Nature humaine (Nausicaa et la vallée du vent)

Nausicaä de la Vallée du Vent, le manga et l’anime par Hayao Miyazaki

Première publication le 31/10/2014- Mise à jour le 30/11/19

Un article de  : TORNADO

VF Manga : Glénat

VF DVD : Ghibli

A force de vouloir trop puiser dans les ressources de la planète, la civilisation industrielle est tombée, au terme d’une guerre monstrueuse aux conséquences catastrophiques pour le système écologique. Mille ans se sont écoulés depuis que la gigantesque « Mer de la décomposition », une forêt toxique étendue sur le monde, a contraint les survivants à se terrer sur les rares îlots préservés de son souffle délétère et meurtrier. La Vallée du vent, comme son nom l’indique, protège ses habitants de la pestilence. Il s’agit d’un petit royaume agricole à la prospérité fragile, qui échappe pour le moment à la grande guerre que se livrent les empires Dork et Tolmèque. Tout s’écroule le jour ou le roi Jill est assassiné. Nausicaä, la princesse de la Vallée du vent, s’élève alors contre l’insurrection et prend en main la destinée de son peuple…

Si Hayao Miyasaki est surtout connu pour ses longs métrages d’animation (on dit « anime japonais ») (Princesse Mononoké, Le Voyage de Chihiro), il est également, comme son confrère Katsuhiro Otomo, un grand auteur de bandes-dessinées (on dit « manga »…). Pour le coup, sa version de papier de Nausicaä De La Vallée Du Vent qu’il débute en 1982 pour la terminer en 1994, est la partie la plus personnelle et la plus achevée de son œuvre. Ainsi, si notre homme demeure aujourd’hui celui qui a fait connaître internationalement l’animation japonaise dans ce qu’elle a de plus noble, il mérite largement d’être étudié dans sa contribution au 9° art. Toutefois, Nausicaä De La Vallée Du Vent est également le titre d’un anime japonais, puisque le maître en propose une adaptation cinématographique dès 1984 !

Nausicaä, le manga : Quand Hayao Miyasaki, surtout connu pour ses films, nous rappelle qu’il est un maître de la bande-dessinée (et de l’aquarelle) !

Quand Hayao Miyasaki, surtout connu pour ses films, nous rappelle qu’il est un maître de la bande-dessinée (et de l’aquarelle) !
©Glénat
©Tokuma Shoten

Une fois n’est pas coutume et, bien que je n’aime pas trop cela, je ne serai pas avare de superlatifs : conte familial de très haute volée, chef d’œuvre absolu du récit d’heroic fantasy dans le fond et la forme, pamphlet panthéiste d’une profondeur vertigineuse, Nausicaä De La Vallée Du Vent est donc la pierre angulaire de l’histoire du Manga, qui se décline à la fois sous la forme d’une bande dessinée fleuve (7 tomes au total) et d’un long métrage d’animation, tous deux réalisés par le même auteur.

C’est l’histoire d’une princesse qui possède le don de communiquer avec les éléments. Dans un pays en guerre où personne n’est épargné, elle va pénétrer la mystérieuse Mer de la décomposition, une forêt toxique gardée par de redoutables insectes géants mutants, qui va se réveiller et changer le monde…
Pas besoin d’en dire plus pour relever d’entrée de jeu le parti-pris écologique du récit. Ici, les forces de la nature et les hommes du monde rural (par extension équilibré et animiste) s’opposent à la violence conquérante d’une civilisation technologique. Des armes bactériologiques, des radiations : la menace polluante et la destruction de l’environnement mènent le monde vers l’apocalypse.

