Antigeek Superstar (La story de Marilyn Manson)

Encyclopegeek : Marilyn Manson

Article de BRUCE LIT

1ère publication le 02/11/17- MAJ le 28/04/19

Toute ressemblance avec etc. etc.

Toute ressemblance avec…
Source Picswe 
©DC Comics
©Gottfried Helnwein

Il fascine autant qu’il révulse.  Et alors que tous ses pairs sont progressivement rentrés dans le rang tel son père spirituel Alice Cooper, Marilyn Manson continue de provoquer des hauts le coeur à tous les puritanismes.  Musicien, chanteur mais aussi acteur, peintre, fabriquant d’absinthe (!) cinéphile averti et commentateur de la décadence occidentale, Marilyn Manson avait toute sa place sur un site traitant de la culture geek, car il en fut le dernier ambassadeur du siècle dernier ; celui qui fut pointé du doigt par tous les détracteurs de rock et de jeux vidéos lorsque deux désaxés entreprirent de massacrer leur lycée en portant ses tee-shirt.

Aujourd’hui ce genre de tuerie est perpétré par des golfeurs friqués sans que personne ne se demande s’il faut fermer tous les cours de golf et surtout que perdure l’accès aux armes en self service aux Etats Unis. Cavalier apocalyptique de la Pop Culture pas encore appelée culture geek,  voici son histoire et son héritage que vous pourrez découvrir sans être un spécialiste rock.

Cet article est dédié à l’ami Julien Lordinator du Lesbian Geek pour ses conseils durant la préparation de l’article. Et une bise affectueusement décadente à ma nouvelle camarade de jeu Edwige Dupont qui m’a gratifié en un temps record du beau tableau que vous retrouverez en fin d’article. 

Quand j’étais un ver

Né Brian Hugh Warner il y a une cinquantaine d’année, le futur antéchrist est un enfant ordinaire frustré par sa vie. Son père est un  ancien militaire au Vietnam qui a arrosé des villages d’Agent Organge. Il vend des meubles, n’est pas souvent à la maison et le jeune Brian le retrouve lors de tests médicaux pour voir s’ils n’ont pas développés de mutations ! Au cours de ces visites, il croise des enfants malades  et handicapés et développe sans le savoir son goût pour la monstruosité, le sordide et les prothèses.

Sa maman est infirmière et dotée d’une personnalité fragile. Elle finira sa vie en psychiatrie. A peine âgé d’une dizaine d’années, le jeune Brian aime jouer au détective chez ses grands parents. Un jour qu’il décide d’explorer leur cave, il découvre son grand père travesti en femme entouré de revues porno et zoophiles en train de se masturber. Jack Warner a un cancer et a un trou dans la gorge ce qui provoque des bruits effrayants qui horrifient et fascinent le jeune garçon.  Il ne pourra s’empêcher de retourner dans ce qu’il l’appellera L’enfer.

Quand j'étais un ver, je pensais que je n'y arriverais jamais. ©Interscope

Quand j’étais un ver, je pensais que je n’y arriverais jamais.©Interscope / Nothing Records

Il est envoyé dans un collège catholique où très vite il va chercher irrémédiablement à se faire virer sans succès. Pour rentrer dans les bonnes grâces de ses professeurs, il leur donne une supposée photo d’un ange vu dans le ciel. Il se prend une tannée de gens qui lui expliquent que la violence c’est mal et nourrit progressivement une haine grandissante de la religion. Il décrira avoir passé des heures dans des séminaires où l’on tentait de dissuader les gamins d’écouter du rock et à les terroriser avec des visions de l’apocalypse et des tourments qui attendent les pêcheurs. Autrement dit, il s’agit tout bonnement d’endoctrinement !

A bien des égards si un parallèle devait être fait avec les comics, disons que le jeune Brian Warner ressemble à s’y méprendre au petit garçon traumatisé par la peur  du nucléaire  finit par disjoncter dans le run de DD  de Nocenti. Brian lui développe une personnalité taciturne. Il est moche, a les dents en avant, la coupe en bol sur un visage en lame de couteau et rencontre d’importants problème d’acné. Tout le monde se fout de lui, il n’a pas d’amis, son seul réconfort affectif étant sa chienne aux yeux vairons (tiens, tiens…) qui mourra empoisonné par un voisin brutal.


