Première publication le 11.01.2015/ Mise à jour le 116/03/25
Daredevil End of Days par Bendis, Mack, Janson, Maleev et Sienkiewicz
Un article de BRUCE LIT
VO : Marvel
VF : Panini
Daredevil The End est une mini série en 8 épisodes mettant en scène DD dans une réalité alternative. Il s’agit en fait d’un scénario élaboré par Bendis il y a quelques années dans le cadre de l’opération The End mettant en scène les derniers jours des Super Héros Marvel.
Même s’il s’agit d’un univers parallèle, il est quand même fait de nombreuses allusions à la continuité du personnage. Panini a tout publié en VF et récémment en Must Have.
Le titre m’ a été fourni de cet article m’a été donné par JP Nguyen. Je le lui rendrai en fin d’article *.
Avec Bendis, je ne sais plus si c’est l’oeuf ou la poule. Est-ce un plaisir sado-maso à subir ce mec pour le déglinguer ensuite ? Ou, hypothèse plus probable, ce type écrivant 50 % des histoires Marvel à lui tout seul, le lecteur, même le plus récalcitrant est obligé de retomber sur lui tôt ou tard.
Ayant pu lire ailleurs que ce End Of Days était un vrai chef d’oeuvre, ma curiosité l’a emporté sur mon intuition pour vérifier si le père Bendis avait retrouvé la grâce avec le héros qui fit sa gloire. Bon-soupirs- on y va ?
Reconnaissons à Bendis quelque talent: l’homme sait s’entourer des meilleurs dessinateurs du marché. A l’inverse d’Alan Moore ou de Garth Ennis qui ont souvent écrit des récits magnifiques avec des dessinateurs moyens, Bendis a toujours bénéficié de crayons exceptionnels pour cacher la vacuité de ses scenarii. Rien que pour cette histoire il réunit 4 dessinateurs prestigieux qui ont chacun marqué l’histoire de DD. Ensuite, il a toujours de bonnes idées de départ, des pitchs ultra accrocheurs qui font pshitt par la suite.
C’est ainsi qu’à l’instar des histoires de Mark Millar, celles de Bendis commencent souvent très fort. Matt Murdock, le visage défiguré par la raclée que lui inflige Bullseye est assassiné en public par son pire ennemi. Avant de succomber, il murmure un mot mystérieux : Mapone. Comme d’habitude, le préposé aux Murdockeries, l’infatigable Ben Urich va enquêter sur la mort de son ami pour chercher à comprendre ce que ce mot voulait dire. Au long de ces 8 épisodes, presque 200 pages au total, il va interviewer les amis de DD, ses ennemis et surtout ses femmes.
Et naturellement, que serait une histoire avec Ben Urich sans ses cigarettes, son gimmick épuisant ( Mon nom est Ben Urich et je suis journaliste ), et l’art de se foutre dans la mouise à chaque page sans DD cette fois ci pour le protéger? Pour mettre en scène la fin de son personnage culte, Bendis reprend les événements peu ou prou après son arc Hardcore, où Matt Murdcok disjonctait et se démasquait devant tout le monde au s’auto-proclamant Kingpin of Hell’s Kitchen. Ca tombe bien, votre serviteur avait toujours clamé qu’après cet arc, la qualité des histoires de Bendis étaient allées décroissantes.
Murdock continue ici son glissement vers le côté obscur. De plus en plus violent, il franchit la ligne rouge en tuant un ennemi. A partir de là, Urich et l’opinion publique ne voient plus DD comme un héros, et ses agissements deviennent de plus en plus mystérieux. Le picth, comme toujours avec Bendis est plutôt excitant. Mais très vite, le lecteur qui refuse de se laisser aveugler par la beauté du dessin voit que quelque chose cloche.
Premièrement, Bendis a déjà écrit cette histoire il y a 10 ans dans l’arc Cauchemar où Ben suspectait que les agissements de DD avaient plongé un petit garçon,Tim, dans un état catatonique. Bendis est plutôt honnête sur ce coup là. Il inclut cette histoire dans la continuité en reproduisant des pages entières et en mettant en scène un Tim devenu adulte élevé par Urich.
