Kon-Lankhul (Lady Boy vs Yakuzas)

Lady Boy Vs Yakuzas par Tohifumi Sakurai

Du Grindhouse ! Du Vrai !

Du Grindhouse ! Du Vrai ! © Akata

AUTEUR BRUCE LIT

1ère publication le 20/11/17- MAJ le 18/07/19

VO : Futashaba

VF: Akata

Lady Boy Vs Yakuzas est une série complète en 5 tomes écrite et dessinée par Toshifumi Sakurai parue en 2013. Il s’agit d’une lecture aussi drôle qu’éprouvante en matière de sexe, de gore et de trash à réserver à un public très averti malgré le floutage des sexes. 

Le sens de lecture est japonais et il convient de saluer l’admirable traduction de Yuta Nabatame.

Par peur des morpions, pas l’ombre d’un spoiler asexué ne viendra s’incruster dans votre slip.

Le pitch : Il était une fois, 100 pervers en slip à la poursuite d’un transsexuel malgré lui.
Uh?
Oui, vous avez bien lu ! Notre héros Kozo est un yakuza porté sur la quéquette. Tant et si bien qu’il culbute, tour à tour la femme puis la fille de son patron.
Pour se venger, celui-ci castre son employé et le transforme en femme ! Transformé en Bimbo, notre héros est parachuté sur l’île Kon-Lankhul (oui !) où vivent 100 pervers sexuel. Commence alors le plus atypique des reality-show : l’île infestée de caméra va suivre le calvaire de Kozo poursuivi par des criminels qui doivent la violer pour retrouver leur liberté

Ce qui devait n’être qu’une formalité tourne bientôt à un invraisemblable survival : Kozo trouvant des alliés inattendus avec des psychopathes en quête de rédemption. Notamment son père, ex-amateur de revues pédophiles qui tente de racheter ses fautes auprès de son fils !

A vos marques ? Prêts ? Violez !

A vos marques ? Prêts ? Violez ! © Akata

…..
Vous êtes encore là ?
Vous voulez encore me fréquenter ?
Vous n’allez pas me dénoncer à la police ?
Parce que c’est là que ce manga prend une tournure insensée: un survival passionnant, truffé d’humour noir et scato, de violence exacerbée mais aussi (et surtout) porté par un talent hors du commun qui raconte une véritable histoire.

Lady Boy Vs Yakuzas enfonce son gode (of war) bien profond dans tous les tabous de la société : l’hygiène ? Un criminel est transformé en PQ humain. L’amour ? La sexualité n’est envisagée que comme un moyen de domination et de souffrance. Le viol ? une routine pour ces personnages qui se servent du corps de l’autre comme outil de satisfaction.

Rien ne sera épargné à Kozo pour lui enlever sa nouvelle virginité

Rien ne sera épargné à Kozo pour lui enlever sa nouvelle virginité © Akata

Ce qui serait tout simplement vomitif et nauséeux dans un Crossed de Lapham est ici impitoyablement drôle et à lire au dixième degré.  A aucun moment Sakurai ne tente de magnifier ses ordures ou de les rendre ambivalentes. Mais il s’amuse comme un fou à imaginer dans une fiction le comportement gaffeurs poussé à l’extrême des pire pervers sexuels.  Plutôt que des les repousser, Sakurai explore à fond leur potentiel comique.

En fait Sakurai pourraît être le Garth Ennis Japonais. Voilà ! C’est dit ! C’est le manga qu’il aurait pu écrire, peuplé de psychopathes d’humeur tellement joviales que l’on quitte immédiatement tout réalisme de ces perversions complètement folles et…drôles.  L’outrance atteint un niveau maximum lorsque Kozo accepte pour survivre un rapport sexuel avec son père qui ne l’a pas reconnu. Comme le détective Soap avec sa mère dans le Punisher.

Une Splash Page un peu cérébrale...

