Télépathes par J.M Straczynski et Steve Epting
Un article de BRUCE LITVO : Awa
VF : Delcourt
1ère publication le 31/05/23 – MAJ le 06/01/24
Conçue en 2023, TELEPATHES est une mini série complète en 6 épisodes publiée à vitesse éclair chez Delcourt avec traduction irréprochable de Laurent Queyssi.
JMS la scénarise quand Steve Epting l’illustre en assurant également les couvertures. Couleurs de Brian Reber.
Si TELEPATHES est une série indépendante, elle puise ses racines dans la littérature super-héroïque, ce qui permettra à l’amateur de super-slips de ne pas se sentir dépaysé tout en se réjouissant d’un traitement adulte et mature. Pas de possession, d’invasion alien ou de lavage de cerveaux pour expliquer que ses héros se comportent comme les pires ordures mais que tout va revenir dans l’ordre et que personnages tout comme les lecteurs vont appuyer sur le bouton reset.
Enfin, si…
Reprenons.
Une gigantesque perturbation électromagnétique entraîne sur notre planète l’apparition soudaine de pouvoirs télépathiques chez un dixième de la population. Face à la divulgation de tous ses secrets la société s’effondre littéralement. Ce sont les heures qui suivent ce bouleversement mondial que raconte JMS.
Tout ça a des réminiscences Marvel : l’attaque électromagnétique rappelle bien évidemment les assauts de Magneto dans X-MEN#25 en explorant en détail les dégâts humains puis ses conséquences politiques avec la création d’une loi de rencenssement des télépathes qui évoque iumméditament CIVIL WAR dont JMS avait écrit les pages politiques les plus inspirées d’un Spider-Man idéaliste face à un Iron-Man pragmatique. Le lecteur sera heureux de retrouver ces deux tendances chez des personnages moins icôniques (voire pas du tout) mais où l’auteur est libre de développer ses propos sans avoir à se demander comment faire machine arrière après qu’un héros de notre enfance n’ouvre des camps de concentration, parce que, well, il s’est trompé…
Comme dans le Cataclysm de Batman cette fois, JMS écrit un récit post-apocalyptique des plus réalistes et à peine moins fantasmé.
A l’ère où la vie privée ne l’est plus, où les données privées sont bazardées à des fins politiques pouvant orienter les bulletins de vote et où les réseaux sociaux peuvent détruire en quelques clicks vies, réputations voire gouvernements, la fiction de JMS a un goût d’apéritif dangereux aromatisé au C’est arrivé près de chez vous.
TELEPATHES montre brillamment la place que les secrets occupent dans nos vie intimes ou institutionnels. Le lecteur s’aperçoit ici que ce pacte silencieux entre les menteurs et la démocratie reste paradoxalement le ciment d’une société. Que ces mensonges soient portés au vu et au su de tous sans aucune contestation possible, et les démocraties comme les dictatures s’écroulent.
TELEPATHES raconte à 100 à l’heure les dernières heures du XXIème siècle sans qu’aucun retour en arrière ne soit possible. La narration emprunte le rythme échevelé de la série 24 avec sa paranoïa, son agent sur le terrain qui tente de sauver ce qui est encore possible tandis qu’une autre intrigue aborde les méandres politiques où le contrat social explose après que le peuple pénètre dans les pensées les plus intimes de ses dirigeants.
Le lecteur est happé par l’intelligence des dialogues, l’évolution de l’histoire et l’habilité avec laquelle JMS clôt ce qui s’apparente à une 1ère saison sans n’avoir bâclé aucune des pistes annoncées en si peu de temps. C’est même assez magistral.
Dommage que les dessins du légendaire Steve Epting soient si statiques et sans agréments à contempler. Ses planches sont fonctionnelles, sa mise en scène peu impressionnante même en convoquant le final de DIE HARD 3. Il n’est pas injuste de pouvoir affirmer que le lecteur pouvait espérer une véritable claque graphique de cette grande signature qui n’arrive jamais.
C’est dire la force de l’écriture de JMS de pouvoir emporter son auditoire malgré des dessins décevants et des personnages peu habités à l’exception du vilain, une sorte de Wilson Fisk qui serait passé par la case THE WIRE.
Ce n’est pas un secret, TELEPATHES s’impose comme un must du comics indépendant 2023.
La BO du jour
Des secrets entre soeurs, les Pierces, tirés de l’ost de PRETTY LITTLE LIARS
Ah ça a l’air cool ça !
