Providence, par Alan Moore & Jacen Burrows
Par : TORNADO
VO : Avatar
VF : Panini
1ère publication le 22/01/18- MAJ le 18/04/21
Cet article portera sur l’intégralité de la série Providence, réalisée entre 2015 et 2017 par le scénariste Alan Moore et le dessinateur Jacen Burrows.
Puisque l’épisode final de la série fait également office de suite et fin au graphic-novel Neonomicon, nous en toucherons également quelques mots en introduction.
Cet article, publié en deux parties, est une retranscription de l’enquête réalisée par Terence Tornado, professeur à la faculté du Boléro de Ravel de Thonon (et apparenté à un certain chroniqueur du blog Bruce Lit), disparu dans des conditions mystérieuses.
Attention : Il contient quelques éléments-clés, susceptibles de révéler des secrets dangereux pour votre santé mentale et pour votre salut…
Introduction de l’auteur :
Mon enquête se déroulera en trois temps, en plus d’une introduction dévolue au graphic-novel Neonomicon. Soit un chapitre pour chaque tome de la série, les trois recueils étant plus ou moins conçus comme autant d’actes (de quatre épisodes chacun), sur le modèle de la thèse, de l’antithèse et de la synthèse.
Providence est censée être l’œuvre définitive du scénariste Alan Moore dans la perspective d’offrir aux lecteurs une relecture moderne et infiniment ambitieuse de la bibliographie de l’écrivain Howard Phillips Lovecraft et de son héritage littéraire nimbé de mystère.
N’y allons pas par quatre chemins : Le but de mon enquête est de percer, à travers la vision de l’auteur de Watchmen et de V pour Vendetta , les secrets qui nous permettront, peut-être, de découvrir l’origine de la création du Necronomicon et, par extension, de trouver la clé menant aux portes de l’au-delà, à la recherche des Grands Anciens…
1) Avant propos – Neonomicon : Les Racines du Mal :
Lorsque le premier épisode de Providence est publié, il est entendu que c’est le début d’une série qui se lit dans la continuité de Neonomicon, un roman graphique en six parties paru initialement en 2011. Celui-ci est constitué d’un prologue (intitulé The Courtyard) adapté d’un récit en prose initialement écrit par Alan Moore, mais transposé sous forme de comicbook par le scénariste Anthony Johnston. Les quatre épisodes du récit principal ont été écrits directement par Alan Moore et l’ensemble est mis en image par Jacen Burrows.
Le pitch s’appuie sur une enquête policière dans le milieu du paranormal, à travers laquelle Moore imagine une trame narrative sur fond d’hommage à Lovecraft.
Sacré Alan Moore ! Lorsque la publication de Neonomicon (« Neo » pour « Nouveau ») a été annoncée, une rumeur insinuait que le scénariste avait réalisé ce comicbook afin de payer ses impôts ! Une possible provocation de la part du plus grand auteur de comics de la planète qui, comme d’habitude (et tant pis si ça énerve les lecteurs de super-héros mainstream qui ne l’apprécient pas) surpasse tout le monde, même lorsqu’il écrit une simple histoire linéaire et facilement accessible comme celle-ci !
Pour ce qui est de l’hommage à Lovecraft, Alan Moore développe d’amblée une toile de fond qui s’avère aussi personnelle que cohérente.
Bourré de références à l’univers du Mythe de Cthulhu, puisant ses sources dans les écrits de Lovecraft aussi bien que dans ceux de ses héritiers littéraires, le récit d’Alan Moore affirme néanmoins son indépendance et son individualité en interprétant librement certains éléments Lovecraftiens, dont la violence latente et les métaphores sexuelles deviennent, sous sa plume, explicites et ostentatoires.
Neonomicon se révèle ainsi sulfureux, à ne pas mettre entre toutes les mains, car l’interprétation que propose Alan Moore de la cosmogonie du maître de l’horreur affiche littéralement ce qui ne relevait jusqu’ici que de la simple allusion, voire du sens caché.
Pour autant, cette transposition frontale (et insoutenable) ne saurait faire passer le récit d’Alan Moore pour de la simple illustration racoleuse vaguement inspirée des nouvelles de Lovecraft. Car notre scénariste s’empare de ce matériel pour témoigner de son propre point de vue sur cet écrivain qu’il considère comme l’une de ses principales sources d’inspiration, en même temps qu’il en condamne le racisme et les idées réactionnaires sous-jacentes. Ainsi, dans Neonomicon, les personnages principaux sont soumis au mal dans une forme de logique qui veut que la punition soit équivalente à leurs fautes, dont l’essence fait écho aux tabous et aux préjugés qui jalonnent la bibliographie lovecraftienne : Aldo Sax, l’enquêteur qui intervient dans le prologue, est un professionnel aussi efficace et brillant qu’il est méprisant et raciste. Les pistes qu’il soulève l’emmenant immédiatement vers un mal à sa mesure qui va s’empresser de le dévorer. Meryl Brears, sorte de Dana Scully nymphomane et bourrée de névroses, sera victime d’un démon aux pulsions sexuelles insatiables. Gordon Lamper, le dernier des enquêteurs, est irréprochable, et c’est un homme de couleur…
Alors que l’on pourrait penser que ce récit fait office d’œuvre mineure, perdue quelque part dans la carrière du créateur de Watchmen, on s’étonne de la richesse de son sous-texte, qui démontre le talent d’un auteur capable, même dans ses travaux les plus anecdotiques, de faire preuve d’esprit et de synthèse conceptuelle.
Pour ne rien gâcher, la narration choisie par Alan Moore est aussi simple qu’efficace. On a certes connu le scénariste plus inventif, mais l’ensemble se lit d’une traite et l’on regrette immédiatement, une fois le livre refermé, que les aventures de ces enquêteurs au royaume du mal ne continuent pas sur toute une série de tomes !
Le prologue est mis au point par le scénariste Anthony Johnston, qui réalise un très beau travail d’adaptation à partir de la prose d’Alan Moore. Je l’ai trouvé beaucoup plus créatif ici (avec son système des deux vignettes verticales par planche) que sur Fashion Beast, une autre adaptation d’un autre récit signé Alan Moore.
Les personnages de Neonomicon reviendront en 2017, lors de l’épisode final de Providence, qui servira ainsi de lien entre les deux histoires…
2) Providence Tome 1 – Sous le Monde :
Le pitch : 1919. Robert Black, un journaliste new-yorkais, propose à son patron de combler les vides de la prochaine édition de son journal avec un article racoleur, du genre à déterrer les faits divers sordides. Il pense au livre Sous le Monde, un brûlot ayant soi-disant poussé ses lecteurs au suicide pur et simple ! Mais il lui faut d’abord mener une enquête afin de retourner à la source de sa publication.
