Le temps lui-même meurt en hurlant

Supreme – Blue rose par Warren Ellis & Tula Lotay

Je mets mes pas dans ceux d'Alan Moore Titre de l'article :Le temps lui-même meurt en hurlant. <i class=""icon-star""></i><i class=""icon-star""></i><i class=""icon-star""></i><i class=""icon-star""></i><i class=""icon-star""></i> <i class=""icon-bullseye""></i>AUTEUR : Présence VO : Image Comics VF : néant Je mets mes pas dans ceux d'Alan Moore.Supbrose_01 Ce tome contient une histoire complète évoquant le personnage Supreme, créé par Rob Liefeld en 1992. Il contient les épisodes 1 à 7 de la minisérie du même nom, initialement publiés en 2014/2015, écrits par Warren Ellis, dessinés, encrés et mis en couleurs par Tula Lotay. Une connaissance superficielle des thèmes centraux des épisodes écrits par Alan Moore permet de mieux apprécier le thème du récit. Les épisodes de Moore ont été réédités dans 2 recueils. Quelque part à une époque indéfinie, Danny (un jeune homme en fauteuil roulant) discute avec une jeune femme appelée Diana Dane. Ils sont sur une terrasse, avec un guéridon à côté d'eux, contemplant un lac devant eux. Ils parlent d'un temps révolu d'un présent âgé de quelques mois et de l'individu avec une tête toute lisse sans visage ni cheveux qui se tient au bord du lac. Diana Dane va s'entretenir avec lui ; il dit s'appeler Enigma. Diana Dane se réveille (elle se souvient de son rêve) et se rend à un entretien d'embauche dans une entreprise appelée National Praxinoscope Company (NPC). Elle y est reçue par Darius Dax, le propriétaire et l'homme le plus important le moins connu. Il l'embauche comme enquêtrice pour découvrir la nature de ce qui s'est écrasé sur la petite ville de Littlehaven, et les raisons d'Ethan Crane qui était sur place. Étant au chômage, Diana Dane accepte, tout en espérant pouvoir continuer à suivre son feuilleton Professor Night (Taylor Kendal). C'est quoi, ces traits bleus qui débordent ?Supbrose_02 Warren Ellis est fidèle à lui-même et le lecteur n'a aucune idée de ce qui est en train de sa passer dans l'histoire. Il absorbe les informations, il essaye de comprendre qui sont les personnages. Il se demande bien quel est le lien avec les incarnations précédentes de Supreme. Il suit les déplacements de Diana Dane en se demandant si telle ou telle séquence est à prendre au premier degré, s'il s'agit d'un rêve, d'une dimension parallèle, ou d'une métaphore conceptuelle à prendre au second degré. Il éprouve la même impression de déstabilisation en regardant les particularités des dessins. Tula Lotay dessine des formes réalistes, mais assez simplifiées, s'attachant pour certains éléments plus à l'impression qu'au détail de la forme (par exemple l'impression de la forêt, plus que détailler chaque arbre). Il s'agace dès la première page du côté artistique retenu. Par exemple, cette jeune dessinatrice souligne quelques traits encrés par un trait de crayon de couleur supplémentaire, légèrement décalé, ce qui donne un fini trouble, peu agréable pour le lecteur. En plus, elle laisse courir des arabesques au crayon bleu par-dessus la page terminée. Donc en feuilletant rapidement ce tome, le lecteur éprouve l'impression d'une narration un peu mode féminine, avec des images parfois déconnectées les unes des autres, et une volonté artificielle de faire artistique. C'est un peu flou.Supbrose_03 Le lecteur habitué aux histoires de Warren Ellis fait confiance à son scénariste favori et se plonge dans la lecture en essayant de trouver des points de repère. Au départ, le plus simple est d'identifier les éléments ayant directement trait à Supreme. Ce personnage a été conçu au départ pour servir de Superman dans l'univers partagé initié par Rob Liefeld, principe repris par Alan Moore par la suite. C'est la raison pour laquelle plusieurs personnages portent un nom avec la même initiale pour le prénom et le nom : Diana Dane, Darius Dax, Zaylarn Zarn, Judith Jordan, Storybook Smith (à l'instar de Lois Lane, Lori Lemaris, ou encore Lex Luthor, Lana Lang, Lucy Lane et tant d'autres). S'il dispose d'une excellente mémoire, il comprend tout de suite que le Danny en chaise roulante n'est autre que Danny Fuller (ah oui, bien sûr). S'il ne sait pas de qui il s'agit, ce n'est pas un obstacle pour comprendre la suite. Évidemment, il est très content quand Darius Dax montre fièrement le frontispice sur lequel le mot Supreme est gravé. Mais en fait, Supreme n'apparaît pas et il ne s'agit pas d'une histoire de superhéros. Le lecteur retrouve aussi le goût de Warren Ellis pour la technologie et ses diverses applications. Diana Dane utilise instagram, par défaut de pouvoir réellement écrire pour un média de presse. Un des personnages évoque les branes issues de la théorie des cordes (branche de la physique théorique visant à unifier les quatre interactions élémentaires connues, aussi appelée théorie du tout). Il récupère le symbole de la rose bleue qui évoque le mystère, ou l'atteinte de l'impossible, pour se l'approprier et imager ce qui motive Darius Dax. De manière plus prosaïque, il utilise le concept du versioning (versions successives d'un logiciel ou d'un document) pour rendre concret le concept qui sous-tend son récit. Le scénariste ne prend pas son lecteur par surprise puisque dès la première page, Danny indique qu'ils se tiennent dans les champs du contrecoup et que d'une certaine manière cet univers n'a que quelques mois d'existence. Meilleur instagram du mondeSupbrose_04 Dès la première page, le lecteur est invité à être un acteur, à tisser des liens logiques entre ce que disent les personnages et ce qui est sous-entendu, entre ce que montrent les images. Warren Ellis semble s'être pleinement investi dans ce récit, car il ne se contente pas de saupoudrer l'intrigue de remarques cryptiques qui finissent par former une image complète une fois que le lecteur les a assemblées. Il joue aussi avec les formes. C'est ainsi qu'il intègre un feuilleton télévisuel dans l'histoire, celui mettant en scène le Professeur Night (Taylor Kendal), établissant une profondeur de champ et une résonnance entre l'un des thèmes principaux du récit (le caractère insaisissable et fluctuant de la réalité). Mais il ne s'agit pas de créer une mise en abyme, il s'agit plutôt de mettre à nu l'essence d'une narration, comment une image inattendue (avec ou sans action) accompagnée d'un bref texte (une phrase de moins d'une dizaine de mots) suffit pour générer l'impression d'une longue histoire palpitante et intrigante. De manière inattendue, ces cases consacrées au Professeur Night génère également une forme de poésie, grâce aux images, mais aussi par la référence à une personne prénommée Primevère (Primrose), créant ainsi un écho avec le concept de rose bleue. Je suis une actrice, mais je tue des personnes réelles.Supbrose_05 À l'évidence pour que de tels moments fonctionnent, il faut que l'artiste propose des visuels avec une forte personnalité. C'est le cas de Tula Lotay qui s'approprie le scénario d'Ellis, le transforme en une expérience visuelle d'une grande richesse, avec une cohérence graphique permettant de faire coexister des éléments totalement disparates dans la narration. L'intrigue réserve une place très spéciale à un personnage appelé Zaylarn Zarn. Lotay lui donne une apparence de star du cinéma américain des années 1950, de femme distante et très séduisante, avec une robe qu'il lui arrive de remonter au-dessus du genou, sans pour autant être vulgaire. Chaque personnage dispose d'une morphologie normale. Il est indéniable que l'artiste sait conférer un chic discret aux dames du récit, qu'il s'agisse d'un chemisier simple élégant (le col légèrement relevé), ou de l'uniforme de Linda qui sert de chauffeur à Diana Dane. La robe de l'ennemi du docteur Night arbore un motif saisissant évoquant un kimono de luxe, avec une coupe de robe des années 1930. Le fait que Tula Lotay réalise elle-même sa mise en couleurs assure une grande cohérence et une parfaite complémentarité aux éléments visuels. Elle peut glisser un logo de Kyuss, en toute discrétion le temps de 2 cases, parfaitement intégré au reste d dessin. Zaylam ZamSupbrose_06 Les personnages masculins sont dessinés avec la même approche réaliste, sans être photographique, normaux, sans être fades. Elle réussit à ne pas céder à la tentation facile de transformer l'écrivain Storybook Smith, en un archétype. Il n'est ni Ernest Hemingway, ni Warren Ellis, même si le lecteur peut y voir une vague réminiscence de l'un ou l'autre. En se situant à la frontière entre une représentation générique et un clin d'œil, l'artiste fait résonner les propos du personnage (le privilège de l'écrivain mâle et blanc) comme une phrase s'appliquant à tous les écrivains âgés, mais aussi comme la lucidité d'une personne ayant conscience de son ethnocentrisme. Au bout de quelques épisodes, l'effet de trouble dû aux traits repassés en décalé vient à disparaître, mais il faut quelques pages pour que le lecteur s'en aperçoive. D'une part il a compris en quoi cet effet artistique permet de manifester visuellement l'un des thèmes principaux du récit, à savoir la difficulté de percevoir la réalité, et donc il apprécie cet effet comme une composante narrative primordiale (et non pas un truc rajouté pour faire genre artistique). D'autre part, il faut qu'il refasse l'effort inverse pour interpréter cette disparition comme étant le signifiant d'une réalité mieux perçue par le personnage. Le savoir-faire artistique de Tula Lotay ne se limite pas à cet effet très visible (les arabesques bleues tracées par-dessus les dessins). Sous des dehors parfois esquissés, chaque environnement dispose de caractéristiques, qu'il s'agisse d'une chambre en désordre, d'un bureau parfaitement ordonné, d'une table à un café, d'une route transdimensionnelle, ou d'une église à la charpente éventrée. Avez-vous déjà entendu le terme de Rose Bleue ?Supbrose_07 L'artiste parvient à rendre visuel tous les éléments les plus sophistiqués de la narration de Warren Ellis, qui est vraiment très exigeante dans ce récit. Il y un leitmotiv qui apparaît sur plusieurs matières, plusieurs accessoires, mais parfois également des êtres humains. Il s'agit d'un triangle rouge pointe en bas, que Lotay sait placer de manière manifeste ou de manière discrète en fonction de la séquence. Il y a des séquences à la scénographie très fermée. Par exemple, le scénario prévoit plusieurs scènes sur la base d'un individu attablé parlant de face à son interlocuteur. Ce dernier n'apparaît pas sur la page, et l'individu semble s'adresser directement au lecteur. L'artiste sait rendre ces visages vivants, ainsi que trouver des postures différentes pour conférer un peu plus de personnalité à la personne qui parle. Le scénario comprend également plusieurs éléments de nature fantastique. Tula Lotay adapte ses techniques de dessin en fonction de ce qu'elle doit représenter. Elle peut donner l'impression de passer à la peinture directe (ou la technologie infographique équivalente) pour représenter l'environnement astral. Elle peut jouer avec une couleur bleutée pour montrer qu'un personnage dans une pièce est une sorte de spectre, sans que le scénariste n'ait besoin de l'expliciter par des mots. Elle doit montrer la perception d'un individu utilisant une technologie lui permettant de courir à une vitesse surhumaine. Elle trouve une solution graphique élégante, respectant le graphisme du reste de la séquence, sans verser dans les stéréotypes des comics de superhéros. À toute vitesseSupbrose_08 Tula Lotay n'épate pas le lecteur à chaque page par des compétences techniques pyrotechniques. Son objectif principal reste d'assurer la narration fluide d'un récit très ambitieux, avec une forte dimension onirique. Le lecteur ne constate le talent déployé que s'il y prête attention. S'il n'y prête pas attention, il est transporté par les visuels. Il se sent intelligent en reconnaissant que l'ambulance accidentée dans les bois à la fin du chapitre 3 est la même que celle qui apparaissait dans l'épisode du Professeur Night au chapitre 1, mais en fait ce sont bien les dessins qui lui ont permis de faire cette connexion. Il marche aux côtés Chelsea Henry dans un champ d'os, pour une vision onirique et macabre hallucinante. S'étant sûrement rendu compte du talent de Tula Lotay, Warren Ellis ne lui a rien épargné. Comme à son habitude, il a développé plusieurs séquences muettes (sans dialogue ni texte), reposant de fait uniquement sur la narration visuelle. Qui plus est, 2 de ces séquences sont de nature onirique. Généralement, le dessinateur se contente de dessiner des jolis dessins sur une trame plus ou moins narrative, soit comme une suite d'hallucinations hermétiques, soit comme une forme de prémonition plutôt explicite pour que être sûr et certain que le lecteur ne se trompe pas sur le sens. Le tandem Ellis & Lotay réussit l'exploit de combiner ces deux approches, avec des images appartenant au domaine du rêve, avec une logique sous-jacente ténue mais bien présente. Là, tu me dessines des antilopes, avec un triangle rouge;Supbrose_09 Ainsi portée par des dessins remarquables de personnalité et de sophistication, l'intrigue d'Ellis prend son envol. Le lecteur éprouve l'impression d'être aux côtés de Diana Dane dans cette réalité fluctuante, en lien avec Ethan Crane, un individu aux capacités extraordinaires, à la dimension quasi mythologique. Les auteurs accomplissent l'exploit de raconter une histoire à la trame simple (retrouver un individu disparu qui détient la clé de compréhension d'une situation inexplicable) jusqu'à la confrontation finale, évoquer la difficulté de comprendre la réalité, s'inscrire dans la démarche d'Alan Moore sur la série Supreme (c’est-à-dire évoquer les conventions et les ficelles des récits de superhéros, une forme de déconstruction positive qui arrive à conserver toute la magie de l'imaginaire). Un tour de force à la narration séduisante sans être racoleuse, évocatrice sans être hermétique, à propos des superhéros mais sans superhéros. C'est quoi, cette réalité ?Supbrose_10

