Intégrale LUCIEN tomes 1 à 3, par Frank Margerin
Un article de TORNADOVF : Fluide Glacial
Cet article portera sur l’intégrale en trois tomes de la série LUCIEN écrite et dessinée par Frank Margerin entre 1979 et 2011.
Ces bandes-dessinées ont, dans un premier temps, été publiées dans les pages du magazine Métal Hurlant. Puis, dans les années 80, en albums aux éditions Les Humanoïdes Associés, sous plusieurs titres distincts (pas seulement autour de la bannière du personnage de Lucien). Puis, plus tard, par l’éditeur Fluide Glacial, sous la forme d’une collection en huit tomes. Cette intégrale en trois reliures regroupe donc ces 11 albums :
- VOTEZ ROCKY (histoires publiées initialement entre 1979 et 1981)
- BANANES METALLIQUES (initialement entre 1982 et 1984)
- RADIO LUCIEN (initialement entre 1982 et 1985)
- CHEZ LUCIEN (initialement entre 1985 et 1989)
- LUCIEN SE MET AU VERT (initialement entre 1989 et 1993)
- LULU S’MAQUE (initialement entre 1987 et 1993)
- RICKY CHEZ LES RICAINS (1998)
- WEEK-END MOTARD (2000)
- TOUJOURS LA BANANE (2008)
- LUCIEN PERE & FILS (2009)
- LA BANDE A LUCIEN (2011)
La première intégrale regroupe les albums 1 à 4. La seconde les albums 5 à 8. La troisième les albums 9 à 11.
Nous allons à présent passer en revue près de quatre décennies de rock’n roll en BD !
Alors, en fait, il ne s’agit pas vraiment d’une série car la chose a connu une publication éparse, tout d’abord avec des petits sketches dans les pages de la revue Métal Hurlant, puis ensuite sous forme de petits épisodes récurrents sur le même thème, avant que Frank Margerin, au départ effrayé par l’ampleur du projet, ne prenne son courage à deux mains et décide de réaliser des albums proprement dits, avec une histoire complète.
Pour raconter la genèse de cette épopée de papier, il faut retourner en 1975 : A cette époque, Margerin est un auteur débutant qui hésite entre le rock (il fondera un premier groupe en 1982 nommé Los Crados (!), puis ensuite Denni’s Twist, formation mixte qui réussira à décrocher une dixième place au TOP 50 grâce au célèbre tube TU DIS QUE TU L’M !) et son ambition de devenir dessinateur de bande dessinée. Il rêve d’intégrer le journal Pilote mais c’est sa rencontre avec Jean-Pierre Dionnet qui l’oriente vers le magazine Métal Hurlant.
En 1979, le dit magazine, spécialisé dans la science-fiction (Bruce ? Fan ?), publie un numéro spécial rock : le N° 39 Bis.
Margerin donne à ce numéro une petite histoire en huit pages intitulée RICKY BANLIEUE ET SES RIVERAINS : LES ROIS DU ROCK, dans laquelle Lucien et sa bande, encore mal dégrossie, apparaissent pour la première fois. Ils tentent de s’inscrire à un tremplin pour les groupes de rock mais doivent répéter en urgence dans la cave du père d’un copain. Et ça dégénère très vite, bien entendu (chassés par le propriétaire à coup de fusil, ils finissent au poste après une bagarre générale) !
A ce stade, la série n’est même pas envisagée mais, l’air de rien, l’auteur vient de poser la première pierre de son édifice. C’est à partir de là qu’il va imaginer une banlieue parisienne (qui va peu à peu prendre les traits de Malakoff) pleine de loubards, d’où va émerger une petite bande de jeunes prolos truculents et attachants. Si le personnage de Ricky occupe au départ le devant de la scène (il est le frontman du groupe qui reprend son nom), c’est finalement Lucien qui va s’imposer comme le personnage principal, au rythme d’une bande dessinée qui s’invente au fur et à mesure de sa publication, plus ou moins aléatoire (mais fidèle), dans les pages du magazine.