Se faisant, Black va sillonner les tréfonds de la Nouvelle-Angleterre en quête de ce mystère, qui va le fasciner au point de lui faire oublier l’objet initial de ses recherches, et le mener vers un monde caché des plus obscurs…
La série débute un peu comme une remise à plat des nouvelles les plus emblématiques d’H.P. Lovecraft. Les quatre premiers épisodes sont ainsi l’occasion pour le lecteur de reconnaitre à chaque fois l’un des récits les plus populaires de l’écrivain (L’air Froid pour le premier chapitre, Horreur à Red Hook pour le deuxième, Le Cauchemar d’Innsmouth pour le troisième et L’Abomination de Dunwitch pour le dernier).
Cette « compilation » de récits célèbres n’est pas gratuite, car Alan Moore les utilise en les mêlant à sa propre intrigue, permettant au final que l’ensemble forme un tout indissociable et homogène. Et c’est là que réside l’un des principaux intérêts de la série : Réinvestir les nouvelles éparses de Lovecraft et les intégrer dans un ensemble mythologique cohérent et moderne, où chaque élément est lié en un tout unique et fédérateur.
Il ne s’agit toutefois pas d’une adaptation au sens propre, car aucun des personnages selon Alan Moore (à ce stade de la série) ne porte le même nom que ceux d’H.P. Lovecraft et même le mythique « Necronomicon » a été ici transformé en « Livre de la Sagesse des Etoiles » ! On est donc bel et bien dans une forme de relecture, tout en restant dans l’hommage pur, restituant pleinement l’esprit initial de l’univers Lovecraftien.
Nous restons également dans la lignée de Neonomicon, à savoir qu’Alan Moore n’y va pas avec le dos de la cuillère dans le domaine de l’horreur et du sexe frontal, illustrant franchement tout ce que l’écrivain ne se permettait pas. Et puisque Lovecraft était paradoxalement, comme nous l’avons lu plus haut, un puritain pétri de préjugés (racisme, homophobie, antisémitisme), Moore profite de sa liberté d’adaptation afin de corriger le tir et rétablit ainsi directement ces notions dans son récit (héros juif et homosexuel, policier gay et raciste, etc.). Il le fait toutefois avec plus de retenue que dans Neonomicon, même si l’on devine qu’il ménage savamment ses effets en commençant par être subtil, pour se lâcher davantage dans les prochains épisodes…
Ainsi, la relecture de la mythologie lovecraftienne par Alan Moore, c’est une combinaison savamment équilibrée entre le maintien des fondamentaux, et le sévère dépoussiérage d’éléments intrinsèquement liés à cette mythologie.
Après Neonomicon, Moore préserve donc son indépendance en continuant à gloser certains éléments Lovecraftiens, sa métaphrase assumant toujours cette volonté de réintroduire les connotations et les diverses orientations sexuelles jadis évacuée par l’écrivain.
Soit l’hommage ultime d’un auteur à l’une de ses idoles, hommage à la fois sincère, critique, analytique, et rehaussé d’un point de vue personnel quant aux éléments fondateurs du Mythe de Cthulhu.
Contrairement à Neonomicon, cependant, Alan Moore renoue directement avec le décorum originel des nouvelles de Lovecraft (les années 20, l’envers du décor étasunien), ainsi qu’avec l’enquête classique et le cadre gothique, glauque et lugubre de la Nouvelle-Angleterre. On suit ainsi le parcours du personnage principal en retrouvant cette sensation envoûtante et mystérieuse, alors que l’on plonge avec lui, lentement mais inexorablement, vers un ailleurs sombre, secret et défendu, qui nous mènera peut-être à la découverte de créatures cosmiques et ténébreuses tels Cthulhu, Dagon et toute la clique…
Comme il le fait avec chacune de ses créations, Alan Moore va commencer par une phase de déconstruction de tous les clichés inhérents au genre consacré (dépoussiérant au passage le cadre gothique suranné tel qu’on le concevait dans les années 20) avant de reconstruire ce dernier en lui apportant un surplus de sens et diverses couches de sous-texte. Il est donc passionnant d’observer le travail du scénariste dans son entreprise de lier la petite histoire avec la grande et, déjà, on peut imaginer que les horreurs lovecraftiennes vont servir de métaphore visant à dénoncer quelques maux de notre monde bien réel…
3) Tome 2 – De la fiction à la réalité :
A ce stade de la série, Alan Moore continue de nourrir son récit de références aux nouvelles originelles de Lovecraft. Mais contrairement au premier tome, dans lequel chaque épisode dissimulait un hommage à une nouvelle emblématique, il multiplie ici ces références tout en les rendant moins facilement identifiables, comme si elles étaient distillées au compte-gouttes. Ainsi, le second épisode de ce recueil (« L’Abîme du Temps ») contient des éléments issus de plusieurs nouvelles lovecraftiennes, telles Dans l’Abîme du Temps, Herbert West Réanimateur et Monstre sur le Seuil. En gros, plus on avance dans l’univers de Lovecraft, plus les références sont nombreuses et diffuses…
Maintenant, l’intrigue toute linéaire du récit prend un tournant inattendu dans la mesure où le scénariste cherche à lier son récit avec la vie de l’auteur de Providence (d’ailleurs Moore est également l’auteur de Providence puisque c’est le titre de sa série !). On assiste ainsi, dans ce second tome, à une étonnante tentative de lier le réel avec la fiction, c’est-à-dire l’un des thèmes forts de l’auteur de Promethea
D’une manière quasi-inintelligible (heureusement que c’est expliqué dans le rédactionnel !), Moore diffuse également tout un tas de références à la famille de Lovecraft, semblant se diriger progressivement vers le personnage réel. Et alors que Robert Black se rapproche peu à peu de la ville de Providence, il croise de manière indirecte les aïeux de l’auteur du Mythe de Cthulhu.
Dans le cinquième épisode, le père de Lovecraft (Winfield Scott) apparait en toile de fond. Puis, dans l’épisode suivant, c’est autour de son grand-père (Whipple Van Buren Phillips) de faire une apparition furtive, avant de revenir dans le dernier chapitre, au cours d’une manifestation onirique. Ce sont des références obscures, nébuleuses, sibyllines. Et il faut les clés pour les assimiler. Mais effectivement, l’un des membres fondateurs de la « Stella Sapiente », société secrète et ésotérique à la recherche du monde d’en dessous imaginée par Alan Moore, apparait sur un tableau aux côtés de Winfield Scott Lovecraft, et il se nomme Van Buren…
En réalisant cet échiquier sur le jeu des références, Moore continue de mêler le réel à la fiction par le biais d’une savante étude du matériel séminal (qu’il utilise pour sa phase de reconstruction), en l’occurrence l’ascendance d’H.P. Lovecraft et les éventuelles répercutions de cet élément sur son œuvre (qui bien entendu vont prendre, dans la série, des proportions éminemment ésotériques, au point de faire d’Howard Phillips un véritable prophète en son pays…). Et l’on apprend d’ailleurs que les parents de l’écrivain avaient vécu des événements qui peuvent être reliés (telle une source d’inspiration indirecte) à ses récits imaginaires.