Je mets mes pas dans ceux d’Alan Moore ©Image Comics

AUTEUR : PRESENCE

VO : Image Comics

VF : /

Ce tome contient une histoire complète évoquant le personnage Supreme, créé par Rob Liefeld en 1992. Il contient les épisodes 1 à 7 de la minisérie du même nom, initialement publiés en 2014/2015, écrits par Warren Ellis, dessinés, encrés et mis en couleurs par Tula Lotay. Une connaissance superficielle des thèmes centraux des épisodes écrits par Alan Moore permet de mieux apprécier le thème du récit. Les épisodes de Moore ont été réédités dans 2 recueils.

Quelque part à une époque indéfinie, Danny (un jeune homme en fauteuil roulant) discute avec une jeune femme appelée Diana Dane. Ils sont sur une terrasse, avec un guéridon à côté d’eux, contemplant un lac devant eux. Ils parlent d’un temps révolu d’un présent âgé de quelques mois et de l’individu avec une tête toute lisse sans visage ni cheveux qui se tient au bord du lac. Diana Dane va s’entretenir avec lui ; il dit s’appeler Enigma.

Diana Dane se réveille (elle se souvient de son rêve) et se rend à un entretien d’embauche dans une entreprise appelée National Praxinoscope Company (NPC). Elle y est reçue par Darius Dax, le propriétaire et l’homme le plus important le moins connu. Il l’embauche comme enquêtrice pour découvrir la nature de ce qui s’est écrasé sur la petite ville de Littlehaven, et les raisons d’Ethan Crane qui était sur place. Étant au chômage, Diana Dane accepte, tout en espérant pouvoir continuer à suivre son feuilleton Professor Night (Taylor Kendal).

C'est quoi, ces traits bleus qui débordent ?

C’est quoi, ces traits bleus qui débordent ?©Image Comics

Warren Ellis est fidèle à lui-même et le lecteur n’a aucune idée de ce qui est en train de sa passer dans l’histoire. Il absorbe les informations, il essaye de comprendre qui sont les personnages. Il se demande bien quel est le lien avec les incarnations précédentes de Supreme. Il suit les déplacements de Diana Dane en se demandant si telle ou telle séquence est à prendre au premier degré, s’il s’agit d’un rêve, d’une dimension parallèle, ou d’une métaphore conceptuelle à prendre au second degré. Il éprouve la même impression de déstabilisation en regardant les particularités des dessins.

