Flash Gordon par Mike Hodges
AUTEUR : TORNADO
Première publication le 26 septembre 2014. Mise à jour le 18/08/18
Issu d’un comic-strip préhistorique créé en 1934 par Alex Raymond, quatre ans avant l’avènement de Superman (le premier véritable super-héros de l’âge d’or des comics), il existait déjà une figure incontournable de l’univers héroïco-cosmique !
Nous allons à présent honorer son adaptation sur grand écran, elle-même devenue l’un des classiques du genre « space-opéra ». A moins qu’il s’agisse d’un nanar. Ou bien d’une pure œuvre d’art ! Are you ready ?
Flash Gordon : Date de sortie : 1980. Réalisateur : Mike Hodges. Producteur : Dino de Laurentiis. Genre : Navet absolu de l’histoire du cinéma en particulier et de l’humanité en général. Genre involontaire : Comédie burlesque hilarante déconseillée aux cardiaques, mais fortement recommandée aux dépressifs et aux personnes ayant le rire difficile. Genre nouveau : Œuvre d’art d’une nouvelle espèce… Référence : film CULTE, voire CULTISSIME.
Le synopsis : Flash Gordon, la superstar de football américain, se retrouve accidentellement propulsé dans l’espace en compagnie du Dr Zarkov et de la journaliste Dale Harden. Ils y rencontrent un tyran intergalactique, l’empereur Ming, qui habite la planète « Mongo ». Le tyran, qui est extrêmement méchant (il parait que c’est comme ça quand on est un tyran !) souhaite immédiatement faire de Dale sa nouvelle concubine.
Car il est méchant, mais il est également coquin, ce qui à priori n’est pas incompatible. Evidemment, Flash ne l’entend pas de cette oreille, parce que Flash aime Dale, vu que tout héros a son amoureuse, et Ming le fait emprisonner aussitôt, ordonnant naturellement son exécution (une véritable ordure, en somme…).
Un retournement de situation se met en place très vite : Effectivement, la Princesse Aura, la fille de Ming, vient délivrer notre héros. Car la coquine (elle est méchante, mais elle est également coquine, ce qui à priori n’est pas incompatible, vu qu’elle est la fille de son père…) n’est pas insensible aux charmes du musculeux terrien.
Que nenni ! Flash aime Dale, et il est hors de question qu’il trompe sa dulcinée avec la première princesse venue, car lui c’est le gentil, faut pas déconner non plus ! Cette dernière, revancharde mais toujours sous le charme, décide alors de le confier à la garde de son amant, le prince Barin. Hélas, celui-ci est tellement jaloux qu’il va aussitôt entreprendre d’éliminer son rival, qui parvient néanmoins à s’échapper !
Le Prince et ses archers, qui ressemblent tous étrangement à certains habitants de la forêt de Sherwood, se lancent à la poursuite du héros, mais ils se retrouvent tous cernés par les hommes-oiseaux du prince Vultan, encore un prince extraterrestre qui en pince pour la belle Aura, qui ne fait rien qu’à émoustiller tout ce côté de la galaxie ! Les volatiles (qui ressemblent à des vikings ailés !) emmènent les captifs sur leur ville-planète qui flotte dans l’espace, ce qui est totalement logique puisque ici tout le monde vole, sans même souffrir de la pressurisation.
Là, Flash retrouve Dale et le Dr Zarkov, qui ont également réussi à fuir le palais de l’empereur…. Ming intervient alors et dupe tout le monde (souvenons-nous que c’est un tyran !). C’en est trop pour toutes ces races extraterrestres, qui décident ainsi, en cinq minutes, de s’allier afin de mettre fin au règne de cet empereur intergalactique qui est décidément trop tyrannique … A la fin, les gentils l’emportent sur les méchants et le héros roule une pèle à sa dulcinée sous l’œil attendri de toute l’assemblée. Mais ne comptez pas sur moi pour vous spoiler le scénario…
Lancé à l’époque dans le sillon de la saga Star Wars et vendu comme un grand spectacle familial du niveau de celui de George Lucas, Flash Gordon est un nanar flamboyant qui gagne un peu plus ses galons d’œuvre culte au fil des années et l’un des plaisirs régressifs les plus hallucinants de toute l’histoire du 7° art.