Du cinéma en musique : ici, un hommage à El Topo de Jodorowski

Question quéquette, c’est pas non plus le Nirvana : Brian perd son pucelage en dix secondes sur le terrain de foot de son lycée avec la seule nana qui accepte de coucher avec lui par pitié. La deuxième lui filera des morpions…. Pas un début mirobolant pour celui qui deviendra de la mari de Dita Von Teese. Bercé par la musique de Bowie qu’il vénérera au point de lui rendre hommage quasiment à chaque album, Brian a la révélation de sa vie en assistant à un concert de Kiss.

Alors que toutes les nouvelles et poèmes qu’il envoie aux journaux locaux lui sont renvoyés poliment, il réussit en inventant un CV bidon à faire des piges pour un journal musical. Il interviewe les Red Hot Chili Peppers dont les réponses le consternent. Son ambition ? Passer de l’autre côté du micro pour être celui qui a des choses à dire. Il en fait part à la nouvelle star de l’indus Trent Reznor de NIN avec qui il sympathise et qui va le signer sur son label en plus de produire son premier disque. La machine est lancée. Pour Brian Warner plus que pour n’importe quel artiste, il n’y aura plus de retour possible.

©Nothing / Interscope

Le Willy Wonka du Rock ! ©Nothing / Interscope

Je veux être une star pour que plus personne ne me fasse chier

Entouré de son groupe qui sera en permanence à géométrie variable, Brian Warner se dote du nom de scène Marilyn Manson. Il s’inscrit directement dans la lignée décadente d’Alice Cooper  avec qui il n’a finalement pas grand chose à voir mis à part le fait de se maquiller et d’usurper progressivement le nom du groupe pour se l’approprier.

Pour le reste Manson est un nihiliste authentiquement décadent quand Alice saura remiser son rôle en coulisses pour sauver son couple et sa vie des excès du rock. Pas Manson qui est devenu le personnage qu’il s’est créé : le bouc émissaire de l’Amérique, le bâtard d’une société qui a honte des enfants qu’elle a engendré. Manson n’est jamais redevenu Brian Warner. Il est Venom qui aurait pris définitivement le contrôle de Peter Parker.

Les débuts du groupe est assez vaseux. Le look de départ est ridicule, le premier album Portrait of an American Family ne contient qu’une seule bonne chanson : Lunchbox  où il raconte les raclées qu’il prenait enfant. La prise de voix de Manson dénote de ses limites vocales. Quant aux musiciens, rien ne leur permet de se distinguer dans une vraie bouillie sonore malgré la production de Reznor qu’on a connu plus inspiré.


Difficile de faire plus malsain !

Pourtant….
Le ver est dans le fruit. Tout d’abord, même si pour l’instant la musique de Marilyn Manson se cantonne au métal bas de gamme de Los Angeles, le groupe se montre plutôt ambitieux en ressuscitant l’aspect bigarré du Glam Rock alors que le Grunge aura popularisé les pires looks de la planète rock : bermuda, chemise de bûcheron et gilets tout droits sortis du Père Noël est une ordure.  Marilyn Manson semble lui tout droit débarqué d’une autre planète !  Chaque album aura une nouvelle identité, un nouveau concept exactement comme les changements de costume des Super Héros !

Il s’avère surtout que le chanteur donne des interviews brillantes où il écrase la concurrence par son humour cinglant, son sens de la répartie et une réelle intelligence qui s’affinera encore au fil des années. Pour l’heure, il s’agit d’expliquer son surnom : L’Amérique glorifie autant les victimes que les coupables. Marilyn Monroe fut une icône lumineuse littéralement assassinée par la part d’ombre du gouvernement américain.

Quant à Charles Manson, il aura prouvé que son sens de la manipulation fit de lui une icône d’une société avide de faits divers sordides. Ainsi souhaite se résumer Marilyn Manson : l’incarnation du bien et du mal en chaque être humain, de la vulnérabilité et de la violence, du glamour et de la manipulation des médias à son propre profit. On pourra penser ce que l’on veut du personnage, mais il reste notable que Manson aura tracé sa propre route sans un directeur marketing pour le vendre. Ce qu’il veut : se venger de tout ce qui l’a frustré enfant !