Comme souvent chez Miyasaki, de ce chaos vont émerger des figures qui échappent complètement aux archétypes traditionnels de la fantasy. En lieu et place de guerriers mâles farouches et de chevaliers hardis, nous auront droit à des femmes déterminées et pugnaces, des enfants purs et innocents et des figures maternelles réconfortantes dispensant la sagesse du vieux monde. Mais tout le génie de l’auteur éclate dans la caractérisation de ses personnages : A part les enfants, seuls garant d’une innocence et d’une pureté encore vierge, il n’y a pas de manichéisme dans cette histoire. Les protagonistes sont richement dessinés et s’élèvent au dessus des notions de bien et de mal pour incarner toutes les facettes de la nature humaine, si changeante lorsqu’elle est confrontée à la notion de « contexte ». L’âme des hommes est en perdition lorsque la science prend le pas sur la conscience…

Comme si tout ceci n’était pas suffisant, Miyasaki injecte, avec un sens du détail maniaque, une multitude de précisions géographiques, politiques et religieuses, qui finissent par enrichir cet univers imaginaire, lui conférant une épaisseur étonnamment consistante : les coutumes, les vêtements, les organisations hiérarchiques… tout est richement développé, fluide et authentique, sans jamais tomber dans la surenchère et le démonstratif. Et puis en plus, tout est du domaine du jamais vu, mettant en scène un univers visuel ou l’émerveillement béat des images féériques côtoie régulièrement les manifestations cauchemardesques les plus malsaines, pour une implication intense et viscérale, chez le lecteur comme chez le spectateur !


Une nature aussi belle que terrifiante, pour des images de celluloïd de toute beauté (et ça date de 1984 !)…

Ajoutez à cela l’amour du maître pour les engins volants, le parcours initiatique qui mène de l’enfance à l’âge adulte par l’expérience du monde (et non des adultes, Miyasaki étant farouchement opposé à la doctrine de l’éducation imposée par les séniors), et vous obtenez certaines des constantes de l’œuvre d’un artiste majeur de notre temps, à la profondeur thématique immense, perfectionniste en diable, pour qui le fond et la forme sont indissociables et pensés au service de l’histoire et non, comme c’est trop souvent le cas dans le cinéma « d’auteur », pour servir l’égo démesuré de l’aaaartiiiste….

Déjà à l’œuvre entant qu’animateur dans le magnifique Horus, Prince du soleil, long métrage d’animation réalisé en 1968 par Isao Takahata qui faisait également la part belle à la philosophie panthéiste, Miyasaki développe les racines de son œuvre en 1978 dans la série animée Conan, Fils du Futur, chef d’œuvre précurseur d’une richesse inégalée (et première réalisation du maître) qui n’a pas pris une ride et demeure épargné par le temps, mais dont peu de spectateurs se souviennent aujourd’hui (regardez-la, c’est une pure merveille !). Miyasaki y expose ses thématiques majeures et met en scène un récit de science-fiction d’une ambition et d’une finesse hallucinante, parsemé de figures complexes, dénuées du moindre cliché manichéiste. Un ovni surnageant au milieu des Albator et autres Goldorak qui, même si on les adore, paraissent aujourd’hui bien kitsch en comparaison !

L’anime de 1984 n’a lui non plus pas pris une ride. Son look épuré et multicolore demeure aujourd’hui une référence incontournable du film d’animation pastoral comme de la saga épique. Le rythme, à la fois posé et acéré, est ponctué de fulgurances dignes des plus grandes fresques guerrières et à l’époque de sa sortie, le film ne connaissait aucun rival dans le domaine de l’héroic fantasy au cinéma. Il faudra attendre Princesse Mononoké du même réalisateur en 1997 et le Seigneur Des Anneaux de Peter Jackson pour découvrir des scènes plus spectaculaires encore !