Si certaines des premières planches sont en noir et blanc, avec un style qui se cherche encore, la pseudo-série va peu à peu évoluer en un canon unique en son genre, nourri d’un style inimitable (entre dessin humoristique « à gros nez » et réalisme social pointilleux), d’un foisonnement de détails impressionnant et d’une palette de couleurs subtile et sophistiquée (il faut voir les planches en vrai, réalisées à la peinture directe, pour prendre conscience de l’élégance de ce travail d’orfèvre !). A l’époque où le chanteur Renaud popularise l’image du loubard en blouson noir, Margerin en offre l’illustration iconique (caricaturale mais affectueuse) la plus emblématique.
L’œuvre de Frank Margerin, par le truchement du personnage de Lucien, évolue de cette manière : en bricolant au départ sur deux passions qui n’en font qu’une, à savoir la BD et le rock, avec en corolaire l’univers des loubards et des bécanes, un embryon de mythologie va faire surface, avec un lieu (la banlieue de Malakoff), des personnages (Lucien, Ricky, Gillou et Riton, le fameux groupe de rock « Ricky Banlieue Et Ses Riverains », ainsi que Nanard -le cousin hippie de Lucien) et un art de vivre, en marge de la société.
La bande à Lucien et Ricky, ce sont des loubards inoffensifs, qui restent dans le giron de leurs parents, qui vivent du système D, qui se contentent de peu, de rock, de bière, de filles, de petits boulots pas trop pénibles, de bécanes, de bagnoles américaines et, surtout, d’amitié ! En amour, ils sont à l’ouest et galèrent pour séduire. Et la plupart du temps, ils se retrouvent entre potes dans leur univers, plutôt prolo. C’est tout l’esprit rock’n roll de la fin des années 70 et du début des années 80 qui s’illustre dans ces pages de BD.
Ce qui est rigolo, c’est qu’en définitive, le loubard est un français moyen, sans aucune autre ambition que celle de vivre en marge, de manière rock’n roll ! Et s’il méprise les beaufs, il en est lui-même un beau spécimen, à sa manière propre, la vie en marge n’étant au final qu’une illusion qui génère des galères en tout genre !
Derrière ces tranches de vie se dissimule néanmoins une analyse incroyablement fine, voire riche de la société et des strates ouvrières qui cherchent à s’émanciper de leurs codes sclérosants au lendemain des trente glorieuses. Certes, Lucien et ses copains se plient aux règles du travail (les jeunes de notre époque contemporaine le font-ils encore ?), mais ils ne sacrifient pas leurs idéaux. C’est-à-dire qu’ils ne rechignent pas à travailler à condition que le travail en question fasse partie de leurs horizons. Ainsi, Lucien verse tour à tour dans les radios libres, les bistrots, les cours et la vente de guitares. Ses autres copains dans la mécanique des voitures et des motos… En définitive, ils ne renient jamais leur art de vivre. Il n’y a que Riton, le « réac’ » de la bande, qui peut passer d’un monde à l’autre en ayant toujours le cul entre deux chaises !
LUCIEN, c’est aussi un look qui marque les esprits (le fameux personnage de l’émission NULLE PART AILLEURS, Didier l’embrouille -interprété par Antoines Decaunes-, est incontestablement une déclinaison imaginée à partir de l’univers de Margerin, la banane gominée en spirale étant une imitation plus vraie que nature de celle de Lucien). Mais c’est avant tout un univers urbain qui, à la lecture, agit aujourd’hui comme le témoignage à la fois précis et pittoresque de toute une époque.
T’as le « look Lucien », coco !
© Canal Plus
Quant à la musique proprement dite, elle occupe paradoxalement une place plutôt discrète dans la série. Si l’on entend parfois parler des Rolling Stones et des Beatles, les personnages semblent avant tout être fans de rockabilly et des vieux rockers français, Johnny Hallyday en tête. Le groupe Ricky Banlieue Et Ses Riverains ne se produit que rarement sur scène (en général c’est un sujet de galères en tout genre…) et, lorsqu’il y parvient, on ne l’« entend » jouer en général qu’un seul et unique titre, le EDDY SOIS BON des Chaussettes Noires !
La plupart du temps, la série délaisse la musique au profit des images, qui marquent sa présence à travers les guitares, les platines-vinyles, les pochettes de disques et les posters (souvent dévolus à Johnny, parfois à… Los Crados !), qui se répandent dans tous les coins de quasiment chaque vignette (notamment dans la première moitié de la série).