Alan Moore n’expose pas ces recherches en les offrant ostentatoirement à ses lecteurs. Au contraire, il les dilue subtilement dans sa phase de reconstruction de l’univers lovecraftien. Ce sont donc des références cachées, qui participent de l’œuvre en toute discrétion. Et Moore de s’imposer tel un artiste contemporain, soucieux de nourrir ses créations sans avoir peur de ne pas être suivi par le public dans son exploration aux diverses couches de lecture…
Ainsi, dans le dernier épisode de ce deuxième tome, Robert Black rencontre Howard Phillips Lovecraft en personne. Celui-ci l’invite à le rejoindre chez lui, à Providence. Et le livre se referme en attendant le troisième et dernier tome. Ce faisant, la réalité vient de rejoindre la fiction…
Le versant purement « divertissant » de l’ensemble est évidemment basé sur le rapport qu’entretient le récit avec l’horreur lovecraftienne. Tous les admirateurs des nouvelles de Lovecraft le savent : ses descriptions en termes d’horreur et de créatures fantastiques sont toujours nébuleuses, distillées en pointillés, et le lecteur doit lui-même imaginer l’essentiel de ces manifestations fantastiques. Dès lors, illustrer cette dimension relève de la gageure. Et Moore & Burrows, pour le moment, s’en tiennent donc au minimum, préférant tisser une atmosphère plutôt que de déballer un bestiaire horrifique. Il y a bel et bien quelques monstres, mais ils sont sans cesse assimilés à des manifestations oniriques et sont rarement exposés au premier plan. Et la scène la plus horrifique de ces quatre épisodes est ainsi réalisée sans le moindre artifice folklorique : Une horreur surnaturelle physique et domestique, entre deux être humains !
A ce stade de la publication, Providence est une série d’une richesse vertigineuse, très austère dans la forme, mais non dénuée de séduction vénéneuse. Les pages se tournent avec un réel intérêt et l’écriture de l’ensemble est extrêmement sophistiquée. Soit un étrange mélange entre la création exigeante d’un auteur au sommet de ses explorations thématiques, le charme attirant de l’univers lovecraftien, et l’application froide et rigide de tout un concept.
Nous vous donnons à présent rendez-vous dans la deuxième partie de l’article, où se poursuivra cette enquête à travers laquelle le grand Alan Moore cherche à effectuer une relecture de l’œuvre d’H.P. Lovecraft !
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Quand Alan Moore revisite l’œuvre d’Howard Phillips Lovecraft, c’est autant l’occasion pour l’auteur de Watchmen de réaliser un hommage sincère et critique envers son idole que de développer une tentative ambitieuse de lier le réel avec la fiction. La 1° partie de l’enquête menée par un de nos chroniqueurs, mystérieusement porté disparu au terme de sa tâche, commence chez Bruce Lit…
La BO du jour :
Qui de mieux, afin de mettre en musique une série gothique et crépusculaire comme « Providence », que le groupe Dead Can Dance ? Et quoi de mieux, au milieu de cette discographie ténébreuse, que le sépulcral « De Profundis » ?
Bon ben…article bien écrit mais bon…moi, j’ai trouvé Neonomicon dégueulasse.
L’obsession de Moore pour le cul commence à me débecter. Je trouve que ça se marrie mal avec les écrits de Lovecraft qui en sont d’ailleurs totalement dépourvu, mais bon j’imagine que de nos jours modernisation signifie « plus de cul et de sang » et que c’est forcément bien dès que ça n’a plus rien à voir avec les romans et qu’on aligne des scènes d’orgies pour choquer.
On pourra bientôt vendre du hentaï comme de la grande littérature. Et les créatures paranormales
flippantes qu’on ne voit jamais que brièvement dans les récits de l’écrivain sont maintenant des monstres couillons qui veulent baiser des humaines et ont des éjaculations précoces. Tordant !
Mais bon bref hein…ce n’est que mon avis. No offense et tout ça. Mais cette approche ne m’intéresse pas. J’ai encore le viol collectif de Neonomicon dans la tête et ça me rend irritable (on appelle ça une nympho comblée une femme qui se fait violer maintenant ?).
Bref je ne lirais sans doute jamais ça. Je préfère largement les œuvres qui s’inspirent de Lovecraft comme le film « l’antre de la folie » ou même les histoires courtes de Junji Ito qui y font penser parfois. Aucune envie de voir Cthulhu sortir de l’eau avec une érection géante pour enfiler une baleine…
Quoi ? Oui j’exagère, je suis taquin^^
Pour moi Neonomicon a autant de rapport avec l’ambiance des écrits de Lovecraft que David Lapham avec le bon goût.
Pour Providence, ben je sais pas quoi en penser vu que je ne l’ai pas lue mais d’après tes descriptions c’est dans la même veine :
« illustrant franchement tout ce que l’écrivain ne se permettait pas »
Ou n’avait aucun intérêt à écrire peut être, non ? Pourquoi faudrait-il toujours qu’il y ait du cul sous-jacent que l’auteur aurait voulu écrire mais se retenait de faire ? Freud, sors de ce corps !^^
Bref moi ça m’inspire du dégoût tout ça, et c’est pas du tout la même sensation que quand je lis les nouvelles de l’écrivain. Du coup, ben…pas tenté du tout.
En plus le trait de Burrows…je n’aime pas vraiment. Encore une fois pour des BD Lovecraftiennes, je crois que je préférerais un truc plus perché sur la forme. Façon Cromwell Stone.
Amen
total d’accord.
Ah, j’suis pas tout seul, ouf^^
Et la nana qui se fait violer a répétition et finit par adorer ça, c’est aussi le principe des hentaï. Parce que c’est bien connu que les femmes sont tellement toutes des sal**** que plus on les viole, plus elles aiment ça, non ?
Argh…c’est vraiment pas pour moi ces conneries. Je ne reproche pas à Moore son idée d’approcher Lovecraft autrement, mais je n’ai aucune envie de voir ça. Et je n’y ai vu aucun propos intelligent (l’inspecteur aurait mérité de se faire massacrer parce qu’il a des idées racistes ? Euh…je préfère juste voir ça comme un rebondissement choquant parce que si on considère qu’il y a un sens caché, il n’est pas flatteur…du genre argument pro peine de mort pour les racistes même s’ils n’ont fait de mal à personne.)
Et qu’on ne vienne pas me dire que j’ai rien pigé et que le cul était le sens profond des écrits de l’écrivain. C’était justement un auteur qui savait distiller une atmosphère inquiétante sans recourir au gore ou au sexe. ça ne m’intéresse pas de voir cette approche de Moore.