Et j’aime bien Steve Epting, même si ça fait très américain et très propre comme style. Mais techniquement c’est joli et ça colle bien à certains récits. ça allait bien pour le VELVET de Brubaker, ou encore son Cap.
P’tite mini série, je vais surement tenter.
Merci pour cette review.
J’avoue que j’ai du mal à reconnaître Epting !
AWA, je trouve qu’il y a à boire et à manger, mais au moins ils ont tendance à se tenir à des séries limitées de 5-6 numéros. Mais pour une histoire qui semble très ambitieuse, n’est-ce pas trop peu ? (Bon, au moins, ça évite que JMS abandonne le récit en court de route)
Petite impression de recyclage par l’auteur : L’idée de base m’évoque un peu Rising Stars (des pouvoirs nés d’un phénomène inconnu, même si le concept est finalement très usité en comics, genre les origines du New Universe), et JMS a déjà utilisé le concept de télépathes utilisant leurs pouvoirs pour découvrir les secrets de figures politiques dans la dernière saison de Babylon 5.
Merci pour ce rapprochement avec d’autres oeuvres de JMS. L’article sur Babylon 5 reste à écrire.
Sur le concept, une fin ouverte annonce possiblement une saison 2 si les lecteurs sont au rdv.
J’aimais beaucoup Epting avec son élégance qi allait très bien aux récits classiques mais là je ne le reconnais plus.
Le pitch, vu vu et revu…
En commençant l’article j’ai immédiatement eu en tête le SCANNERS de Cronenberg (article sur le site). Comme les copains, même si je connais peu Epting (je l’ai lu sur le Cap de Brubaker et Civil War), on ne le reconnaît pas trop ici je trouve et les scans ne sont pas très attirants. Par contre l’histoire peut être cool, il est vrai que les théories du complot et les indignations et les défiances envers les gouvernements se font de plus en plus sentir. Donc pourquoi pas, mais si on me le prête quoi, à l’occasion. L’article est bien, direct et sans chichis.
La BO : ah oui c’est la musique du générique non ? Bof bof, inoffensif.
@Cyrille
Indeed.
L’article de Scanners par bibi : https://www.brucetringale.com/les-xmen-version-cronenberg/
@Tornado
Normalement en indépendant, il n’y a palus personne pour le faire chier. Mais c’est aussi le risque de voir ses séries annulées. Les super-héros font de très bons véhicules pour les idées des auteurs. Les mêmes avec des persos forcément moins iconiques, c’est moins vendeur.
Les Pierces ont sorti un album de noël il y a 3 ans.
Ah oui, ça a l’air chouette. Ce JMS, quand même, quel talent ! Et quel gâchis sur quasiment tous les trucs de super-héros qu’il a laissé en plan à cause de ces boulets d’éditors…
Un des meilleurs scénaristes de sa génération. Et on lui met tout le temps des bâtons dans les roues…
La BO : Cool. Dommage qu’elles ne sortent plus rien les filles… depuis 10 ans !
Alors que j’aime beaucoup Stracz, cela ne m’intéresse absolument pas ! J’ai l’impression de voir un truc déjà recylclé, fait par le même gars déjà 3 ou 4 fois. Quand à Epting, s’il reprend des crayons et un bon encreur, OK mais là…
Bonsoir.
Cela aurait pu m’intéresser, étant très amateur des récits de JMS. Je n’ai pas du en rater beaucoup, même au cinéma (L’ECHANGE) ou en série télé comme SENSE8, dont je retrouve la côté être dans la tête de l’autre.
Mais il m’a déçu sur sa production chez AWA. Il faut dire qu’il n’a pas été aidé par les dessins assez moches de Deodato Jr.
Le lecteur est happé par l’intelligence des dialogues, l’évolution de l’histoire oui il en effet bon sur cela.
ce qui s’apparente à une 1ère saison une marque de fabrique de JMS, l’écriture au format feuilleton/série. Maitrise total de l’exercice.
Là j’aurais bien pris pour le pitch (même si rien d’original) mais surtout pour Steve Epting, mais en le feuilletant ce week end, aucun coup de coeur.
Ce pacte silencieux entre les menteurs et la démocratie reste paradoxalement le ciment d’une société. – Je reconnais bien là le Straczynski des grands jours.
Ce qui s’apparente à une 1ère saison : tu me l’avais bien vendu jusqu’à cette petite phrase. Il a trop souvent abandonné des séries en route pour que je puisse croire qu’il y revienne. pourtant il peut être très bon sur des séries courtes comme Sidekick (12 épisodes) avec Tom Mandrake qu’il a écrit comme complète et pas comme le début d’une histoire.