Pour un lecteur de ma génération, Lucien est un peu une sorte de grand frère (le mien avait à peu-près le même âge à l’époque de la publication originelle) et d’ailleurs, c’en est un (il a un petit frère et une petite sœur) ! Ainsi, lorsque je lis et contemple les planches des premières aventures de LUCIEN, c’est une véritable Madeleine de Proust qui vient remuer mes souvenirs d’enfance et raviver cette période charnière de la fin des années 70’s et du début des années 80. Car Margerin apporte à ses petits sketches un éclairage documentaire d’une incroyable précision (strictement dédiée à l’univers des loubards et de la jeunesse urbaine des quartiers prolétaires), illustré par un sens du détail d’une maniaquerie inouïe. Ainsi, chaque vignette est pleine à craquer d’objets, de meubles, d’accessoires, d’affiches, de magazines, de publicités, de pochettes de disques et de vêtements qui transpirent leur époque et son état d’esprit rock’n roll, (parfois baba cool, punk ou même BCBG selon les lieux et les personnages invoqués). Chaque appartement (souvent en colloc’), chaque squat, ruelle, garage, local, échoppe, bistrot ou épicerie visitée est une occasion de voyage dans le temps, un temps où la jeunesse rock’n roll écumait les disquaires, les friperies, les kiosques, les cinémas de quartier et les boutiques spécialisées. Un temps révolu : tous ces endroits, tous ces métiers jadis réservés aux geeks ont disparu au profit du commerce virtuel d’Internet…
Les premiers albums de LUCIEN sont les meilleurs, en grande partie grâce à tout ce foisonnement de détails comme autant de marques de leur époque : Une suite de petits sketches d’une ou de quelques planches dans lesquelles la bande à Lucien est confrontée à la galère que représente l’envie de vivre sa vie en marge, tout en profitant des plaisirs simples que la société peut néanmoins lui prodiguer (jouer au flipper, boire des bières, regarder la télé). Au départ les gags sont gentillets mais, au fur et à mesure, la verve de l’auteur monte en puissance et les éclats de rire s’accumulent…
Margerin en profite également pour mettre en scène toutes les facettes de la mythologie interne de cette jeunesse sans le sou, sans cesse en opposition aux règles et aux lois, qui trafique les bolides, cherche à pénétrer par effraction en tout lieu, à ne pas payer les billets de concerts, à pratiquer le système D. Dans leur sillon (car la bande à Lucien ne verse jamais dans la délinquance malveillante, l’alcoolisme et la défonce ostentatoire, préférant boire un café ou quelques bières, et ne franchissant ces limites que par accident ! (même si, objectivement, ils sont un peu plus « méchants » au début de la série, tandis qu’ils s’empâtent ensuite très vite)), certains protagonistes occasionnels moins sympathiques vont plus loin. Quelques « épisodes » mettent donc en lumière divers loosers, dealers de drogues, magouilleurs et squatteurs en tout genre, qui hantent l’envers du décor de la France de l’époque. Et c’est donc tout un univers qui renait à chaque page, sous un éclairage aux frontières de la caricature et du réalisme. Un pur numéro d’équilibriste.
En 1987, Frank Margerin franchit le pas en réalisant un album entièrement scénarisé autour d’une seule histoire (dans laquelle Lucien tombe amoureux et s’installe avec sa petite amie) : LULU S’MAQUE. Ce n’est pas la meilleure partie de la série et il faudra attendre les albums suivants (RICKY CHEZ LES RICAINS et surtout WEEK-END MOTARD) pour que l’auteur commence à maitriser l’exercice de l’histoire longue (qu’il avoue tout de même improviser au fur et à mesure qu’il dessine ses planches). Quoiqu’il en soit, les meilleurs passages sont encore ceux qui sont dévolus aux petits sketches et il reviendra d’ailleurs, pour les deux derniers albums de la série, à la compilation d’histoires courtes.