Mais bon je veux pas débattre sur son talent hein. Si vous voulez, il a du talent. Moi un truc sur deux de lui me tombe des mains mais bon…je vais juste dire que c’est pas pour moi.
@Matt : quand j’écris sous le scan idoine « Meryl Brears, une nymphomane comblée… », il y a un jeu de mot graveleux pour détendre l’atmosphère (comblée = remplie), certainement pas une allusion au fait que la nympho mérite d’être violée…
Ah…sorry^^ J’avais pas saisi la blague.
Le truc c’est qu’elle semble finir par aimer ça dans le comics, et du coup j’ai trouvé ça tordu. C’est pas un sujet que j’aime voir traité à la légère et où il est facile de donner l’impression que la femme finira toujours par prendre son pied à subir divers sévices…
J’ai lu Providence sans avoir pris connaissance de Neonomicon.
Je suis d’accord avec ton analyse.
J’ajoute qu’il vaut mieux être familier des écrits de Lovecraft pour pouvoir saisir certaines subtilités.
Enfin, je trouve que Stuart Gordon à une approche similaire quand il s’agit d’aborder de manière frontal le sexe (Dagon, From Beyond…).
Pour la petite histoire et pour ceux qui ne seraient pas au courant (j’espère que Bruce ne m’en voudra pas de faire grassement mon autopub ici), je sors une biographie de Lovecraft en BD le 8 février, aux éditions 21g.
Et il y en aura en avant-première à Angoulème (stand Motif/Délirium/La Cafetière) et à Paris Manga (avec Central Comics)
Face à la complétude de ce 1er article, j’ai définitivement effacé le mien qui était aussi ignare que méchant. Celui de Tornado restera donc la référence sur cette oeuvre que j’ai cordialement détestée. Mais comment put-il en être autrement ? La magie et l’ésotérisme me gonflent. Je n’ai jamais ouvert un Lovecraft de ma vie. Et je n’ai aucune espèce d’attirance pour les poulpes.
Tu m’apprends ici que les chapitres sont autant de clins d’oeils à des bouquins que je ne connais pas.
Par contre, je suis en léger désaccord autour de la simplicité de l’intrigue, puisque je me suis accroché et n’y ai RIEN compris. J’avais trouvé les dessins atroces. Par contre je n’ai pas souvenir d’autant scènes de sexe que celà. M’étais je déjà endormi ?
J’ai vite revendu mon édition Panini, et il est, pardon, pardon, pardon, pardon, pardon (X1000) très peu probable que je veuille replonger là dedans.
Par contre le volet autobiographique du bonhomme ne serait pas pour me déplaire à explorer.
Oui alors hein…Neonomicon n’a rien à voir avec les écrits de Lovecraft. J’aime les nouvelles de cet auteur mais pas ce comics.
Neonomicon passe 10 pages sur une scène de viol collectif, puis la nana ne cesse de se faire prendre par le monstre. On oscille entre le dégoût face à une telle complaisance à montrer tout ça de manière extrêmement frontale et la parodie quand on voit que le monstre se branle limite dans son coin…
Franchement c’est du hentaï malsain pour moi.
Stuart Gordon en film traite au moins ça sérieusement, avec un niveau d’érotisme léger et pas au niveau d’un film porno interdit aux moins de 18 ans, et quand la nana dans Dagon se fait choper par un gros monstre, on ne sait pas trop ce qui lui arrive mais elle ne semble pas prendre son pied. Elle est offerte en sacrifice et crève. Et il y a du suspense avant de révéler ce qui se passe dans le village, il y a une fin un brin poétique.
Mais bon bref je l’ai déjà dit…Moore fait ce qu’il veut, mais je n’ai pas aimé ce matin dégueulasse. Les enchainements de massacres, démembrements et viols, ce n’est pas ce que je recherche dans les récits d’horreur. C’est une façon facile de générer du dégoût chez le lecteur, faute de savoir distiller une atmosphère mystérieuse et inquiétante par des moyens plus subtils…comme le faisait Lovecraft.
Et chez Lovecraft, la magie est rare. Comme les monstres sont rarement visibles aussi. Se baser sur les adaptations pour juger si on aime ou pas c’est dommage.
Bon tu as le droit d’aimer ce que tu veux hein, mais ça peut être bien d’essayer quand même. Par exemple pour 4€ tu prends ce volume (tu n’aimeras pas la première histoire qui contient un gros monstre et qui est loin d’être ma préférée aussi, mais les autres peut être) :
https://www.amazon.fr/Labomination-Dunwich-H-P-Lovecraft/dp/2290336564/ref=sr_1_1?ie=UTF8&qid=1516618523&sr=8-1&keywords=l%27abomination+de+dunwich
Alan Moore, arrivé à ce stade de sa carrière, n’a rien à gagner à pratiquer le racolage par le sexe et l’outrance. Et connaissant le bonhomme, on peut être certain qu’il n’introduit pas ces éléments pour faire du buzz, pas plus qu’il ne prend de dessinateur pour faire cool, le style de Burrows n’étant pas le plus accrocheur du monde…
Il y a du sexe, du gore et de la crasse malsaine ? Et alors ? C’est ça l’horreur aussi.
Lovecraft ne faisait pas ça ? Et alors ? Il ne s’agit pas d’une adaptation ici, mais d’une relecture 100 ans plus tard. Une prolongation. Une transfiguration.
Certains n’aiment pas quand c’est crade et qu’il y a du cul pas beau ? Très bien, il suffit de lire les Avengers dans ce cas.
Toutes les attaques qui peuvent être faites à Alan Moore comme quoi on n’a pas besoin d’être salace quand on raconte une histoire d’horreur lovecraftienne ne tiennent pas debout puisqu’il n’est établi nulle part qu’il s’agit d’une adaptation, et qu’il est établi partout que Moore ne fait pas ça dans un but racoleur.
C’est un auteur qui écrit librement. Et, par bonheur, un auteur libre ! Libre d’écrire ce qu’il veut.
Partant de là, ceux qui n’aiment pas son univers doivent simplement s’abstenir. Mais pour ce qui est de le salir sur l’autel du racolage, je ne suis pas d’accord.
Pour ma part, ce n’est pas un secret, j’aime l’intensité de ce genre d’univers. « Neonomicon » m’a retourné l’estomac et m’a révulsé à maintes reprises. Mais quel voyage ! Il m’a fallu un moment une fois le livre refermé pour que l’horreur et le dégoût se transforment en expérience de lecture fascinante, avec plein de pistes de réflexion en amont. Ça c’est de la lecture !
Si d’aventure un lecteur ne réussissait pas à dépasser ses névroses à l’issue de cette lecture, et qu’il se mette à retourner sa haine contre l’auteur en prétextant que c’est de la gratuité et de la vacuité, je trouverais ça irrecevable.
Qu’on n’aime pas je peux parfaitement le comprendre. Mais on peut aussi simplement passer à autre chose, sans vouloir tout brûler.
