REDLINE par Takeshi Koike – Studio Madhouse
Un petit tour de piste drivé par JP NGUYENDVD/Blu-Ray : Kazé
Sorti dans les salles japonaises en 2010, REDLINE est un anime de course automobile dans un univers futuriste. Il dure 102 minutes et son héros s’appelle JP (si, si, je vous jure !) Les lignes ci-dessous tenteront d’expliciter toutes les qualités de cette œuvre en dehors de l’homonymie de son protagoniste avec votre serviteur.
Cet article comportera forcément des spoilers, car ça améliore l’adhérence et la stabilité des véhicules lancés à haute vitesse !
En principe, les histoires de bagnole, ça me désintéresse. Les engins mécaniques, ça ne m’a jamais vraiment botté. Bon, j’avais du avoir une petite collection de voitures Majorette quand j’étais gosse mais je ne me suis jamais passionné pour les modèles en taille réelle. Quand mes petits camarades faisaient des duels de cartes à coups de cylindres et de tours/minute, ça ne me parlait pas du tout. Adolescent, la mobylette ne m’a jamais tenté. Et une fois adulte, je n’ai jamais réussi à obtenir mon permis de conduire !
Et pourtant, REDLINE est un des animes les plus marquants qu’il m’ait été donné de voir et dont plusieurs visionnages n’ont pas émoussé le charme. L’histoire est pleine de clichés et tient quasiment du prétexte. Tous les cinq ans, quelque part dans l’univers, se déroule la Redline, la course la plus folle réunissant les meilleurs pilotes et les machines les plus puissantes. JP perd la Yellow Line, la course de qualification, mais réussit à se faire repêcher grâce aux votes du public et au forfait de certains concurrents. Car cette année, la Redline aura lieu à Roboworld, un monde gouverné par des militaires cybernétiques qui n’a aucune envie d’accueillir cet évènement sportif et a menacé les concurrents de représailles en cas de course sauvage !
JP va devoir convaincre Frisbee, son agent, qui s’est endetté auprès de la Pègre, de ne pas compromettre une nouvelle fois ses chances de victoire tout en essayant de séduire son amour de jeunesse, Sonoshee McLaren, également engagée dans la course.
Une bande-annonce qui, elle, ne ment pas sur le contenu du film.
La suite est quasiment cousue de fil blanc mais c’est encore un cas où l’histoire compte moins que la façon dont elle est racontée. La mise en images est chatoyante, à commencer par le design des personnages, aux morphologies diversifiées, depuis les simples humains aux looks kitsch aux aliens aux traits animaliers (chien, gorille…) en passant par les êtres aux prothèses cybernétiques. Les créateurs exploitent parfaitement le contexte extraterrestre et font défiler moult créatures aux apparences improbables. Si certaines tronches sont légèrement inquiétantes, c’est surtout le côté exagéré, voire le mauvais goût, qui donne une saveur particulière au casting de REDLINE. Ainsi, notre héros, JP, arbore une banane d’une taille démesurée qui aurait rendu Dick Rivers vert de jalousie… Du côté des véhicules, nous avons droit à des engins motorisés aux capacités impressionnantes avec une belle diversité dans les designs. Enfin, l’animation nous plonge au cœur de la course et parvient par moments à vous scotcher à votre fauteuil tellement l’impression de vitesse est bien retranscrite ! Ainsi, lorsque JP booste ponctuellement son moteur avec une capsule de « Platinum Nitro », l’image subit des distorsions pour véhiculer l’accélération hors-norme qui se produit à cet instant.
Si le film ne comporte que deux très longues scènes de course, entre les deux nous avons droit aux préparatifs, à quelques flashbacks et une présentation ludique des différents concurrents. Au fil de la course, il y a quelques rebondissements annexes qui sortent un peu de nulle part mais le rythme est assez soutenu et on ne s’ennuie jamais tout au long de REDLINE.
Alors que le film file à toute allure, sa réalisation aura pris pas mal de temps : 3 années de développement et 4 années de production ! Un paradoxal éloge de la lenteur pour raconter une course vitesse ! Mais le résultat se voit sur l’écran : dans le genre, c’est vraiment beau, avec plein de designs originaux, une foultitude de détails et des animations même pour les arrière-plans. REDLINE a été réalisé sans recours à la 3D mais a bénéficié de plus de 100 000 dessins « faits main » ce qui confère à certaines scènes un charme particulier, comme lorsque la voiture de JP fait des hoquets avant de pousser une forte accélération : ce parti-pris cartoonesque est alors bien plus efficace qu’une froide animation assistée par ordinateur.