Accaparé par d’autres projets, Margerin va mettre plusieurs fois LUCIEN en pause et y revenir quelques années plus tard. Ainsi, lorsqu’il reprend la série en 2008, décide-t-il de faire vieillir ses personnages : Lucien a désormais la cinquantaine, des cheveux grisonnants et un bel embonpoint. Mais surtout, il est père de famille ! Ses deux adolescents sont des gamins de leur propre époque qui renvoient constamment Lucien à la sienne, ne manquant jamais de le traiter de ringard, mettant ainsi l’accent sur le fait que notre héros n’a rien renié de son passé de rocker ! Effectivement, sa banane est toujours là (comme le précise le titre de l’album de 2008) et ses premières amours, notamment le rock et les bécanes, également. Son activité tourne d’ailleurs autour de la guitare puisqu’il travaille dans un magasin entièrement dédié à la six-cordes (Grat’ en Vrac !) et qu’il donne des cours de guitare à ses heures perdues (c’est d’ailleurs en donnant un cours qu’il a rencontré celle qui est devenue la mère de ses enfants). Et comme de bien entendu, il ne se déplace qu’en moto…
La plume de Margerin s’est encore affutée et chaque passage de ces trois derniers albums est l’occasion de dresser un regard pénétrant sur cette nouvelle époque, par le biais d’une poignée de personnages n’ayant jamais vraiment réussi à quitter la leur, ce qui en soi nous réserve bien évidemment une série de gags truculents, notamment lorsque Lucien est confronté à toutes les évolution sociales (sa femme passe sa vie sur le web et les réseaux sociaux, son fils est constamment collé à sa Playstation, sa fille adopte un look et une attitude rebelle renvoyant la sienne à l’âge des cavernes…), auxquelles il n’entend strictement rien !
Fatalement, Lucien et sa bande ont beau refuser de changer, ils ont bien dû s’adapter à la vie. De ce côté, Lucien, même s’il ne roule pas sur l’or, s’en est assez bien sorti, certes parce qu’il est rentré dans le rang en fondant une famille, mais également parce qu’il met sincèrement en pratique un sens des valeurs auxquelles il demeure fidèle. Au bout du compte, sa femme et ses enfants finissent par l’aimer aussi pour ça.
Ricky, devenu dépressif et inactif, est le moins bien loti. Il lui faudra la réunion de ses anciens amis et la reformation sur le tard de leur groupe de rock pour le remettre sur les rails (trente ans plus tard, Gillou est revenu de son périple aux USA sans rien avoir changé de sa manière de vivre (il est d’ailleurs le seul à n’avoir pas pris une ride), tandis que Riton est devenu… lieutenant de police ! (les gags le mettant sans cesse face à ses dilemmes entre son statut de gardien de la loi et ses vieilles habitudes de rocker valent d’ailleurs leur pesant de cacahuètes !)).
Souvent impertinente, la série n’en demeure pas moins extrêmement chaleureuse car, derrière ces tranches de vie aux atours rock’n roll se dissimule, outre la toile de fond sociétale relevée plus haut, un thème principal, à savoir celui de l’amitié !
Du début à la fin, LUCIEN est une véritable ode à l’amitié et ses personnages principaux sont extrêmement attachants, y compris Nanard qui effectue son retour dans le dernier album !
Lucien et sa bande, ce sont donc de braves types, français moyens au style de vie gentiment marginal. Et si le style en question est devenu obsolète derrière leurs oripeaux de rockers perdus au milieu d’un monde qui a rapidement changé, leur amitié est restée intacte, sans nuages, naturelle et innée. Et communicative car, lorsque se referme le dernier tome de cette intégrale, ces sacrés loustics plus vrais que nature vous manquent immédiatement !
L’une des seules chansons que l’on « entend » jouée par les musiciens du groupe « Ricky Banlieue Et Ses Riverains » étant systématiquement et sempiternellement « EDDY SOIS BON » (vieux tube des Chaussettes Noires reprenant le JOHNNY BE GOOD de Chuck Berry), la BO du jour était donc toute trouvée…
Néanmoins, on ne va pas écouter la version des Chaussettes Noires mais plutôt celle de Jimi Hendrix
Ah…. Lucien dans les pages de Fluide Glacial ou Métal Hurlant.
Toute une époque. Quel personnage attachant…
Un seul regret ne pas avoir conservé mes magazines ☹️
Ton article est d’une très grande richesse. J’ignorais qu’il existait des intégrales.
Je ne savais pas non plus que Margerin dessinait encore le personnage en 2011. Et que celui-ci avait évolué en cinquantenaire père de famille.
C’est un peu mon / notre histoire ..
