Encyclopegeek : De Swamp Thing à Vertigo
1ère publication le 10/11/16- Mise à jour le 15/07/19
AUTEUR: ALEX NIKOLAVITCH
C’est marrant à quoi peuvent tenir les choses, quand même. Tenez, si je vous dit que Vertigo, avec tous ces monuments des comics genre Preacher ou Y the Last Man, ça s’est joué à l’opiniâtreté d’un type qui a refusé de se laisser mettre un vent par téléphone une dizaine d’année plus tôt, je parie que vous ne me croirez pas.
Et pourtant…
**Insérez ici une zoulie image de Tonton Lavitch qui bourre sa pipe au coin du feu pour vous raconter une belle histoire**
Un beau matin de 1983, un certain Len Wein, editor et scénariste chez l’éditeur DC Comics (notons qu’il avait bossé aussi chez un concurrent, chez lequel il avait inventé un personnage de mutant griffu sur lequel à l’époque personne n’aurait misé un kopek) décrocha son téléphone pour contacter un jeune auteur dont il avait désespérément besoin.
Parce que Len Wein avait créé une douzaine d’années plus tôt un personnage, la Créature du Marais (ou Swamp Thing, pour parler la langue de Shakespeare et de Stan Lee), personnage qui avait connu des haut et des bas, et donc plus personne ne semblait savoir que faire. Wein, éditeur sur le titre dont il avait cédé le poste de scénariste à Martin Pasko, voulait profiter du départ de ce dernier pour lui redonner une nouvelle direction.
Il appela un scénariste anglais dont le boulot dans des revues britanniques commençait à se faire remarquer, une espèce de hippie du nom d’Alan Moore.
Et Moore, qui avait (et a toujours, paraît-il) un caractère qu’on qualifiera d’entier par goût de la litote et de l’euphémisme, croit à une blague et lui raccroche au nez (l’histoire ne le précise pas, mais il est probable qu’il ait balancé quelques insultes bien sentie avec son accent si particulier).
Ici s’impose peut-être un bref rappel. Le scénariste Len Wein, tous ceux qui ont pu lire sa production le savent et le confirmeront, n’est certainement pas un génie des comics. C’est un auteur compétent, dont les productions se lisent sans déplaisir, mais sans non plus déclencher la passion. À la limite, il a probablement fait du meilleur boulot dans d’autres médias (il a été scénariste sur la série animée Batman de Bruce Timm, par exemple). Comme editor, par contre, il a présidé à des choses très intéressantes. Parce que c’est quelqu’un qui avait le nez creux. Et donc, contrairement à vous ou moi, qui aurions économisé le prix d’un deuxième appel transatlantique (ça valait une blinde, en plus, à l’époque) et qui aurions cherché le nom suivant sur le calepin, Wein insista et rappela, bien décidé à faire entendre raison au wookie bougon de Northampton. Et là, c’est le drame, comme on dit. Car Wein arrive à convaincre le rosbif récalcitrant. Et la suite, c’est de l’histoire.
En seulement deux numéros (un pour finir l’intrigue laissée en suspens par Pasko à la fin du numéro 19, l’autre pour poser sa note d’intention quant à la suite), Moore dynamite purement et simplement la série Saga of the Swamp Thing, qui ronronnait jusque là avec des histoires très vaguement horrifiques qui pour la plupart n’auraient pas déparé dans le Hulk télévisuel qui sévissait à la même époque.
Il y a deux séries séminales qui révolutionnent complètement les comics en 1983. La première est le American Flagg! de Howard Chaykin, dont la narration par écrans de télé interposés et le caractère politique teigneux annoncent le Dark Knight de Frank Miller. La deuxième, c’est la reprise de Swamp Thing par Alan Moore, c’est aussi simple que ça. Car Moore n’a pas plus de tabous que Chaykin. Sexe, drogue et maladie mentale font partie des éléments qui déboulent dans les pages de la série, qui curieusement mettra près d’un an à perdre son sceau du Comics Code.