En ce moment je lis l’intégrale des adaptations de Lovecraft par Ian Culbard. C’est très différent, à la fois beaucoup plus fidèle aux nouvelles de l’écrivain et en même temps très libre aussi d’un point de vue artistique. Mais il s’agit d’adaptations au sens propre, pour le coup.
Ce que je disais à l’époque de la démarche de Moore sur Neonomicon :
https://nikolavitch-warzone.blogspot.fr/2013/07/plus-une-necronomiconnerie-pres.html
Merci. Je constate donc que je n’ai pas dit que des conneries ! 🙂
Béh moi j’suis d’accord avec ce que dit Mantichore en commentaire^^
« Il y a du sexe, du gore et de la crasse malsaine ? Et alors ? C’est ça l’horreur aussi.
Lovecraft ne faisait pas ça ? Et alors ? Il ne s’agit pas d’une adaptation ici, mais d’une relecture 100 ans plus tard. Une prolongation. Une transfiguration.
Certains n’aiment pas quand c’est crade et qu’il y a du cul pas beau ? Très bien, il suffit de lire les Avengers dans ce cas. »
« Si d’aventure un lecteur ne réussissait pas à dépasser ses névroses à l’issue de cette lecture, et qu’il se mette à retourner sa haine contre l’auteur en prétextant que c’est de la gratuité et de la vacuité, je trouverais ça irrecevable. »
Bon voilà alors tu ne vas pas m’épargner un débat, hein ?
-Bon alors déjà on a le droit de ne pas aimer l’excès de cul et de gore sans se faire qualifier de « lecteur des avengers » (sous entendu : lecteur de trucs mainstream couillons gentillets)
-Deuxio, j’ai pas dit que c’était mauvais parce que ce n’était pas pareil que les écrits de Lovecraft. C’est toi qui dit que Moore fait ce que Lovecraft n’osait pas. En lisant ça, ça donne l’impression que Lovecraft l’aurait fait s’il avait pu et que c’est ça le sens profond de son travail. Je dis juste que je ne suis pas d’accord.
-Ensuite, c’est sympa de parler des névroses des lecteurs parce qu’ils n’ont pas envie de voir certains saloperies. C’est ma faute alors, j’suis trop névrosé et sensible pour saisir la grandeur de l’œuvre ? ça c’est le genre d’argument avancé par les adeptes de la mode torture-porn dans les films. Les spectateurs qui n’aiment pas voir de la torture pendant 10 minutes, ils n’ont juste pas l’esprit assez ouvert. Mouais…
Tout ce que je dis c’est que ces saloperies, je les ai vues dans des hentaï bas de gamme racoleurs et pervers. Et que je ne saisis pas en quoi quand c’est Alan Moore qui fait ça, ce serait incroyablement génial. Oui la crasse, le cul et le gore ça fait partie de l’horreur. Mais pour moi, selon mon avis perso à moi qui n’oblige personne, c’est de l’horreur bas de gamme. Le « plus c’est trash visuellement et que ça dégoute le lecteur, mieux c’est ». Je ne partage pas cette vision, pour moi c’est trop facile, autant aller se mater des photos gores sur le net alors, ou même du hentaï, ça suffit pour avoir la même expérience qui retourne l’estomac.
Je ne sais pas si c’est spécialement à moi que tu t’adressais mais je suis le seul à critiquer la chose pour l’instant donc je te trouve un peu sur la défensive par rapport à ce que j’ai dit. C’est mon ressenti, c’est tout.
J’aime bien l’horreur mais pas quand ça consiste à montrer un viol collectif sur 10 pages avec des monstres et que l’histoire se résume à ça.
J’avais quand même bien aimé le prologue avec le mec qui fait des cauchemars et devient fou.
Le reste, désolé mais c’est pas pour moi. Et pour le racolage et la complaisance, ben écoute je sais pas si c’est les bons mots mais j’ai jamais vu des scènes de cul déviantes aussi explicites dans une BD qui n’est pas cataloguée comme porno…donc ok c’est pas forcément là pour que le lecteur prenne son pied (vu que moi ça m’a dégouté) mais disons que je trouve la démarche de provoquer le dégout facile (surtout quand ça se résume finalement à du sexe et du gore, alors que Cronenberg explorait par exemple des trucs plus tordus à base de transformation, de body horror…comme Junji Ito. Mais niveau sexe et gore, il suffit de dessiner les pires trucs qui nous passe par la tête, ça fera forcément son effet). C’est comme les jump scare.
Je préfère quand l’horreur réside dans une ambiance ou un visuel créatif.
Perso, j’ai juste feuilleté, j’ai pas aimé le parti-pris, j’ai reposé. Je n’ai donc pas d’analyse profonde à faire.
Juste que je ne reconnais pas le « feeling lovecraft » là dedans.
tout, le scénar, l’iconographie aussi et même la couleur.
Je me fiche de savoir si j’ai une quelque sorte de « tort de lecteur », parce que ça on peut dire ça de n’importe quoi que quiconque n’a pas apprécié.
moi bourrin: quand je vois du cul sur Lovecraft, bon ben je vois pas le rapport.
évidemment Chtulhu, c’est certainement une métaphore cochonne avec toutes ces tentacules…
mais j’en ai rien à péter, je n’apprécie pas des masses ce genre d’interprétations.
« Je me fiche de savoir si j’ai une quelque sorte de « tort de lecteur », parce que ça on peut dire ça de n’importe quoi que quiconque n’a pas apprécié. »
C’est une phrase très juste ça^^
Bon et faut arrêter avec les interprétations de hentaï hein. Cthulhu apparait UNE fois dans UNE nouvelle de Lovecraft, alors de là à tirer des plans sur la comète sur une métaphore sexuelle…j’en ai rien à péter non plus.
Moi j’ai juste pas trouvé ça bon. Un enchainement de scènes choc qui, si elles ont un sous-texte, véhiculent des idées plutôt radicales et peu profondes. Mais comme c’est du Moore, je vais m’en prendre plein la gueule parce que je touche à une vache sacrée.
@Matt : Désolé Matt, je ne répondais pas seulement à tes remarques (rien de personnel), mais elles ont tenu la 1° place sur le sujet.
Rien dans cette relecture de Lovecraft ne m’a paru donner dans la « facilité », au contraire.
En lisant l’article de Nikolavitch sur son blog, je trouve qu’il a su aller à l’essentiel pour bien démontrer la volonté de Moore d’être à la fois dans la critique et dans l’hommage. Il démontre plus directement que moi que d’un côté, Moore règle aussi son compte à Lovrecraft en remuant la merde cachée dans le sous-texte.
C’est un exercice de démonstration rondement mené que l’écriture de Moore sur ce coup là.