La BO : Johnny B. Good est la chanson mythique de Rock par excellence. Ce n’est pas pour rien que c’est le seul morceau Rock a être emporté par les sondes Voyager 1 et 2 pour sillonner l’espace..
En ma qualité de Zenn-Lavian, je confirme à tous les terriens que Chuck Berry à été écouté par un extraterrestre au détour de Jupiter et Saturne.
Lucien le « Archie » du Rock n’ roll…
La encore les polaroids de mon enfance reviennent toujours chez mes oncles… cette ambiance, le rêve de devenir musicien et la guitare qui finit par roupiller derrière le lit avec les trucs chourés à l’armée pendant le service militaire…
sur cette BD j’avais pourtant un problème de…forme et de fond…
Naaan j’taquine. disons que je pensais que c’était « moqueur » et cela ne m’attirait pas…puis j’en ai lu en bibli… et je trouvais ça moins « canaille » que Litteul Kevin….
En revanche je te rejoins sur le témoignage de toute une époque et une mentalité disparue, un univers à l’odeur de tabac froid, de café, ses capsules de mauvaises bières pliées en deux dans les cendriers, les partie de dès dont les points étaient notés au dos des dessous de verre, auquel j’étais profondément attaché. le poste cassette crachait aléatoirement du Stones, du Brassens, du Renaud ou du Trust… les cheveux chatouillaient les épaules…
merci pour les flashbacks…
Super article. Le hasard a fait que je n’ai dû lire qu’un ou deux tomes de cette série, ou peut-être même que quelques histoires éparses dans un magazine ou un autre. Pourtant, j’aime beaucoup les dessins, que je trouve très agréables à l’œil, très expressifs.
Un style inimitable entre dessin humoristique à gros nez et réalisme social pointilleux, un foisonnement de détails impressionnant et d’une palette de couleurs subtile et sophistiquée (il faut voir les planches en vrai, réalisées à la peinture directe, pour prendre conscience de l’élégance de ce travail d’orfèvre !) : ça transcrit exactement (et même en mieux) ce que je ressens en regardant ses planches. Pour parler ainsi de la couleur, je suppose que tu les a vues en vrai lesdites planches ?
Un loubard : français moyen, sans aucune autre ambition que celle de vivre en marge, de manière rock’n’roll, la vie en marge n’étant au final qu’une illusion qui génère des galères en tout genre ! – Vivement la réaction du Bruce sur cette du rocker dépouillée de tout romantisme…
Des personnages n’ayant jamais vraiment réussi à quitter leur époque, […] un sens des valeurs auxquelles il demeure fidèle – Une belle bande dessinée sur le passage à l’âge mûr, l’art de vieillir alors que les jeunes générations s’installent avec leurs propres idoles, leur propre mode de vie, leurs propres rites, nous rendant obsolètes.
Une BD qui ne m’a jamais parlé.
Il faut bien se dire que j’ai 33 ans hein. Ce machin c’était publié quand j’étais pas né.
Et même si j’ai lu plein de BD anciennes par la suite (toutes les publications Spirou, tout ça) ben…c’était plus universel et plus accessible pour un enfant de 10 ans que ce bonhomme a moto qui fait du rock. J’en avais rien à carrer et ça ne me parlait pas du tout^^ Trop éloigné de mon monde, trop réaliste au final. C’est clairement un truc pour les gens de l’époque qui se reconnaissent dans le perso j’ai l’impression.
Je crois que ça ne me parlerait toujours pas aujourd’hui d’ailleurs. pas du tout ma vie, ni mes aspirations, ni rien.
Alors je me suis régalé car je n’ai jamais lu Lucien. J’apprends donc certaines corrélations avec la naissance de Gaston Lagaffe ainis que le fait qu’il vieillit en temps réel. J’y vois également une belle illustration du pouvoir positif de la musique et du rock : amitié, rigolades et magouilles pas nuisibles à autrui. Une vie en rock sans drogues ni trop d’alcool qui permet de fonder une famille et de la voir grandir.
Rétrospectivement ces blousons noirs étaient quand même inoffensifs au vu des terroristes issus des banlieues. Une manière de se rappeler que la rébellion que permet le rock est un programme du système pour s’auto réguler comme le démontrait brillamment MATRIX (c’est sans doute le seul truc que j’ai compris de la trilogie).
Pour autant ai-je envie de lire LUCIEN ?
