Encyclopegeek X-MEN : 1983
Un voyage dans le temps proposé par FLETCHER ARROWSMITHVO : MARVEL
VF : Lug, Panini
Cet article portera sur l’année 1983 de la série UNCANNY X-MEN avec un focus sur son principal dessinateur, Paul Smith.
En 1983 au grand dam de Tornado Hergé nous quittait, Thorgal assistait Au-delà des ombres à La Chute de Brek Zarith, DC comics acquérait les droits des personnages de Charlton Comics pour ce qui allait donner WATCHMEN et Jean-Claude Forest, créateur de Barbarella se voyait décerner le grand prix de la ville d’Angoulême. Et pour les X-Men c’est une année extraordinaire qui va voir le jour avec l’arrivée de Paul Smith comme illustrateur régulier. Chris Claremont, qui a une écriture souvent en phase avec son dessinateur va tutoyer les sommets pour une période que nombreux déclarent comme leur préférée, devant même celle dessinée par John Byrne.
Comment survivre au départ de John Byrne ?
Quand UNCANNY X-MEN #165 sort en janvier 1983, cela fait presque deux que la période dorée avec John Byrne est terminée. Dave Cockrum a fait son grand retour sur l’équipe qu’il a cocréé. A part quelqu’un fill-in (Bob McLeod, Jim Sherman, Bill Sienkiewicz et Brett Anderson) et fort d’une belle entente avec Chris Claremont, l’artiste répond présent et assure une prestation supérieure à son premier passage, notamment sur le conte de fée de Kitty, mais ne déchaine pas les foules. Compliqué de passer après le dessinateur canadien, alors aux commandes des FANTASTIC FOUR.
Chris Claremont opère également une nouvelle orientation dans sa narration depuis UNCANNY X-MEN #143 (dernier numéro dessiné par John Byrne) et l’arrivée notable de Kitty Pryde. La benjamine des X-Men devient la première pierre d’une nouvelle phase. Claremont lance beaucoup de pistes, se recentre sur l’école, conçoit de nouveaux antagonistes (les Morlocks, Belasco, les Broods) et développe ses personnages quitte parfois à perdre ses lecteurs dans la direction prise. Même au niveau de l’enchainement des numéros cela semble erratique. Les X-Men semble partout et nulle part à la fois. Ils sont au centre d’un conflit chez les Shiard, puis on les retrouve sur l’île de Magneto, qui entame sa rédemption, en passant entre temps dans les souvenirs de Xavier sans oublier une intrusion au Pentagone et dans le royaume de Belasco. Oui compliqué à suivre à l’époque, surtout en France où nous devions jongler avec le retard de la publication française, les épisodes au compte-gouttes dans un trimestriel (Spécial Strange) et les albums X-Men où figuraient également des épisodes de la série régulière.
Une année qui a du punch
© Marvel comics
Du neuf, du vieux et du neuf avec du vieux
1983 c’est l’arrivée de deux personnages féminins phares chez les X-Men : Malicia (Rogue en VO) et Madelyne Pryor.
Pour Malicia, on l’avait déjà vu évoluer dans la sphère des X-Men depuis sa première apparition dans le mythique AVENGERS ANNUAL #10 puis des séries comme DAZZLER, ROM et surtout au Pentagone en 1982 dans UNCANNY X-MEN #158. Son apparition sur le pas de la porte du manoir reste un grand moment de l’année. Son intégration ne se fera pas sans mal, mais Xavier n’hésitera pas à rappeler que son idéal et son école intègrent les secondes chances, n’en déplaise à Carole Danvers. Après Wolverine et avant Magneto, Xavier accueille donc une hors la loi. D’ailleurs c’est naturellement que Logan deviendra, dès le séjour au Japon, celui qui chapeaute la nouvelle X-Woman.