Si l’animation est « à l’ancienne », elle est au final diapason de son héros. JP pilote un coupé jaune évoquant une voiture américaine des années 70 (avec un moteur quand même ultra-trafiqué) et arbore un look emprunté au Fonzie de HAPPY DAYS : pas de doute, il a l’étoffe des « rétros » ! Les démêlés de son agent avec la Pègre, et les pressions qu’il subit pour perdre la Yellow Line, tout cela fleure bon le cliché des combats de boxe arrangés où l’outsider tente de modifier une histoire écrite d’avance… Cette influence polar est assumée par Takeshi Koike qui a déclaré en interview être un grand fan de Frank Miller et de son SIN CITY.
Mais dans une course où tous les coups sont permis et où les adversaires n’hésitent pas à utiliser harpons et missiles, le véhicule de JP est entièrement dépourvu d’armes ! Ce héros est donc résolument romantique, et à plus d’un titre puisqu’il courtise la belle Sonoshee, personnage qui ne se limite pas au rôle de demoiselle en détresse puisque ses talents de pilote sont bien mis en valeur et qu’elle aura un rôle décisif dans la dernière ligne droite !
Par certains aspects, JP évoque le Spike Spiegel de COWBOY BEBOP. Il affiche la même désinvolture et sa relation avec son agent et son mécano, qui sont ses aînés, est similaire à celle que Spike entretient avec Jet Black.
En fait, même s’ils sortent de moules très familiers, les personnages sont suffisamment stylés et sympathiques pour faire passer la pilule. Leurs créateurs leur ont insufflé assez de vie pour qu’on ait envie de les suivre, au moins le temps de la course. Il y a là un amour du détail et un talent pour l’épure qui parviennent, en quelques secondes, à brosser un portrait ou esquisser un background au moindre personnage secondaire. La générosité de cet anime va au-delà des images avec un univers foisonnant qui pourrait se prêter à des revisites.
Quelques mots sur la BO de l’anime, que l’on doit à James Shimoji. La musique étant perçue comme très importante pour le réalisation Takeshi Koike, il a souhaité disposer en abondance d’ambiances musicales pour accompagner les différentes scènes du film. Etant nul pour cataloguer les genres musicaux, je me limiterai à dire qu’il y a pas mal d’instrumentaux mais aussi quelques chansonnettes pop parmi les 42 ( !) pistes, les plus marquantes étant pour moi REDLINE, REDLINE DAY et surtout YELLOW LINE, un morceau épique de sept minutes qu’il est déconseillé d’écouter au volant sous peine d’être pris d’un irrépressible désir de pointe de vitesse : la guitare et les percussions y sont redoutablement efficaces et pourraient donner le groove à une tortue sous traitement hypotenseur.
Je vous ai d’ailleurs mis ci-dessous un montage qui superpose ce morceau à la scène d’intro du film, ou l’on voit précisément la course Yellow Line se jouer…
Une ligne qui donne furieusement envie de tracer la route…
Evidemment, ce n’est pas un film parfait et il ne pourra pas plaire à tout le monde. Comme dit plus haut, l’intrigue est très prévisible et il ne faut pas rechercher de sous-texte ou de message caché… REDLINE propose un bon moment de détente, du délire fun, bien pensé et amoureusement façonné. Dans le genre, il évite le gros foutage de gueule et les moments totalement incongrus qu’on pourrait trouver dans d’autres animes comme, par exemple, BATMAN : NINJA.
Pour conclure cet article, j’emprunterai les mots d’une voiture… Si, si !!! Dans TRANSFORMERS, il y a un autobot nommé Jazz dont la devise est : « Fais le avec style, ou ne t’embête pas à le faire ! » Clairement, du style, Redline n’en manque pas et vous ne devriez pas vous embêter devant un anime qui vous en mettra plein les yeux et les oreilles, sans trop solliciter votre cortex. Si ce voyage vous tente, attachez bien vos ceintures et… PLATINUM NITRO !!!
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La BO du jour : Ben… Redline, quoi !
