Ghost Rider par Jason Aaron et collectif
1ère publication le 23/11/16- Mise à jour le 20/05/18
Auteur: MATTIE-BOY
VO : Marvel
VF : /
Toutes les images © Marvel Comics
Cet article portera sur le run de Jason Aaron sur Ghost Rider, à savoir les épisodes 20 à 35 de Ghost Rider v.5 publiés entre 2008 et 2009 + la mini-série « Heaven’s on Fire » en 6 épisodes. Le tout a été publié dans un Omnibus Marvel en VO.
Ces épisodes font suite au run de Daniel Way. Ce dernier a produit un run de 19 épisodes assez ennuyeux, la faute à une intrigue étirée sur trop d’épisodes, à des dialogues peu inspirés et un supporting cast inexistant et ce malgré de beaux dessins et des idées pas toutes mauvaises. Il aura d’ailleurs condamné la série en VF dont la publication s’est arrêtée à l’épisode 23. C’est fort dommage car Panini a stoppé cette série au moment où elle devenait intéressante.
Le concept du Ghost Rider est assez difficile à prendre au sérieux. Pour rappel, Johnny Blaze a passé un pacte avec le Diable pour sauver la vie de son père adoptif et s’est vu condamné à devenir l’esprit de la vengeance, le Ghost Rider, un motard à la tête enflammée. J’ai toujours bien aimé le design de Ghost Rider. Mais le concept d’un esprit vengeur qui punit les criminels alors qu’il bosse pour le Diable, et qui est comme par hasard un américain opérant uniquement en territoire US alors que les entités de type dieux et démons n’ont aucune raison de se limiter à cette zone, en font un concept bancal. Si on ajoute à cela l’absence d’intérêt du personnage de Ghost Rider qui est juste une sorte de Terminator sans émotions, il manquait quelque chose pour que ça marche.
C’est là qu’arrive Jason Aaron. Pour mieux comprendre son run, il peut être intéressant de lire la fin du run de Way (encore que je ne l’ai pas fait, donc si vous êtes malins, vous comprendrez sans) qui a tout de même eu une très bonne idée avant de s’en aller (mieux vaut tard…). Cette idée vient bouleverser la continuité du personnage (si quelqu’un en avait quelque chose à foutre) mais est très cohérente. La révélation est que le Ghost Rider n’est pas une arme de l’Enfer mais du Ciel. Roxanne, la chérie de Johnny Blaze à l’époque (qui est à présent morte), aurait pactisé en secret avec l’archange Zadkiel pour que Johnny ne soit pas damné. Manque de bol? il l’a été quand même parce que les anges sont aussi des enfoirés. Il est donc promis à l’Enfer mais appartient à Dieu avant ça. Bien entendu, le diable ne s’est pas empressé de le dire à Blaze puisque ça l’arrangeait bien que celui-ci se croit lié à sa volonté.
De la rétro continuité ? Oui. Mais quand la continuité de base a peu d’intérêt ou de logique et que le personnage ne remue pas les foules, pourquoi pas ? Surtout que c’est davantage une révélation qu’une modification du passé qui viendrait fausser toutes les anciennes histoires. Et c’est d’autant plus cohérent pour un esprit punissant les criminels d’être au service du Ciel. Et j’ai envie de dire : ENFIN un auteur qui s’intéresse au concept religieux du Ghost Rider autrement qu’en le faisant se battre contre Satan, et contrairement aux auteurs qui l’ont juste fait se battre contre des ennemis lambda. Garth Ennis l’avait déjà fait dans une mini-série Road to Damnation. C’était sympatoche mais un peu court pour développer quoi que ce soit. Ennis avait cependant pris le même parti de décrire certains anges comme des opportunistes narcissiques se fichant pas mal du sort des humains.
Et justement ici, Zadkiel est un pourri qui veut prendre le pouvoir au paradis en destituant Dieu. Commence un road trip nous racontant comment Johnny Blaze va tenter de le stopper et au passage se venger de cet archange. Mais avant que Zadkiel ne se soucie de Blaze, celui-ci va d’abord se heurter à ses serviteurs.
Jason Aaron a su rendre intéressant ce personnage en redéfinissant complètement sa mythologie et en nous racontant le tout avec son célèbre ton décalé et humoristique dont il usera plus tard dans Wolverine & les X-men. Mais ici, c’est tout de même plus cru et sanglant. En gros Aaron ne se prend pas au sérieux et nous livre une histoire certes violente mais drôle. C’est ainsi que Blaze devra affronter des infirmières bardées de gros flingues au service de Zadkiel, un démon aux allures de poupée Barbie anorexique, des engins de chantier possédés, un camion démoniaque qui mange des gens, un colosse fanatique nommé the Deacon ou encore de vieux ennemis ringards oubliés.