Une Splash Page un peu cérébrale… © Akata

Pourtant il est impossible pour qui est capable de surmonter ses limites du mauvais goût de ne pas déceler un véritable d’auteur. Aux dessins d’abord, le graphisme de Sakurai est un mélange de réalisme et de caricaturiste troupier. Tout est volontairement disproportionné : les seins de Kozo sont évidemment énormes, on se demande encore comment il lui est possible de s’enfuir ses talons sur le sable.  Comment prendre au sérieux cette armée de psychopathes en slip, à l’anatomie plus maltraitée que chez Rob Liefeld, ces cous plus allongés qu’une Ndébélé, ces doigs de pieds aussi pointus que des pointes de flèches, ces nez qui coulent à chaque contrariété ?

Comment résister à l’humour dévastateur de ce survival iconoclaste ? Ces vilains aux mines patibulaires qui meurent dans des conditions grand-guignolesques. On se rappelle encore du Russe de Ennis transformé en femme sur une île de criminels et du plaisir obscène à les voir mourir.

Notre héros avant sa femelle transformation et son patron au nez qui coule

Notre héros avant sa femelle transformation et son patron au nez qui coule© Akata

Mais surtout derrière l’obscénité et le chaos, il y a le travail, une méthode, une discipline. Celle d’un auteur au parcours atypique qui a réalisé des enquêtes gonzo pour des magazines sulfureux : il a testé les bars SM, une falaise où les hommes éjaculent dans le vide, a eu des relations sexuelles avec une mamie de 78 ans et une autre femme de 160 kgs.

Concernant ces criminels sexuels, l’homme a récupéré des milliers de photos de faits divers pour retenir 100 physionomies pour sa BD. Il fait l’effort de leur donner un état civil et une histoire.  Kozo commence l’histoire comme une bimbo décérébrée. Sauf qu’entre deux gags, il est possible de percevoir la justesse de de son regard, une certaine intelligence et une réelle douleur d’avoir à affronter son père. Car derrière tout ce saint-cirque, l’histoire d’un père qui tente de sauver la vie de son enfant marqué par ses perversions est aussi imprévue que…touchante !

Il y a un vrai scénariste pour réussir ce cocktail inhabituel de viol de tabous et d’ironie distancée : un gars qui réussit à tenir 5 volumes, à réussir à maintenir en vie Kozo contre 100 tueurs en multipliant les coups de théâtre, les alliances contre-nature (sic), massacres et prises de conscience. Alors oui, Sakurai va très loin dans la transgression des limites, dans le pipi-caca et la violence, mais Sakurai sait doser son récit, y injecter des dosettes d’émotion, d’introspection et de jouer parfaitement avec les codes du survival façon Battle Royale. Dont il pourrait être l’héritier le plus intéressant.

Avec son arrière fond Grindhouse, son ultraviolence souvent hilarante, Lady Boy Vs Yakuzas obtient sans efforts sa place dans le Top 5 des meilleurs mangas lus cette année. Il y a sûrement plus respectable (le très surestimé Chisoboke qui a fini au bac à solde) plus sentimental sur le changement de sexe (le très beau et très conseillé Dans l’intimité de Marie), mais en 2017 lire un manga qui n’a peur de rien, ni de personne et ressuscite les frissons de plaisir de mes vieux Garth Ennis, donne envie de refaire un petit tour à Khon-Lhankul.

Un couteau contre un hélico

Un couteau (no ken) contre un hélico © Akata

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La BO du jour : Pour des raisons évidentes : 

https://www.youtube.com/watch?v=TqseYiGA0us

28 comments

  • Bruce lit  

    Content d’avoir suscité ton intérêt.
    Concernant le lien, il s’agit d’une nouvelle tactique de Bruce Lit : le lien mensonger, encore mieux que du putaclick ! Tu cliques sur Neil Gaiman et tu te retrouves sur Liefeld ! Le concept me plait, merci de me l’avoir suggéré.
    Plus sérieusement, c’est une bourde. J’avais écrit sur BATTLE ROYALE que j’adore le film et le manga au début du blog. Le temps a fait que j’ai trouvé ces articles médiocres et que tout a fini à la poubelle. Le créneau est donc dispo pour qui voudrait écrire sur BR.

    • Kaori  

      Hum… Pour l’instant je passe mon tour. Ça fait trop longtemps que j’ai vu le film, et je n’ai pas lu le manga.

      Ah et tu m’as bien fait rire avec ton nouveau concept !

      Et enfin, t’arrêtes de virer les trucs que TU trouves inintéressants ??

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