Mais là encore, petit rappel. Swamp Thing, au départ, c’est l’histoire d’un mec, Alec Holland, qui faisait des expérience sur des engrais miracles dans des marécages. Suite à diverses magouilles de gens voulant s’emparer de ses découvertes, il est pris dans l’explosion de son labo et, le corps saturé des substances chimiques sur lesquelles il travaillait, est projeté dans le bayou (un peu comme un autre type du même nom qui, après l’explosion de DSK, se retrouva propulsé dans… mais je m’égare). Les plantes le colonisent, entrant en symbiose avec son cadavre calciné, et il ressuscite sous la forme d’un monstre végétal à forme vaguement humaine qui devra accomplir sa vengeance tout en échappant à la vindicte des humains et d’Anton Arcane, savant fou voulant tirer de sa carcasse moisie et moussue un secret d’immortalité. Et la créature tente de retrouver son humanité.
Par la suite, la créature qui avait été Alec Holland se liera d’amitié avec Abigail, la fille d’Arcane, qui épousera Matt Cable, un agent du gouvernement qui avait tenté de protéger Holland de son vivant. Quand il arrive aux commandes de la série, Moore commence par tuer une nouvelle fois la créature. Puis par la faire examiner par des scientifiques travaillant pour une multinationale corrompue. Et là, coup de théâtre : la créature n’a jamais été Alec Holland, mais une plante boostée par la formule chimique et infectée par les souvenirs encore présent dans le cadavre pourrissant au fond du bayou. La quête d’humanité de la créature tourne court. La chose verdâtre va, en s’assumant pleinement, se découvrir de nouveaux pouvoirs, ceux d’un avatar du règne végétal tout entier, le « Green » (la verdure. En VF ça a été traduit ces derniers temps par « la Sève »).
Face à un personnage qui assume complètement son inhumanité, les humains qui gravitent autour vont gagner en importance. Pendant que Matt Cable en pète un (de câble), la créature se rapproche d’Abigail avec laquelle elle va vivre une étrange histoire d’amour (qui rappelle celle déjà mise en scène par Moore entre Mike Moran et Liz dans Marvelman, et annonce celle de Doc Manhattan et Laurie dans Watchmen). Et aussi des communions, quand « Alec » donnera à manger à sa belle des tubercules psychédéliques qu’il fait pousser sur son propre corps moussu. Dès lors la série horrifique gentillette de la décennie précédente va s’enfoncer dans l’étrange, le bizarre, le dérangeant. Et par étrange, bizarre et dérangeant, je veux dire vraiment étrange, vraiment bizarre et vraiment dérangeant. Le marécage y devient un symbole de la condition humaine, un stade final de déliquescence dans lequel échouent tous les laissés pour compte. Mais il est également, dans le petit coin que se sont aménagés Alec et Abigail, un petit coin de paradis, un bout de nature apaisée quasiment édénique (et le croquage de tubercule prend tout son sens) d’où le monde extérieur s’ingénie à les sortir.
Entretemps, le titre a changé d’editor, et Wein a laissé la place à Karen Berger, représentante d’une nouvelle génération éditoriale qui tente de rompre avec le conservatisme de la maison. Moore a donc les coudées franches, il fait ce qu’il veut.
Là où il est très fort, c’est qu’il continue de le faire dans les limites de l’univers DC. Superman et Batman peuvent croiser la route de la créature (il y aura d’ailleurs un excellent arc à Gotham), comme ils le faisaient au cours de la décennie précédente, sans que cela soit incongru. Et Crisis, le gros événement de l’année 1985, est intégré à l’histoire, permettant à Moore de faire intervenir toutes sortes de personnages magiques de DC comme le Baron Winter ou Zatara (qui ne survivra pas à l’expérience).
Mais quel rapport entre le coup de fil de Wein et Vertigo, rapport que je mentionnais en début d’article ? (oui, Tonton Lavitch, peut-être que les herbes de ta pipe n’étaient pas seulement que du tabac dans ta tabatière-Ndr) Si Moore et Wein continuent à travailler ensemble (Wein sera editor sur Watchmen, rien que ça), le barbu bougon servira de tête de pont à toute une cohorte d’autres scénaristes anglais que Karen Berger ira chercher, au premier rang desquels Pete Milligan, Grant Morrison et Neil Gaiman.