Tula Lotay dessine des formes réalistes, mais assez simplifiées, s’attachant pour certains éléments plus à l’impression qu’au détail de la forme (par exemple l’impression de la forêt, plus que détailler chaque arbre). Le lecteur s’agace dès la première page du côté artistique retenu. Par exemple, cette jeune dessinatrice souligne quelques traits encrés par un trait de crayon de couleur supplémentaire, légèrement décalé, ce qui donne un fini trouble, peu agréable pour le lecteur. En plus, elle laisse courir des arabesques au crayon bleu par-dessus la page terminée. Donc en feuilletant rapidement ce tome, le lecteur éprouve l’impression d’une narration un peu mode féminine, avec des images parfois déconnectées les unes des autres, et une volonté artificielle de faire artistique.

C'est un peu flou

C’est un peu flou©Image Comics

Le lecteur habitué aux histoires de Warren Ellis fait confiance à son scénariste favori et se plonge dans la lecture en essayant de trouver des points de repère. Au départ, le plus simple est d’identifier les éléments ayant directement trait à Supreme. Ce personnage a été conçu au départ pour servir de Superman dans l’univers partagé initié par Rob Liefeld, principe repris par Alan Moore par la suite. C’est la raison pour laquelle plusieurs personnages portent un nom avec la même initiale pour le prénom et le nom : Diana Dane, Darius Dax, Zaylarn Zarn, Judith Jordan, Storybook Smith (à l’instar de Lois Lane, Lori Lemaris, ou encore Lex Luthor, Lana Lang, Lucy Lane et tant d’autres). S’il dispose d’une excellente mémoire, il comprend tout de suite que le Danny en chaise roulante n’est autre que Danny Fuller (ah oui, bien sûr). S’il ne sait pas de qui il s’agit, ce n’est pas un obstacle pour comprendre la suite. Évidemment, il est très content quand Darius Dax montre fièrement le frontispice sur lequel le mot Supreme est gravé. Mais en fait, Supreme n’apparaît pas et il ne s’agit pas d’une histoire de superhéros.

Le lecteur retrouve aussi le goût de Warren Ellis pour la technologie et ses diverses applications. Diana Dane utilise instagram, par défaut de pouvoir réellement écrire pour un média de presse. Un des personnages évoque les branes issues de la théorie des cordes (branche de la physique théorique visant à unifier les quatre interactions élémentaires connues, aussi appelée théorie du tout). Il récupère le symbole de la rose bleue qui évoque le mystère, ou l’atteinte de l’impossible, pour se l’approprier et imager ce qui motive Darius Dax. De manière plus prosaïque, il utilise le concept du versioning (versions successives d’un logiciel ou d’un document) pour rendre concret le concept qui sous-tend son récit. Le scénariste ne prend pas son lecteur par surprise puisque dès la première page, Danny indique qu’ils se tiennent dans les champs du contrecoup et que d’une certaine manière cet univers n’a que quelques mois d’existence.

Meilleur instagram du monde

Meilleur instagram du monde©Image Comics

Dès la première page, le lecteur est invité à être un acteur, à tisser des liens logiques entre ce que disent les personnages et ce qui est sous-entendu, entre ce que montrent les images. Warren Ellis semble s’être pleinement investi dans ce récit, car il ne se contente pas de saupoudrer l’intrigue de remarques cryptiques qui finissent par former une image complète une fois que le lecteur les a assemblées. Il joue aussi avec les formes. C’est ainsi qu’il intègre un feuilleton télévisuel dans l’histoire, celui mettant en scène le Professeur Night (Taylor Kendal), établissant une profondeur de champ et une résonnante entre l’un des thèmes principaux du récit (le caractère insaisissable et fluctuant de la réalité).

Mais il ne s’agit pas de créer une mise en abyme, il s’agit plutôt de mettre à nu l’essence d’une narration, comment une image inattendue (avec ou sans action) accompagnée d’un bref texte (une phrase de moins d’une dizaine de mots) suffit pour générer l’impression d’une longue histoire palpitante et intrigante. De manière inattendue, ces cases consacrées au Professeur Night génère également une forme de poésie, grâce aux images, mais aussi par la référence à une personne prénommée Primevère (Primrose), créant ainsi un écho avec le concept de rose bleue.

Je suis une actrice, mais je tue des personnes réelles

Je suis une actrice, mais je tue des personnes réelles©Image Comics

À l’évidence pour que de tels moments fonctionnent, il faut que l’artiste propose des visuels avec une forte personnalité. C’est le cas de Tula Lotay qui s’approprie le scénario d’Ellis, le transforme en une expérience visuelle d’une grande richesse, avec une cohérence graphique permettant de faire coexister des éléments totalement disparates dans la narration. L’intrigue réserve une place très spéciale à un personnage appelé Zaylarn Zarn. Lotay lui donne une apparence de star du cinéma américain des années 1950, de femme distante et très séduisante, avec une robe qu’il lui arrive de remonter au-dessus du genou, sans pour autant être vulgaire.

Chaque personnage dispose d’une morphologie normale. Il est indéniable que l’artiste sait conférer un chic discret aux dames du récit, qu’il s’agisse d’un chemisier simple élégant (le col légèrement relevé), ou de l’uniforme de Linda qui sert de chauffeur à Diana Dane. La robe de l’ennemi du docteur Night arbore un motif saisissant évoquant un kimono de luxe, avec une coupe de robe des années 1930. Le fait que Tula Lotay réalise elle-même sa mise en couleurs assure une grande cohérence et une parfaite complémentarité aux éléments visuels. Elle peut glisser un logo de Kyuss, en toute discrétion le temps de 2 cases, parfaitement intégré au reste d dessin.

Zaylam Zam Supbrose

Zaylam Zam©Image Comics

Les personnages masculins sont dessinés avec la même approche réaliste, sans être photographique, normaux, sans être fades. Elle réussit à ne pas céder à la tentation facile de transformer l’écrivain Storybook Smith, en un archétype. Il n’est ni Ernest Hemingway, ni Warren Ellis, même si le lecteur peut y voir une vague réminiscence de l’un ou l’autre. En se situant à la frontière entre une représentation générique et un clin d’œil, l’artiste fait résonner les propos du personnage (le privilège de l’écrivain mâle et blanc) comme une phrase s’appliquant à tous les écrivains âgés, mais aussi comme la lucidité d’une personne ayant conscience de son ethnocentrisme.

Au bout de quelques épisodes, l’effet de trouble dû aux traits repassés en décalé vient à disparaître, mais il faut quelques pages pour que le lecteur s’en aperçoive. D’une part il a compris en quoi cet effet artistique permet de manifester visuellement l’un des thèmes principaux du récit, à savoir la difficulté de percevoir la réalité, et donc il apprécie cet effet comme une composante narrative primordiale (et non pas un truc rajouté pour faire genre artistique). D’autre part, il faut qu’il refasse l’effort inverse pour interpréter cette disparition comme étant le signifiant d’une réalité mieux perçue par le personnage. Le savoir-faire artistique de Tula Lotay ne se limite pas à cet effet très visible (les arabesques bleues tracées par-dessus les dessins). Sous des dehors parfois esquissés, chaque environnement dispose de caractéristiques, qu’il s’agisse d’une chambre en désordre, d’un bureau parfaitement ordonné, d’une table à un café, d’une route transdimensionnelle, ou d’une église à la charpente éventrée.

Avez-vous déjà entendu le terme de Rose Bleue ?