Je me suis vraiment donné du mal pour écrire cet article en décortiquant au maximum ma lecture de ces 4 tomes (si on considère que Neonomicon en constitue le premier volet). Parce que je voulais être certain, justement, que c’était aussi brillant que je pensais que ça pouvait l’être.
Du coup, je ne peux pas laisser passer des attaques comme « c’est de la facilité de verser dans le cul et le gore pour montrer l’horreur« . Parce que la remarque passe à côté de l’essentiel. C’est comme dire que l’action dans Matrix c’est too much. Au contraire, c’est une des rares fois où cette action et ce karaté chorégraphié produisent du sens, au service du script, et au sens conceptuel du terme. En ce qui concerne le sexe et l’outrance dans Neonomicon et Providence, c’est la même chose : Ça produit du sens. Ce n’est pas gratuit, et ce n’est pas de la facilité racoleuse.
Bah je trouve ça too much dans Matrix^^ Enfin ça se fait complètement au détriment de l’histoire. Mais bon ces films me gonflent aussi, je les trouve prétentieux et pompeux, je l’ai déjà dit^^ Le premier film ça va, pas les autres.
Tu réagissais à quelles remarques alors ? Sur facebook ? Y’a que moi qui remue la merde ici^^
Ecoute on va pas se fâcher, je ne vois pas ce que toi tu vois^^ Ou peut être que je trouve la critique de Lovecraft inutile (l’époque voulait ça aussi). Ou même impossible à comprendre si on ne connait pas l’auteur (donc la BD ne tient pas debout toute seule, ou ne prend du sens que si on connait le travail de Lovecraft à côté.)
Si on ne connait pas tout ça à côté, il ne reste qu’un récit linéaire simpliste avec beaucoup de cul gerbatoire et un ton bizarre qui frôle parfois la parodie (la nana qui vient tripoter le monstre qui a une éjaculation précoce…j’ai senti que ça voulait détendre l’atmosphère mais d’un autre coté…WTF ? On est censé trouver ça drôle dans un contexte pareil de femme violée par 30 personnes + un monstre ?)
Bref on va dire que je ne suis vraiment pas entré dans le délire et que j’ai trouvé ça gerbant. ça te va ?^^
« Bref on va dire que je ne suis vraiment pas entré dans le délire et que j’ai trouvé ça gerbant. ça te va ?^^ »
Oui, ça me va ! 🙂
N’empêche, ce schéma qu’emprunte systématiquement Alan Moore dans lequel il pratique phase de déconstruction et de reconstruction, je trouve ça réellement brillant. Il fait la même chose ici et utilise certains éléments, notamment l’élément sexuel, pour reconstruire un univers lovecraftien qui en était jusqu’ici dépourvu en surface, mais pas forcément dans le sous-texte. Un univers lovecraftien que la morale de l’époque réfrénait probablement (Moore faisait déjà la même chose dans Miracleman en dépoussiérant une vieille série de comics particulièrement enfantine et en la propulsant soudain dans un monde adulte viscéral). Je trouve que c’est une idée géniale, et une manière très efficace de montrer que Lovecraft, dans un sens, c’est vieillot aussi. Alors, lorsque je lis que c’est gratuit, je me dit « merde, ils ont raté un truc !.
Ouais sauf qu’à ce niveau là j’ai un peu le même ressenti que pour les effets spéciaux au cinéma. Si la technique ou les mœurs d’une époque t’empêchent de faire certaines choses, ça ne veut pas dire que ce sera moins bien que le jour où on pourra tout faire et tout se permettre.
Parce que la totale liberté technique et morale ça peut aussi brider la créativité et l’originalité qui peuvent venir de limitations forcées. Du coup ça peut aussi générer une absence de subtilité, de créativité, d’un gros bourrinage crade et méchant…et ça se voit dans certaines types de films d’horreur ou blockbusters que je n’affectionne pas.
Sans l’appliquer à Moore, tu dois comprendre mon point de vue, toi qui aime les films d’horreur où on ne voit rien, qui sont remplacés par des torture porn^^ Si c’est ça la modernité, je veux revenir en arrière moi !
La maison du diable ou bien Hantise… 🙂
M’en parle pas…
c’est pour rire, on ne peut pas comparer un Moore même en deçà des attentes avec un film de Jan de Bont. il y aurait que quoi provoquer des crises cardiaques…
Le soucis c’est que je pense que tu ne saisis pas la portée du travail de Moore sur cette partie de son oeuvre. Il ne s’agit pas de moderniser la chose dans la forme pour le coup, mais dans le fond.
C’est un travail de relecture, de prolongement et de transfiguration, avec un point de vue et une analyse critique. Pas un travail d’adaptation, encore moins de remake.
Il n’est pas question de remplacer les écrits de Lovecraft, dont Moore semble bien préciser qu’ils sont précieux, fédérateurs, et qu’il en est un profond admirateur et en quelque sorte l’un des héritiers.
Mais ne disons pas tout aujourd’hui, car il ne s’agit ici que de la 1° partie de l’article ! 😉
Sur un registre plus sérieux, c’est avec l’oeuvre matricielle que j’ai désormais un peu plus de recul.
j’en ai bouffé au lycée, son vocabulaire, la puissance d’évocation de l’indescriptible m’ a totalement envoûté. comme beaucoup de monde.
Tous les auteurs actuels ont aujourd’hui cette double pulsion d’hommage à l’oeuvre tout en rejetant l’auteur dont les nombreuses tares nous renvoie un reflet dont nous nous passerions bien.
c’est pourtant au fil des nouvelles assez répétitifs et ses obsessions racistes apparaissent de manière bien plus dérangeante chez lui que chez Howard par exemple…
ce dernier renvoie souvent le noir à une image « primitif » mais c’est souvent positif chez Howard de par son rejet quasi militant du verni hypocrite de la civilisation… il en devient ainsi une sorte d’image de l’humanité idéalisée mise à nu.
dans leur correspondance, il me semble même qu’Howard se méfiait du nazisme alors que cela transportait complètement le vieux Lovecraft. et n’oublions pas qu’ils sont morts bien avant le début de la guerre.
Warren Ellis sans aller jusqu’au bout du truc comme Moore en fait plus moins un résumé dans son Planetary/Authority qui traduit cette même pulsion d’amour/rejet.
j’obéis aussi à cette règle et je m’éloigne quelque peu de cet auteur.
si pour cette présente BD, je n’adhère pas, c’est bien par goût primaire aussi le « non dit » que m’a justement fait aimé ce vieil aigri.
par contre ton effort pour analyser et dresser l’inventaire des allusions, nécessaire à la rédaction de tes articles constituent un travail titanesque qu’on ne peut que saluer. cela n’est pas à mettre en doute pas nos propos critiques. il serait dommage que tu sois celui qui en prenne ombrage.
les correspondances HPL/REH, j’en cite un gros bout dans ma bio, d’ailleurs. elles sont assez éclairantes sur le rapport au fascisme qu’entretenait Lovecraft d’une façon assez déconnectée.