Rétroactivement on peut se demander ce qui a fait pencher la balance entre Carol Danvers, présente depuis plus d’un an dans la série et ayant évolué en Binaire et Malicia. Surement qu’avec la fille adoptive de Mystique, Claremont avait les deux en une, rapport à l’absorption des pouvoirs et psyché de Carol dans AVENGERS ANNUAL #10. C’est également une évolution avortée d’une possible relation homosexuelle (voir plus loin). Quand on voit la place que Malicia a pris par la suite et son succès auprès des fans, Chris Claremont a été bien inspiré. Néanmoins, il soigne la sortie de Carol Danvers, en lui donnant une nouvelle chance auprès des Starjammers.
Une pile et face malicieux
© Marvel comics
L’autre élément féminin mise en avant, c’est la benjamine des X-Men, Kitty Pryde que Chris Claremont a toujours chouchouté, étant une de ses créations favorites. C’est en 1983 qu’elle prend réellement de la hauteur, notamment avec l’arrivée de jeunes mutants de son âge au sein de l’école. Ce qui vaudra, pour donner suite à une tentative de la changer d’équipe, un des coups de gueule les plus célèbres de l’histoire des X-Men, « THE PROFESSOR X IS A JERK », traduit superbement la première fois en VF par le « professeur X est un CHAMEAU ». J’adore. A travers Kitty, Chris Claremont relance également les Morlocks via Caliban dans une intrigue qui se poursuivra les années suivantes notamment avec une nouvelle proposition de mariage et un nouveau caillou dans la chaussure de Colossus. Il est intéressant de découvrir la déchéance d’Angel, crucifié tel le christ (d’ailleurs Paul Smith l’avait déjà magnifié dans Marvel Fanfare), préfigurant sa chute dans MUTANT MASSACRE, 3 ans plus tard.
Claremont en profite pour continuer à construire (ou déconstruire) la personnalité de Charles Xavier. Après nous avoir livré des bribes importantes de son passé l’année précédente, il soigne la dépression du mentor des X-Men d’abord en encadrant une nouvelle équipe, retrouvant ainsi son rôle de professeur et directeur qu’il avait eu tendance à délaisser. Puis Claremont franchit une ligne jaune quand Xavier retrouve l’usage de ses jambes. Son positionnement vis-à-vis des X-Men en sera alors changé, l’image de la figure paternelle lisse et irréprochable étant désormais bien loin.
Enfin, ne minimisons pas la création de l’un des animaux de compagnie les plus célèbres de Marvel, à savoir le dragon de Kitty, Lockeed, arrivant tout droit de la saga des Brood qui s’est terminée lors du premier trimestre.
Etes-vous prêt à danser le Jerk ? (oui on ose tout sur Bruce Lit)
© Marvel comics
Avis de tempête
Arrêtons-nous un instant sur un moment important de ce run : la métamorphose de Tornade. Le génie de Chris Claremont est certes d’avoir non seulement surpris les lecteurs mais surtout d’avoir travaillé son sujet depuis de nombreux mois. Son rôle de leader était contesté. Sa posture devant le fait de tuer un être vivant un véritable chemin de croix qui l’amène à prendre des décisions controversées, notamment moralement. Claremont achève la transformation en deux temps et autant de femmes fortes qui lui renvoie une image de ce qu’elle n’est pas mais de ce qu’elle pourrait être.
Sa confrontation avec Callisto dans un duel au couteau, digne de James Dean dans la FUREUR DE VIVRE, c’est le franchissement de la ligne rouge, qu’elle s’est toujours refusée de franchir : prendre une vie. S’étant endurcie, Yukio l’amène de son côté à dépasser les apparences et sortir de sa relation avec la nature. Yukio vient de la ville quand Ororo prend ses racines dans sa terre nourricière africaine. Yukio croque la vie à pleine dents comme si chaque jour était le dernier, en contradiction avec l’appellation de déesse d’Ororo et son contrôle de soi (et de ses pouvoirs). Son nouveau look cuir (une marotte de Claremont) avec la fameuse coupe punk contribue à troquer l’image lisse de leader parfaite pour une apparence dure, inaccessible et imprévisible.