Mais le plus fort, c’est cette mythologie qu’il va réécrire. On le sait à présent, Jason Aaron aime aborder le thème de la religion. Ici, il va se pencher sur la nature des Ghost Riders. Danny Ketch, le second Ghost Rider révélé comme étant le frère de Johnny Blaze et qui avait eu droit à sa série dans les années 90 est aussi présent et tombera sous l’emprise de Zadkiel. Celui-ci lui ordonnera d’assassiner tous les autres Ghost Riders susceptibles de l’arrêter car il ne peut le faire lui-même, n’ayant pas encore usurpé le pouvoir divin. Car oui, il y a des Ghost Riders partout dans le monde de différentes religions et au look carrément cool.
Aaron justifiera la présence d’esprits de la vengeance au service du paradis même en Afrique ou en Asie par le biais d’une habile explication comme quoi chaque peuple, en fonction de ses croyances, perçoit différemment les entités mystiques. Et comme l’expliquera le Ghost Rider arabe, là où Johnny Blaze, personnage principal dont nous adoptons le point de vue, verra les portes dorées de la nouvelle Jérusalem dans l’au-delà, un arabe y verra les rivières et les jardins de Jannah tandis qu’un autre personnage versé dans les croyances vaudou y verra la croisée des chemins où attend Papa Legba. D’ailleurs Dieu restera invisible et sera davantage associé à un symbole qu’à une entité anthropomorphe.
Certes si nous creusons en profondeur, nous nous rendrons compte que les concepts de chaque religion ne peuvent pas tous être transposés dans d’autres. Mais Aaron s’en fout, il est athée et ne rentre pas dans les détails. Il déclare que les Ghost Riders sont une réalité. Ce sont les religions qui s’y plient et rationalisent leur existence en fonction de leurs croyances. La démarche est intéressante dans la mesure où cela permet un rapprochement entre les religions qui partagent malgré tout de nombreuses croyances similaires, et une richesse bien plus grande de l’univers du Ghost Rider dont la représentation ne se limite plus seulement à un vengeur américain.
Blaze sera donc tout d’abord attaqué par des infirmières servantes de Zadkiel avant de rencontrer sœur Sara, une jeune femme forte qui a été entrainée aux arts martiaux dans un couvent par la mère supérieure. Oui, je sais, ça semble complètement con, mais je l’ai dit : Aaron ne prend pas tout ça au sérieux et nous livre une histoire déjantée très fun et agréable. Le personnage de sœur Sara est d’ailleurs vraiment attachant. Elle est à la fois pure, chaste et honnête mais carrément féroce quand il le faut. Le contraste est assez amusant et fait d’elle un personnage secondaire que j’ai été assez triste de quitter à la fin de l’histoire.
Ce qui nous amène à l’autre force de ce run : son casting. Le problème principal du personnage de Ghost Rider c’est que seul, il n’est pas intéressant. Car trop monolithique et dépourvu d’émotions. Ici, il fera face à son frère Danny Ketch déjà davantage vulnérable et sa relation d’amour/haine envers lui rendra les deux personnages plus profonds. De même, l’ajout du personnage de sœur Sara en tant que combattante aux côtés du Ghost Rider marche vraiment très bien. Elle est là pour révéler son côté plus humain. Blaze sera d’ailleurs tenté de tout laisser tomber au cours de l’histoire, dépassé par les événements et n’ayant plus aucune raison de lutter. Sara est aussi la petite fille du caretaker, le gardien du savoir des Ghost Riders. Elle endossera son rôle lorsque celui-ci mourra.
Ensuite, le concept des autres Ghost Riders est très bien trouvé. Et nous aurons droit à des vignettes intéressantes comme un Ghost Rider tibétain qui viendra réclamer vengeance pour son peuple auprès d’un officier chinois. Ou des vignettes amusantes comme les époux Ghost Riders africains en train de forniquer sous leur forme d’esprits vengeurs (donc des squelettes en feu. So sexy !). Nous aurons aussi droit le temps d’une parenthèse à l’apparition de deux Ghost Riders du futur uniquement là pour avertir Sara d’un danger. Ces Ghost Riders sont clairement un clin d’œil à Terminator et sont surtout là pour redonner espoir à Sara et…pour le délire.
Le casting des bad guys aussi est riche en idées amusantes. Des infirmières armées jusqu’aux dents aux anciens ennemis ringards en passant par un colosse fanatique qui récite la Bible en découpant tout le monde. Nous retrouverons aussi Blackout le vampire, ennemi du Ghost Rider Danny Ketch qui, alors qu’on le sent dangereux, se fera maraver la tronche dans une scène cartoonesque (à 2 reprises). Ce personnage est d’ailleurs devenu une sorte de blague maintenant puisque Dan Slott ne s’est pas privé non plus de le ridiculiser dans son Superior Spider-man lorsqu’il se fait torturer par Otto Octavius.