Le casting est pourtant prestigieux : Max Von Sydow dans le rôle de l’Empereur Ming, Ornella Mutti dans celui de la Princesse Aura, Timothy Dalton dans celui du Prince Barin. La musique est assurée par un groupe Queen au faite de sa gloire. Et… Danilo Donati, le concepteur des décors et costumes attitré de Federico Fellini assure la partie esthétique ! Alors, il est où le problème ? En réalité, le problème vient surtout du fait que le producteur Dino de Laurentiis, complètement mégalo et trop fier d’avoir damé le pion à Lucas en le privant des droits d’adaptation de la bande dessinée d’Alex Raymond, alors que le papa de Star Wars en rêvait depuis l’enfance et que c’est d’ailleurs pour ça qu’il se « contentera » d’imaginer la saga des Skywalker à la place.
Le problème disais-je, est que le producteur italien n’a pas du tout les moyens de ses ambitions (je veux dire artistiquement parlant, puisque le budget du film est pharaonique !). En découle une production qui se donne des airs de spectacle grandiose et inédit à coup de décors en carton empruntés dans les boîtes disco du coin, de costumes recyclés à partir de pyjamas aux couleurs fluo, d’effets spéciaux indignes d’un spectacle de David Copperfield (je parle du magicien de Las Vegas) et de scènes d’action chorégraphiées comme un vulgaire spectacle de fin d’années tel qu’on peut en voir dans les écoles primaires de campagne.
Alors que le scénario tente de respecter l’œuvre graphique originale en s’inspirant au plus près des planches de Raymond, le script saupoudre cet hommage à priori révérencieux de notes piquantes d’un mauvais goût absolument édifiant : Ming et la Princesse Aura s’adonnent à l’inceste le plus naturel, alors que cette dernière, complètement nympho, épouse le Prince Barin pour mieux le tromper avec le premier venu. Pendant ce temps là, l’acteur Sam Jones, qui incarne le héros, joue comme une patate et roule des muscles tandis que la Princesse Aura (encore elle !) se fait fouetter en petite coquine sado-maso qu’elle est… Et jusqu’à la fin, le spectateur est invité à se marrer comme une baleine devant une avalanche de scènes inénarrables : Flash quitte la Terre et s’en va dans l’espace avec un tee-shirt blanc marqué d’un « Flash » rouge et un brushing magnifique (c’est SON costume de super-héros).
Alors qu’il arrive sur la planète « Mongo » et qu’il a l’occasion de jouer un match de foot extraterrestre (!!!), on lui a déjà préparé un débardeur rouge avec un « Flash » sur la poitrine !!!Plus tard, lorsqu’il manque de se noyer dans un marécage boueux et visqueux, il en ressort propre comme un sou neuf et toujours sous un brushing nickel ! Les scènes comme celles-ci sont légions ! Mais ma préférée, celle dont je ne suis jamais parvenu à me lasser, c’est lorsque le héros, pas content, retourne sur « Mongo » afin d’attaquer la planète tout seul sur un scooter volant au son du tube de Queen qui scande son nom : « Flash ! Flahaaaaash » ! (comment respire-t-il dans l’espace, là n’est pas la question…). De leur tour de garde, les vigiles de l’empereur Ming nous lancent alors un sublime « Attention ! Flash Gordon attaque à bord de son scooter de l’espace ! »
Inutile de préciser que la carrière de Sam Jones s’est arrêtée net. Aujourd’hui, il a rejoint le panthéon des icônes gay ! Quant au producteur Dino De Laurentiis, il nous aura tout de même infligé, en six ans seulement, trois nanars d’anthologie aux allures de superproduction internationale : Flash Gordon, Kalidor et King Kong 2 !
La première fois que j’ai vu le film, enfant, je l’avais beaucoup aimé. Mais quelque part, insidieusement, je sentais qu’il y avait quelque chose de bizarre, quelque chose qui n’allait pas. S’agissait-il de l’iconographie anachronique imaginée par Alex Raymond (sorte de mélange entre les folklores celte et nordique, le tout transposé dans un univers de type space-opéra !), sachant que son comic-strip flamboyant ne supporte certainement pas le passage sous un autre medium ? S’agissait-il des relents sadomasochistes cachés dans le sous-texte ? Et d’ailleurs, le sous-texte en question était-il volontaire ? Evidemment, à cet âge là, on ne se pose pas toutes ces questions. Mais tout de même, le film exhalait déjà un parfum vraiment très, très spécial… On peut d’ailleurs se demander jusqu’à quel point Danilo Donati, concepteur des décors, accessoires et costumes, ne s’est pas éclaté en douce en imaginant les connotations les plus déviantes possibles !