Le run de Moore sur Swamp Thing servira d’ailleurs de gabarit, de méthode pour ces auteurs. Avant de les laisser créer leurs propres récits (comme le fera Milligan avec Enigma) ou s’emparer de grosses licences (comme le fera Morrison sur JLA ou les X-Men), on leur refilera des séries en perte de vitesse voire disparues pour les relancer avec un ton nouveau. Pour Milligan, ce sera le Shade the Changing Man de Steve Ditko, pour Morrison, Animal Man et Doom Patrol, et pour Gaiman Black Orchid et surtout Sandman.
Et examiner les débuts de Sandman à la lumière du Swamp Thing de Moore, c’est mettre le doigt sur l’apport de ce dernier. Sandman bâtit son récit sur toute une arrière court de personnages DC dont certains avaient été réactualisés voire créés par Moore : les « présentateurs » des titres horrifiques des années 70, les diverses itérations du Sandman, Matt Cable (réincarné en corbeau), John Constantine (création de Moore dans Swamp Thing), sans compter les apparitions pures et simples de super-héros comme Martian Manhunter ou Mister Miracle ou des villains comme Doctor Destiny. Gaiman (et à des degrés moindres Morrison et Milligan) s’insèrent dans la continuité méthodologique directe de leur précurseur.
Aucun de ces premiers titres de la « british invasion » ne coupe le cordon d’avec l’univers super-héroïque DC. Il faudra attendre la série Hellblazer, lancée peu après avec Jamie Delano au scénario pour paradoxalement commencer à prendre de la distance. Paradoxalement parce qu’elle raconte les aventures en solo de John Constantine, apparu dans Swamp Thing n°37 et que, dans l’esprit de Moore, Constantine s’intégrait pleinement à l’univers DC, au point qu’il en avait fait le pivot de sa maxi série/crossover Twillight of the Super-heroes qui ne se concrétisera hélas jamais.
Constantine croisera encore des personnages DC comme Doctor Fate ou le Spectre dans les pages du Books of Magics de Neil Gaiman, jolie série se voulant un panorama des bas-fonds mystico-magiques de l’univers DC, mais aucun super-héros n’apparaîtra jamais dans les 300 numéros de Hellblazer (Il faudra attendre les New 52 de 2012 pour que Constantine réintègre l’univers DC).
Rapidement, ces titres à la marge montrent une grande vitalité créative et les ventes suivent, souvent auprès de publics alternatifs pas forcément passionnés par les super-héros, qui bientôt achètent les séries sur le seul nom du scénariste. Le niveau de liberté atteint par Moore pose néanmoins souci, au point que son successeur sur Swamp Thing, Rick Veitch, claquera la porte parce qu’on lui refuse une histoire mettant en scène Jésus.
Le divorce sera consommé en 1993, 10 ans après le coup de fil fatal de Len Wein, quand Karen Berger lancera le label adulte de DC, Vertigo, ouvrant un espace de liberté supplémentaire aux auteurs et officialisant la séparation de fait entre les univers. Si le Sandman version Gaiman peut apparaître dans les JLA de Morrison, c’est vraiment à titre d’anecdote. La règle, ce sont désormais des séries relativement indépendantes les unes des autres, en dehors de celles qui exploitent la mythologie liée au Sandman (The Dreaming, Lucifer, etc).
L’invasion des brittons aurait-elle eu lieu si Wein n’avait pas rappelé ? Allez savoir. Mais sans Moore et sa fontaine d’idées foutraques, sa capacité à rebondir avec génie sur tout et n’importe quoi et son caractère l’amenant à tout pousser dans ses derniers retranchements, les Morrison, Ennis et autres Ellis auraient-ils joui de la même liberté qui nous a donné Arkham Asylum, Preacher ou Transmetropolitan ?