De même, Aaron s’en donne à cœur joie pour mettre en scène des démons plutôt délirants. Il y a le fameux camion vivant conduit par un clone de Dick Curless, le chanteur country qui fera d’ailleurs bouffer à l’autoradio en forme de bouche une cassette de son titre « A Tombstone Every Mile ». Et puis il y a la répugnante poupée Barbie rachitique aux yeux globuleux qui transforme les gens en tout et n’importe quoi. Parfois, l’humour est très violent et même si ce n’est pas du Garth Ennis, ça devient assez trash visuellement. Mais c’est drôle.
Les lieux où l’action se déroule vont de l’Amérique profonde peuplée de rednecks et autres personnages ravagés à une prison, de petites villes au milieu du désert, des contrées perdues en Asie ou en Afrique. On a la sensation parfois d’être dans une sorte de comics horrifique d’exploitation de type « pulp » (ou du moins une version parodique) avec les accès de violence délirants propres au genre dans des coins paumés. Ici, pas de cameo d’Iron-Man ou tout autre héros bankable. On est dans le GrindHouse de Marvel.
Aaron applique une recette efficace en transformant des ennemis grotesques en vraies menaces (bon…pas tous) grâce à leurs pouvoirs améliorés par Zadkiel. Ce qui donne un résultat à la fois sérieux au niveau des enjeux et comique dans les combats (notamment ce bouffon de Madcap et son pistolet à bulles complètement inutile qui aura cependant le pouvoir de plier à sa volonté ses adversaires.)
Bien sûr, il y a du sérieux dans tout ça. Zadkiel n’est pas là pour rigoler et même l’antéchrist (un sale gosse obscène) tentera de profiter du chaos pour prendre le pouvoir. Dans les rangs des « héros », nous pourrons aussi compter Daimon Hellstorm, fils de Satan qui s’opposera au plan de Zadkiel avec sa chérie Jaine Cutter (personnage obscur créé par Warren Ellis). Les seuls personnages, pour ceux qui les connaissent, qui nous rappellent qu’on est dans l’univers partagé Marvel.
Le personnage du shérif Kowalski est également intéressant. Alors qu’il enquête au début sur une affaire de route hantée par des esprits démoniaques dont Blaze subira les assauts, Kowalski, flic pourri, est kidnappé par un des descendants de ces esprits qui s’avère être un cannibale et se fera bouffer la main. Plus tard il subira le « Penance stare » du Ghost Rider qui consiste à lui faire ressentir les souffrances de tous ses péchés et il deviendra obsédé par Blaze. Quand les murs du paradis s’effondreront, il sera frappé par du feu divin et deviendra le nouveau Vengeance, un autre Ghost Rider ambigu à la fois désireux de tuer Blaze et d’empêcher Zadkiel de foutre davantage le bordel sur terre.
La partie graphique est assurée par 3 dessinateurs aux styles assez éloignés. Cela peut être gênant pour certains. Mais alors que je suis du genre à apprécier une certaine unité graphique et que je craignais cette disparité, j’ai été conquis par les 3 styles de dessin.
Les premiers épisodes sont dessinés par Roland Boschi, un français de chez nous. Son style est très brut et je craignais de ne pas l’aimer mais cela passe très bien après un temps d’adaptation. Il donne une atmosphère âpre à l’ensemble des épisodes sur lesquels il travaille grâce à son trait anguleux et parfois proche de l’esquisse. Mais il est aussi aidé par les couleurs de Dan Brown qui viennent relever le tout grâce à un supplément de textures et une palette de tons à dominance rouge qui illumine les planches. Boschi signe la plupart des épisodes car il revient pour la mini-série finale.
Ensuite lui succède Huat Tan Eng le temps de9 épisodes. Son style arrive en seconde position en termes de présence à l’image. Et c’est un style très particulier que j’apprécie assez. Il a travaillé plus récemment sur X-men Legacy (période Marvel Now) et un peu sur le Punisher de Rick Remender. Son style est tout en exagération. Les visages et les proportions des personnages sont allongés, les perspectives exagérées lors de plans en plongée ou contre-plongée mais il en ressort une impression de mouvement très agréable et une grande expressivité des corps et des visages (à quelques délits de sales gueules près lorsqu’il déforme un peu trop les visages, mais c’est rare). Sa manière aussi de dessiner les flammes des Ghost Riders est magnifique. Il est par contre un peu avare en décors parfois, notamment en Afrique où l’affrontement contre les serviteurs de Zadkiel semble se passer dans une zone vide. Les couleurs de Jose Villarrubia sont plus classiques que celles de Dan Brown mais offrent un rendu très lumineux, et c’est approprié lorsqu’on a du feu un peu de partout sur les planches.
