Peter Lorre

 

Lobster Johnson tome 2 – The burning hand / La main enflammée par Mike Mignola John Arcudi & Tonci Zonjic

Des couvertures mystérieuses de Mike Mignola

Des couvertures mystérieuses de Mike Mignola ©Dark Horse

AUTEUR : PRÉSENCE

VO : Dark Horse

VF : Delcourt

En 1993, Hellboy fait sa première apparition dans un comics. Il s’agit d’une création originale de Mike Mignola qui réalise le scénario, les dessins et l’encrage. En 2002, Mignola inaugure la première série dérivée : BPRD, pour Bureau for Paranormal Research and Defense.

Depuis plusieurs autres séries dérives ont vu le jour (souvent sous forme de miniséries successives. Le personnage de Lobster Johnson apparaît pour la première fois sous forme ectoplasmique dans les pages d’Hellboy (l’histoire Box of evil).

Ce deuxième tome comprend les 5 épisodes de la minisérie initialement parue en 2012. Il contient une histoire complète indépendante de toute continuité. Il n’est pas besoin d’avoir lu le tome 1  pour apprécier ou comprendre celui-ci. Le scénario est de Mike Mignola et John Arcudi, les illustrations de Tonci Zonjic, et la mise couleurs de Dave Stewart. 

 

Un crime sordide avec mutilation barbare

Un crime sordide avec mutilation barbare ©Dark Horse

Un couple sort d’un cinéma et rentre chez lui à pied. Ils viennent de voir un film de Buster Keaton : « Le plombier amoureux » de 1932. Dans une rue déserte, ils découvrent un policier en uniforme scalpé encore vivant et même conscient, attaché à un lampadaire. Alors qu’ils s’inquiètent de son état, ils sont attaqués par une horde d’indiens à pieds pour certains, à cheval pour d’autres, en tenue folklorique (avec peinture de guerre, parure de plumes).

Le lendemain, 2 inspecteurs de police enquêtent sur place en examinant les cadavres ; ils sont interpellés par Cindy Tynan, une journaliste. En posant des questions sur les victimes, elle va interviewer Harry McTell un mécano auto qui semble bien comprendre les affaires louches qui se trament dans le quartier. Elle va finir par attirer l’attention sur elle et devoir son salut à l’intervention providentielle d’un individu au blouson en cuir orné d’une pince de Homard et coiffé d’un bonnet et de lunettes lui masquant le visage.

Des indiens à New York

Des indiens à New York ©Dark Horse

Avec cette histoire, Mignola et Arcudi rendent hommage aux pulps, ces histoires bon marché des années 1930 avec des justiciers plus ou moins masqués rendant une justice expéditive parmi les bas-fonds des villes en tuant des criminels exotiques (la génération précédant les superhéros). Ici Lobster Johnson doit plus à Doc Savage qu’à The Shadow. Il dispose d’un repère secret en pleine ville (avec son propre avion, mais ce n’est pas un autogyre), et d’une équipe de personnes qui lui sont dévouées corps et âme.

L’apparition de la troupe d’indiens de pacotille évoque les méthodes des criminels à la forte identité visuelle, usant de subterfuges pour terroriser la population. Il dispose d’une force normale, d’une grande agilité et d’une détermination farouche. Le lecteur n’apprendra pas sa véritable identité, et ne verra pas son visage à découvert. Il reste une énigme du début jusqu’à la fin.

Des scènes d'action faisant la part belle aux dessins

Des scènes d’action faisant la part belle aux dessins ©Dark Horse

Au fil des pages, le personnage à la personnalité la plus développée devient Cindy Tynan (du côté des « bons ») qui évite de peu de jouer le rôle de la captive sans défense, pour affirmer au fur et à mesure un caractère bien trempé.

Par contre du côté des « méchants », le lecteur est à la fête. Le boss de la pègre (Arnie Wald) dispose de suffisamment de personnalité pour que chacune de ses interventions en devienne savoureuse. Il est aidé par un couple exotique : Kamala (une femme asiatique, ah ! les mystères insondables de l’orient) et Raimund (un bon allemand dont l’apparence évoquera des souvenirs aux lecteurs de la série BPRD) Diesel.