« I am the Watcher, and »… ah non, ça ne peut pas être un « What if ? ». Disons alors une « Imaginary Story ». Et comme dirait l’autre, « aren’t they all ? »
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Mais c’est (décidément) trop horrible ! » 4/6
Vu que Trump n’est pas le premier concerné par le réchauffement climatique, Bruce Lit se met au vert et se tourne vers son ministre de l’écologie, du patrimoine et de la culture Alex Nikolavitch pour vous narrer le Swamp Thing d’Alan Moore. Ou comment un coup de fil aboutit à la naissance de Vertigo !
La BOlavitch :
Désolé Alex, mais le « Bela Lugosi ‘s Dead » de Bahaus ayant été suritilisé au gré des articles, ton choix n’est pas retenu (et puis c’est mon privilège de redac’ chef de faire ce que je veux, si je veux, quand je veux). Voyons….Entre Nikolavitch et A. Moore, Alex Holland et Abigail c’est la grande A.Moore !
« Le marécage y devient un symbole de la condition humaine, un stade final de déliquescence dans lequel échouent tous les laissés pour comptes »
Je trouve que cette définition pourrait également correspondre au Man-Thing de Steve Gerber, une autre perle tiré de la décennie précédente.
Je suis du même avis en ce qui concerne Wein et son plus grand apport au médium (son compère Marv Wolfman est un meilleur scénariste que lui je trouve).
» [..] Man-Thing de Steve Gerber, une autre perle tiré de la décennie précédente. »
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J’avais lu il y a déjà quelques temps que Steve Gerber était le « Grant Morrison des années 1970 ».
Pour ma part il ne fait aucun doute, toutes choses égales par ailleurs, que Moore & Morrison sont les Steve Gerber des années 1980 (et suivantes). [-_ô]
C’est clair que Gerber était bien foufou et osait des trucs pas dans le manuel. Un précurseur, quoi.
Je suis peu familier du travail de Steve Gerber mais déjà je trouvais que ses scénarios sur les gardiens de la galaxie (la première série des années 70) étaient carrément originaux et intéressants et ont bien résisté au temps.
Au passage j’avais bien apprécié la version française de Panini, dont la traduction était si je ne m’abuse assuré par nul autre que Alex lui-même.
L’association de Bissette et Totleben c’est la grande classe quand même, et pour le coup je préfère cette version à celle de Wrightson.
La version Delcourt (joliment traduite – aussi – par Jean-Paul Jennequin) en noir & blanc était une très belle réussite aussi, dommage que la suite n’ait pas été proposée dans cette version.
Je trouve que le N&B, dans un plus grand format en plus que le « format comic book »(si mes souvenirs sont bons) faisait honneur aux magnifiques planches de la série.
le problème, c’est que seul le début était traduit par JPJ. La suite était de moins bonne tenue de ce côté-là.
de mémoire, par contre, c’était pas tellement un plus grand format. par contre, très beau noir et blanc, similaire à celui des éditions anglaises de chez Titan Books qu’on trouvait assez facilement à la fin des années 80.
Bonjour à tous, en complément si je puis dire, de l’article de l’ami Alex, je me permets de vous proposer le scénario qu’Alan Moore a écrit pour le projet « Twilight of the Superheroes », en français : http://artemusdada.blogspot.fr/2012/11/twilight-of-superheroes-par-alan-moore.html (en 3 parties sur mon blog).
Vous verrez, pour ceux qui ne connaissent pas, que beaucoup d’éléments (comme souvent avec le travail de Moore), se sont retrouvés plus tard intégrés à d’autres aventures d’encre et de papier écrites par d’autres.
[-_ô]
Excellent complément, Amigo ! Twillight aurait pu être un monument des comics, occultant largement Crisis.
l’éditeur en a décidé autrement, hélas.
tout à fait
je me suis imprimé tout ton dossier que je relis souvent
je me suis fait rembarrer par un interlocuteur sur internet quand j’ ai affirmé que beaucoup de crossovers suivant ont picoré ce travail non concrétisé du druide de nothampton 😉
j’ ai compris après que, la façon dont je l’ avais exprimé,il a cru que je le considérait comme aussi important que des crossovers existants vraiment
Eh bien j’ai appris plein de choses dans cet article dont je ne savais pas grand chose. je n’ai pas lu Swamp Thing et j’ignorais tous ces détails sur les raisons de la venue d’Alan Moore aux US.