Enfin, nous aurons droit à 3 épisodes seulement dessinés par Tony Moore qui se situent en fin de série, avant la mini-série qui permettra de reprendre l’intrigue. Tony Moore nous livre des épisodes qui forment un peu une parenthèse au niveau de l’intrigue. Ce n’est pas une parenthèse désagréable du tout, mais la voir en fin de série laisse planer un doute sur ce qu’il se passait pendant ce temps-là chez Marvel qui était sur le point d’arrêter cette série. On aurait pu s’attendre au contraire à une précipitation pour clore rapidement l’intrigue. Mais heureusement, il y a eu une mini-série en 6 épisodes, car conclure en 3 aurait été un sacré gâchis. Moore se sert de son style qui donne aux visages des airs un peu bouffons pour illustrer Blaze aux prises avec des démons lâchés sur le monde, notamment notre poupée Barbie flippante et le camion mangeur d’hommes. Et le rendu est très beau.
Venons-en aux quelques défauts de ce run. Tout d’abord la fin. Comme je le disais, la série s’achève au numéro 35 alors que l’intrigue n’est pas du tout résolue. Sans doute pour des raisons éditoriales ou de désintérêt des lecteurs (ce qui n’est pas en soi une preuve que la série est mauvaise, on connait bien des exemples contraires). La fin prend donc place dans la mini-série en 6 épisodes Heaven’s on Fire. Pour ma part je trouve la fin satisfaisante en termes de scénario mais on pourra tout de même juger que la lutte finale contre Zadkiel est torchée assez rapidement.
On pourra aussi noter un démarrage de l’intrigue principale un peu lent. Les 4 premiers épisodes se focalisent sur une histoire de route hantée assez sympathique mais presque sans rapport avec Zadkiel et les autres Ghost Riders, comme si Jason Aaron cherchait encore l’approche à adopter.
Mais l’ensemble tient vraiment bien la route. Souvent les reproches qu’on peut entendre sur ce run sont du genre : « Danny Ketch n’était pas aux commandes du Ghost Rider dans les années 90 alors que là, il contrôle ses actes donc ce n’est pas logique ». Ou encore que le choix de faire du Ghost Rider une arme céleste pose certains problèmes avec la continuité de certaines aventures obscures. En gros des arguments de puristes dont on se fout royalement, surtout qu’ils sont contestables même en se référant à la continuité tant elle est assez pauvre en explications. Mais pourquoi même se fatiguer à argumenter contre ces critiques quand nous avons là surement le meilleur run sur Ghost Rider depuis la création du personnage ? Drôle, intelligent dans sa construction du mythe des esprits de la vengeance, et qui use d’un personnage moyennement populaire pour bâtir un récit s’émancipant de certaines exigences du mainstream (aucune incursion du crossover Secret Invasion à part une vanne, aucun héros populaire présent dans les planches, une violence assez osée). Ce run constitue donc un récit auto-contenu totalement indépendant des autres séries, et qui nous fait même parfois douter qu’on est dans du Marvel super-héroïque. Il faudra malgré tout être réceptif à l’humour de Jason Aaron qui est ici quand même plus trash que dans Wolverine & les X-men, mais toujours plein de bonnes idées.
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Il aura fallu 3 ans d’existence du blog, l’arrivée de Mattie Boy en tant que contributeur et celle de Jason Aaron pour que le Ghost Rider vienne enfin parquer sa Harley chez Bruce Lit. Un superbe travail de redéfinition pour le justicier pas content.
LA BO du jour : comme une évidence !
« Le concept du Ghost Rider est assez difficile à prendre au sérieux. » dis-tu ; commencer un article sur un super-héros par cette phrase ne manque pas d’audace. [-_ô]
C’est vrai qu’hormis le Ghost Rider, le « monde » des super-héros est peuplé de concepts tout ce qu’il y a de plus sérieux.
Le premier super-héros jamais inventé est d’ailleurs un modèle du genre : un extraterrestre est envoyé sur Terre où il acquiert des super-pouvoirs, sauve le monde plus souvent qu’à son tour mais se cache sous une fausse identité : un journaliste du nom de Clark Kent. Une identité secrète préservée grâce à des lunettes et un accroche-cœur. [-_ô]
Ce que j’entendais par là, mais je l’explique juste après, c’est que Ghost Rider utilise un contexte religieux existant en dehors des comics. Et l’utilise de manière guère convaincante. Du moins avant Aaron. Un agent du diable qui élimine des tueurs et uniquement aux US.
Il ne s’agit pas de remettre en question l’aspect fantastique de l’univers des héros et ses créatures alien. Mais un univers fantastique a aussi ses règles et sa cohérence.
Pour ma part j’ai découvert ce personnage quand j’étais gamin, et je peux te dire que je ne l’avais pas trouvé bancal (dans les petits formats d’Artima/Arédit) mais assez flippant. Surtout la scéne d’invocation avec le pentacle et les bougies (si mes souvenirs sont bons).