Entre Nietzsche, Milton et Weapon X : Antechrist Superstar, le chef d'oeuvre des années 90

Entre Nietzsche, Milton et Weapon X : Antechrist Superstar, le chef d’oeuvre des années 90 !

Il vient d’enregistrer une oeuvre d’art sulfureuse : Antichrist Superstar qui se veut autant une destruction méthodique de l’Amérique chrétienne qu’une prédiction de sa propre ascension et chute, le pays et son chanteur étant intrinsèquement liés. Manson gavé de drogues, passe des semaines sans dormir, enregistre dans la maison où fut assassinée Sharon Tate, se racontes sous fond de paraboles Nietzschéenne. Il n’était qu’un ver qui a regardé vers le ciel à la recherche de Dieu et ce Dieu c’était lui même.

Manson entreprend alors sa propre apocalypse : détruire son ancienne identité pour renaître supérieur à ce à quoi les institutions le destinaient. Il refuse d’être un faible destiné à alimenter les forts. Le ver sent ses ailes pousser pour devenir Marilyn Manson l’ange déchu refusant de se soumettre à la religion. Certains de ses propos sonnent terriblement justes : le catholicisme exige de l’homme qu’il se comporte comme un saint pour aller au paradis alors qu’il suffit d’être soi-même pour aller en enfer. C’est une religion cruelle basée sur la culpabilité d’un Dieu cruel qui en vient à tuer son propre fils.

Le disque est un triomphe : Marilyn Manson propose un art brutal et trash derrière lequel se cache un individualisme impitoyable : Dieu est une statistique, un numéro sur lequel l’homme ne peut pas compter. Alors que tout se liguait contre lui, Brian Warner a réussi à réaliser ses rêves et vivre pour lui-même et invite chacun d’entre nous à ne jamais capituler et à refuser qu’une quelconque autorité vienne nous aliéner. Un message très proche du Mur de Pink Floyd dont Manson est très fan.

Manson prévoit cependant sa propre chute : le prix de la liberté totale est une liberté égoïste sacrifiant amitié et famille dans le processus. Brian Warner est mort, Marilyn Manson est devenu l’homme que l’on craint, celui dont la liberté artistique obscène gène. Une première pierre dans la mégalomanie et la paranoïa du personnage qui réalisera que vivre de manière si intense le conduit droit dans le mur et va opérer une seconde transformation : celle de l’animal mécanique.

Vulnérable

Vulnérable

Je ne suis pas un animal mécanique, juste un con qui joue avec la mort

Alors que pour beaucoup le rock est mort sous les balles de Mark Chapman (l’homme qui tua John Lennon), Marilyn Manson est parvenu à raviver à lui seul la flamme du rock subversif dangereux et imprévisible, un truc que l’on croyait disparu depuis la fin des Pistols. Manson est devenu un sujet de société. Le mainstream abhorre ses provocations et ses cris de haine, les autres ne sont pas dupes : derrière le clown se cache un artiste érudit, sensible qui tire les ficelles et dont les disques sont de vrais manifestes philosophiques.

Lorsque paraît Mechanicals Animals, c’est son public que Manson divise cette fois. Manson apparaît comme une créature asexuée vulnérable et débarquée d’une autre planète dans un disque pop et dansant. Vendu pour les uns, il s’agit certainement de son disque le plus beau, le plus profond et souvent poignant.

Le rocker rend encore hommage à Bowie en s’imaginant tout droit sorti de L’homme qui venait d’ailleurs de Nicholas Roeg, un extraterrestre perdu sur terre récupéré et markétté pour devenir une rock star dans un Dope Show. La seule issue reste la mort avec le suicide comme ultime acte de liberté. Mais entre temps, Manson en couple avec l’actrice Rose Mc Gowan (encore plus déglinguée que lui) découvre le sentiment amoureux sur le tard. Alors qu’emmergent l’Internet, les téléphone portable, l’artiste se demande ce qui différencie l’homme de la machine : les émotions qui créent à la fois notre grandeur et notre chute. Ces émotions nous permettent l’empathie via le sentiment amoureux mais aussi la détresse puisque la drogue et le show business sont là pour en créer des artificielles. Autour de lui, il n’y a que des animaux mécaniques.