Claremont avait dans l’idée de créer un relation amoureuse entre Carol Danvers et Ororo. Le contexte étant difficile à l’époque pour ce type de sexualité, le scénariste se rabattra sur des fantasmes à travers les personnages de Callisto et Yukio, deux représentantes crédibles d’une sexualité différente (homo ou bi). L’émancipation de Tornade nous offre une plus belle évolution d’un personnage féminin dans les comics mainstream des années 80.
La fureur de vivre au féminin
© Marvel comics
“Ceux qui aiment la vérité doivent chercher l’amour dans le mariage, c’est-à-dire l’amour sans illusions.”
Cette citation d’Albert Camus résume parfaitement la tragédie que va vivre Logan : l’illusion du bonheur à travers son union avec Mariko. Les mariages ne sont pas des évènements très courant dans les comics mainstream. Celui de Logan et Mariko avait été annoncé l’année précédente dans l’extraordinaire mini-série WOLVERINE dessinée par Frank Miller (dernière planche du quatrième numéro). Il donne le droit à un diptyque au Japon (UNCANNY X-MEN #172 #173) fabuleux en intensité, dépaysement, rebondissements et une chute brutale et cruelle. Cela achève de rendre encore plus humain le griffu, en échec devant une société civilisée qui semble le rejeter, lui l’animal comme il lui sera rappelé par la suite. Wolverine s’efface devant Logan. L’émotion et l’intensité de ces deux numéros restent gravés dans la mémoire des fans et font parties des plus belles planches jamais produites sur la série. Pour Logan c’est un véritable tournant qui s’opère. Son traitement par Claremont s’oppose à celui donner à Scott Summers, le X-Man réservé par excellence qui va sembler enfin trouver le bonheur à travers le second mariage de l’année. Claremont n’a eu de cesse de construire une opposition entre ces deux X-Men, l’année 1983 ajoutant une nouvelle pièce à l’édifice à l’issue finalement surprenante. Peut-être pour ne pas rester sur un tel moment déprimant, la seconde cérémonie de l’année, bien que mouvementée, verra une bien une heureuse conclusion.
La renaissance du Phoenix
La seconde partie de l’année 1983 va entretenir un sacré suspense : Jean Grey est-elle vivante ? A l’époque pas d’internet, il faut se contenter de 22 pages uniquement chaque mois pour savoir ce que deviennent nos personnages préférés.
Oh ils ont encore ressuscité Jean Grey
© Marvel comics
Alors quand nous découvrons, comme Scott Summers, Madelyne Pryor dans la dernière case de UNCANNY X-MEN #168, c’est le choc. On nous a ramené Jean Grey (ce qui n’était pas totalement faux dans un sens). . Pour Scott Summers c’est un nouveau coup de foudre, après avoir rompu en gentleman qu’il est avec Lee Forrester. Bien que je trouve que le mystère est assez vite résolu finalement et si le numéro anniversaire, UNCANNY X-MEN #175 est un chouia décevant, c’est quand même un coup de génie du père des étranges X-Men, deux ans avant le retour officiel de Jean, sur une idée de Kurt Busiek dans AVENGERS, FANTASTIC FOUR et X-FACTOR. Et puis, le scénariste étant connu pour écrire des intrigues au long terme, cela va nous amener des années plus tard à INFERNO. Avec le mariage de Scott et Madelyne et l’intrigue autour du retour de Jean, l’éditorial semble enfin couper le cordon avec l’ombre de John Byrne et la saga du Phoenix Noir qui planait encore sur la série des années après. D’ailleurs ces épisodes sont un miroir de la fameuse saga, le retour du Cerveau n’étant pas innocent. Claremont semble prendre sa revanche, l’optimisme régnant désormais en proposant ce que l’on peut prendre comme une fin alternative à UNCANNY X-MEN #137.