Maintenant qu’une histoire obéissent à des règles (souvent tacites d’ailleurs) et qu’elle soit cohérente (en tant que telle) je suis bien évidemment d’accord.
Maintenant (et je te dénie pas le droit de penser autrement, ça va de soi) parler d’un concept difficile à prendre au sérieux lorsqu’on parle de super-héros me paraît assez difficile à concilier avec le genre même.
En outre la plupart des série sont très (souvent voire toujours) américano-centrées ; j’ai parlé dernièrement de Cable/Soldier X :
http://artemusdada.blogspot.fr/2016/11/cable-soldier-x-tischmanmacankordey.html
http://artemusdada.blogspot.fr/2016/11/soldier-x-darko-macan-igor-kordey.html
mais elles font figure d’exceptions.
Et même chez Vertigo, pour en revenir au « sérieux », la branche soi-disant adulte de DC Comics, en tout cas sûrement de ce quadrant de l’imaginaire, il n’y a pas l’ombre d’une once de « concept sérieux ».
De mon point de vue, les super-héros font partie de la fantasy (le genre), et pour en lire il faut faire preuve de la célèbre « suspension volontaire d’incrédulité », et lire un article qui commence comme le tient m’a fait (gentiment) réagir.
Cela dit il est bien entendu que tu as parfaitement le droit de développer tes propres idées, la question ne se pose d’ailleurs pas pour moi. Seulement en te lisant, cette phrase m’a fait sourire, et m’a rappelé qu’une part (importante ?) des lecteurs manifestait – de plus en plus souvent – un besoin de « sérieux » ou de « réalisme » dans leurs lectures (de BD de super-héros), ce qui tient peut-être à l’âge auquel ils ont commencé à en lire, et que je trouve ça paradoxal voire antinomique.
Les super-héros c’est justement la possibilité de repousser les frontières de l’imaginaire en inventant un personnage qui se crée sous nos yeux à partir d’un pot de beurre de cacahuètes (Steve Gerber), ou un amas de vase et de végétation qui se prend pour un homme (Alan Moore), ou comment devenir un sur-homme grâce à la méthode de Charles Atlas, etc.
Bref, pour moi le sérieux n’est pas compatible avec les super-héros.
Au plaisir de te relire en tout cas.
[-_ô]
Et pour revenir au concept de base que tu évoques, il faut aussi se remettre dans le contexte.
Le Ghost Rider est né à une époque où les comics connaissaient une baisse significative des ventes, surtout due à une escroquerie d’envergure nationale (dont je parle sur mon blog) en même temps (et c’est lié à la baisse des ventes) qu’une volonté d’essayer de nouvelles choses pour justement relancer les ventes.
De plus, à la même époque (durant les années 1970) Stan Lee fait la tournée des universités américaines, dans le but de s’émanciper du très jeune lectorat qui compose le plus gros pourcentage de ses aficionados, et recruter si je puis dire, des lecteurs plus âgées. Il n’est pas le seul, DC Comics fait la même chose.
À partir de là sortent des séries telles que le Green Arrow/Green Lantern d’O’Neil & Adams, ou les Black Panther de Don McGregor (et quelques autres séries du même type : « relevant »), mais aussi le Ghost Rider (ou dans un registre proche, le Fils de Satan) voient le jour.
Tout cela est aussi bien sûr, mâtinée d’une bonne dose de contre-culture, voire de matières stupéfiantes pour accoucher de scénarios sérieusement allumés.
Et l’idée de départ du Motard Fantôme est plutôt osée : un pacte avec Méphisto auquel le héros vend son âme.
Mais cette idée plutôt barrée pour l’époque (aujourd’hui ça paraît bien moins iconoclaste) – la Comics Code Authority veille – doit quand même répondre au cahier des charges de ce type de BD ; d’où les criminels (parce que le Motard Fantôme est quand même un super-héros) et le pays où se déroule l’action (les super-héros sont avant tout une affaire étasunienne).
Je ne savais pas cela, donc merci de tes précisions.
Après je ne veux pas offenser les fans en disant que c’est dur à prendre au sérieux. Je ne fais que dire ce que je pense et pour moi ça n’a jamais très bien marché le concept du Ghost Rider. Même si au niveau look, je le trouvais cool. Doit-on tout connaître du personnage historiquement pour pouvoir donner un avis sur ce qu’on aime ou non dessus ?
Après c’est dans l’ordre des choses je pense que le concept évolue maintenant, alors que le comics code ne sévit plus et que l’idée de base n’a plus rien de spécial. C’est pourquoi j’ai trouvé la réécriture de la mythologie du Ghost Rider de Aaron très intéressante. Et l’idée (qui est de Daniel Way à la base) d’en faire un agent du ciel plutôt bien trouvée.