A priori non. Car si tout cela s’apparente au Renaud Titi Parisien, moi je préfère la période MISTRAL GAGNANT moins connotée extrème gauche.
Mais surtout, et je crois que c’est l’une des raisons pour lesquelles je n’ai jamais lu LUCIEN, c’est les dessins. Présence, il y a du Joe Badge là-dedans, c’est assez (trop) underground pour moi ces bras et ses jambes spaghettis.
Il y a bcp d’albums qui séparent Radio Lucien de Arnaques délinquances et système D (les scans de l’article) ? Le 1er est ok, le deuxième, non je peux pas.
Pourtant tout ceci m’a l’air infiniment sympathique et attachant. Si je trouve ça en médiathèque, je pourrai y jeter un oeil curieux.
La BO : bon je n’aime pas bcp Hendrix, un best of de lui me suffit amplement. Je ne connaissais pas cette reprise. Le son est monstrueux quand on pense que c’est un trio. Mais j’ai toujours trouvé le son de Hendrix trop bourrin, trop gras. Quant à sa voix, je ne l’aime pas et là il chante vraiment faux.
Dennis Twist : une adorable friandise pop, je me rappelle bien du clip, c’était fun.
Peter Bagge : si je me souviens bien sa biographie romancée, Buddy Bradley (publiée en VF par les éditions Rackham) était moins bon enfant que la vie de Lucien.
Ah oui, j’ai les deux tomes de Rackham, c’est même plutôt dramatique comme série. Il faudrait que je les relise, en tout cas, j’adore ces bds.
Marrant tu préfère le Renaud qui devient tiédasse?
ceci cit, oui ce chanteur pour une raison pas si évidente est très liée à l’esthétique de Lucien, blouson noir, bière, bistrot (les trois B), la révolte pas trop fatigante …
plutôt d’ailleurs que le situer « extrême gauche » je le qualifierais plutôt d’adolescent-puis jeune marié–puis papa, -puis écolo-puis dépressif.
Mistral Gagnant est sans doute son meilleur album à la croisée un peu des chemins tout en étant aussi le premier introspectif..
personnellement Le retour de Gerard Lambert est le plus agréable à mes oreilles (quasiment rien de connu dedans à part Manu et Mon Beauf’ et encore, ça doit faire des dizaines d’années qu’il ne la chante plus…) mais il est bourré de personnages qui sautent des couplets comme la femme seule de Banlieue Rouge, le copain drogué Michel (j’ai été surpris que ce ne soit pas Coluche d’ailleurs…) de LA Blanche ou Oscar son grand père du Nord (je ne suis pas chauvin mais c’est vrai que ça a un écho…) le blues râpeux sur l’ambiance de tournée d' »A quelle heure on arrive? « …
Non, Renaud ne devient pas tiédasse mais humain. La pêche à la ligne, c’est beau à pleurer.
Oh oui. Et Fatigué. Et Mistral Gagnant. Et Miss Maggie.
Je suis fan absolu d’Hendrix. Moi qui n’aime trop le rock bruyant, il est de ces rockers qui me rend dingue. La rondeur et le groove de son jeu, ça me fait ça avec les Who ou ACDC par exemple : Ça me transperce !
J’adore aussi sa voix, bien qu’ici effectivement, son impro n’est pas très convaincante.
Mon TOP 5 de ses chansons :
– VOODOO CHILE SLIGHT RETURN
– ALL ALONG THE WATCHTOWER
– CASTLES MADE OF SAND
– WAIT UNTIL TOMORROW
– LITTLE WING
Mais plein d’autres aussi… (FIRE, WHO KNOWS, THE WIND CRIES MARY…)
J’aime bcp ses tubes swinging London, quand Hendrix est pop, c’est phénoménal. Dès qu’il vire Hard Rock, je peux plus et je parle même pas du Jazz. Ce qui réduit considérablement les chansons de son répertoire : une dizaine. Mais une dizaine magique comme les chansons de Syd Barrett.
C’est vrai que le titre de l’article sonne bien.
Merci pour les retours.
Je suis étonné que peu de gens connaissent Margerin. Quand j’étais au lycée, mes copains punks avaient ça en intraveineuse et récitaient des répliques entières à longueur de journée.