Mais le métrage est surtout, avec la série Conan le fils du futur, un manifeste de toutes les thématiques que l’auteur va développer dans la suite de son œuvre : La philosophie panthéiste, la pureté vierge de l’enfance, le passage de l’enfance à l’âge adulte avec tout le parcours initiatique que cela implique, le tout saupoudré d’une passion vivifiante pour les engins volants, sans oublier que chacun de ses films est habité de nombreux détails autobiographiques… Mais le thème récurrent le plus important, le plus grave et le plus vibrant de l’œuvre du maître, tourne autour de la nature ambivalente de l’homme moderne, systématiquement déchiré dans sa dépendance entre la Nature (au sens écologique du terme) et l’industrie. Quelle que soit sa création, quel qu’en soit le sujet ou même son ambition conceptuelle, Hayao Miyasaki approfondit sans cesse sa réflexion sur la frontière ténue qui existe entre l’apprivoisement et la domination de la Nature par l’homme. Et le constat demeure immuable : Tant qu’il s’agit d’une forme d’apprivoisement respectueuse, basée sur l’harmonie, les choses peuvent fonctionner. Mais dès lors que l’homme tente de plier les forces de la Nature à sa volonté sans se soucier de ce qui peut advenir, c’est le début de la fin.

Nausicaä, le manga : Prenez garde à la revanche de la Nature sur l’industrie !

 Prenez garde à la revanche de la Nature sur l’industrie !
©Viz Media
©Tokuma Shoten

Dans Le Château Dans le Ciel comme dans Porco Rosso, Mon Voisin Totoro ou même dans Kiki la petite Sorcière, il n’est pas de film du maître qui soit majeur ou bien mineur (mais une œuvre de Miyasaki peut-elle être mineure ?!!!) dans lequel le sujet des vicissitudes liées à la dégradation de la nature par les avancées technologiques (thématique fortement ancrée dans un Japon postmoderne ayant vécu les traumatismes de la bombe nucléaire) n’est sous-jacent, tel un indéfectible fil rouge… On se souvient que, dans Mon Voisin Totoro, les deux petites héroïnes (des petites filles, toujours !) n’apprivoisaient la nature que pour de bonnes raisons (s’éveiller à la nouveauté, venir en aide à l’autre, faire pousser les graines de leur jardin, etc.). Totoro et les autres esprits de la forêt se manifestaient ainsi naturellement à elles de manière bienveillante (alors que les autres ne pouvaient les apercevoir !), en les aidant volontiers dans leurs entreprises désintéressées…

Dans Porco Rosso, le héros (qui a une tête de cochon et une petite fille en guise de compagnon, on n’est pas chez les héros classiques ici, faut pas déconner…) est victime d’une malédiction. Malédiction probablement causée par son refus de participer à la fondation d’une nation s’élevant sur la voie du fascisme et de la doctrine rigide du monde moderne. Il en a donc été exclu telle la première « tête de cochon » venue !

S’il est devenu chasseur de prime, s’il a fui les honneurs que son pays lui réservait entant que héros de guerre, c’est qu’il a vu ses amis mourir un par un durant le conflit mondial et qu’il a pris conscience des horreurs et de l’absurdité de la guerre. S’il a décidé de demeurer libre, en marge de la société (il vit sur une île déserte) tout en continuant à construire son existence autour de son engin volant, c’est qu’il veut prouver que les progrès de la technologie doivent servir la liberté, et non la construction d’un monde fou et la mort de ses semblables.
Bref, toujours moult déclinaisons sur le thème du conflit entre la science et la conscience…


La passion des engins volants

Dans Kiki la Petite Sorcière, La ville où atterrit l’héroïne (une… petite fille !) est une cité balnéaire totalement fantasmée (si elle existait, j’y habiterais déjà !) où tout est beau, où les gens sont bons et bienveillants, où chacun à sa place, et où tout le monde semble avoir renoncé à la technologie (on vole en dirigeable et en bicyclette à hélice !). Ainsi, Kiki, qui peut voler de façon « naturelle », trouve sa place dans une société parfaitement stable, car ne cherchant pas à développer de technologie ni à contrecarrer les événements naturels. Face à la menace que représente la nature, incarnée par le vent et les oiseaux, les gens choisissent l’apprivoisement plutôt que la domination. A la fin, Kiki ne parvient plus à communiquer avec son chat par magie. Pourtant, l’animal décide de rester avec elle, tout simplement apprivoisé… mais de son propre choix ! Et il en est ainsi de toute l’œuvre de Miyasaki : La nature ne peut être domptée. Elle ne peut être soumise et surtout pas malmenée. Il faut l’apprivoiser et, par extension, choisir l’harmonie. L’humanité ne peut survivre autrement à long terme. Telle est la philosophie du maître. Et tel est son thème majeur. Naïf ? Désuet ? Primaire ? Heu… Non : Imparable ! Regardez donc Ponyo Sur la Falaise, l’une de ses dernières œuvres, et vous ne verrez plus la nature sous le même angle…