Tout pareil j’éprouve un désintérêt total pour les bagnoles (à part celle de Starsky & Hutch, faut quand même pas déconner). Mais ton article JP à totalement réveillé mon intérêt pour cet anime ! Tu as su trouver les bons mots et les arguments qui font mouche.
En regardant les vidéos et les images, il m’a semblé faire un bon en arrière. Cet anime ressemble furieusement, dans l’ambiance et dans le style, au film MÉTAL HURLANT sorti en… 1981 !!!
Mais ce n’est pas pour me déplaire. Malgré ses défauts, je continue de me passer MÉTAL HURLANT parfois, et je l’aime toujours autant.
C’est en rédigeant cet article que j’avais recherché ton article sur la boxe, alors en cours de refonte.
La course truquée par les mafieux fait forcément écho aux matchs arrangés.
» Mais le résultat se voit sur l’écran : dans le genre, c’est vraiment beau, avec plein de designs originaux, une foultitude de détails et des animations même pour les arrière-plans. REDLINE a été réalisé sans recours à la 3D mais a bénéficié de plus de 100 000 dessins « faits main » »
Ce que j’aime beaucoup dans les animes, et ce qu’on voit notamment dans les extraits de celui-ci, c’est qu’ils animent parfois super bien des trucs banals.
Genre t’es impressionné en voyant une main tapoter des trucs sur le tableau de bord, ou juste des effets de fumée sur les roues.
ça se voit bien sur cet anime, mais c’est quand même un truc très « japanime » de rendre des actions basiques cool à regarder.
Sinon c’est un anime que je connais de nom mais j’ai jamais franchi le pas vu que je m’en fous un peu des bagnoles. On dirait que ça peut quand même être sympa à voir.
Ah j’ai oublié de dire que le style de dessin avec beaucoup d’ombres très noires me fait penser au court métrage World Record de Animatrix, avec l’athlète qui se dépasse au point de sortir du programme.
://www.youtube.com/watch?v=SJYDIhJMMC4&ab_channel=YanikFillion-Murphy
C’était cool Animatrix. Plus cool que toutes les suites je trouve.
Ah oui ça me rappelle que j’en ai vu deux ou trois seulement, il faudrait que j’arrive à tous les voir, les Animatrix.
Ce sont surtout des « essais » autour du concept de Matrix, qui ne vont pas trop en profondeur mais qui sont chouettes.
Je trouve que ç’aurait été bien plus intéressant de pousser le concept dans d’autres films en jouant sur les éléments abordés dans Animatrix (des gens qui se réveillent d’eux-mêmes, des glitchs dans la matrice vus comme des turcs surnaturels (il y a un segment Animatrix ou des gamins jouent autour d’un lieu ou la gravité n’existe pas…avant que le glitch ne soit corrigé)
Pris comme tel Animatrix n’est pas un truc très profond, ça peut faire penser à une grosse promo autour du concept du film, mais c’est très stylé et au final vraiment plus sympa que certaines suites.
Tiens dans un segment appelé « a detective story », on est dans un film noir à la Humphrey Bogart en noir et blanc ou le privé poursuit une femme mystérieuse (Trinity)
Je me suis amusé à en faire une affiche en mettant vraiment Humphrey Bogart et Carrie Ann moss (les crédits n’ont aucun sens par contre^^)
://i.imgur.com/64uOkhm.jpg
Une perle, rien à ajouter 😍
Salut JP.
Vendu (à quelqu’un qui se déplace en vélo et qui n’aime pas les voitures).
On est sous le charme avec le kid à la maison.
Superbe animation et une BO qui pet une pèche d’enfer. J’ai cru commencé à faire mon Taïso dessus.
J’ai en tête Speed Racer de mon côté même si ce n’est pas la même chose.
il a l’étoffe des « rétros » : une nouvelle phrase culte à ton crédit.
Très bon article.
Ah, je vais voir si j’ai ça dans mes cartons. Déjà, comment résister à un (autre) héros nommé JP ?
Et puis, ça fait un peu madeleine de Proust, mais j’ai un tendre souvenir d’un Livre dont vous êtes le héros issu de la licence Car Wars, à la thématique proche de cet anime. Enfin, le style moderne de Madhouse, c’est toujours un plaisir.
Merci pour cette découverte !
Tu parles du Combattant de l’autoroute (très Mad Max) ?