Tous les défauts de l’écriture de Bendis se déchaînent : Une intrigue décompressée frimeuse, des pleines pages qui ne servent qu’à remplir du vide, une histoire catalogue où défilent les personnages venant dire bonjour, et surtout une enquête ennuyeuse qui n’avance pas d’un chouia au fil des épisodes…. La révélation du mot Mapone est complètement alambiquée : une fois connue, arguments lourdingues répétés des fois que, le lecteur a l’impression d’avoir été berné ( je suis un garçon poli) .
Comme pour Décalogue, Bendis veut se la jouer cinéphile en singeant le Rosebud de Citizen Kane. Sauf qu’à l’instar d’Urich, le lecteur n’apprend rien, sur Mapone, sur Murdock, ni sur les personnages secondaires. Il n’est pas donné à tout le monde de pouvoir comme Gaiman ou Ennis parler d’un personnage absent. Ici DD est totalement évacué avant de revenir dans la dernière histoire sur un claquement de doigt…
La plupart des réactions des témoins sont hallucinantes d’idiotie : Nick Fury révèle à la fin qu’il détenait le dossier Mapone et le donne placidement alors qu’il aurait pu le faire dès le début. Milla Donovan est devenue une mégère brutale qui gifle sans raison Urich qui venait de lui dire que son fils était beau. Entre temps, Bendis semble oublier qu’elle est aveugle, encore un symptome à sa propension à massacrer ses personnages et ceux des autres !

Je t’interdis de trouver mon enfant beau ! Ouais ! C’est comme ça qu’on t’aime Milla !©Marvel Comics
Quant aux autres femmes du récit, il en fait des pondeuses éplorées tentant de reconstruire leur vie après le décès de Matt. Ces femmes, on vient de le voir, sont écrites hors des clous, et représentées avec des jeunes enfants roux, des mini Murdock du même âge, suggérant que notre héros était polygame et a fait des marmots à toutes ses copines une nuit après l’autre.
Mention spéciale à Elektra, qui accompagne son fils jouer au foot le jour de l’enterrement de son amant et fait preuve d’une brutalité lamentable envers Urich. Ce n’est pas la première fois que Bendis massacre allègrement la ninja grecque mais alors là, c’est le pompon.

Un grand moment : Elektra menace Urich en plein jour pas très loin de son fils qui joue au foot en face du cimetière de son père….©Marvel Comics
Même les couvertures sont mensongères puisque Elektra est représentée pendue alors que dans l’histoire, elle est en pleine forme. A ses pieds, un flic sous les traits de Bendis observe le cadavre…. On appréciera le message inconscient de cette scène…
Ce qui est complètement dingue, c’est que les sauts dans le temps que Bendis propose sont complètement carabinés, inexplicables et à contre pied de la plupart des caractères mis en scène…. Ah ? Milla n’est plus aveugle ? Matt Murdock avait un plan post mortem ? Stick est capable de se réincarner ? Bref des personnages creux, une intrigue plate invraisemblable où Bendis parvient à déglinguer ses personnages en leur faisant faire et dire n’importe quoi, une fin nulle et une histoire décompressée sur huit volumes où les dessinateurs se font plaisir….
Encore une Bendisserie laborieuse, loin, bien loin de l’effroyable concision, de la violence et de l’économie verbale d’un Garth Ennis qui clôturait en moins de 40 pages la vie de Frank Castle avec Richard Corben sans toute cette débauche de moyens : quatre dessinateurs par histoire, des ( très belles) couvertures alternatives par dizaines pour une montagne qui accouche de sa souris habituelle….. En tout cas, bénie soit l’intégrité de David Mazzucchelli de n’avoir pas participé à cette débandade….
Teaser du soir:
« Daredeweek » 1/5
Le dernier récit de Daredevil, sa fin : c’est Brian Michael Bendis qui s’en occupe bien sûr. Mais End of days est-il plus un hommage vibrant et sincère à Matt Murdock, un écrin pour le baroud d’honneur de Klaus Janson, ou un scénario décompressé de plus avec contresens sur le personnage à la clé ?