Les X-Men en tant qu’équipe n’ont pas pu empêcher la mort de Jean. Cyclope après avoir pris une droite mémorable de sa dulcinée (en tant que Scott Summers), défait son équipe à lui tout seul et fait tomber le méchant derrière. Pas de mort comme bouquet final mais un hymne à la vie avec un mariage, le premier de Scott (le second avec Jean Grey des années plus tard). Au passage Claremont écrit un très beau texte quand nous voyons Scott se recueillir sur la tombe de Jean, des mots qui renvoie à Elegy (UNCANNY X-MEN #138) et un fameux dessin de John Byrne qui montre ce qu’aurait pu être l’après Phoenix noir. Graphiquement Paul Smith, le premier à avoir croqué Madelyne, marche dans les crayons de John Byrne. L’année se termine sur une lune de miel perturbée qui achève de façonner le personnage de Madelyne Summers, femme entière et plus complexe qu’il n’y parait, s’éloignant enfin de l’éternel Jean Grey.
La technique du baiser sur rousse selon Scott Summers
© Marvel comics
Un véritable feuilleton made in Marvel
1983 fût également une année remarquable car elle lance définitivement l’emprise des titres mutants chez la maison des idées. Wolverine a eu le droit à sa première série en 1982 et c’est désormais une seconde série mutante que Chris Claremont anime avec NEW MUTANTS lancée en mars (après le Graphic Novel datant de novembre 1982). Les Nouveaux Mutants apportent un vent de fraicheur dans le manoir et le scénariste ne rencontre aucune difficulté à animer tous ses personnages qui évoluent ensemble. Mieux cela lui permet d’agrandir son terrain de jeu en faisant en plus intervenir un support cast pertinent comme Moira, Amanda Sefton (qui contribue à mettre en image les complexes de Nightcrawler) ou encore Stevie Hunter qui nous rappelle le parcours de danseuse de Kitty. C’est en 1983 que Scott et Alex Summers peuvent enfin passer de véritables moments dans leur famille retrouvée. Cela les amènera d’ailleurs, en civil, jusqu’à Anchorage où une certaine Madelyne les attend.
Cette promiscuité permet ainsi de renouveler les rapports entre les personnages avec des relations entre les anciens et les nouveaux élèves, de les voir grandir notamment Kitty qui s’émancipe (combat mano à mano avec un Sidri qui rappelle celui contre un NGarai, dernier numéro dessiné par John Byrne) et d’accentuer le côté soap qui est désormais une part importante du succès des X-Men. Le scénariste ose enfin la relation Kitty-Piotr, qui passe à la vitesse supérieur, au temps des premiers baisers, conscient de marcher sur des chardons ardents vu l’âge des protagonistes. La romance est chaste, décrite surtout comme un amour d’adolescents mais va contribuer à faire grandir les deux personnages. Kitty va y gagner en maturité tandis que Peter restera finalement maladroit.
Et côté continuité Chris Claremont affiche sa maitrise de l’univers partagé Marvel. Les Shiards via leur Magestrix interviennent dans les FANTASTIC FOUR de John Byrne tandis que l’apport de personnages en marge au départ de la série, comme Carol Danvers ou Malicia se fait de manière naturelle. Chris Claremont clôturera également l’année avec MAGIK, une nouvelle Limited Serie consacrée à Illyana et son séjour dans les limbes. Les mutants sont désormais partout et assoient leur stature comme franchise numéro un de l’univers Marvel.
Laisser tomber le spandex, oser le kimono
© Marvel comics
D’ailleurs on peut schématiser cette production annuelle comme un résumé du passage de l’adolescence à l’âge adulte. Xavier marche (métaphore sur le passage à l’âge adulte), Kitty s’émancipe, Nightcrawler et Rogue sont mal dans leur peau, le rapport au corps change (Xavier et Tornade) et la sexualité est remise en question (Tornade). On se fait de nouveaux amis (Rogue, les Nouveaux Mutants) et on entre dans une phase de rébellion (Tornade et Kitty, Callisto, Yukio). Puis vient le temps des premiers amours (Kitty et Peter) et celui des ruptures brutales (Wolverine) pour enfin grandir et quitter le foyer afin de fonder une famille (mariage de Cyclope) comme la conclusion d’un cycle.