Avez-vous déjà entendu le terme de Rose Bleue ?©Image Comics

L’artiste parvient à rendre visuel tous les éléments les plus sophistiqués de la narration de Warren Ellis, qui est vraiment très exigeante dans ce récit. Il y un leitmotiv qui apparaît sur plusieurs matières, plusieurs accessoires, mais parfois également des êtres humains. Il s’agit d’un triangle rouge pointe en bas, que Lotay sait placer de manière manifeste ou de manière discrète en fonction de la séquence. Il y a des séquences à la scénographie très fermée. Par exemple, le scénario prévoit plusieurs scènes sur la base d’un individu attablé parlant de face à son interlocuteur. Ce dernier n’apparaît pas sur la page, et l’individu semble s’adresser directement au lecteur. L’artiste sait rendre ces visages vivants, ainsi que trouver des postures différentes pour conférer un peu plus de personnalité à la personne qui parle.

Le scénario comprend également plusieurs éléments de nature fantastique. Tula Lotay adapte ses techniques de dessin en fonction de ce qu’elle doit représenter. Elle peut donner l’impression de passer à la peinture directe (ou la technologie infographique équivalente) pour représenter l’environnement astral. Elle peut jouer avec une couleur bleutée pour montrer qu’un personnage dans une pièce est une sorte de spectre, sans que le scénariste n’ait besoin de l’expliciter par des mots. Elle doit montrer la perception d’un individu utilisant une technologie lui permettant de courir à une vitesse surhumaine. Elle trouve une solution graphique élégante, respectant le graphisme du reste de la séquence, sans verser dans les stéréotypes des comics de superhéros.

À toute vitesse

À toute vitesse©Image Comics

Tula Lotay n’épate pas le lecteur à chaque page par des compétences techniques pyrotechniques. Son objectif principal reste d’assurer la narration fluide d’un récit très ambitieux, avec une forte dimension onirique. Le lecteur ne constate le talent déployé que s’il y prête attention. S’il n’y prête pas attention, il est transporté par les visuels. Il se sent intelligent en reconnaissant que l’ambulance accidentée dans les bois à la fin du chapitre 3 est la même que celle qui apparaissait dans l’épisode du Professeur Night au chapitre 1, mais en fait ce sont bien les dessins qui lui ont permis de faire cette connexion. Il marche aux côtés Chelsea Henry dans un champ d’os, pour une vision onirique et macabre hallucinante.

S’étant sûrement rendu compte du talent de Tula Lotay, Warren Ellis ne lui a rien épargné. Comme à son habitude, il a développé plusieurs séquences muettes (sans dialogue ni texte), reposant de fait uniquement sur la narration visuelle. Qui plus est, 2 de ces séquences sont de nature onirique. Généralement, le dessinateur se contente de dessiner des jolis dessins sur une trame plus ou moins narrative, soit comme une suite d’hallucinations hermétiques, soit comme une forme de prémonition plutôt explicite pour que être sûr et certain que le lecteur ne se trompe pas sur le sens. Le tandem Ellis & Lotay réussit l’exploit de combiner ces deux approches, avec des images appartenant au domaine du rêve, avec une logique sous-jacente ténue mais bien présente.

Ainsi portée par des dessins remarquables de personnalité et de sophistication, l’intrigue d’Ellis prend son envol. Le lecteur éprouve l’impression d’être aux côtés de Diana Dane dans cette réalité fluctuante, en lien avec Ethan Crane, un individu aux capacités extraordinaires, à la dimension quasi mythologique. Les auteurs accomplissent l’exploit de raconter une histoire à la trame simple (retrouver un individu disparu qui détient la clé de compréhension d’une situation inexplicable) jusqu’à la confrontation finale, évoquer la difficulté de comprendre la réalité, s’inscrire dans la démarche d’Alan Moore sur la série Supreme (c’est-à-dire évoquer les conventions et les ficelles des récits de superhéros, une forme de déconstruction positive qui arrive à conserver toute la magie de l’imaginaire). Un tour de force à la narration séduisante sans être racoleuse, évocatrice sans être hermétique, à propos des superhéros mais sans superhéros.

C'est quoi, cette réalité ?

C’est quoi, cette réalité ?©Image Comics

50 comments

  • Tornado  

    Tiens, on parlait de la mise en couleur, hier, à propos de « All Star Superman » (que je trouve horrible, froidasse et aseptisée). Je trouve que, ces derniers temps, l’art de la mise en couleur prend des hauteurs assez impressionnantes, avec des artistes qui savent utiliser l’outil infographique comme un véritable outil artistique (voir ce qu’à fait Dave Stewart sur « Batwoman » ou ce que fait Dean White dans le premier tome de la série « Black Science »).
    Je constate aussi que ces artistes coloristes optent de plus en plus pour une colorimétrie conceptuelle, avec trois, parfois seulement deux couleurs dominantes (je pense notamment à « Airboy » ou « L’Homme qui tua Lucky Luke », deux exemples de comics et de BD que j’ai lus récemment). Une bi-chromie ou une tri-chromie savante, élégante, qui ne sonne pas « clinique » mais qui restitue au contraire une véritable atmosphère propre à la bande-dessinée. Et ça met une sacrée claque et un sacré coup de vieux à toute cette « période photoshop » qui s’étend sur les 20/25 dernières années.
    A noter que certains dessinateurs comme Tula Lotay ou Greg Hinckle (Airboy) effectuent eux-même cette mise en couleur conceptuelle.

    • Jyrille  

      Je suis bien d’accord ! Cependant le coloriste Walter avait déjà cette classe dans les albums de Poisson Pilote et Donjon.

    • Lone Sloane  

      Matthieu Bonhomme assure également la colorisation de son Lucky Luke, et sa couv’ est á tomber avec ce titre hommage à John Ford.

      • Tornado  

        C’est vrai. Mais le récit en lui-même ne m’a pas emballé. Une volonté de faire naturaliste qui donne lieu à quelque chose de paradoxalement lisse, comme un exercice de style qui manque au final de sel et de caractère.

  • Présence  

    Il s’agit effectivement d’un récit conceptuel qui requiert vraisemblablement une bonne culture comics pour pouvoir s’y repérer.

  • Présence  

    Respect pour la ligne éditoriale de cette semaine où l’on voit apparaître, dans l’enchaînement des articles, une politique d’auteur dans les comics choisis, avec une approche conceptuelle exigeante.

  • Tornado  

    Oui, oui, on va bien sûr trouver tout plein d’exceptions. Mais dans l’ensemble il y a une évolution impressionnante de l’art de la couleur dans la BD qui connait un pic dans les productions récentes et contemporaines.

    • Matt  

      C’est bien vrai. Je pense aussi à la série Elektra de Mike del Mundo et Haden Blackman. Une dominance de rouge/vert, des tons pastels plus discrets pour les autres couleurs. Je n’ai pas lu la série mais…c’est beau en tous cas.
      Attention tout de même à ne pas en faire une mode^^
      S’il n’y a plus que ça…ça va devenir redondant.
      Je dirais que le pire c’était dans les années 90 aux débuts de l’outil infographique. C’était notamment très laid dans les comics avec toutes ces couleurs flashy.
      Après il y a certaines colorisations classiques aux palettes de couleurs agréables à l’œil qui ne révolutionnent rien mais qui sont plaisantes.

      • Présence  

        Cette série d’Elektra était magnifique pour chacun des épisodes dessinés par Mike del Mundo. Il a ensuite illustré la minisérie consacrée à Weirdworld (écrite par Jason Aaron) parue pendant Secret Wars 2015, ainsi que les premiers épisodes de la série continue du même nom (avec cette fois-ci des scénarios de Sam Humphries).

    • Lone Sloane  

      Matthieu Bonhomme is the man…mais pour la poilade, je pense que Guillaume Bouzard va tout donner, la planche visible donne soif de lecture

  • Jyrille  

    Ok merci !

    Présence, ton article est effectivement ardu à suivre, mais il est aussi fascinant que Lost Highway… J’ai les éditions VF de Supreme par Alan Moore et j’avais adoré cette série pour sa relecture des comics et de Superman. Je ne savais pas que Liefeld avait créé ce personnage, je comprends moeux pourquoi je n’en ai jamais lu la suite. Tu donnes très envie d’essayer ce Warren Ellis et je pense que tes analyses sont de plus en plus poussées. Respect pour la ligne éditoriale et cet article, qui se rapproche pour moi de celui sur Shaolin Cowboy.