Hello Sonia, au risque de me répéter /radoter, je ne vois pas en quoi un divertissement devrait être de mauvaise qualité. La question n’est pas la continuité ou pas, on s’en fiche. C’est simplement être raccord avec le scénario écrit. Quand on créé le personnage de Milla Donovan, on devrait être capable de se rappeler qu’elle est aveugle et qu’elle n’ a pas 60 ans de continuité derrière elle.
Dernièrement j’ai lu The Sword des frères Luna et l’ai adoré : un divertissement extrêmement bien mené, une sorte de Kill Bill pas très bien dessiné, mais sans prétention, au scénario et à la fin implacable. Ce n’est pas du Alan Moore, ni la bD du siècle mais le pacte entre l’auteur et son lecteur semble respecté : le divertir sans le prendre pour un con, sans tricher, ni magouiller ses effets quand on a bien allumé le lecteur et faire machine arrière….
@Omac : tu me dois 28€ !
J’avais complètement oublié cette histoire,maintenant je sais pourquoi!
La matraque perforante de Bullseye,oh pinaize!
Il me semble que l’utilisation du trombone et de la dent cassé comme projectiles mortels, on les doit à Joe Quesada dans Guardian Devil. Miller était resté plus soft, enfin façon de parler (la carte à jouer, le trombone mais pour tuer une mouche, le fil du micro pour étrangler…) et faisait quand même utiliser pas mal d’armes conventionnels à Bullseye (le pistolet Mauser, les shurikens et le sai d’Elektra…)
Dans le même esprit, Millar et hitch feront utiliser ses ongles à Hawkeye dans le volume 2 d’Ultimates…
Ca y est je l’ai lue. Depuis le temps que je fantasmais sur cette bd, enfin, surtout pour les dessins… Et au final, c’est vraiment ce que je retiendrais et qui fait que je suis content de l’avoir : niveau dessins, c’est tout de même du lourd. Même si je ne suis pas fan de certains angles que Janson fait subir aux corps, je cite Présence : « Grâce à Sienkiewicz, les dessins de Janson passent d’un niveau acceptable mais un peu daté, à une vision artistique plus affirmée. »
Parce que à part quelques planches, quelques inserts (sérieux, ce Caïd de dos de Sienkiewicz période LOVE AND WAR, c’est magnifique), c’est surtout Janson. Et il sert bien le propos : c’est noir. On reste dans le polar, celui que Bendis avait repris.
Clairement, on n’est pas dans le meilleur de son run sur le personnage. Mais je vois les choses ainsi : alors que Ennis avait fait une superbe The End du Punisher en reprenant le versant social du personnage et son jusqu’au boutisme, Bendis se promène dans la continuité et rend hommage aux auteurs de comics ayant oeuvré sur DD plus qu’au personnage lui-même. On revoit ses amis, ses amours, ses emmerdes, on nous donne de belles planches pour se souvenir, on reprend la Main, des flèches par centaines, un bar refait exactement de A à Z… C’est de la pure nostalgie. Alors que le The End du Punisher, rien de tout ça : aucun personnage connu, du nihilisme, la fin de l’humanité.
Alors oui, ça m’a gonflé de voir plein de gamins roux d’environ du même âge (surtout que comme dit JP le gêne est récessif), oui Fury qui revient à la fin avec un dossier c’est rageant, oui je ne comprends pas l’attitude de Bullseye, oui on n’apprend rien lors des entretiens avec Ben Urich mais bon, c’est tout de même une belle ballade. J’ai adoré le concept des couvertures où tous les personnages sont présentés comme morts. Et à l’exception d’une couverture mensongère, de nombreux personnages meurent. Et c’est aussi marrant que malin, si jamais quelqu’un voulait repartir sur cette version du nouveau DD.
Donc je n’ai pas trouvé ça génial mais j’ai trouvé ça plutôt sympa et malgré tout respectueux, plus de l’esprit que de la lettre. Ca me donnerait envie de relire les runs de Bendis et Brubaker car j’ai oublié des choses qui sont rappelées dans ce End of Days.