Pourtant, à chaque fois que je le revois, c’est la fête ! J’ai beau connaitre chaque scène par cœur, il me semble la redécouvrir à chaque vision, tant je n’en crois ni mes yeux, ni mes oreilles ! Toutes ces incohérences scénaristiques, tous ces sous-entendus tellement salaces qu’on se demande encore s’ils étaient volontaires, tout ce mauvais goût criard et bling bling avant l’heure finissent en définitive par faire la richesse d’un film que l’on regarde comme on hallucine.
Comme s’il s’agissait d’une Tarte Tatin, délicieuse dans sa formule ratée, car cuite à l’envers. Comme si le film, dans sa version foireuse et kitschissime, était devenu une œuvre d’art exquise, à ne déguster que pour ses côtés ratés ! Bref, un chef d’œuvre du genre aux accents de paradis régressif…
Ce faisant, Dino De Laurentiis, Mike Hodge, Sam Jones et tout le reste de la bande auraient réussi à atteindre le paroxysme de l’art régressif, où notre sensibilité humaine civilisée côtoie le plaisir de régresser par procuration, en contemplant le mauvais goût et le kitsch involontaire. Pour toutes ces raisons, n’ayons pas peur des mots : Flash Gordon est l’un des plus flamboyants nanars de l’Histoire du cinéma !
Alors qu’aujourd’hui la mode des héros cosmiques semble renaître après tant d’années passées dans les limbes de l’oubli, il serait peut-être bon de repenser au fiasco artistique du film de Mike Hodge et Dino de Laurentiis, qui ruina le genre en le ringardisant d’emblée aux yeux du monde et de l’élite intellectuelle. Après tout, c’est vrai, la figure du « héros cosmique » souffrira longtemps de son bagage désuet et ringard, tant il est impossible de ne pas penser au mauvais goût ostentatoire de ce film de 1980.
Mais les temps changent. Alors que la nouvelle trilogie Star Wars se profile à l’horizon, que les superproductions des studios Marvel réhabilitent doucement le genre, la probabilité d’une nouvelle adaptation cinématographique du comic-strip d’Alex Raymond se précise.
Et sur Wikipedia l’on peut lire : « Variety annonce, en aout 2004, que le réalisateur américain Stephen Sommers projetterait une nouvelle réalisation de Flash Gordon pour Universal Pictures. En avril 2014, la production 20th Century Fox a acheté les droits du comics trip et le scénario est confié à J.D. Payne et Patrick McKay, les scénaristes du prochain Star Trek… »
Quarante quatre ans séparaient la première adaptation sous forme de serial du comic-strip de Raymond d’avec la superproduction de Laurentiis. A l’heure où j’écris ces lignes, trente quatre ans se sont déjà écoulés depuis que Sam Jones a remis son costume au vestiaire. La future adaptation sera-t-elle meilleure que le film de Mike Hodge ? Probablement. Sera-t-elle aussi intéressante artistiquement parlant et deviendra-t-elle un objet de culte au même titre que son ainé ? Cela parait moins sûr car, de ce point de vue, on tient là le maître-étalon du genre !
Pour terminer, il est amusant de noter que le personnage principal des GARDIENS DE LA GALAXIE, Star-Lord, est à l’origine une création du scénariste Steve Englehart, directement inspirée du héros créé par Alex Raymond. Au cinéma et dans les comics, comme ailleurs, rien ne se crée, rien ne se perd, tout se transforme…
Oui, de bons gros nanars. De même que « Les Hommes d’une Autre Planète » et, surtout, mon chouchou du genre : le nanardesquissimesque « destination Planète Hydra » ! 😀
Tu vois quand je disais que Captain Kronos ne mérite pas son titre de nanar, c’était pas pour dire qu’il était génial. Mais on n’est pas sur le même level quand même, non ?^^ On va dire qu’il y a des degrés dans le nanar.
destination Planète Hydra est sorti chez Artus films^^ Ils sortent un peu de tout, eux. Dont des nanars. Dommage que les bons DVD à l’image jolie côtoient les DVD un peu dégueulasses pas du tout restaurés. Mais bon j’imagine qu’avec un public de niche…c’est pas évident de dépenser des fortunes pour remasteriser un nanar.
Tiens en remettant la main sur quelques vieux Spirou magazines qui ont échappé au massacre et à la vente que j’ai bêtement opéré en grandissant, j’ai vu qu’était publié un récit Flash Gordon par Al Williamson. Je ne sais pas lequel ni sur combien de numéro, j’ai juste trouvé quelques pages (les parution Spirou, c’était 2 ou 3 pages par magazine, il en fallait un paquet pour finir le récit)
… Ce n’est pas un nanar du tout !