Le surnom de Margerin, dont les albums et les revues circulaient à l’internat, était « Marj ». Raison pour laquelle je ne suis pas peu fier du titre de mon article… 🙂
Les personnages sont surtout canailles au début de la série. Ensuite ils prennent une tournure plus attachante, avec davantage de bonhommie. Ce n’est pas du tout connoté extrême gauche ni titi parisien. Plutôt banlieusard prolétaire ou au pire classe moyenne anar.
Je conseille de commencer par le 1° album et de patienter : Les premiers gags sont très légers. Mais ensuite ça monte en puissance avec le comique de répétition et c’est de mieux en mieux.
@Bruce : Les deux scans que tu évoques sont de la même période.
@Présence : Oui, j’ai vu les planches en vrai lors d’une exposition. Elles sont magnifiques, tout en peinture directe. Il n’y a pas plusieurs étapes (pas de « bleu »). Tout est dessiné et mis en couleur sur le même support.
Ah oui, dans ce cas, bravo pour le titre de l’article que je trouvai déjà très bon avant !
Personne autour de moi n’a eu cette période rockab, on est plus jeunes (je me comprends), on a eu direct les hardos et les corbeaux. Mais toujours Renaud.
« ces sacrés loustics plus vrais que nature vous manquent immédiatement ! » Sans doute la marque des bonnes séries, des bonnes oeuvres de fiction.
Je ne connais pas Lucien, j’ai dû en lire 10 gags dans ma vie, pas plus, sans doute dans un Fluide Glacial, n’ayant pas pu m’offrir de Métal Hurlant avant mes 40 ans je crois (et encore, ils traînent dans une pile à lire). Je n’ai même jamais entendu le tube de Margerin et de son groupe.
Par contre je tire le chapeau à ton article, car je crois bien reconnaître toutes les qualités et les caractéristiques des personnages dans ce que tu décris. Pour ça, ton article est une mine sur laquelle je reviendrai creuser si par hasard je tombai sur ces tomes. Je ne sais pas comment Margerin connaissait autant ce monde, je ne connais pas Malakoff (c’est un quartier de Paris ?), je sais juste que Renaud a repris Margerin tel quel parfois, en illustratrion (je crois). Cela n’appelle aucune nostalgie chez moi, mais je peux totalement comprendre celle qu’elle renvoit. Tu donnes vraiment envie d’essayer !
Encore merci et bravo pour ce bel encyclopegeek !
La BO : super fun !
Oui, Malakoff est dans la petite ceinture. Le marché est l’un des plus grands de France. C’est un chouette quartier aujourd’hui, qui est devenu un peu bobo avec le temps.
« ces sacrés loustics plus vrais que nature vous manquent immédiatement ! » Sans doute la marque des bonnes séries, des bonnes oeuvres de fiction.
Je ne connais pas Lucien, j’ai dû en lire 10 gags dans ma vie, pas plus, sans doute dans un Fluide Glacial, n’ayant pas pu m’offrir de Métal Hurlant avant mes 40 ans je crois (et encore, ils traînent dans une pile à lire). Je n’ai même jamais entendu le tube de Margerin et de son groupe.
Par contre je tire le chapeau à ton article, car je crois bien reconnaître toutes les qualités et les caractéristiques des personnages dans ce que tu décris. Pour ça, ton article est une mine sur laquelle je reviendrai creuser si par hasard je tombai sur ces tomes. Je ne sais pas comment Margerin connaissait autant ce monde, je ne connais pas Malakoff (c’est un quartier de Paris ?), je sais juste que Renaud a repris Margerin tel quel parfois, en illustratrion (je crois). Cela n’appelle aucune nostalgie chez moi, mais je peux totalement comprendre celle qu’elle renvoit. Tu donnes vraiment envie d’essayer !
Encore merci et bravo pour ce bel encyclopegeek !
La BO : super fun !