Et comme d’habitude, l’analyse de Présence est pertinente et je la partage presque intégralement.
babelio.com/livres/Bendis-Daredevil-End-of-Days-Integrale/1503089#!
Ah, un autre truc qui m’a plu : Bendis n’évite pas la conclusion facile de ne rien dévoiler (je pense à toi, BLUE FLAME). En deux planches, on apprend tout de Mapone, sauf qu’on ne sait pas pourquoi il a dit ça et pourquoi Bullseye en devient fou (une réminiscence de 100 BULLETS ?). Je ne sais pas pour vous, mais même si son apport au cinéma est indéniable et important, CITIZEN KANE n’est pas un film palpitant ou totalement bien écrit. Mais c’est très bien joué et réalisé. Sur cette base, Bendis a fait un peu la même chose, qualitativement : malin, solide, beau, mais pas flamboyant.
MAPONE !
Ca ne devrait strictement rien vouloir dire, pour Bullseye !
C’est franchement une intrigue mal branlée de la part de Bendis.
Ou alors… Dans le Marvel Universe, il existe un pays qui s’appelerait la Maponie, au bord du cercle polaire.
Bullseye, s’étant toujours imaginé au coeur de la cible, ne pouvait s’entendre dire qu’il était périphérique, du fait de sa mère, que Matt aurait bien connu (et ta soeur aussi ?)
Totalement ravagé par cette révélation, Bullseye se suicide et embarque avec lui le scénario, obligeant Bendis à tout réécrire, mais c’est pas grave, ça lui prendra cinq minutes sur un coin de table.
Comment, c’est qu’un ramassis de conneries ?
Hey, je me mets au niveau de l’oeuvre, les gars !
Ou alors, DD voulait dire « Map One », ce qui a ramené Bullseye à ce jeu de FPS où il avait été éliminé dès le premier niveau, ébranlant totalement sa confiance en lui…
Ou encore, DD avait la machoire enflée et articulait mal, il voulait dire « Ma pine ». Les comics Marvel ne pouvant montrer d’organe sexuel mais étant moins réticent sur la violence graphique, Bullseye s’empare du symbole phallique le plus proche (le Billy Club) et pénètre Matt, par les deux trous en un, dans une partie de son corps supposée parmi les plus sensibles.
Plus tard, pris de remord de ne pas lui avoir mis le Billy Club ailleurs, il se suicide…
Rien à voir avec DD, mais je ne suis pas d’accord sur THE BLUE FLAME : les expressions faciales me semblent laisser présager de la fin.
Sinon, Mapone, si ça se trouve, c’était juste un cri de révolte envers ses frères opprimés : finissons-en avec la résignation et l’indifférence, ouvrons les yeux ! Partout, l’injustice, le nationalisme, l’exclusion (on le sait peu, mais Bullseye est un disciple du grand penseur George Abitbol)
Ah un moment il n’y a pas une charge sur Brubaker ? C’est ce qui m’ a semblé.
Oui car je l’ai moi aussi finalement acheté surtout pour la partie graphique.
Et c’est en effet assez décevant. je ne dirais pas mauvais mais quand même. Que d’erreurs….Sans avoir lu l’article avant j’ai relevé les mêmes défauts qui m’ont énormément dérangé plus j’avançais dans la lecture. Et puis le 2nd DD était compréhensible des km à la ronde. Mal construit, trop d’impasse, trop de personnages finalement maltraité à l’instars de Matt qui devient un véritable psychopathe (même Miller n’avait pas osé) et problème de rythme.
Par contre c’est beau.
Comme Bruce je ne comprends pas ce qui ont crié au chef d’œuvre.
NB : pour rappel Bendis dans son run, notamment au début ne fait que reprendre des précédentes intrigues. Il n’a rien inventé.
Ah mais justement JB : BLUE FLAME n’a pas de fin. Aucun courage de terminer ce qu’il a commencé. J’attends l’article de Pat6, vous pourriez peut-être faire un team up ?