C’est une œuvre Camp assumée, qui aligne les clichés relatifs à l’infantilisme de la plupart -sinon la totalité !- des récits de « S.F. » antérieurs à sa réalisation. Je mets les guillemets exprès parce que, là aussi, il y a longtemps eu (et il y a encore !) un malentendu persistant entre un genre littéraire servant de base aux extrapolations « futuristes » les plus ambitieuses et un simple prétexte à la mode pour d’innombrable et faciles redites du passé, vues et revues, mais ravalées à grands coups de vernis « modernes », qu’ils soient scientifiques et/ou Fantastiques. Au fait : salut, Georges !
Avec un parti-pris d’auto-dérision très bienvenue, Dino De Laurentiis et sa clique se sont régalés à mettre en scène un quasi opéra, baroque et burlesque, plein de paillettes et de feux d’artifices colorés et où les archétypes les plus outrés s’affrontent avec une bonne humeur franchement très communicative. Toutes les valeurs classiques sont systématiquement inversées : Flash est nunuche : « J’ai pris des cours de pilotage, mais je ne sais pas encore atterrir… » , Dale n’a rien de fragile : « VIVRE ET LAISSER VIVRE ! C’est mon crédo… », Zarkov est complètement dingue : « Allez chercher votre brosse à dents, vous venez avec moi ! », Ming n’a rien de terrifiant -ses manières affectées !!-, Aura est comique (À son fou en laisse) : « Allons, viens, Fellini… » Et à Flash : « Effleurez, chéri ! C’est extrêmement sensible…), Barin, fringué comme la version renard de Disney, (!) est un Robin Des Bois incroyablement simplet : « Aura, vous jouez avec le feu ! » « Ah, mais, bien entendu… » plus craignos que nature. Quant à Vultan, c’est décidément le plus exhibitionniste des faux hétérosexuels/mâles Alpha jamais porté à l’écran : son slip de cuir avec bedon poilu apparent, bien sûr ; mais surtout cette scène hallucinante où il est assis -en équilibre très précaire…!- sur son rocher…
Respectueux des codes de ce cinéma-là, l’ambiguïté s’exprime bien évidemment beaucoup au dessous du niveau de la ceinture : « Soufflez donc dans votre pipeau, imbécile, et fichez-moi la paix ! », mais aussi au travers de dialogues décalés qui ajoutent encore au comique des situations mises en scène. Ils débarquent à la cour d’un monarque extraterrestre et Dale s’exclame : » On dirait une réception à l’hôtel de ville ! » ! Et cet échange hilarant entre elle et Flash où, ce dernier lui répondant au mauvais moment, semble dire qu’il craint, lui aussi, de ne plus savoir se maquiller une fois de retour sur Terre !
La musique de Queen, énorme, tonitruante, démesurée, et employée tout à la fois de manière si dérisoire dans ses utilisations scéniques (Football Fight, The Wedding, Flash…) est parfaitement au diapason de l’ambiance irréelle de ce grand spectacle parfaitement orchestré. Du plein les yeux, plein les oreilles !
C’est délibérément que cette pièce-montée somptueuse cumule les artifices les plus usités dans le cinéma dit de Science-Fiction. Prenant le contre-pied du « réalisme » esthétique en vogue de l’époque (et si cher aux spectateurs en état de manque des Eigthies, dont j’étais !), la production colle très fidèlement à l’atmosphère des Pulps d’antan sans en conserver un iota de ce qui les a rendu si rapidement obsolètes : le sérieux de leur ton ainsi que leur nouillerie romanesque, mortellement dénués d’humour. Il faut voir de quelle façon s’expriment les sentiments, dans ce vaudeville Kitch ! Dale, pendant que le prêtre l’unit à Ming : « NON ! NON ET NON !! » !
Un summum dans le genre parodique -pas un navet, je le répète- et un grand moment de cinéma formel tout court. En tous les cas, une véritable œuvre grand public, authentique et talentueuse, à laquelle ses créateurs ont courageusement insufflé beaucoup d’eux-mêmes et de leur culture/sensibilité, au mépris de l’argument commercial : four aux USA, bien entendu ; mais accueil bien plus positif dans le reste du monde, et définitivement culte, aujourd’hui -avec raison. Avec moi : » DIIIIIIIIIIIIIVE ! ! ! ».
Mon cœur ira sur 2 autres citations : « Gordon’s alive ?! » et « Pas les vers perforants ! »
Ah oui ! Les vers perforants ! ARF !