Hello,
Excellent article comme d’habitude qui m’a fait re-découvrir le GR. Et ça m’a donné envie de m’y replonger. Et ma liste continue de s’allonger !
Les épisodes de Daniel Way – J’ai maintes fois été tenté d’acheter et de lire l’intégrale, justement pour la raison que tu cites, à savoir les dessinateurs dont quelques épisodes réalisés par Richard Corben. Mais à chaque fois je me rappelle de la qualité d’écriture de Daniel Way.
Comment peux-tu oser qualifier The Orb de vieil ennemi ringard et oublié, alors qu’il est au cœur de l’événement Original Sin ? Ah, pardon, on me glisse à l’oreillette que cette histoire était également écrite par Jason Aaron, au temps pour moi.
L’approche religieuse reste quand même à la surface, aux éléments apparents, ce qui est cohérent avec le ton très série B et même grindhouse de la narration, avec un humour noir sarcastique irrésistible.
Entièrement d’accord avec toi sur les arguments fallacieux de puriste pour cette histoire en particulier.
As-tu lu les épisodes de Gath Ennis du Ghost Rider, dont je guette en vain une réédition ?
Merci beaucoup pour cet article sur une série bien agréable à lire, un divertissement adulte, sans prétention.
J’ai lu le run de Daniel Way, mais après avoir lu celui-ci. C’est pourquoi je dis qu’il est un peu naze alors que je précise par la suite que je ne l’avais pas lu avant de lire la partie de Aaron^^
Eh bien…tu ne loupes rien. C’est vraiment linéaire à l’extrême. Ghost Rider va d’un point A à un point B en tapant du méchant diable avec des dialogues insipides et puérils (amplifiés encore par la VF, j’ai pu comparer). Reste juste la révélation de fin qui était une bonne idée.
J’ai lu les épisodes de Garth Ennis oui. Les 2 mini séries. Road to Damnation et Trail of tears. Sympa toutes les deux. Mais dieu que c’est noir ! Surtout Trail of tears qui n’a RIEN de drôle. Alors que Road to Damnation c’est un peu fun quand même. Mais j’ai tout de même trouvé ça court pour développer quoi que ce soit.
Au passage, Road to Damnation a été édité 3 fois en VF. Tu ne trouves pas ton bonheur ? Une fois dans la collection « les incontournables » mais mieux vaut éviter cette version au papier mat non-approprié. Une fois en 100% marvel et une dernière fois en Marvel Dark : Enfer et damnation.
Pour la série Trail of tears par contre, c’est plus compliqué, il n’y a que le 100% marvel. Un ghost rider noir au temps de la guerre de sécession, c’était une idée sympa. Mais bon sang, ce récit n’est vraiment pas tendre ! Je ne l’ai pas gardé. Je ne peux pas dire que ce n’était pas bien. Mais déjà Clayton Crain, j’ai un peu de mal. Ce n’est pas que ça me déplaît comme style, et ça se marrie même bien dans la noirceur avec Garth Ennis…mais c’est un peu trop littéral comme noirceur ! On voit que dalle des fois ! Planches trop sombres, Mr Crain.
Ah ok.
Bah je peux comprendre. Mais pour ma part je ne suis pas assez bon en anglais pour que le confort de lecture soit le même. Je privilégie donc la VF.
Sauf quand elle vient justement entamer mon confort (au hasard…une trad de Coulomb) Là, je préfère la VO.
« Les lieux où l’action se déroule vont de l’Amérique profonde peuplée de rednecks et autres personnages ravagés à une prison ».
– Voilà bien l’un des thèmes majeurs de Jason Aaron, qu’il développe en particulier dans ses propres créations.
« Ici, pas de cameo d’Iron-Man ou tout autre héros bankable. On est dans le GrindHouse de Marvel. »
– Cool. Je déteste de plus en plus les featuring hype et racoleuses.
« pose certains problèmes avec la continuité de certaines aventures obscures. En gros des arguments de puristes dont on se fout royalement, surtout qu’ils sont contestables même en se référant à la continuité tant elle est assez pauvre en explications »
– Ah mais là non seulement je suis d’accord, mais en plus je deviendrais presque gratuitement provocateur. Les jours où je suis méchant, j’irais même jusqu’à dire que j’aime la rétro-continuité lorsqu’elle roule dans la poussière les vieilleries old-school qui sentent le moisi infantile (du genre ce qu’a fait Brubaker avec le personnage de Bucky Barnes)…
« aucune incursion du crossover Secret Invasion à part une vanne, aucun héros populaire présent dans les planches, une violence assez osée). Ce run constitue donc un récit auto-contenu totalement indépendant des autres séries, et qui nous fait même parfois douter qu’on est dans du Marvel super-héroïque ».