Ben je ne saisis pas forcément ce que fait Moore, ouais. Peut être que Providence m’aiderait à piger. Mais si c’est dans la même veine que Neonomicon, j’ai pô envie de m’infliger ça^^ Ce serait un devoir d’école, j’aurais pas le choix tu vois, mais comme tu le dis souvent, on sait ce qu’on veut lire et ce qu’on ne veut pas lire^^
@Eddy : Il n’est pas question d’idolâtrer Lovecraft qui avait ses défauts bien sûr. Mais de prendre ses écrits pour ce qu’ils sont. Moi j’suis fan. Et je pense qu’un auteur datant d’un siècle est moins soumis aux mœurs d’aujourd’hui. Si on va par là, Homère était peut être un foutu raciste aussi, qui sait ?^^ Moi ce qui me dérange c’est quand les écrits en eux-même ont une portée politique ou sociale comme un Mein Kampf ou certains écrits de Céline. Là ce sont des gens aux idées douteuses qui veulent « t’instruire » sur les méfaits de certains peuples. Lovecraft au pire, c’est son problème dans son coin, il ne cherche pas à convaincre les gens.
Par contre c’est cool ça de bouffer du Lovecraft au lycée. Moi j’avais des trucs chiants à lire.
J’ai découvert Lovecraft récemment en fait, en 2011.
pas en cours de Français, rêve pas. non de moi même au CDI…
pour son racisme, sa description physique des étrangers fait quand même un peu pitié dans son oeuvre…
j’avais un pote qui m’a dit une fois pour plaisanter qu’ils étaient plus flippants que les monstres…
ça peut revêtir un parfum dérangeant pour un lecteur n’ayant pas le recul nécessaire.
Au lycée, je ne lisais que des BD mais j’ai fait une rencontre qui m’a converti au pulps, à Moorcock, au jeu de rôle etc…
multiplier tout ça permet de multiplier les ponts…
Après tu sais j’ai été initié à Lovecraft par un black qui mettait ça sur le compte de l’époque et s’en foutait un peu.
Ce mec m’a aussi fait lire du Dan Simmons. Il était hardcore, il lisait des romans de 800 pages en anglais en quelques jours. Ah oui bilingue aussi donc.
J’avoue que les films gore « inspirés par Lovecraft » m’ont toujours portés sur les nerfs, Reanimator en tête de liste. Je n’ai rien contre les films gore, mais Lovecraft s’est tout dans le hors-champ, pas dans le déballage minutieux. De ce point de vue, L’antre de la folie est bien plus réussi.
Ceci dit, quand on lit à travers les lignes des écrits de Lovecraft, il est clair qu’il fait souvent référence à des orgies ou des bacchanales (surtout quand il parle d’autochtones adorant l’un ou l’autre des Grands Anciens – c’est clair que pour un raciste comme Lolo, les sauvages des iles ne peuvent que s’accoupler pour célébrer leurs dieux).
Toujours est-il que je n’ai pas du tout aimé Neonomicon (à cause de la scène du viol), mais je suis curieux de découvrir Providence. Merci Tornado pour cet article 🙂
Tout ça peut aussi venir de ce que l’écrivain se contente de suggérer en te laissant imaginer, et ce que le dessinateur te montre. Lovecraft avec des scènes de cul décrites comme dans un roman porno, ça ne l’aurait pas fait^^ C’est ça qui dans un sens est impossible à retranscrire visuellement, ça ne sera jamais aussi inquiétant que ce que l’auteur suggère par écrit. Et visuellement ça ne correspondra jamais à ce que chacun a imaginé.
Certaines adaptations de Stuart Gordon me plaisent mais ce n’est pas à considérer comme une adaptation très fidèle mais inspiré par les écrits. Difficile de faire un film également avec ce genre de récits dont la force repose sur ce que tu ne vois pas et la folie que ça déclenche chez ceux qui ont vu.
Ces tomes sont bien évidemment dans ma pile de lecture, mais je n’ai lu que le Neonomicon pour l’instant. Cet article est précieux car il me permet de diminuer mes inquiétudes par rapport au déchiffrage de leur lecture, en fournissant le travail prémâché de présentation des clefs de lecture. Merci Tornado.
Le système des deux vignettes verticales par planche, pour The Courtyard – Lorsque je l’ai lu, j’ai surtout eu l’impression que l’objectif pour le scénariste était de décompresser (au rythme de 2 cases pas page) pour en tirer le maximum de pages.
Je me suis fait offrir les nouvelles éditions Bragelone : 3 volumes intitulés « Cthullu le Mythe ». J’ai failli commencer à lire le premier, et puis le temps m’a manqué…
J’avais commencé à lire Lovecraft au lycée moi aussi. C’était en même temps que Howard, Moorcock et Tolkien. Là aussi, le temps a fait que j’ai dû faire des choix. J’ai assez vite arrêté Lovecraft et Howard dans un premier temps. Puis j’ai ensuite lâché le cycle d’Elric au 5 ou 6° tome, pour pouvoir me concentrer pleinement sur tous les textes de Tolkien disponibles à l’époque.
Plus tard, j’ai repris les Conan. Mais les nouvelles de Lovecraft m’attendent encore, tandis que je me suis plongé dans la plupart de leur adaptations filmique (cinéma et TV).
J’ai les éditions Bragelone aussi. Les 3 tomes. Ils sont biens^^ Il doit me rester la moitié d’un des 3 à lire, mais je connais les histoires, lues dans une autre édition avant.
Je n’ai toujours rien lu de Lovecraft. J’ai feuilleté Neonomicon en médiathèque et reposé vite fait. Ce n’est pas ma came, je n’ai pas d’attirance pour ce genre et cet univers-là.
Pour avoir lu l’article mis en lien par Alex, lorsque Moore s’amuse avec les références comics dans Top 10, ça me parle et c’est jouissif. Comme là, il fait des références à l’oeuvre d’un auteur que je ne connais pas du tout ben… je pense que je pigerai pas grand chose…
Alors que j’essaie de filtrer au maximum les bds que je veux lire, voilà que tu me perturbes dans l’idée que je m’étais faite d’une adaptation de Lovecraft par Moore. Il faut dire que le dessin ne m’attire pas du tout, et comme tu le soulignes, l’essence de Lovecraft se trouve dans ce qui ne peut être décrit, l’indicible, le concept même de bd sur du Lovecraft me semble destiné à être raté.
Mais tu vends vraiment bien le truc et tu soulèves des points très intrigants, notamment sur la recherche du passé de Lovecraft et son arbre généalogique. Cela dit, renommer le Necronomicon ne me rassure pas.