Merci à toi pour cet éclairage donc.
Je n’ai hélas pas l’impression qu’on puisse encore trouver à prix raisonnable les éditions VF de Swamp thing.
J’aime Swamp thing et j’étais fan de Vertigo dans les années 90 ton article ne pouvait donc que me combler 😉
A noter que comme dit sur Fessebook il est honteux d’avoir refusé Bela Lugosi’s dead au profit de Valérie Lemercier… Un détail m’échappe :)) Quoi qu’il en soit cette version aurait pu l’affaire : https://www.youtube.com/watch?v=YS_h4iqhYtM
@Tonton Lavitch : l’image de toi façon vieux sage dessiné à la Vertigo est une image qui me restera en tête en imaginant ton bagout….Et désolé pour Marc Lavoine 😉
Même si c’est un chanteur que j’aime beaucoup, classe, aimable pas très régulier mais qui me rappelle Joe Dassin : un type vraiment sympa à la voix chaleureuse capable d’écrire des chansons populaires pas trop putassières.
L’anecdote concernant Alan Moore vaut son pesant de cacahuètes et le scan très bien choisi. L’as tu déjà rencontré ? Il doit être très impressionnant non ?
//Swamp Thing : le personnage me dégoutte…A chque fois que je le vois enlacer Abigail dans ses bras couverts de mousse, de bourgeons et de tout autres trucs, j’ai une espèce de nausée. Toutefois j’ai lu en médiathèque ce run et j’avais trouvé l’idée géniale d’une plante sen pensant homme. Encore un concept à rebrousse poil du grand Alan. Pour le reste de sintrigues, j’ai pas accroché plus que ça pour résistance bornée aux comics ésotériques et vaguement psychédéliques.
Ce qui ne fut pas toujours le cas en ayant le souvenir du nanar de Wes Craven adapté du personnage…..
@Patrick Redwave : Il est sûr que Preacher, Bloody Mary, Hitman, Y the Last Man, Fables sont effectivement des oeuvres hautement snobs et inaccessibles au commun des lecteurs…Heureusement, tu peux te rabattre sur le Millarworld….
Jamais eu l’occasion de rencontrer Moore en live, non, hélas.
Le côté dérangeant de certaines images du run, Moore l’a cultivé à l’envi, ça devient une métaphore de toutes les amours que les bigots qualifient de « contre nature ». Et c’est souvent que Moore glisse des métaphores sociales de ce genre dans son travail. Ça participe de son immense richesse.
Ayant déjà eu l’occasion de lire du Druuna de Serpieri avec ses mutants qui ressemblent à des tas de chair en fusion plein de tentacules qui tripotent l’héroïne, je ne peux que trouver mignon en comparaison une plante qui enlace une femme. C’est comme faire un câlin à un arbre. C’est pas si dégueu que ça^^
J’ai lu toute la partie publiée en VF chez Delcourt dans la superbe édition en NB il y a des années maintenant (autour de l’an 2000). J’avais trouvé ça absolument génial. Quel pavé dans la marre au niveau des comics mainstream de l’époque ! C’est d’un niveau d’écriture tellement à des années lumières célestes au dessus de la production du moment que c’en est vertigineux.
Urban Comics nous promet une collection « Alan Moore présente Swamp Thing » depuis des lustres. On aurait enfin le run complet en VF, après plusieurs tentatives infructueuses. Et j’arrêterais enfin de râler en criant que cet éditeur ne fait que publier des histoires de slips et des rééditions de trucs déjà publiés ailleurs (bon, en fait j’arrêterais peut-être de râler, parce qu’il nous manque encore une édition complète des séries Tom Strong et Tomorrow Stories du même Alan Moore, et même une réédition correcte (non découpée à l’arrache en 7 tomes) de Promethea)…
Souvenirs, souvenirs – Je ne connaissais pas l’anecdote du démarchage téléphonique, et je n’avais pas conscience de l’importance du rôle de Len Wein. Merci pour ces éléments.