La relecture donne cette très agréable impression que chaque numéro possède un climax, un moment tellement fort, qu’il marque la série à jamais, comme si Chris Claremont était arrivé à atteindre la perfection dans sa narration puissante sur les relations entre les personnages et l’écriture de son feuilleton soap mutant.
Paul Smith ou la classe américaine
L’impact graphique de Paul Smith sur la série reste impressionnant. On connait Chris Claremont pour son côté verbeux et l’utilisation à outrance de pavés et bulles de texte. Et bien Paul Smith arrive à couper la chique au scénariste. Paul Smith utilise avec parcimonie les détails, peu nombreux (à la différence d’un George Pérez) mais qui habille rapidement des cases et planches très aérées. On parle parfois d’économie dans le trait, mais comme l’école de la ligne claire, c’est plutôt l’efficacité qu’il faudrait mettre en avant.
Venant de l’animation, en plus de sa maitrise de tout l’espace avec peu, il impressionne sur l’art séquentiel comme en témoigne deux séquences des plus marquantes de cette année : le combat de Tornade contre Calisto et la saga au Japon notamment la séquence finale où Wolverine et Malicia affrontent Vipère et le Samouraï d’Argent. Pas de texte et des combats chorégraphiés bien avant l’emprise du cinéma d’action et asiatique sur le médium, dans la lignée d’ailleurs de qu’avait proposé Frank Miller l’année précédente. Du très grand art. Et notre artiste n’est pas en reste pour mettre en scène des moments d’humoristiques, je pense notamment à la découverte de Lockeed dans le sac par Madelyne ou encore et encore le Professor X is a Jerk de la benjamine des X-Men.
Paul Smith after Miller
© Marvel comics
On remarquera également que Paul Smith opte pour des personnages dessinés dans une approche assez réaliste s’éloignant de ces autres confrères et à l’opposé de la future école Image Comics, bodybuilding et grosse poitrine qui fera fureur dans les années 90. Ainsi il ne sexualise pas les personnages féminins, respecte les différences de morphologies et de taille, le tout avec une certaine élégance dans le trait comme en témoigne son approche de Nightcrawler. D’ailleurs son passage voit le plus souvent les X-Men croqués en civil plutôt qu’en costume. Les personnages ne paraissent pas non plus figés empruntant des poses naturelles, ne se contorsionnant pas dans tous les sens pour rentrer dans des cases.
Les dessins de Paul Smith sont restés dans l’imaginaire collectif, peut-être plus qu’aucun autre artiste sur la série. Comment oublier Kitty et son anorak so 80’ jurant sur le prof X. Ou encore l’attitude tête baissée et timide de Malicia, tenue et coupe de cheveux redéfinies, au Japon. Bien évidemment on ne peut passer sous silence qu’il fut l’artiste qui dessinera le premier l’évolution choc de Tornade en cuir et coupe Mohawk. Sa façon de dessiner Wolverine en action, notamment sur la couverture de UNCANNY X-MEN deviendra même iconique et sera reprise par Marvel pour des publicités ou autres produits dérivés.
Un ange pré-massacré
© Marvel comics
Visite en coup de vent
Paul Smith quitte les X-Men avec le numéro 175, qu’il partage avec le nouveau dessinateur régulier, le grand John Romita Junior qui dessinera à son tour une nouvelle page importante des mutants. Paul Smith a évoqué à l’époque des désaccords avec Chris Claremont notamment sur la direction de la série et un manque d’intérêt qui venait. Sur ce dernier point on peut quand même signaler qu’avec UNCANNY X-MEN, Paul Smith signa là son plus grand engagement sur la durée sur une série mainstream régulière exception faite de LEAVING TO CHANCE et ses 13 numéros. D’ailleurs il ne cachait pas qu’à l’époque les royalties sur la série bestseller de Marvel avaient fortement contribué à son choix de s’engager sur une année complète. Durant sa prestation le niveau de vente a augmenté de plus de 50 000 copie. On le retrouvera ensuite sur DOCTOR STRANGE avec Roger Stern, personnage qu’il avait commencé à dessiner avant qu’on lui propose UNCANNY X-MEN.