J’ai lu Démons et Merveilles l’an passé, c’est du Lovecraft étonnant car très onirique (à l’époque, ce roman était à l’origine de l’extension Les contrées du rêve du jeu de rôle) et ai relu Je suis d’ailleurs, qui est une compilation de courtes nouvelles (il y a en une quinzaine ou plus, alors que la plupart des autres ne comportent que quatre nouvelles). Je les mélange un peu car elles sont parfois semblables ou moins marquantes que Air Froid ou La musique de Erich Zann, mais j’ai pris du plaisir à me replonger dans mes vieilles éditions, surtout que je comprends mieux certains passages ou disons certaines ambiances.
Cela m’intrigue donc et me donne à la fois envie de relire mes autres Lovecraft et de tenter ces bds. Mais je sais que je ne vais pas pouvoir les acheter de suite… il faut que je me trouve une vraie médiathèque !
A part ça j’ai commencé une nouvelle mission ce matin, j’ai pas mal de trucs à faire à côté (un examen pour une certification ce jeudi, des morceaux de musique à bosser, de l’administratif, du sport, des articles et donc de la lecture…) donc ne m’en veuillez pas si je ne suis pas très réactif !
La BO : cela fait bien longtemps que je n’ai pas écouté du Dead Can Dance. Mais comme je viens de me réécouter tout Téléphone que je n’avais pas écoutés depuis le lycée, tout est possible : j’écoutais Dead Can Dance à peu près à la même époque. C’est de la musique de rôliste 🙂
Enfin, super article comme toujours Tornado. J’ai adoré la mise en bouche avec un explorateur disparu, qui est typique des écrits lovecraftiens et notamment de Démons et Merveilles.
Cher monsieur, vous trouverez peut-être la réponse à vos questions d’ici peu, lors de la publication de la 2° partie de l’article. Mon cousin Terence a laissé quelques notes griffonnées sur un vieux cahier qu’il m’appartient manifestement de déchiffrer jusque là…
N’ayant jamais vraiment joué aux jeux de rôle (vous aurez compris que je déteste le jeu sous toutes ses formes, y compris la pétanque ! 😀 ), je suis fan de Dead Can Dance depuis le lycée. En revanche j’ai toujours cordialement détesté Téléphone, malgré la qualité des musiciens. La voix d’Aubert m’est absolument insupportable, de même que leur genre de rockers bourgeois, qui a un je ne sais quoi qui m’insupporte aussi.
Je ne suis vraiment pas un fan de Téléphone mais en les réécoutant, au-delà de la qualité des musiciens, je comprends bien qu’ils forment une version française des Rolling Stones et des Who, ce sont des influences bien trop flagrantes. Ils ont vraiment quelques titres excellents : Au coeur de la nuit, Fleur de ma ville, La bombe humaine, Dure limite, Cendrillon… et bien sûr leur meilleur titre au final, Un autre monde. C’est une redécouverte, puisque je ne les avais pas écoutés depuis le lycée !
Téléphone, même à l’époque, je pouvais pas. Sans doute que j’écoutais les paroles.
Moi aussi je ne les supporte pas. Des souvenirs de kermesses puantes et de fêtes de la musique foireuses. Et ce fameux, ça se sent que c’est toi
Un autre souvenir de soirées rock de banlieues parisiennes où la psite boudait sur les tubes de Metallica, Guns ou Nirvana avant de littéralement jouir sur cette maudite chanson. Dans mon palmarès des groupes cheap et kermesses, Téléphone est en tête talonné de près par U2 et son maudit sunday sordide machin et les Cranberries et leur refrain abrutissant….
Ahem….
Je me calme…
Pardon….
(Mais Fuck quand même).
Un jour peut être les réévaluerai je. Jean Louis Aubert et Bertignac ne me sont pas antipathiques. Mais mon adolescence a été baignée de cette friture consistant à les considérer comme le seul groupe de rock français valable. Bon, Noir Désir, c’est à peine mieux, même si j’ai quelques disques de la bande à Cantat à la maison. Mais pas plus de deux….
Je pense que leur succès vient aussi de leurs paroles, très naïves ou faciles la plupart du temps. Mais sur quelques titres, ça marche.
Oui. Et puis ils étaient jeunes et sympas avec une bonne attitude.
Je suis totalement d’accord avec Tornado, j’ai adoré Neonomicon et Providence et même si mes lectures « Lovecraftienne » sont assez anciennes et ne m’ont laissés que quelques souvenirs (Elles remontent au lycée quand même), je n’ai vu que peu de points communs entre ce que j’ai lus à l’époque et l’adaptation d’Alan Moore et dans le fond, je dirais tant mieux : Comme le dit Tornado, ce n’est pas une adaptation stricto sensu, c’est la vision de Moore, sa façon à lui de voir les écrits de Lovecraft, après libre à quiconque d’y trouver son compte (Moi j’ai adoré) mais taxer Moore de faire du racolage, c’est exagéré et c’est du dénigrement facile et gratuit.
David Lapham, ça c’est du racolage gratuit à base de cul et de gore facile sur des scénarios qui tiennent sur des face B de timbre poste, là on a du Alan Moore pur jus, un auteur qui fait ce qu’il veut avec un matériel de base aussi nébuleux que mystérieux, ouvert à toutes les interprétations, cet aspect brumeux des écrits de Lovecraft, c’est ce qui en fait la force : Tout le monde peut en imaginer ou en déduire ce qu’il veut, Moore les voit de cette façon, après libre à chacun d’adhérer à cette vision ou pas. Quand Bernie Wrightson et les autres auteurs adaptés eux aussi les écrits de Lovecraft dans les pages de Creepy ou autres publications du même genre, il le faisaient aussi de façon frontale, là aussi c’est leur vision, à savoir si on y adhère ou pas.
Depuis quelques temps, dés que l’ont parle de Moore, il y a comme un acharnement de la part de ces détracteurs de tout de suite avancé, principalement dés qu’il place une scène de sexe, que c’est un genre de « pervers pépère » qui ne sait plus rien faire d’autre que des trucs de cul du niveau du pire des hentaï.
C’est ridicule et absolument faux, et, je pense, de la provocation facile.
(En aparté et pour rester terre à terre, je lis du hentaï (Et j’assume à fond, j’assume totalement mon gout pour les trucs de cul, violent, gore et débiles) et ça fait partie des trucs les plus idiots et crétins qui puissent exister mettre ça au même niveau que du Moore, c’est limite comique).
Je pense aussi que c’est la mode actuellement de cracher sur Moore car il a enchaîner depuis quelques années les projets aux thématiques douteuses (Lost Girls, Crossed +100, Neonomicon etc.) en sortant du moule des auteurs « doués » du moment (D’ailleurs la réflexion de Tornado aux débuts des commentaires « ça ne vous plait pas ? Allez lire Avengers ! » et bien représentative de mon avis sur la question et je la partage totalement), Moore ne s’est pas fait que des amis et le meilleur, c’est qu’ils s’en bat complètement les roubignolles et pour ça, il aura toujours mon respect et mon admiration.