– Ouh punaise, il me le faut !!! 😀
Cette itération du personnage, rock’n roll et décomplexée, avec avec un côté trash et une totale liberté de ton, m’évoque fortement ce qu’a fait Remender avec son Punisher.
Il fut un temps où j’aurais tué père et mère pour avoir ce run (en VF). Et j’en voulais à mort à Paninouille d’avoir stoppé la série au moment où ça devenait intéressant, comme tu dis.
J’ai renoncé à m’acheter l’omnibus « Wolverine par Jason Aaron » qui vient de sortir, qui s’impose pourtant comme une réussite selon les fans, et en plus comme une lecture autonome (je n’avais pas été plus emballé que ça par les quelques arcs lu dans quelques revues de l’époque). Et bien entendu je ne me suis pas intéressé à la série « Wolverine & les X-men » à cause de sa connexion avec les events et les crossovers de merde.
Mais là, j’avoue que tu me donnes bien envie de lire ça ! Je guetterai la sortie VF, si un jour elle existe…
Je ne suis pas autant anti-continuité que toi, tu le sais. Mais parfois les puristes sont d’une mauvaise foi abusive. Certains reprochent le fait que Danny Ketch ne pouvait pas être obsédé par le pouvoir car dans la séries des 90’s, ce n’était pas lui aux commandes. Sauf que bon…il voyait quand même ce qui se passait. ça a pu lui plaire.
Et ici, Danny Ketch obtient son pouvoir de Ghost Rider de Zadkiel, donc ce n’est pas le même pouvoir qu’il avait dans la série des années 90 où il était possédé. Donc ça a du sens qu’il puisse se contrôler cette fois. Enfin…certes je sais que je joue le jeu des puristes en essayant d’expliquer ça en fonction de la continuité, et qu’ils auront toujours des arguments contraires…mais c’est pour dire que des fois leur discours ne tient pas la route même en se référant à fond aux comics qui laissent des portes ouvertes et des interprétations diverses. Donc c’est clairement être borné et refuser un concept nouveau.
J’espérais que ça puisse t »intéresser. Après il reste l’humour de Aaron que tu sembles ne pas apprécier forcément. Mais là il est dans un registre plus série Z décomplexée fun et un peu trash. Peut être que tu aimeras.
Hélas si tu attends une VF…j’ai peur que tu ne le lises jamais. Depuis 2007 ce run est boudé par Panini. Alors que celui de Way est publié. Pour ma part c’est un des premiers trucs en VO que je me suis acheté. Et c’est loin d’être le plus complexe à comprendre (ça ne philosophe pas trop^^)
Ben déjà tu ne m’as pas offensé, j’ai commenté ton article en toute camaraderie, d’amateur à amateur.
Ensuite oui, je crois que si on déborde d’un sujet (ici le run d’Aaron) en donnant son avis sur le concept global derrière le personnage on devrait se renseigner sur ledit personnage et le contexte dans lequel il a été créé (et y réfléchir sérieusement). C’est du moins comme cela je vois les choses (mais je ne suis pas, ni veux être, force de loi dans ce domaine).
Cela dit je ne suis pas – d’une manière générale – opposé à des réajustements, ou des réécritures (même si on peut aussi inventer de nouveaux personnages), ce que ne se privent pas de faire, de toute façon les éditeurs. À partir du moment où j’ai du plaisir à lire ce que je lis, je suis partant.
Ok, je garderai à l’esprit de glisser un mot sur le contexte historique si je râle sur un concept. Après ce n’est qu’une petite pique sans méchanceté sur un concept que je trouvais bancal par rapport aux croyances religieuses, je ne pensais pas engendrer une telle réaction de ta part. Même si en effet tu ne me sembles pas outré outre mesure^^
Avec Nick Fury, le Ghost Rider fait partie des personnages Marvel dont je me fiche éperdument.
Tout d’abord parce que je déteste les motos, la culture motard et tout le saint cirque qui va avec. Ce sont vraiment des engins que je deteste.
Ensuite parce que tout simplement je n’ai jamais rien compris au concept de GR (qui n’a pas l’air compliqué ceci dit).
Enfin parce que tête de mort +démons + motos = une équation impossible pour moi.
Et même avec JAson Aaron et ton explication intéressante (une série indépendante, des emprunts à Sandman pour la representation de GR en fonction des nationalités, une fin en bonne et due forme et une tenta ive de travail autour de la religion), je suis pas du tout intéressé par cet univers.
Enfin, même en creator owned, je suis un peu déçu par la production de Aaron ces temps ci, notamment avec son Southern Bastards dont la lenteur m’exaspère à l’inverse d’un Scalped où je m’étais intéressé aux personnages.
Mon explication inintéressante ? Eh ! C’est méchant ! Même si ça doit être une faute de frappe^^
Ben après que dire contre ça ? les goûts et les couleurs, tout ça…je ne peux pas t’en vouloir de ne pas être tenté.
