroles soient mal interprétées, mais je cherche à comprendre.
Peut être que c’est complètement dépendant de notre sensibilité (comme tu dis ça ne te « parle » pas, ça ne te séduit pas), et il n’y a pas de quoi s’énerver finalement. Juste renoncer à cet auteur.
Finalement c’est parce que tout le monde fait un flan avec tel ou tel auteur qu’on insiste, qu’on essaie de comprendre pourquoi il a du succès, ce qui nous échappe, etc. La preuve face à vos réactions à mes propos sur Lynch, je me sens encore con à ne pas voir ce que vous y voyez. Et ça agace, comme si c’était moi le problème. Mais peut être que je suis simplement non-réceptif à son cinéma (celui « non-classique » j’entends, puisque je n’ai pas de souci avec les intrigues plus accessibles comme Elephant man, Dune, etc.)
Oui je pense avoir compris ton ressenti. Je ne suis pas forcément d’accord avec ton article mais il présente clairement les choses 🙂