Après recherche, celui auquel je pense s’intitulait A fond la caisse chez Hachette. Il me semble que l’on pouvait changer de véhicule au cours de l’histoire, mais je confonds peut-être avec celui que tu cites
Cool de parler de ce film, j’ai bien aimé, une course de frappés sans le moindre scrupules pour les autres coureurs où tous les coups sont permis sauf pour JP qui pour lui, une vraie course est avant tout un plaisir d’atteindre la victoire avec juste sa conduite et sa nitro, rien de plus. Il est vrai que l’histoire n’a rien d’extraordinaire, c’est qu’une course… mais quelle course ! On est vraiment entrainé dedans, le visuel est génial et la musique si entraînante et bien accordée aux scènes, fait que l’on ne s’ennuie pas, on reste scotché jusqu’aux tous derniers instants, avec ce baiser de fin qui clôture.
Le côté sympa que j’apprends est qu’ils l’ont fait à ancienne, tout en dessin, cela est plus rare de nos jours, ça demande certes plus de temps de travail mais c’est bien que ça ne se perde pas (un peu comme les films en « stop-motion » une prouesse fascinante)
Merci pour ton article !
Comment, toi non plus tu n’as pas le permis ? On en apprend tous les jours… bon il est vrai que Bruce a fini par l’avoir aussi, le fils lui, il le passe lundi…
Moi petit j’adorais les voitures. C’était même un début de passion et encore aujourd’hui, même si je m’en fous royalement, j’apprécie la mécanique et la beauté de ces créations. Des fois j’adorerai essayer de conduire sur piste, qu’on me prête une Porsche vintage, une Ferrari, une SM (Citroën les gars !) etc…
J’ai regardé les vidéos. Je ne trouve pas que cela fasse très manga, ça me rappelle pas mal AEON FLUX, mais pas le film, le DA (mais si souvenez-vous, L’oeil du cyclone sur Canal+ dans les années 90…). C’est assez agréable et ça défouraille beaucoup, mais bon c’est le même principe que les Fous du volant en fait non ? Où sont Diabolo et Satanas ?
Pour les BO, désolé, je n’ai pas du tout aimé. C’est très techno dance je trouve, pas du tout mon truc (mais ça doit en effet bien marcher dans une salle de sport).
Bon sinon deux choses : article impeccable as usual et plein de jeux de mots de fous (celui que souligne Fletcher est de haute volée) et si je tombe dessus, je penserai à toi et n’hésiterai pas à le regarder. Merci donc pour la découverte !
« J’ai regardé les vidéos. Je ne trouve pas que cela fasse très manga »
C’est pour ça que je comparais à Animatrix ou il y a beaucoup de styles différents. Mais c’est bien japonais hein^^
Moi j’aime bien les design des vieilles voitures. Les trucs années 30-50 quoi.
Celles d’aujourd’hui se ressembent toutes vu que ce qui prime c’est l’aérodynamisme.
Et je suis pas fan des designs de voitures de sport modernes façon Porsche et tout.
Je préfère genre…une delage d8 coupe 1938.
Après c’est pourri niveau pollution, vitesse, tout…mais c’est joli^^
Moi j’aime bien le design des années 50-60, mais tous les autres aussi, ils ont tous leurs charmes. Ca me fait penser que j’ai oublier de dire à JP qu’il devrait regarder le film LE MANS 66 de James Mangold (FORD V FERRARI en VO).
Je ne l’ai pas trouvé si extraordinaire LE MANS 66. J’ai passé un bon moment (même si je n’ai pas compris les entorses à la vraie histoire) mais pas au niveau où cela m’a été « vendu ».
Merci pour le vote de confiance de tous ceux qui ne l’ont pas encore vu.
Vous m’en direz des nouvelles.
A dire vrai, c’est un article écrit il y a un certain temps et relire mon texte enjoué de l’époque me fait du bien, un peu comme s’il avait été écrit par quelqu’un d’autre.
Un anime de course automobile dans un univers futuriste […] En principe, les histoires de bagnole, ça me désintéresse. – Tout pareil.
Notre héros JP : je confirme, tu es notre héros JP. 🙂
3 années de développement et 4 années de production : beau projet, je suis admiratif des créateurs qui parviennent ainsi à faire aboutir leur projet au long court.
JP a l’étoffe des rétros : ça fait du bien de retrouver ton humour JP, et ça permet de mesurer combien il m’a manqué.