    • Présence  

      Je n’avais aucune idée de quoi m’attendre en ouvrant cet ouvrage, et j’ai été époustouflé par l’ambition du propos, servi par des dessins enfin à la hauteur d’Ellis. Mais ce n’est qu’en rédigeant cet article que j’ai découvert des niveaux de lecture qui m’avaient échappé.

      Pour poursuivre sur la conversation d’hier, il faut accepter de se plier à la fantaisie d’Ellis, ou au moins lui faire confiance. Il faut accepter de regarder les pages pour ce qu’elles sont, faire l’effort de réfléchir à ce qui est montré et à ce qui est dit pour pouvoir capter la direction de l’histoire et son thème principal. Par rapport à la remarque de Bruce sur Grant Morrison, il faut que le lecteur s’adapte à la narration d’Ellis et fasse un effort d’interprétation. Il doit se mettre à l’écoute des auteurs (Ellis + Lotay) et être participatif, acteur de sa lecture.

      • Jyrille  

        Ton article, les scans, les commentaires (sauf que je n’ai pas lu le dernier que tu as posté, très long), le côté cryptique, la suite de Supreme… Je suis convaincu que c’est pour moi, contrairement à Bruce (et c’est cool). Je viens de la commander et devrai la recevoir dans une semaine ou deux.

        De plus, la réédition de Planetary (tome 1) vient de sortir, et je l’ai prise évidemment puisqu’il me manque un TPB Panini. Je suis dans l’Ellis jusqu’au cou.

  • JP Nguyen  

    Bon, j’arrive en retard et avec un paquet de coquilles sous le bras… Bon, la première n’est pas vraiment une coquille mais un enchaînement qui complique un peu la lecture et pourrait (soyons indulgents), en partie expliquer le commentaire péremptoire de patrick (pas le Prisonnier, l’autre, le matinal).
    Il s’agace dès la première page du côté artistique retenu.
    Cette phrase, vers le début de l’article désigne « le lecteur » par « il », mais elle vient après
    Tula Lotay dessine des formes réalistes, et du coup le « il » fait un peu bizarre… Il aurait peut-être fallu remettre « le lecteur », certes au prix d’une répétition…

    Le reste est plus basique : il manque un « u » dans parfaitement intégré au reste d dessin (mais là, ça ne gêne pas la compréhension)
    Et un verbe manquant
    Il y un leitmotiv qui apparaît sur plusieurs matières

    Bon, une fois ces considérations expédiées, je peux me consacrer au fond de l’article proprement dit : c’est une nouvelle fois très bien analysé mais je ne sais quoi en penser. Visuellement, ça semble chouette mais je ne sais pas si je me laisserai embarquer…
    Bon, et le Boss n’a pas encore exprimé son point de vue mais s’il trouve ça accessible, alors moi, je suis Donald Duck… (j’ai préféré cette expression à l’alternative « alors là, je me coupe une couille… », plus dangereuse…)

    Enfin au sujet de une politique d’auteur dans les comics choisis, avec une approche conceptuelle exigeante., le Boss a de l’humour, au milieu de toutes ces oeuvres conceptuelles et exigeantes, il a glissé le DD de Soule…

    • Présence  

      Je viens de m’apercevoir qu’effectivement, le « il » de « il s’agace » est devenu incompréhensible avec la coupure de l’image.

      Il y encore une autre coquille dans la légende « Zaylam Zam Supbrose » qui aurait dû être « Zaylam Zam ».

    • JP Nguyen  

      Oui, oui, Bruce, pour le thème tu es raccord avec ton teaser… C’était juste pour titiller Présence and Co lorsqu’ils considéraient l’aspect uniquement auteurs/conceptuels de la semaine. Mais je vais éviter de parler de ce scénariste honni, « the less said, the better »…

      Et sinon, j’avais vu juste, ce n’est pas avec ce Ellis que tu accrocheras. J’aurais pu être plus ambitieux dans mon pari 😉

      • Matt  

        Moi je n’ai lu que des choses que j’ai aimés de Ellis pour l’instant. Il est temps que je m’attaque à sa série « phare » Transmetropolitan. Bientôt…
        Cela dit je ne tenterais pas celui-là. Je ne cherche pas des trucs qui retournent le cerveau et demande 300 livres annexes pour décortiquer les scènes.

        • Tornado  

          L’œuvre phare de Warren c’st Planetary ! 🙂

        • Matt  

          Ah je savais que je n’aurais pas du utiliser ce terme sans qu’un connaisseur me tombe dessus^^
          Moui bon d’accord. Mais disons que Trans est déjà une longue série qui a son importance. Et le thème m’intéresse.

  • Matt  

    Donc Warren Ellis écrit aussi des choses difficiles d’accès visiblement.
    Ton analyse est encore une fois très intéressante Présence et on sent que tu y as réfléchi. Mais je ne suis pas certain que j’aurais pu comprendre tout ça. Et au delà de ça, je ne sais même pas ce qu’est Supreme. Visiblement ce n’est nécessaire de connaître, mais ça rajoute une couche d’incompréhension je pense.
    Je ne pense pas tenter, c’est assez intimidant ce genre d’œuvre cryptique.

    • Présence  

      Supreme : au départ, c’est juste un mauvais ersatz de Superman, décalqué par Rob Liefeld, juste pour pouvoir peupler son propre univers partagé (jamais pleinement développé, uniquement esquissé à grand traits grossiers lors de la création d’Image Comics). Liefeld était uniquement intéressé par un Superman pour pouvoir composer des images qui en mettent plein la vue, sans aucune réflexion sur la nature du mythe ou ce qui fait sa spécificité (certains diraient même sans scénario).

      Pendant quelques mois, Alan Moore avait délaissé le monde des comics e superhéros. En voyant la réussite d’Image Comics, il a souhaité s’y associer pour leur apporter sa notoriété, pour toucher un lectorat plus jeune que le sien, et parce qu’il était déjà irrémédiablement brouillé avec Marvel et DC. C’est ainsi qu’il a écrit 2 miniséries de Violator pour Todd McFarlane, 2 épisodes de Spawn, la minisérie Spawn: Bloodfeud, 14 épisodes de WildCats, et 22 épisodes de Supreme.

  • Artemus Dada  

    Bonjour à tous, hasard ou coïncidence je viens justement de terminer cette mini-série.

    Et si j’ai bien saisi l’allusion au praxinoscope, le côté « méta » de l’histoire, si Warren Ellis tente pour ainsi dire de se réapproprier le concept de Supremacy inventé par Moore, en lui donnant le lustre du « versioning », les lecteurs qui le connaissent s’attendent à voir surgir ses fixette technologiques, et si le talent de Tula Lotay crève les yeux ; quelqu’un qui a lu SUPREME: BLUE ROSE (au hasard Présence [-_ô]) peut-il m’expliquer ce qui se passe à la fin, et que raconte par rapport à l’histoire principale le feuilleton (dans le style récit dans le récit à la Watchmen, on n’en sort pas) ?

    Pas facile, si ?

    Cela étant dit, merci pour tout ces commentaires (toujours bien écrits si je peux me permettre), et toutes ces propositions de lectures.

    • Présence  

      Je suis ravi de trouver quelqu’un qui partage mon avis sur les pages de Tula Lotay.

      Cela fait déjà 3 mois que j’ai fini ce récit, et mon souvenir en est devenu assez vague. Néanmoins j’ai réussi à retrouver le tome dans une pile. J’ai relu les dernières pages. Quelques idées éparses sur la fin, sans assurance qu’elles n’expliquent grand chose, mais j’essaye quand même.

      J’ai présupposé que Darius Dax souhaitait détruire Ethan Crane, ce qui constitue la dynamique de base des comics de superhéros où le criminel souhaite détruire ou réduire à néant son ennemi. Dans l’avant dernière séquence, Darius Dax semble avoir déterminé que la présence d’Ethan Crane constitue l’assurance de la destruction de l’humanité à plus ou moins long terme, ce qui le conduit à l’assassiner. Les dialogues sous-entendent que l’existence de Supreme sur Terre s’accompagne forcément de chutes de météorite, de caducité des lois physiques et de dégénérescence du temps. En supprimant cette incarnation d’Ethan Crane, Dax déclenche la Révision, c’est-à-dire la survenance d’une nouvelle version de Supreme (la résurrection inéluctable de tous les superhéros, à commencer par Superman), comme si le temps était venu pour le scénariste en place de passer la main au suivant qui donnera une nouvelle interprétation du personnage.