A l’époque, j’achetais mes comics mensuellement chez Album (à l’époque encore dans la boutique rue Dante) et j’ai dû arriver à la fin des épisodes d’Alan Moore. Passer de la VF disponible à l’époque, à la VO pré-Vertigo était un saut quantique que je n’ai pas assimilé sur le moment.
J’aime bien la manière dont cet article souligne la liberté artistique dont jouissait Moore. L’épisode 60 restera à tout jamais gravé dans ma mémoire, une forme de vie racontant un souvenir à ses enfants, avec des illustrations à base de collage réalisées par John Totleben. Sidérant !
Vraiment étrange, vraiment bizarre et vraiment dérangeant – La forme de communion décrite par Moore, entre Abigail et la créature repoussait effectivement les limites de l’imaginable, en allant jusqu’à une union physique aussi romantique que difficile à conceptualiser sur le plan biologique, en mettant en avant les sentiments des personnages. Magique, romantique et anti-conventionnel !
En lisant ton article, je me souviens également comme il était surprenant que des personnages DC usés et tournés en ridicules pour certains (le premier Sandman de Kirby et Simon) trouvent une seconde jeunesse en passant du côté mature, en s’émancipant jusqu’à prendre leur autonomie de l’univers partagé DC, tels Shade ou John Constantine.
Ayant vécu cette époque, ça a été un déchirement pour moi de voir John Constantine réintégrer cet univers partagé dont il n’avait jamais vraiment fait partie.
« Ayant vécu cette époque, ça a été un déchirement pour moi de voir John Constantine réintégrer cet univers partagé dont il n’avait jamais vraiment fait partie. »
À ce sujet, Ennis a dernièrement tourné en dérision le traitement du personnage chez DC, en le montrant nostalgique de sa gloire passé chez Vertigo :
http://www.bleedingcool.com/2016/09/27/garth-ennis-parodies-treatment-john-constantine-dc-comics/
Pour ma part, je considère que le véritable Constantine a disparu avec la fin de la série Hellblazer.
Allez puisque demain c’est férié, j’y vais de mon débat :
Alex, les copains que pensez vous des dernières déclarations de Moore avant sa retraite, notamment autour du fait qu’il serait temps pour le XXI siècle d’inventer ses icones et non plus de surfer sur la vague des super héros inventés il y a un demi siècle de celà ?
Je pense tout simplement que l’un n’empêche pas l’autre. Mais oui, inventer de nouveaux personnages serait cool. Et techniquement les auteurs le font déjà en créant des persos « secondaires » (chez Marvel ou ailleurs) mais ils ne semblent pas prendre racine. Surement par frilosité des éditeurs qui veulent continuer de miser sur ce qui est sûr de marcher.
Le problème, c’est que comme il déteste Harry Potter, il ne voudra jamais lui accorder ce statut d’icône.
après, il a raison, on ne peut pas toujours ressasser les vieilleries (même si Moore lui même l’a beaucoup fait, et avec brio d’ailleurs) mais l’industrie des comics, pour ne citer qu’elle, a du mal à faire émerger de nouvelles grosses licences : Walking Dead, c’est déjà vieux, et les derniers personnages vraiment iconiques ont été créés entre le milieu et la fin des années 90 (Hellboy, Spawn, Witchblade).
Je crois qu’il y a en effet une crise générale de la créativité, je crois, et c’est structurel, en partie dû à la mainmise de grands groupes de médias.
Là où je donne raison à Moore, c’est que tout ce revival des 80’s est quand même tout bénefs pour les studios mais peu pour l’art…Ca m’évoque les reformations des vieux groupes de rock.