Tout au long de ses clips Manson apparaît de plus en plus humain, de plus en plus vulnérable. Il livre de véritables oeuvres d’art dont le plus beau reste indéniablement le Coma White : Manson met alors en scène un cauchemar récurent : il est à Dallas dans la peau du Président Kennedy et abattu dans les bras de sa femme à la fois sous les hourras et les cris d’horreur. Il ne se doute pas qu’encore une fois, il s’agit d’une prémonition qui annonce sa future métamorphose.


Coma White : un clip exceptionnel

Si tu meurs à la télé, tu deviens l’agneau de Dieu

Car le 20 avril 1999, deux lycéens commettent l’effroyable : arpentant les couloirs de leur école comme dans un Doomlike, ils descendent 12 élèves, en blessent une trentaine d’autres et tuent deux professeurs avant de se donner la mort. C’est le massacre de Columbine et l’Amérique sous le choc va se chercher un bouc émissaire…Ce sera bien sûr Manson du fait que les gamins écoutaient sa musique et portaient ses tee-shirts.

Le chanteur récolte au centuple le prix de ses outrances. Ainsi, alors que l’on supprimait le comic-code-authority, un nouveau procès en hérésie  commençait contre la culture populaire avec toujours les mêmes arguments affublés à la BD, puis au rock, puis au cinéma d’horreur, puis au aux jeux-vidéos, puis aux mangas : ces médias et leurs artistes sont dangereux pour notre pays ou nos enfants, interdisons-les, contrôlons-les.

Alors que Angus Young (AC/DC) avait répondu avec humour à la même accusation 15 ans plus tôt (« donc, si un taré porte un tee-shirt McDonald, on ferme tous les fast-food » ? ), Manson va mener pendant des mois une vie de reclus. L’homme a peur et à juste titre : la plus grande puissance du monde le pointe du doigt,  les menaces de mort ont doublées (!) et l’enfant en lui se rappelle de toutes les fois où il il était rabroué pour ses opinions. Tout le monde le croît fini, il prépare son dernier grand album la rage au bout du stylo.

Sur Holy Wood, il se représente en Christ crucifié la mâchoire arrachée. Evidemment les hypermarchés ne veulent pas mettre ce truc en rayon ! Il s’agit d’un disque puissant, sociologique qui extermine de manière impitoyable les médias, la religion et même son public  par moment !  Jesus, Lennon, Kennedy dérangeaient comme lui.  Leur mort devant une audience les a rendus immortels et les a transformés en martyrs aux yeux de la même foule qui les condamnaient. Le dogme est fabriqué pour mieux asservir les masses contre lesquelles Manson refuse de se soumettre : Je ne serai pas l’esclave d’un Dieu qui n’existe pas et si c’était le cas il vous haïrait comme moi.  Dieu ne m’a jamais posé problème, c’est le vôtre que je déteste. A son public : Vous n’aimez que les copies d’une imitation, alors je serai comme vous, un autre moi stupide comme toi !

Martyr de la liberté d expression ?

Martyr de la liberté d ‘expression ?

Ailleurs, il constate que la célébrité par la violence est le seul outil de promotion sociale. Eric et Dylan étaient des moins que rien, des anonymes, des enfants maltraités qui en silence préparaient leur vengeance. Pourquoi personne ne s’est jamais aperçu de rien ? Qui s’en souciait ? Derk Backderf se posera la même question dans son Ami Dahmer. Les tueurs feront deux fois la une du Time post-mortem : Nous sommes les moins que rien qui crevons d’envie de devenir quelqu’un, quand nous serons morts, vous saurez qui nous sommes hurle t’il dans The Nobodies. Lorsque Michael Moore demandera à Manson dans Bowling for Columbine ce qu’il aurait eu envie de dire aux jeunes meurtriers , il répondra: Je ne leur dirais rien. Je me contenterai de les écouter. Et c’est ce que personne ne semble avoir fait.