Cette Encyclopegeek ne serait pas complète sans évoquer la brillante mini-série X-MEN ALPHA FLIGHT également par Paul Smith et Chris Claremont qui doit être lue et vue comme un prolongement de cette année hors du commun bien que publiée l’année suivante. La rencontre avec Alpha Flight, qui fait l’objet elle aussi d’une série régulière lancée en…1983 !!!, renforce cette idée d’une prestation en miroir à la période John Byrne.
Passage trop court sur la série, au désespoir des fans, Paul Smith (JSA : THE GOLDEN AGE) retrouvera quand même les mutants au cours sa carrière. En premier lieu sur X-FACTOR à l’occasion de la saga JUDGEMENT WAR (X-FACTOR #43 à 49) sous la plume de Louise Simonson. Sur un encrage de Al Migrom qui ne lui convient pas, rendant moins délicat son trait, Paul Smith ne semble pas non plus inspiré par le scénario de Louise Simonson qui comme Chris Claremont a du mal à se remettre du climax que fût INFERNO. La déception pour les fans est d’autant plus grande qu’il ne dessinera pas X-FACTOR #50, le dernier épisode de la saga et numéro anniversaire, laissant sa place à Rick Buckler au style passe partout.
Punk Floyd
© Marvel Comics
Paul Smith reviendra dessiner les X-Men dans les années 90 à l’occasion de quelques numéros ici et là mais sans retrouver cette osmose de l’année 1983. Puis dans les années 2000, c’est une nouvelle collaboration avec Chris Claremont à l’occasion de X-MEN FOREVER mais surtout des retrouvailles avec Kitty Pryde et le Japon sur la mini-série, de bonne facture, X-MEN : KITTY PRYDE SHADOW & FLAME.
1983 restera un cru d’exception de la cuvée X. Chris Claremont relance la machine mutante avec des apports essentiels : des nouveaux protagonistes, des intrigues au long terme, le développement important de certains personnages, des moments parmi les plus marquants de la série et cela avec une maitrise narrative et une approche graphique qui force le respect. Tandis que V FOR VENDETTA triomphera au Eagles Awards de l’année suivante pour la production de 1983, Les X-MEN de Chris Claremont et Paul Smith y seront consacrés « Favourite Group or Team ». Faites-vous du bien, prenez la machine à remonter le temps du docteur Fatalis et programmez 1983 comme destination, vous ne serez pas déçu.
Goodbye Jean et Paul (dessin de John Romita Jr)
© Marvel comics
En 1983 Tornade et Callisto s’affrontaient sur Beat It de Michael Jackson.
Bravo Fletcher ! Pour l’année du chameau, tu as montré qui était le Boss !
Cet article est une formidable remise en perspective de ce run et un memory trip enthousiasmant, pour qui a connu cette période.
Les numéros qui m’ont le plus marqué sont ceux du mariage annulé de Wolverine puis le numéro double où Cyclope fait face à toute l’équipe, manipulée par le Cerveau.
Pour la partie japonaise, ta formulation est parfaite de concision : « un diptyque au Japon (UNCANNY X-MEN #172 #173) fabuleux en intensité, dépaysement, rebondissements et une chute brutale et cruelle. »
Tes observations sur tous les évènements constituant un passage à l’âge adulte me semblent aussi très pertinents, je n’avais pas pleinement mis le doigt dessus (je me souvenais plus de la bascule dans le Dark Age avec Mutant Massacre).
Merci JP.
Le diptyque au Japon est en effet très beau avec ce qu’il faut de moment de bravoure. Certaines images ont disparu à la mise en page. On voyait le parallèle entre les planches de Miller et celles de Paul Smith.