Stranger Things, j’ai pas testé, faute de temps et justement parce que ce qu’on m’en avait dit (revival 80’s) avait de quoi me faire fuir : les années 80, j’y étais, et j’ai pas envie de revoir le Top50, les pantalons trop courts et les synthés clinquants (et rappelons-nous que c’est l’époque où Donald Trump est devenu une espèce d’icône des yuppies reaganiens).
après, le problème n’est pas tant les éditeurs que le lectorat. je pense que Jeff Lemire vend beaucoup mieux X-Men que Sweet Tooth.
Sweet Tooth n’a rien d’enthousiasmant à mes yeux. J’y reviendrai.
Un podcast sur Comics Sanctuary m’avait bien intéressé : les comics, c’était mieux avant ? Dragnir et Julien Hugonnard Bert émettait des trucs intéressants autour du fait qu’après l’âge des personnages, des créateurs, notre époque était celle des éditeurs. Tout est dit.
Le super héros, j’aurais tendance à penser que c’est comme le rock : tout y a été dit mais de temps à autre un groupe vient faire la différence. Je pense pourtant comme Moore qu’il serait temps de passer à autre chose. Ce qui n’est pas prêt d’arriver.
Ah oui très intéressant comme discussion. J’ai écouté le podcast et j’aime bien aussi le volet sur l’obsession des fans sur le réalisme des super héros qui dessert pourtant parfois les récits alors qu’on peut parler de problèmes réels sans être trop réalistes, alors que donner une origine hyper réaliste à un héros, au pire on s’en fout quoi. C’est pas ça l’important. Parce qu’au final il y aura toujours un mec en slip qui vole, et ça ne permettra jamais d’atteindre le niveau de réalisme d’un truc comme Scalped.
Frank Miller a voulu faire un Batman qui défonce du djihadiste ?? Un peu daté en effet comme concept.
Et j’suis d’accord aussi sur le fait que Fatalis qui pleure lors du 11 septembre dans le run de JMS, ça passe pas^^ J’en avais déjà parlé. Too much. Le mec est un tyran qui a massacré plein de gens. C’est absurde. ça nous sort trop de l’univers de la BD pour nous montrer la gravité d’un acte qui a réellement eu lieu. Faire pleurer le caïd aurait été plus logique.
finalement, DC ne l’a pas laissé faire, et Miller a redessiné les oreilles pour en faire un autre héros. Ça a donné Holy Terror, un truc dont il paraît qu’il faut le lire au second degré, mais moi, même au troisième, j’ai eu du mal. (et pourtant je lis des trucs qui feraient vomir un bouc)
Je ne connais pas du tout Swamp Thing et j’attends moi aussi une édition Urban digne de ce nom. J’ai donc appris énormément de choses ici tout en étant très amusé par le texte : l’introduction à base de belle histoire de l’oncle Paul est irrésistible.
J’ai également adoré les légendes de scans et la mise en perspective de.toute une époque que je ne connais pas. Bref, merci.
J’ai beaucoup aimé Stranger Things en le prenant pour ce qu’il est, un divertissement à base d’histoires d’horreur et de secrets d’état : typiquement années 80 aussi. Peut-être que la nostalgie a joué mais c’est très agréable.
Je ne pense pas que de nouvelles icônes puisse avoir la force de celles passées, ni même que les idées nouvelles existent. Tout est recyclage. Harry Potter, que je vénère, doit beaucoup au Seigneur des anneaux, et l’article traite bien du dépoussiérage de vieux personnages.
Pourtant il y a toujours de nouvelles choses. Battlestar Galactica, Game of Thrones par exemple. Quant à Moore, il est le principal instigateur de l’avènement de lecteurs ou spectateurs plus exigeants, il devient très compliqué d’avoir un consensus sur de nouveaux personnages.