      Dans l’avant dernière page (sur fond blanc), Danny Fuller (dans le fauteuil roulant) confirme que tout change. La révision se produit, une nouvelle version succède à la précédente. Il prononce la phrase And then it all changed, qui est également la phrase d’ouverture du récit, déjà prononcée par Danny Fuller.

      Du coup, je pense qu’il s’agit de Diana Dane dans la dernière page. Elle apprend une information sur la ville de Littlehaven, ce qui va la conduire inexorablement à s’y rendre, recommençant le cycle : rencontre avec Ethan Crane, Darius Dax, confrontation ou affrontement inéluctable, etc.

      Le feuilleton – Ma réponse n’est qu’une conjecture liée à ma sensibilité et à d’autres récits de Warren Ellis sur le même thème, également abordé à plusieurs reprises par Grant Morrison. Le thème : le rapport entre le réel et la fiction. Le thème secondaire : l’essence d’un récit, d’une histoire. Warren Ellis ne raconte pas une histoire à proprement parler. Il met en scène la manière dont un auteur exprime ses idées à partir de matériaux narratifs déjà existants, surtout en ce qui concerne le genre des superhéros. Blue Rose est un hommage à la déconstruction opérée par Alan Moore avec ses épisodes de Supreme. C’est l’étape d’après, la suite logique sous forme d’une réflexion sur l’exercice de déconstruction et de reconstruction (au point que l’apparition du superhéros n’est même plus nécessaire).

      Alan Moore lui-même a récupéré un ersatz de Superman, une pâle copie abâtardie, un mauvais décalque réalisé de manière littérale par Rob Liefeld. Mais il rendait hommage à Superman, dans des épisodes sur la mythologie de Superman, ou plutôt ses différentes versions au fil des décennies et des auteurs. Le récit devient donc une mise en abyme sur les récits de Superman (et plus généralement du concept de surhomme), donc finalement une analyse sur ce thème. Warren Ellis pousse le bouchon encore plus loin (en s’appuyant sur la réflexion menée par Moore) en interrogeant également la notion même d’histoire. Les pages consacrées au professeur Night et à Evenning Primrose proposent des amorces de récits, une situation de départ. Cela me rappelle les épisodes de Global Frequency où les intrigues étaient réduites au strict minimum, épurées, comme il l’avait déjà pratiqué pour RED.

      J’ai pris ça pour autant de promesses de récits qui ne se concrétiseront jamais, mais que j’ai trouvées intéressantes, qui auraient mérité de devenir des histoires. Dans les 2 pages consacrées à la réalité de professeur Night dans l’épisode 5, Evening Primrose s’interroge sur la nature de la réalité, sur les limites de sa compréhension du monde, émettant l’hypothèse qu’elle évolue dans des décors finis. Elle interroge ce que lui disent ses sens, tout comme les personnages de l’histoire principale se rendent comptent que leur réalité est une version pas plus, ni moins valide que la précédente ou la suivante. Du coup, j’y vois (à tort ou à raison, mais je promets que je n’ai consommé aucune substance psychotrope) le même thème que l’histoire principale, abordé sous un autre angle, celui de l’histoire dans l’histoire (dispositif cher à Neil Gaiman, emprunté à Shakespeare).

      Aussi quand le professeur Night et Evinning Primrose traversent la barrière du récit fictif et interviennent dans l’histoire de Diana Dane et des autres, c’est comme si Diana Dane et les autres pouvaient intervenir dans notre monde. C’est une variation sur le réel qui influe sur la fiction et réciproquement.

      Les interrogations d’Evening Primrose évoquent également à mes yeux un roman de Philip K. Dick (ou était-ce une nouvelle) dans lequel le personnage principal se rend compte qu’il évolue dans un décor et qu’à certains endroits les éléments de décors n’ont pas eu le temps d’être posés ; il n’y a qu’une étiquette portant le nom de ce qui aurait dû se trouver à cet endroit-là. Il s’agit à mes yeux de la mise en scène de 2 thèmes philosophiques.

      Le premier est à nouveau relatif à la réalité, un questionnement sur ce que je peux considérer comme étant réel et tangible, malgré la finitude des 5 sens, l’impossibilité d’être sûr, sur la nature de la conscience (Qu’est-ce qui réel ? Quel est ce Je qui s’exprime ?). Le deuxième est celui sur la nature irrémédiablement égocentrique de l’être humain. Il ne perçoit la réalité qu’au travers de son corps, sans pouvoir se projeter dans la conscience d’un autre individu. Cela peut conduire à des postures un peu paranoïaques (Philip K. Dick où es-tu ?) où l’on en vient à penser que tout ce qui m’entoure (lieux comme les autres personnes) n’est que des éléments de décors dans une réalité créée uniquement pour l’individu que je suis. Il n’y a que moi qui existe, tout le reste n’est simulacre et décors.

      Je jure à nouveau sur l’honneur que je n’ai rien pris d’illicite avant décrire ces paragraphes. Toute autre opinion sur ce récit est la bienvenue.

      • Artemus Dada  

        Merci beaucoup de ta réponse, solidement argumentée, et qui soulève des points très intéressants.
        Si une ou deux choses paraissent rétrospectivement évidentes, elles ne l’étaient pas autant avant de te lire. or donc merci beaucoup.

        Cœur avec les doigts, paix & prospérité.

  • Lone Sloane  

    Je rebondis sur votre échange pour apprécier à mon tour la dècouverte de Tula Lotay,. Suite à la lecture de ta chronique, j’ai été voir ses dessins sur la toile et été séduit par ses personnqges féminins. Comme un écho contemporain de Robert E Mc Ginniss et de Paul Gillon, deux artistes qui ont un goût certain pour les femmes de caractère.
    J’ai été également surpris par ton titre et me demande si il a été inspiré par celui d’un film de SF des années 60 (titre qui est égalememt celui de ma chanson fétiche de UB40: the earth dies crying)?

    • Présence  

      Le titre du présent article est une traduction très (trop) littérale de la phrase mise en exergue du chapitre 4 : Time itself dies screaming. Rien dans le récit n’indique qu’il pourrait s’agir d’une variation sur le titre du film que tu as cité.

      • Jyrille  

        Je rejoins Lone sur le trait qui rappelle Gillon et McGinnis… J’ai failli craquer pour le recueil de dessins de McGinnis sorti récemment mais bon, j’achète déjà trop de bds.

  • Le moustachue  

    Je suis une bille en anglais mais je me dis je peut comprendre les base d’un comics en VO et ça améliorera mon anglais puis je lis l’article et je trouve les scan géniaux et plus j’avance dans le résume et plus je me rends compte que meme en français je risque de passé a coté de plein de truc ….

  • Artemus Dada  

    Suite à ma lecture de « Supreme Blue Rose », et de l’article de Presence ; et après mûres réflexions, et une relecture de la mini-série, voilà ce que j’en pense.

    En espérant que je ne contreviens à aucune règle en vigueur ici.

    Scénariste de son temps, Warren Ellis a depuis longtemps montré une appétence particulière pour la métafiction, il suffit pour s’en convaincre de lire PLANETARY et a fortiori SUPREME BLUE ROSE la mini-série dont il est question ici, dessinée par la très talentueuse Tula Lotay.
    Enfant de l’ère postmoderne et surtout du siècle 2.0 il réinvente ici le concept de Supremacy* d’un personnage vivent) in silico ; c’est-à-dire à partir d’un modèle informatique.
    Ainsi n’est-il plus question de relaunch ou de reboot mais de « versioning ». Darius Dax ennemi privilégié de Suprême, est à la tête d’une société la National Praxinoscope Company ; quel nom merveilleux lorsqu’on sait que le praxinoscope est une invention qui donne l’illusion du mouvement en utilisant un mouvement cyclique et des dessins, et qu’il s’agit de parler des univers partagés de la bande dessinée américaine comme le font ici Ellis & Lotay.
    Du reste le récit est lui-même cyclique : arrivé à la dernière page du septième et dernier numéro vous pouvez reprendre à la première page du premier numéro et enchaîner une nouvelle lecture.
    D’ailleurs si vous regarder attentivement la couverture du dernier numéro sur la droite on aperçoit les plumes de la queue de l’oiseau qui se trouve sur la première couverture (à gauche). CQFD !