Sur le passage à l’âge adulte, c’est flagrant à la relecture. Certes Claremont avait déjà fait évoluer Uncanny X-Men (la mort de Jean-Phoenix, les Morlock-SDF, Tornade à Harlem), mais c’est réellement en 1983 que la série prend une orientation plus mature qu’elle poursuivra avec le cycle JRjr, au loin jusqu’au #200.
Merci pour ce passage en revue d’un run marquant.
Petite confession : je ne suis pas un inconditionnel de John Byrne, y compris en tant qu’artiste sur les X-Men. A contrario, en écho à ta mention de l’entrée de ce run dans l’imaginaire collectif, je retiens beaucoup de séquences du court passage de Paul Smith : le « Chameau », avec cette VF tellement marquante. Ce bourre-pif si satisfaisant de Maddie à l’égard de Scott. Charlot se faisant quelques paniers sur un terrain de basket pour fêter sa mobilité retrouvée, un peu trop rapidement pour son bien. La parenthèse humoristique où Maddie découvre Lockheed, chope Scott par la cravate et lui demande dans quoi il l’a entraînée. Ce moment où Logan sert une Malicia agonisante contre lui pour lui transférer son pouvoir de guérison, une communion (littéralement : ceci est mon corps, ceci est mon sang) qui marque l’acceptation de la jeune femme au sein de l’équipe. Comme tu l’indiques, efficacité !
J’ignorais ce projet sur Carol et Ororo. Mais après tout, toutes 2 subissent une métamorphose traumatisante durant la Saga des Broods, ça reste logique. Mais le côté déjanté de Yukio s’oppose bien à l’aspect inaccessible de Tornade (et la complète) et permet de comprendre sa transition.
Salut JB,
Charles s’essayant à être Larry Bird c’est plus tard avec JRjr aux dessins dans Uncanny X-Men 180.
Je me permets, du coup, de mettre en complément les numéros sur lesquels portent l’article :
VO : MARVEL UNCANNY X-MEN 165 à 176. Une partie a été éditée dans le TP Uncanny X-Men : From the Ashes
VF : Special Strange 44 à 47 et album X-Men 7 à 9 (chez LUG) / X-Men : L’intégrale n°14 (Panini Comics)
Comme toi, je ne mets pas le run de Byrne dans mon top3 au contraire de beaucoup de fan même si force de reconnaitre que c’est sous son influence et ses crayons que la série va réellement décoller.
Bien vu pour l’échange Wolverine/Rogue communion (littéralement : ceci est mon corps, ceci est mon sang)
Oups ^^ Mais j’aime bien le premier passage de JR Jr sur les X-Men, donc ça a dû se fondre avec ce run dans ma tête !
Bravo Fletcher et merci ! Bel article, bien structuré et aux petits oignons.
Très beau voyage dans le temps, 40 ans en arrière. C’était le bon temps, un passage agréable et élégant pour les X-Men avant la noirceur de mise apportée par la seconde moitié des Eighties avec les dessins furieux et plus violents de John Romita JR (Nimrod, le loi anti-mutants, le Beyonder, Rachel Summers, Mutant Massacre).
La période Smith semble une époque bénie pour les XMen, un Age d’or dans lequel tous les espoirs semblaient permis avant la dissolution du mariage de Scott et Maddelyne, la destruction des Morlocks, la séparation Kitty-Peter (merci Jim Shoter).
Ah la transformation de Tornade, Malicia si mignonne et rendu attachante par les dessins de Smith après le viol psychique qu’elle fit subit à Carole Danvers. On pourrait même dire que son dessin tend à édulcorer certains passages plus violents comment le duel Callisto-Storm ou le duel entre Wolverine et le Silver Samurail.
Un Claremont en pleine forme servi par un Paul Smith sobre dont le dessin est dépouillé des artifices habituels dans les comics de super-héros.
Bonjour Nicolas.
tu as raison d’insister sur le côté dépouillé des dessins de Paul Smith, épurés même avec un storytelling remarquable dans son utilisation de l’art séquentiel.