Je ne savais pas que Hellblazer était fini…
Même le Seigneur des Anneaux, quand on regarde de près, c’est moitié Kalevala, moitié Nibelungen, moitié Edda (oui, la somme des parties, le tout, tout ça)
après, l’œuvre de Tolkien diffuse une sensation d’urgence et d’apocalypse informée par l’expérience de la guerre de Tolkien (qui était infirmier dans la Somme il y a pile cent ans)
Pour Lemire, j’ai la nette impression qu’il est plus à son aise sur ses projets personnels indés plutôt que sur ses oeuvres de commande mainstream. Ses X-Men ne vont sans doute pas enthousiasmer Bruce.
Y’en a qui disent que « Lemire is no good ». Tout ça parce que l’Emir voulait devenir calife à la place du calife !!!
perso, j’aime beaucoup le boulot de Lemire, et je trouve qu’il arrive à passer avec bonheur de trucs super calibrés (ses X-Men, efficaces et marrants qui m’évoquent assez les Asto de Whedon) à des choses ultra intimistes du genre Underwater Welder ou Essex County.
Incroyable mais vrai : ayant offert un abonnement Netflix à ma femme nous avons regardé la première saison de Stranger Things ensemble et en entier. J’ai également trouvé les premiers épisodes (2 ou 3) comme un hommage appuyé que j’ai été capable d’identifier grâce aux remarques de Tornado sur les Goonies. Mais à partir de l’épisode 4, l’empathie a fonctionné à plein, malgré les ressorts un peu convenus. Au final, j’ai trouvé cette première saison très bien.
Ah ben je suis content que toi aussi tu aies aimé !
En ce moment, j’alterne entre Agents of SHIELD saison 4, The Wire saison 4 et Agent Carter, dont je viens de voir la fin de saison 1 (la série est finie, arrêtée pour faute d’audience, et ne comporte que huit épisodes dans sa saison 1 et dix dans sa saison 2).
« Hé, les gars, qui fait la review de Stranger Things ? Présence ? 🙂 Ce serait une première !
Relèvera-t-il le défi ? (suspense insoutenable) 😀 »
@ Tornado : le chef m’en a fait la commande hier soir, suite à mes déblatérations sur la saison 3 sur mon compte FB…
@ Cyrille : ça te gêne pas si je m’en occupe ?
@ Bruce : encore un heureux hasard !
@Kaori – Non, je n’ai pas relevé le défi… et je n’ai pas regardé les saisons suivantes.
@Kaori : aucun souci, je ne me sens pas du tout d’en parler. Je suis en plein dans la saison 3, plus que trois épisodes à regarder. Je la trouve plus réussie que la deux.
@ Jyrille : même avis 🙂 . Ok, je m’y atèle !
@Kaori : Cool ! J’ai vu les deux premières saisons et j’ai adoré (surtout la 1ere).
Hâte de lire ton article !
Rien que sur la bande originale, il y aurait déjà une tonne de trucs à dire pour ceux qui ont vécu les années 70. Et quant aux références aux films de la même époque, encore plus (non non je ne cherche pas à te mettre la pression !) 😀
@Tornado non mais laisse tomber, c’est ce que je me suis dit hier et cette nuit (« Mais pourquoi tu t’es lancée dans un défi pareil !!! »). Déjà la phrase de Cyrille m’a fait buguer. Cyrille qui ne « se sent pas d’en parler », oh putain ça part mal !
Le truc c’est que si j’en dis trop, je gâche le plaisir de la découverte (mais au moins je suis excusée d’en avoir oublié 😉 ), et si j' »alerte spoiler », va putain falloir que je note toutes les références, et c’est quasi mission impossible !!!
Pour l’instant je me suis lancée dans une analyse générale, avec différents points importants à aborder. Pour le reste, vive Internet, hein… Va me falloir les deux mois de vacances, si ça se trouve !! 😉
T’inquiète pas Kaori, ça va bien se passer… C’est juste que ça ne m’inspire pas trop. Je n’ai pas d’angle d’attaque. C’est une série que je trouve surtout fun, ça rappelle Le club des 5, les Goonies, une certaine idée de l’insouciance.
@Kaori : Ah ah ! T’inquiètes ! Tu feras comme tu veux et ce sera nickel ! Je te chambrais !
Hâte de lire ton article, quel que soit l’angle d’approche 😉