    Or donc, Darius Dax veut éliminer l’alter ego de Suprême car il a compris comme tous les lecteurs de comic books que le premier super-pouvoir des super-héros est d’attirer à eux les pires catastrophes et les ennemis le plus improbables.

    Si on regarde de plus près l’histoire du genre, il suffit qu’apparaisse un super-héros pour que toute une flopée de super-vilains suive.
    En faisant de Darius Dax un homme qui veut se débarrasser du super-héros en titre, pour protéger la planète car il est un aimant à « problèmes », Warren Ellis dénonce la supercherie ultime : le super-vilain n’est pas celui qu’on croit.

    Les super-héros pour continuer à être ce qu’ils sont et ne pas devenir la « cartouche vide » hégélienne que tout vrai redresseur de torts est destiné à devenir (et devrait rêver d’être), et constituer encore et toujours une source de profit pour leurs propriétaires, ces personnages donc disposent d’un talent caché : celui de créer de l’inflation dramatique qui se traduit par la création de problèmes qu’ils sont les seuls soi-disant capable de contrecarrer.

    Les super-héros inventent les raisons de leur existence.

    Utilisant avec un rare talent la décompression : cette technique narrative qui dilate le temps en séquençant l’action au maximum – inspirée du storytelling de certains manga – et qu’il a été l’un des premiers à importer dans la BD made in U.S.A., SUPREME BLUE ROSE devient la métaphore des interminables séries « à suivre » qui sont le fond de commerce de l’industrie de la BD outre-Atlantique.
    Ce qui n’est pas un mince tour de force en seulement 7 numéros, mais lire cette histoire donne parfois l’impression de faire du surplace : il est évident que tout ça aurait pu être dit en moitié moins de fascicule.

    Belle réflexion sur le genre, SUPREME BLUE ROSE bénéficie en outre de l’énorme talent de l’artiste Tula Lotay, dont la moindre des qualités est de nous donner envie de lire et relire cette mini-série ; et donc de nous donner la possibilité d’en saisir toute la richesse grâce à une lecture répétée.

    Cela dit « relire » est l’activité principale de tout lecteur de comic books lorsqu’il lit des séries au long court.

    Il me semble en effet évident que ce n’est plus des aventures inédites qu’il nous faut attendre lorsque nous lisons des séries dont la durée de vie avoisine celle d’un être humain, mais plutôt des combinaisons nouvelles de situations déjà lues.

    Ce que propose SUPREME BLUE ROSE en ajoutant au plaisir de la lecture celui de l’analyse (et la révélation d’un deuxième degrés riche en perspectives nouvelles) c’est de réitérer la lecture de quelque chose que l’on connaît par cœur, à l’instar de ce que fais n’importe quel lecteur de comic books, et d’y prendre à chaque fois plaisir. Ou du moins de l’espérer.
    _______________

    * Supremacy est un « endroit » où toutes les anciennes versions (et donc obsolètes) du super-héros Suprême vivent ensemble.

    (Je propose sur mon blog une version illustrée si cela intéresse quelqu’un il est le bienvenu) :

    http://artemusdada.blogspot.fr/2016/07/supreme-blue-rose-warren-ellistula-lotay.html

    En tout cas merci Presence, ton article ainsi que notre échange a stimulé mon envie d’écrire sur cette série.

    Cœurs avec les doigts amigo ! [-_ô]

    • Présence  

      C’est un grand plaisir pour moi de (re)découvrir cette histoire par les yeux d’un autre lecteur. L’un des effets secondaires (au moins pour moi) d’écrire un article sur une lecture est d’en figer l’interprétation au fil directeur de l’analyse que j’ai suivi.

      En lisant ton analyse, je ne peux qu’être d’accord avec ce point de vue différent et complémentaire. Je prends également conscience que je reste encore très attaché à l’intrigue des comics de superhéros, que c’est un niveau de lecture qui m’apporte une dose de divertissement encore bien réelle. Je présume que c’est en partie pour cette raison que je ne suis pas capable de ressentir ou de percevoir la métaphore des interminables séries « à suivre » que tu mets en lumière..

      Il est évident que tout ça aurait pu être dit en moitié moins de fascicule. – Juste pour le plaisir de la discussion, pour cette histoire, je ne le ressens pas du tout comme une évidence parce que les auteurs abordent bien d’autres points que cet éternel recommencement.

      • Artemus Dada  

        Au sujet de la longueur tu as bien évidemment raison, ainsi que la richesse de ce qu’on peut trouver dans cette mini-série.

        7 épisodes ce n’est pas de trop, mais la façon dont Warren Ellis les utilise me laisse penser que ça va plus loin que ça.
        Ce n’est d’ailleurs pas un reproche, au contraire puisque ça fait sens en adaptant la forme au propos.

        Je pense qu’Ellis utilise la décompression pour donner une impression de durée, celle que justement on trouve dans les séries qui durent depuis plus de 70 ans pour certaines (toutes choses égales par ailleurs). D’où également l’aspect circulaire de l’histoire.

        Moi aussi je suis attaché à l’intrigue en elle-même, c’est même là ma première porte d’entrée.

        S’il n’y a pas d’histoire, il y a peu de chance que cela m’intéresse.
        Mais si en lisant l’histoire je vois des points d’entrée pour une lecture au « deuxième degrés », je ne boude pas mon plaisir.

        [-_ô]

  • Jyrille  

    Back from holidays ! Salut les copains !

    J’ai donc relu Supreme Blue Rose. C’est passé bien plus facilement que la première fois, mais je pense encore avoir loupé pas mal de choses (et pourtant, ce n’est pas très verbeux, tout le contraire du dernier Sandman que j’ai attaqué). J’ai une relation bizarre avec cette bd : je l’adore réellement, j’ai adoré le trait, les dessins, les couleurs, l’ambiance et ces personnages totalement irréels, mais j’ai toujours du mal à la cerner. Je pense que c’est une oeuvre unique et que je n’avais jamais rien lu de tel, même chez Grant Morrison les choses me semblent moins alambiquées. C’est un peu devenu mon oeuvre préférée de Warren Ellis pour l’instant, je crois – du moins, de ce que j’ai lu de lui. On sent une totale symbiose entre le scénariste et la dessinatrice. Je suis ravi, dans le sens d’être kidnappé, happé, transporté. Merci beaucoup Présence et Artemus Dada pour la découverte.

    • Présence  

      Comme tu le dis la symbiose entre scénariste et dessinateur est exceptionnelle, et prouve que la valeur n’attend pas le nombre des années. Pour avoir lu beaucoup de Warren Ellis, il a développé un format d’écriture des plus exigeants pour les artistes. il y a des pages d’exposition avec un dialogue abondant, pour lesquelles il est difficile d’imaginer une mise en scène qui présente un intérêt visuel. A côté de ça, il y a des pages sans mots qui nécessite que toute la narration soit portée par les dessins, faisant tout reposer sur l’artiste, parfois pour donner à voir des concepts complexes, souvent pétris de science avec une une apparence de science-fiction. Je me souviens encore des dessins de John Cassaday dans le dernier tome de Planetary, où il devait montrer la structure de la réalité selon Ellis.

      • Jyrille  

        Je vais relire Planetary dans sa nouvelle édition avec tes mots en tête, Présence. Par curiosité, quels sont tes Warren Ellis favoris ?