J’ai toujours pensé que sa prestation sur UXM était le meilleur travail de sa carrière. Je sais qu’il est décrié par certains et j’avoue que j’ai, moi aussi, était parfois déçu par ses prestations. Mais en 1983 avec un Claremont revigoré c’est l’osmose parfaite.
Le meilleur travail de sa carrière en effet, mais sa prestation sur Leave it to Chance est pas mal avec une Kitty Pryde réinventée en aventurière avec un dragon apprivoisé.
Egalement le magistral Golden Age, relecture désenchantée des Super-héros DC du Golden Age pendant le McCarthysme.
C’est vraiment une période que j’aime beaucoup. Outre le fait que je suis inconditionnel de Paul Smith (il y a ses Doc Strange un peu avant, qui sont très bien, et ensuite il reprend Nexus où il assure), l’épisode de Walt Simonson est très chouette. De fait, tout ce qui va de la Saga des Broods à l’arrivée de Rachel est une période que je relis souvent et toujours avec plaisir. Il se passe plein de trucs et c’est, selon moi, le sommet du soap claremontien bien équilibré avec les enjeux plus forts.
Bravo Fletcher pour le boulot abattu ! Un bel encyclopegeek où je n’ai pas compris grand chose (c’est vraiment du soap opera, ces histoires de super-héros) mais j’apprends plein de trucs, notamment l’arrivée de Malicia, le fameux « jerk », et l’apparition d’une Carole Danvers : est-ce Captain Marvel ?
J’admire la référence à James Dean, good game man!
J’aime bien la planche « Paul Smith after Miller ». Je trouve cependant que son trait est très proche de celui de Byrne, y compris dans les autres scans que tu as mis. Merci pour le lien sur V pour Vendetta. Par contre aucune chance que je lise ces X-Men un jour 🙂
La BO : bien joué.
Une jolie déclaration d’amour pour cette année mutante 1983 que je considère également comme ma préférée toutes périodes confondues, un âge d’or dont j’adore lire chacun des épisodes. Rien n’est à jeter, et c’est suffisamment rare pour le dire 🙂
Tu le soulignes très bien : la période qui suit Days of Future Past est marquée par une certaine instabilité sur le plan scénaristique. Les ellipses narratives se succèdent les unes aux autres et il paraît difficile pour le lecteur de s’y retrouver. La palme pour l’interminable saga des Broods, dont la trame principale se voit entrecoupée de fillers (pas forcément mauvais au demeurant) qui cassent complètement la dramaturgie de l’arc en plus de nous perdre.
L’arrivée de Paul Smith coïncide avec une continuité retrouvée, notamment grâce à une mise en avant assumée du côté « soap » de l’univers mutant. Ces douze épisodes (l’équivalent d’un battement de cil au regard de ce qu’est la chronologie mutante) m’ont toujours semblé d’une rare fluidité. La fin de la Saga des Broods, la première rencontre entre X-Men et Nouveaux Mutants, le rite initiatique de Kitty, l’arrivée de Maddie, le combat contre les Morlocks avec l’affrontement Tornade/Callisto en tête de gondole, la transformation de Tornade, l’arrivée tonitruante de Malicia au sein des X-Men, le voyage au Japon, le mariage avorté, la Saga du Phénix Noir 2.0 et enfin le mariage de Scott et Maddie : tous ces événements déterminants dans l’histoire des X-Men s’enchaînent ici avec une facilité déconcertante jusqu’à l’apothéose que constitue le récit où le Cerveau se joue des X-Men et de leur peur du Phénix. Mieux : ces épisodes sont tellement mythiques que je garde en tête au minimum 2 ou 3 planches par épisode. Il faut dire que Paul Smith n’y est pas pour rien, avec son trait si élégant et son talent évident pour la mise en page. Et Dieu sait qu’il en faut du talent pour réussir à réduire Chris Claremont au silence.
Merci pour cette très belle Madelyne de Proust 😉