La sensualité des mystères de l'Orient

La sensualité des mystères de l’Orient ©Dark Horse

Mais la très grande réussite est le second d’Arnie Wald : Mister Isog. Il est évident que Mignola (grand fan de cinéma de genre comme il l’avait déjà prouvé avec Hellboy dans House of the living dead) a voulu rendre hommage à Peter Lorre (M Le maudit, Le Faucon maltais, Arsenic & vieilles dentelles et bien d’autres).Et le résultat est aussi convaincant pour le rôle qu’il lui a attribué que pour l’interprétation visuelle de Tonci Zonjic. C’est un vrai plaisir que de retrouver cette tête et ces manières de traître fielleux et pleutre.

Tonci Zonjic s’est fait connaître en illustrant une histoire complète Who is Jake Ellis. Il utilise un style plutôt réaliste, aux contours simplifiés, très agréables à l’œil. Dès le début, le lecteur éprouve l’impression d’être dans les rues de New York des années 1930, légèrement patinées par la distance temporelle, déjà presque mythiques. Les couleurs discrètes de Dave Stewart accentuent cette impression de circuler dans des lieux déjà consacrés comme légendaires par le temps qui passe.

Chaque lieu dispose de caractéristiques qui le rendent unique, avec un savant dosage pour que les cases ne donnent jamais l’impression d’être surchargées. Le rendu des visages évoque parfois Edgar P. Jacobs, avec des contours plus adoucis et des dessins un peu plus grands (en moyenne entre 4 à 6 cases par page).

Zonjic capture avec une aisance déconcertante l’essence de chaque scène. Lorsque le lecteur se promène sur le pont d’un paquebot, il contemple Kamala Diestel en maillot de bain sur un transat en train de prendre le soleil, avec l’océan en arrière-plan, c’est à la fois l’image universelle (presque générique) de cette situation et à la fois une vision rendue unique du fait de la coupe de cheveux de la dame, de la texture de bois du transat, des vêtements des promeneurs sur le pont.

Des rues de New York 1932 crédibles

Des rues de New York 1932 crédibles ©Dark Horse

Évidemment Zonjic respecte le ton des séries estampillées « Hellboy » en utilisant des aplats de noir copieux lors des séquences nocturnes, sans les transformer en surfaces géométriques abstraites. Le personnage repris de la série BPRP dégage exactement la même impression que la version de Guy Davis. Les expressions des visages sont pertinentes, sans être exagérées. Et puis Peter Lorre exhale un charme vénéneux irrésistible.

À la fin de la lecture de cette histoire, le lecteur constate qu’il ne s’agit que d’une bonne série B : Mignola, Arcudi et Zonjic revisitent avec maestria tous les codes des pulps, mais sans rien apporter de novateur, sans autre objectif qu’un récit distrayant, sans commentaire particulier. Si, il y a bien un commentaire particulier : la déclaration d’amour aux personnages interprétés par Peter Lorre. Si vous n’avez jamais été impressionné par cet acteur, ce tome mérite 4 étoiles. S’il a marqué votre imaginaire, la qualité de cet hommage mérite 5 étoiles.

Des horreurs indicibles en plein cœur de New York

Des horreurs indicibles en plein cœur de New York ©Dark Horse

5 comments

  • Tornado  

    Celui-là dort sur mes étagères…

    Du 100% pulp. Je ne peux résister…

    • Bruce lit  

      Connaissais pas ce Peter Lorre. Merci de parfaire ma culture geek à la culture tout court. Je ne suis pas un grand fan du pulp, je pense passer mais les dessins sont très chouette. Quand est ce que nos aurons du Hellboy ? LA série est toujours en court ? une fin est elle prévue ? Il ne devait pas y avoir un troisième film ?

      • Présence  

        La série Hellboy est toujours en cours, mais de manière sporadique et irrégulière. Mike Mignola a réalisé 5 épisodes en 2014, constituant le premier tome de « Hellboy in Hell ».

  • Jyrille  

    Je ne possède qu’un seul Hellboy, je ne connais pas très bien cette série, je ne savais pas qu’il y avait un autre spin off. Merci de parfaire ma culture donc. Je connais un peu Peter Lorre par contre. Bref, tout ça donne envie.

    • Présence  

      Il y a d’autres séries dérivées d’Hellboy. Elles comprennent plus ou moins de tomes : Abe Sapien, le BPRD bien sûr, Sir Edward Grey Witchfinder, Sledgehammer ’44, et Lobster Johnson.

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