L’enragé par Baru
Première publication le 13 avril 2014- Mise à jour le 13 juin 2015
L’enragé est un dytique publié chez Aire Libre, écrit et dessiné par Baru.
Dans une banlieue pourrie du 93 (euphémisme?), Anton Witkowsky est un jeune en échec scolaire total. Humilié par ses profs, brimé par son père, Anton ne rêve qu’un chose : mettre sa rage au service de ses poings sur un ring de boxe.
Du petit match amateur jusqu’au championnat du monde , Baru dessine et scénarise l’ascension et la chute d’un jeune boxeur qui, pour ne pas crever, va se déchaîner sur les rings.
Bien sûr quelques clichés sur la boxe sont inévitables : le jeune surdoué qui part de rien et qui s’embourgeoise avant de se ressaisir. Mais la fibre sociale de Baru est authentique et permet de faire passer ces stéréotypes en arrière fond. Son héros, Anton, est têtu, orgueilleux, arrogant mais terriblement humain, un personnage qui a les forces de ses faiblesses et inversement.
Anton veut du fric, quitter son HLM pourri et son No Future. Pour ce faire, il abandonnera sa famille, ses amis et reportera sa haine sur les femmes. Gloire, fric, sexe, Baru fait de ascension du jeune homme la même que celle d’une rockstar. Pourtant à la moitié du récit, l’histoire prend un tournant surprenant en faisant d’Anton une star brisée accusé d’un meurtre qu’il n’a pas commis.
Baru se débarrasse de son héros et met en scène des émeutes de banlieue puis un mouvement civique demandant la libération du jeune impétueux. Une jeunesse défavorisée indignée par l’injustice touchant l’un des siens, aux antipodes des racailles de banlieues, va se saisir du symbole d’une génération frustrée. La fin est à la fois étonnante et réussie et fait une belle éloge de la solidarité et de l’amitié.
En moins de 100 pages , Anton a une vie tumultueuse et ne mâche pas ses efforts pour s’extraire d’une destinée sociale qu’il réprouve. Son obstination fera de lui le bouc émissaire des puissants et le héros des humiliés. Loin du héros parfait, il est l’Icare du ring qui arrive trop haut, trop vite.
Son salut viendra de la France d’en bas qui souhaitera sauver non pas l’homme mais le symbole. Entre Raging Bull et Hurricane Carter, Baru brosse le portrait crédible d’une jeune homme en colère qui porte la rage de son auteur. On en ressort K.O debout ….
YEAH ! Superbe Baru, peut-être mon préféré de ce que j’ai pu lire de lui jusqu’à présent (ouais même meilleur que L’autoroute du soleil).