        • Présence  

          Je n’ai pas tout lu de ce qu’a écrit Warren Ellis (en particulier je n’ai pas encore lu sa première moitié de ses épisodes pour Hellblazer) et je n’ai pas tout lu à la même époque, donc certains de mes souvenirs son datés. Ces précautions étant prises, sans ordre particulier :

          – Nextwave
          – Astonishing X-Men: Xenogenesis (les épisodes dessinés par Kaare Andrews)
          – Supreme: Blue Rose
          – Global Frequency
          – No hero
          – Hotwire: Requiem for the dead (avec Steve Pugh)

          Pour être complet, il faudrait que je relise Planetary qui est un peu lointain dans mon souvenir.

          • Jyrille  

            Merci ! C’est intéressant, tu ne mets pas Transmetropolitan, The Authority ou Fell. Je ne connais pas ceux que tu cites à part No Hero et Supreme Blue Rose et je me dis qu’il faudrait que je relise tout ça. Ton article sur Orbiter m’a intéressé également, je verrai à l’occasion. Et j’attends la suite de Trees.

          • Matt  

            Fell est bien mais il a un sérieux goût d’inachevé. ça ne devait pas être une série plus longue à la base ?

          • Jyrille  

            Matt, je ne sais pas pour Fell, vu que je n’ai qu’un tome en VF et que je ne sais pas si il y a eu une suite…

            D’ailleurs Présence dit également que la suite de Scarlett par Bendis et Maleev est sortie ! Est-ce bien la suite de ce qui a été publié par Panini ?

            Tornado, je ne connais pas les deux derniers Ellis que tu cites. Et puis bon, aujourd’hui, je me suis pris le tome 4 de Preacher et la réédition de Punisher par Ennis et Corben. Or, il y a trois histoires, dont celle avec le Tigre chroniqué par JP. Vous m’avez bien eu les gars !

          • Matt  

            Le Extremis de Tornado, c’est Iron Man Extremis.
            Et le passage de Mr Warren sur les Thunderbolts est chroniqué sur le blog. Très bon. Il me reste à lire Planetary quand Urban aura sorti le tome 2.

  • Tornado  

    Mon top de Warren :
    – Planetary
    – The Authority
    – Transmetropolitan
    – Extremis
    – Thunderbolts

    • JP Nguyen  

      Mon Top de Warren :
      Warren Worthington III
      Warren Beatty
      Warren Buffet
      Warren Des Neiges…

      Ah, on me signale qu’il faut se limiter aux comics de Warren Ellis… Dans ce cas :
      Planetary
      Stormwatch+Authority
      Desolation Jones

      Ce sont mes must-read de Ellis. Après en plus anecdotique, Gravel, Red, ses Hellblazers…

      • Présence  

        Aaargh !!!!! Plus jamais il ne me sera possible d’entendre parler de la Reine des Neiges sans penser à Warren Ellis. Ce calembour est trop efficace, mon esprit en est marqué à jamais, les coins de la pièce commencent à se gauchir avec des angles qui n’existent pas. Plus jamais, je ne verrai la réalité de la même manière. Mais, quel cerveau a pu ainsi établir un lien entre la pureté de l’enfance et les créations perverses et morbides d’un scénariste sans limite ?

        Tu as fait très fort avec ce top 5. Tu t’es montré digne de Warren Ellis.

      • Matt  

        J’avoue que tu m’as tué aussi JP. Je ne peux m’empêcher de penser à François Perusse avec tes calembours débiles (débile est ici une sorte de compliment^^)
        Je sais qu’il n’a pas le monopole des calembours mais dans ma culture personnelle, c’est lui le maitre. Et aussi un peu Charles Degotte dans la vieille BD du journal de spirou « le flagada » (que j’aime et j’assume !)

        Me concernant j’aurais du mal à faire un top 5 vu que je n’ai du lire que 5 trucs de Ellis.

        Extremis
        Astonishing X-men Xenogenesis
        Astonishing X-men Ghost Box
        Thunderbolts
        Nextwave
        Fell

        Ah non ça fait 6. J’ai commencé Transmetropolitan mais je ne peux pas encore le lister comme lu en ayant lu que 2 tomes sur 5.
        Dans le tas j’ai bien aimé Xenogenesis, Extremis et Thunderbolts. Les autres sympas aussi mais moins.
        Je suis tenté par plein d’autres trucs mais je ne sais pas ce que ça vaut.
        Il y a Ignition City, Captain Swing, Ocean, Planetary (mais lui j’attends la sortie du tome 2, pas envie de commencer et de devoir attendre la suite)
        Et ses FreakAngels c’est bien ?

        • Présence  

          @Matt – Je n’ai pas lu Ignition City, il s’agit d’une production Avatar, généralement avec des dessins particuliers.

          Tornado et moi avions beaucoup aimé Captain Swing (tu trouveras nos commentaires respectifs sur mazon).

          Ocean est court et efficace, avec des dessins très propres sur eux de Chris Sprouse, pour une histoire SF rondement menée (commentaire sur amazon).

          FreakAngels est une histoire plus longue. L’approche graphique de Paul Duffield fait penser à celle des frères Luna (Girls, Sword) qui peut ne pas être du goût de tout le monde (mieux vaut feuilleter avant). L’histoire se lit facilement et Warren Ellis a choisi une construction avec le moment le plus fort au milieu du récit, ce qui décontenance un peu arrivé au dernier tome qui finit tranquillement (commentaires sur amazon). Cette série a été prépubliée en ligne, avec accès gratuit, mais (je viens de vérifier) le lien n’est plus actif.

          • Matt  

            Merci pour les infos. Je vais peut être tenter Captain Swing. Tornado a l’air déçu que ce soit si court. C’est un peu ce que je crains avec les One shot. Autant je n’aime pas trop les séries très longues (j’ai hésité à commencer Transmetropolitan), autant les BD de 60 pages…je trouve souvent ça vachement court. Sauf si c’est une histoire complète inscrite dans une série d’histoires complètes avec les mêmes personnages (principe des Tintins, Soda, et…tous les classiques franco belges en fait)

            Par contre, pour être taquin je dirais que quand on est sur amazon vous faîtes un peu de promo pour le blog, et une fois que les gens arrivent ici, vous les renvoyez vers vos critiques là bas^^
            C’est un peu particulier, hein, messieurs !

          • Présence  

            Pour la taquinerie, tu as entièrement raison. A titre personnel, je n’ai pas trouvé d’alternative élégante (ou satisfaisante) et j’essaye de ne faire référence à amazon uniquement quand un visiteur du blog est intéressé par plus d’informations (cas de figure où il deviendrait un peu bizarre de recopier des articles entiers dans les commentaires du blog).

  • Tornado  

    Mon merd’of de Warren : (allez JP, tu peux le faire ! 😀 )
    – Ultimate Galactus
    – Wolverine La mort aux trousses (encore qu’il faudrait que je le relise)
    – X-man (à l’époque d’Onslaught, c’était pas terrible).

  • JP Nguyen  

    Bon, je viens de finir ma première lecture de Supreme Blue Rose et j’ai beaucoup aimé l’ambiance onirique et les réflexions méta sur le genre super-héroïques.
    Concernant la remarque d’Artemus Dada sur « le vilain qui n’est pas celui que l’on croit », je ne partage pas tout à fait, puisque Ethan Crane, lorsqu’il apparait enfin dans le récit, affirme qu’il s’est volontairement caché car il ne croit pas/plus vraiment être utile au monde.
    « I’m supposed to be an interventionist god for a simple world, and I’m just another white guy in glasses who doesn’t know what’s going on ».
    En fait, dans cette phrase, on peut lire à la fois une critique du genre super-héros mais aussi une analyse du monde actuel, complexe et multipolaire, rendant obsolète le modèle classique et manichéen du gentil héros face au méchant vilain.
    Merci Présence pour m’avoir décidé à tenter cette lecture ! (avec l’article initial et celui sur « Trees »…)

    • Présence  

      Ravi que ça t’ait plu. Je suis assez d’accord avec l’interprétation que tu donnes de cette phrase. Warren Ellis, comme Alan Moore, est capable de dénoncer le modèle de l’opposition simpliste Bons/Méchants comme étant obsolète… tout en l’utilisant quand même dans ses travaux pour Marvel !

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