De Margerin, je connaissais plutôt « Manu », une déclinaison en dessin animé et plutôt light de Lucien.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Manu_(s%C3%A9rie_t%C3%A9l%C3%A9vis%C3%A9e_d%27animation)
Cet article rend un bel hommage à une série que je ne connaissais pas mais cela ne pique pas suffisamment ma curiosité pour que je cherche à lire cela un jour…
J’en ai lu quelques pages, au hasard des Métal Hurlants hérités de ci-de là. Pas du tout mon univers, mais l’ensemble était vraiment très bien fait, avec un travail impressionnant au niveau du dessin -le trait, mais aussi le « rendu » de l’ensemble, très équilibré et, c’est vrai, très bien colorisé. Les gags ne me faisaient pas hurler de rire, ni vraiment les expressions des personnages : Margerin donnait vraiment dans un presque figuratif « sérieux » où la caricature des personnages, fixée dès les premières planches, n’était en aucune façon amplifiée ou altérée selon la nature de l’humour exprimé. Gros nez et jambes maigres, mais parfaitement intégrés à leur décors, quasi documentaires.
En corolaire de ce qui se passait sur les planches, on sentait bien la réalité de cet environnement banlieusard : sans avoir besoin d’en rajouter, avec quelques phrases et détails précis, tout un univers transparaissait dont l’authenticité apportait une profondeur à ces historiettes. Au détour d’un dialogue ou même d’une simple image, un maximum de renseignements étaient intelligemment distillés sur des pans entiers de l’existence au sein des grandes villes. Lire du Lucien, pour un presque campagnard comme moi, c’était très dépaysant !
La richesse de témoignage Historique, très bien pointée dans l’article, est indéniable grâce au soucis de Margerin de mettre en scène, avec le moins « d’effets » possibles, la petite bande de Rockers ; et cette auto-discipline paye car, qu’on apprécie ou nom cette série aussi ronronnante que néanmoins décalée -surtout le ton, à priori léger, comparativement à la rigueur et la richesse de détails du dessin- sa valeur artistique aujourd’hui dépasse de loin l’anecdote.
Beaucoup de vérités « simples » sur la vie des mecs, vues par un mec.
Pour quelqu’un qui n’a « lu que quelques pages », c’est plutôt bien assimilé ! 🙂
« Les gags ne me faisaient pas hurler de rire » : Ce qui m’a frappé en relisant l’intégrale, c’est la montée en puissance de l’humour et de la marque d’un « humour à la Margerin », avec ses running gags propres à la série. Si on n’éclate pas de rire au début, chemin faisant, en retrouvant cet humour et ces gags qui se bonifient, s’afinent et s’embellissent au fur et à mesure, on finit au final par éclater de rire (c’est ce qui m’est arrivé en tout cas).
Je dois être complètement vierge en ce qui concerne les albums post – Métal Hurlant : ceci expliquant peut-être cela (et, ne possédant rien de Margerin en nom propre, je n’ai pas eu l’occasion de m’y replonger.). Je m’y remettrai, un de ces quatre, au détour d’une occase quelconque ?!
Mama mia ! Qu’est-ce que c’est loin, tout ça.
Et oui, c’est loin. Pour moi ça date du lycée. Mes potes étaient des punks et ils vénéraient Margerin. C’est avec eux que je l’ai découvert. Ça a été un grand plaisir de me faire ces trois intégrales récemment.
Il y a deux ou trois ans, Margerin était venu dédicacer près de chez moi. J’y suis allé et j’ai discuté avec lui un bon moment. Il fait encore très jeune et il n’en revenait pas que je lui dise avoir découvert ses BDs au lycée.
Je lui ai dit que j’avais écrit un article sur LUCIEN pour le blog. Et je lui ai raconté l’idée de mon titre « LA VIE EN MARGE », que j’avais choisi parce qu’au lycée avec les copains, on le surnommait « Marj ». Il a adoré.
Quand il m’a demandé si j’avais dit du bien de ses BDs dans l’article, je lui ai répondu « Ah non, non ». On s’est marrés ! 😅
Pareil que pour tous les bons : il semble être un gars très bien. Facile à percevoir à travers leur travail : c’est jamais par hasard qu’un truc aussi révélateur qu’une BD d’auteur complet fédère les amateurs ; surtout au delà de leur zone de confort habituelle, ce qui était mon cas.
J’avais un ami « Punk », aussi ; et lui possédait un album ou deux : j’ai du me les lire avec Clash, les Stranglers et les Cure en fond sonore -une (presque !) torture, pour moi, à l’époque, qui ne jurais que par la Pop/Funky/variétoche francophone. 😉
… Mais après, ça a été plus dur : j’ai eu droit au Pogues OUARFF !
Je ne regrette rien : ça valait le coup.