Il faut préciser que par rapport à son adaptation sur grand écran, la version papier en sept tomes apparaît comme une « version longue » (voire très longue !) des aventures de Nausicaä.
Chaque numéro (chaque tome VF étant la réplique fidèle de l’édition japonaise) est un concept à lui tout seul, avec jaquette, posters couleurs et certaines planches imprimées en sépia, procédé qui confère à l’œuvre un caractère hors du temps bien en phase avec sa dimension mythologique (le nom de Nausicaä n’étant bien évidemment pas choisi au hasard)…Bref, même si les avalanches de superlatifs ne sont pas toujours les bienvenues, aujourd’hui je me permets une entrave à ma volonté d’en user le moins possible. Pour moi, c’est une certitude pure et simple, une évidence, une vérité universelle qui fait que de toute façon j’ai raison et que tous ceux qui ne pensent pas comme moi ont tort ! Hayao Miyasaki est un génie, et accessoirement l’un des plus grands auteurs des 20° et 21° siècles…

Nausicaä, le manga, des images sépia pour une œuvre hors du temps…

Des images sépia pour une œuvre hors du temps…
©Tokuma Shoten

62 comments

  • Jyrille  

    J’ai enfin vu le DA (merci Netflix) que je n’avais jamais vu. Et j’ai adoré. Contrairement au CHATEAU DANS LE CIEL, on n’a pas du tout l’impression d’être devant un anime de 1984. Il est incroyablement beau malgré les présences monstrueurs des Omus et autres insectes.

    Je suis totalement d’accord avec toi sur l’originalité du récit y compris dans ses archétypes, mais je n’ai pas vu la dimension panthéiste. Ecologique évidemment, animiste aussi, mais pas panthéiste…

    Les scènes de vol sont de toute beauté, j’y suis bien plus sensible que dans ses autres oeuvres pour le moment (mais je ne les ai pas toutes vues), sachant que (je l’ai appris cette semaine) Ghibli était le nom d’un avion de reconnaissance pendant la seconde guerre mondiale.

    Maël, aussi enthousiaste que moi après la vision de l’anime, a très envie de s’offrir les tomes du manga que je n’ai pas lu. Je crois qu’on les met sur la liste des to buy dès qu’on peut sortir du confinement. Même si ma librairie de préférence a déjà mis en place un système de drive : je ne vais pas plus loin qu’il est nécessaire…

    D’où vient le nom Nausicaä ?

    • Eddy Vanleffe  

      référence mythologique.
      pour moi la filmo de Miyazaki c’est comme les classique Disney, peu import l’année de production, le talent du bonhomme est incoyable…
      Je suis plus sensible à ceux avant l’informatique, les couleurs étaient plus pétantes.
      Nausicaa/Kiki/POrco rosso/Totoro sont des « must see » absolus.
      il faut que je vois Le vent se lève que je ne connais pas…

      • Jyrille  

        De ses longs métrages, je n’ai pas vu LE VENT SE LEVE et LE CHATEAU AMBULANT (et ses premiers travaux comme Conan le fils du futur). Et je dois revoir Porco Rosso qui ne m’avait pas trop inspiré. Et Kiki que j’ai adoré. Comme je le disais, Totoro est un des rares DVD que j’ai dû racheter (avec Monstres et Cie et Charlie et la chocolaterie) pour cause d’usage intesif. Je ne savais pas qu’il était réalisateur sur EDGAR DETECTIVE CAMBRIOLEUR !

        http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne-18793/filmographie/

        • Eddy Vanleffe  

          Si le château de cagliostro est une pure merveille!
          tout son talent est déjà là, c’est un film d’action qui a carrément mis sur le cul Spielberg en son temps, totalement bluffé par le sens du rythme, il s’en serai inspiré pour ses Indiana Jones..