Pour moi c’est un de ses meilleurs travaux pour Marvel avec Wolverine et les X-men. Je n’aime pas ses mini séries (Spider-man/Wolverine et Thanos Rising) J’ai toujours l’impression qu’il va dans la simplicité quand il n’a pas le temps qu’il lui faut pour développer un truc. Même le début de ce run sur Ghost Rider commence par une sorte de mini histoire avant qu’il étende son univers.
Sinon pour la culture motard, franchement je n’y connais rien et je m’en fous pas mal. Je n’ai pas la sensation de lire un truc de niche adressé aux motards en lisant Ghost Rider. Mais bon…
Et sinon, n’attendons pas des auteurs qu’ils nous épatent dans tous leurs travaux. ça peut bien arriver que certains trucs nous déçoivent. Je n’ai pas d’auteurs favoris à cause de ça. Bon évidemment je sais qu’il y en a auxquels je suis allergique mais j’essaie de ne mettre personne sur un piédestal. Sinon c’est la grosse déception démesurée quand le mec a un petit passage à vide. Alors que bon…ça arrive hein.
Tu vends plutôt bien ce run, Matt, mais je ne suis pas vraiment fan des dessinateurs. Je les ai vus sur d’autres séries et je n’ai pas trop accroché…
Sinon, sans crier au génie, j’aimais bien le relaunch de Ghost Rider dans les années 90, par Howard Mackie et Javier Saltares puis Mark Texeira. Dans mon souvenir, c’était simple (peut-être trop, c’est pour ça que je ne tenterai pas la relecture) mais efficace.
@Présence : « la qualité d’écriture de Daniel Way », j’hésite, est-ce une litote ou un oxymore ?
Ce n’était pas mauvais le relaunch des 90 avec Danny Ketch, mais ça ne cassait pas 3 pattes à un canard non plus en effet. J’avoue que ça me plaisait pour les dessins mais aucune envie de relire non plus.
Alors pour les dessins…j’avais les mêmes craintes. Mais tu vois les dessins du run de Way sont classes (Texeira et Saltares justement) mais c’est d’un ennui et d’une puérilité…
Là les dessins sont peut être moins attirants au premier coup d’oeil, mais j’ai été pris dans l’histoire. Et j’ai apprécié. Mais bon…ça ne veut pas dire que ce sera ton cas, je l’entends bien.
« Grindhouse de Marvel » est super bien trouvé ! Je ne connais pas le personnage du Ghost Rider (et ai soigneusement évité les films avec Nicolas Cage), mais il est apparu dans la nouvelle saison de Agents of S.H.I.E.L.D. (la 4) et je l’ai trouvé très bien écrit. Surtout, l’acteur est bien trouvé, et ils ont réussi à faire croire à ce personnage de biker tout droit sorti d’un fantasme de poster de bar. De plus, ce n’est plus un biker dans la série, mais un gars qui conduit une Dodge Charger noire (la voiture de Shérif Fais-moi peur / Dukes of Hazzard), c’est tout de suite plus classe.
Ca a l’air pas mal du tout, mais il faut vraiment que je finisse de m’acheter Scalped d’abord…
Je sais que dans la période Marvel Now, un nouveau Ghost Rider au volant d’une voiture a fait son apparition. Je n’ai rien contre mais ça ne fait plus trop « rider » quand même. Ghost driver ?
En tous cas c’est accessible aux néophytes ce run de Aaron. Il n’y a que la révélation sur Zadkiel qui apparait à la fin du run précédent qu’il vaut mieux avoir saisi. Mais il y a un rappel.
Ce qui est sympa c’est que le ghost rider n’est pas forcément toujours Blaze selon les séries. Ennis a aussi fait une mini série « Trail of tears » avec un Ghost Rider noir du temps de la guerre de sécession. Par contre là rien de drôle, c’est vraiment impitoyable. Tellement que ce n’est pas le rider le personnage principal. Mais un cowboy qui est de son bord et qui essaie de ne pas se faire tuer au beau milieu de la vengeance de l’autre.
Bon…un gars comme Présence qui lit tout n’aurait-il pas lu la mini série Spirits of vengeance en 5 épisodes qui sort ce mois ci en VF ? Avec Ghost Rider, Satana, tout ça…
Non, je ne l’ai pas lue. Ni le scénariste ni le dessinateur ne m’attiraient.
J’avais oublié que le run d’Aaron a eu droit à son spin-off (inédit en VF) : une mini-série sur Danny Ketch (le Ghost Rider bleu) par Spurrier.
Je ne l’ai pas lue.
Mais de toutes façons tout est inédit en VF en ce qui concerne ce run^^
Sauf le premier arc.
Certes. Panini et son super timing pour arrêter les parutions…