          • Jyrille  

            Ok… je vais tâcher de me mater les Sherlock Holmes, je n’ai revu que le premier épisode (ça fait bizarre, trente-six ans plus tard ! La chanson du générique est super).

        • Tornado  

          – CONAN est un chef d’oeuvre. 26 épisodes pour la postérité. Tout Miyazaki est dedans et ça n’a pas pris une ride ! Comparé aux séries de la même époque (Goldorak, entre autres), quasiment rien n’est kitsch !
          J’envisage de la revoir avec mes enfants.
          – PORCO ROSSO est peut-être mon préféré. Il y a une atmosphère (teintée de références cinés à l’époque consacrée) qui me transporte à tous les coups. Il y a je trouve cette même atmosphère de l’Italie fantasmée que dans KIKI, mais transposée à une époque précise de l’Histoire récente
          – EDGAR : Il n’a réalisé que deux épisodes de la série (pas vus, ils n’ont pas été traduits en VF). Et un long métrage (LE CHATEAU DE CAGLIOSTRO) qui est excellent (dommage que les voix VF ne soient pas les habituelles par contre). Pour le reste il n’a fait qu’un travail sur l’animation.
          – Le VENT SE LEVE est naturaliste et en partie autobiographique. C’est pas folichon. C’est encore un boulot de fou, mais à voir ça ne m’avait pas plus transporté qu’un autre film naturaliste…

          • Eddy Vanleffe  

            oui mais pour l’aviation entre deux guerres…

          • Jyrille  

            Merci. Je pense me mater Souvenirs goutte à goutte de Takahata. Mon Miyazaki favori pour le moment, ce doit être Chihiro, que j’ai vu plusieurs fois (mais que j’ai envie de revoir rien que d’en parler).

  • Jyrille  

    Aujourd’hui, pour la première fois depuis deux mois, j’ai pu aller dans une librairie ! Deuxième magasin après mon fournisseur de bières locales 😀

    Ne trouvant pas le dernier One Piece pour Maël, je lui ai pris le premier tome de Nausicaä. Ca me forcera à essayer aussi.

    J’ai également pris le tome 2 de FARMHAND (Rob Guillory) et le premier tome chez Toussaint L’ouverture de MIND MGMT !

    • Bruce lit  

      On se demandait avec Patrick, quelles précautions prendre en librairie. Feuilleter les bouquins, les désinfecter à la maison ?

      • Jyrille  

        J’avoue n’avoir rien désinfecté. Sur les trois tomes, j’en ai pris deux en présentoir, en haut de la pile, j’ai donc pris des risques (mais je n’ai pas vu beaucoup de monde. En semaine, il faut dire…). En tout cas les libraires font gaffe (à la brasserie aussi), ils nettoient le terminal de paiement par carte avec un désinfectant, ont des gants, des masques… Je suis arrivé en librairie avec mon masque.

  • Bruno :)  

    J’ai découvert Miyazaki avec Nausicaa (l’Animé) et ça m’avait bien plu sans pour autant me bouleverser : je devais être déjà bien mature (la quarantaine…?!) ; et, fatalement, mon exposition à tout un tas d’autres bijoux Nippons dans le genre avait probablement un peu désensibilisé mes neurones… C’est, à mes yeux, une belle fable d’Anticipation dont les enjeux écologiques suffisent à stimuler l’intérêt, au delà des images magnifiques. D’ailleurs, la bande-son aussi est magnifique !

    Depuis, je crois n’avoir vraiment fonctionné qu’à Ponyo -sinon la fin, à rallonge : tout le reste m’emballe à chaque fois ! C’est un véritable miracle de dinguerie et d’humour dont les partis-pris esthétiques, à la fois élaborés mais pourtant simples à apprécier, arrivent à faire coexister sans aucun inconfort visuel ou scénaristique l’intimité humaine la plus émouvante avec la mythologie de celluloïd la plus outrée : un tour de force ! Et Porco Rosso qui, par je ne sais quel miracle de mise en scène, parvient vraiment à me transporter grave ailleurs, alors que l’argument et les péripéties -et le personnage !- me laissent froid. Mais je pense que ça a à voir avec le « look » des plages et le bleu de cette mer amicale : il y a un truc qui parle direct à une partie souterraine de mon âme, là dedans.
    Ah ! Et l’épisode de Edgard est, en effet, très réussi : hilarant et dynamique, il se paie le luxe d’être en plus un joyau esthétique : très très beau. Totoro est un Ovni dont le classicisme du sujet est très joliment travesti par la sensibilité si particulière du réalisateur, pour le coup moins « crue » qu’à d’autres moments : production plus facile que d’autres à apprivoiser. Mononoke et Chihiro par exemple ; qui fonctionnent très bien, aussi. Et toutes deux fourmillent de trouvailles graphiques oniriques propres à nourrir un millier de songes. Mais certains de ces choix, justement, m’empêchent de rester « dans l’ambiance » ; comme ces viscères grouillantes dans le premier ou le fantôme régurgitant dans le second -la transformation des parents de Chihiro en porcs géants relevant, en ce qui me concerne, d’un tout autre genre de lecture et l’une des scènes les plus violentes/impressionnantes qu’il m’ait été donnée de voir dans un Dessin-Animé.
    Je me suis (toutes proportions gardées…) ennuyé devant Kiki, Le Château Dans Le Ciel, Le Château Ambulant… Malgré la technicité parfaite et les choix graphiques très personnels, j’avoue rester un peu à distance de ces personnages, assez semblables les uns au autres d’un Animé au suivant ; et qui semblent tous sous l’emprise de quelque substance un poil excitante… C’est peut-être juste l’intensité de leurs regards qui me fait cet effet-là ? Il est clair aussi que ces Animés-là visent d’avantage un public plus jeune, et moins aguerri à ces univers humains si réalistiquement détaillés mais issus de « réalités alternatives ». Le Vent Se Lève ne m’a même pas fait frémir, par contre : œuvre incontestablement personnelle et aussi talentueusement racontée qu’à l’accoutumée, ni son thème, ni son exposition où sa finalité n’ont stimulé mon intérêt. Sans doute trop loin de ma sensibilité (trop Japonais ?!), j’ai trouvé ça vide.

    Sinon, bien entendu, Le Tombeau Des Lucioles est un chef-d’œuvre aussi âpre que lucide sur l’horreur de la condition humaine ; et le plus efficace pamphlet anti-militariste jamais mis en scène en Animé.
    Je n’en revient pas que vous puissiez qualifier l’histoire de « triste ». C’est horrible. C’est monstrueux. C’est déchirant. Et ça se passe en ce moment même.

  • Tornado  

    Quand j’ai montré LE VOYAGE DE CHIHIRO à mes enfants, la transforation des parents de Chihiro en pôrcs les a profondément impressionnés, voire traumatisés.
    KIKI et LA CHATEAU DANS LE CIEL font partie de mes préférés par contre. Mais bon, en ce qui me concerne, c’est difficile de dire « mes préférés » avec une telle filmographie où tout est chef d’oeuvre. PORCO ROSSO, PRINCESSE MONONOKÉ, NAUSICAA, font également partie de mes préférés…
    Cet article est un de mes plus anciens articles. Il serait à réécrire complètement. Vraiment…

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