Holy Wood deux ans avant le 11 septembre réhabilitera Manson auprès de gens qui le prenait pour un psychopathe insensible. C’est au contraire un artiste qui prône la victoire de l’esprit sur l’obscurantisme, capable de citer Oscar Wilde, Sade ou Nietzsche en interview. Le 11 septembre finira de plomber sa carrière. Comment chanter désormais qu’il déteste l’Amérique sur le corps des 3000 morts ?  Comme choquer d’avantage un monde tétanisé par l’effondrement des deux tours. ? Cet événement changera notre monde et mettra fin prématurément à la carrière du dernier agitateur rock.

Je ne suis pas une marionnette mais une grenade

Au moment de Golden Age of Grotesque, personne ne sait que Manson vit ses dernières grandes heures. En couple avec Dita Von Teese, Manson se tourne vers la vieille Europe et notamment l’Allemagne des années 30 : il absorbe l’art cabaret dégénéré et transforme sa scène en Vodevil. Il s’agit certainement de son travail le plus imaginatif où il invente des mots et joue de nouveau sur la dangerosité des images, notamment celles de Mickey Mouse et de la croix gammée, deux symboles populaire détournées de leurs origine pour devenir des outils d’oppression : le nazisme bien entendu et l’empire Disney avec en filigrane les postures fascistes de son créateur.

Cet art monstrueux permet à Manson de se dire que dans les années 30, il aurait été mieux compris entouré d’artistes-freaks.  Si Marilyn Manson était un super héros, ce serait sans nul doute Wolverine : un être violent et brutal mais protecteur envers les enfants qui n’est jamais à sa place dans une société qui réprouve la violence. Une violence que l’on peut assimiler à Crossed, la série trash de Garth Ennis. La démarche est la même : flinguer la religion et montrer ce qui reste d’une société en faillite en se montrant le plus brutal, vicieux, dangereux possible. Provoquer des hauts le coeur, faire vomir pour laisser l’espace libre à ceux qui iraient au delà des apparences. Romero l’a montré : les zombies et leur violence servent une métaphore sociale exactement comme Marilyn Manson.

Les aquarelles de Manson sont désormais reconnues à travers le monde  Les aquarelles de Manson sont désormais reconnues à travers le monde. ©Nothing / Interscope

Les aquarelles de Manson sont désormais reconnues à travers le monde©Nothing / Interscope

Pourtant à partir de cet album, tout est réglé de manière mécanique : Manson et son sideshow, ses prothèses, ses siamoises, foetus humain et créatures hermaphrodites commencent à lasser comme les films de la Hammer. Et le plus fatigué est certainement Manson lui-même : il est adulé, respecté désormais par ses détracteurs, reconnu en tant qu’artiste lorsque le Lutetia à Paris lui ouvre ses portes pour exposer ses peintures. En gros, il n’a plus personne à qui s’opposer, il est marié à une femme sublime et son prêtre n’est autre que Jodorowski.

Mais, Manson paie désormais l’addition de ses excès : Von Teese le quitte le soir de noël fatiguée de son mode de vie impossible et sa vie sentimentale défraiera désormais la chronique. Il boit de plus en plus d’absinthe, échoue à mettre en scène les films qu’il a en tête, prend beaucoup de poids et la déprime se transforme en dépression qu’il n’arrive pas à surmonter depuis presque 15 ans.

Ancien demi-dieu , l’homme est désormais pathétique sur scène, incapable de chanter ou de se souvenir de ses paroles. L’artiste révolutionnaire se traîne désormais sur scène, ne tient plus debout dans un état à peine meilleur que Renaud qui a dix ans de plus que lui. Côté musique, il vient enfin de sortir un album intéressant de bout en bout où il renoue avec des clips sulfureux et provocants.  Say10 le voit en pleine orgie aux côtés de Johnny Depp.

Dans le lancement de son nouvel album, il décapite ni plus ni moins que Donald Trump et déchire de nouveau ses Bibles !  Musicalement, il est épaulé par Tyler Bates compositeur réputé de jeux vidéos (God of War 3) mais aussi de séries (Californication) et de films : Les Gardiens de la galaxie,  300 et Watchmen, preuve de l’implantation de Manson dans la culture populaire.


Leader suprématiste dans Sons of Anarchy

Je ne suis pas désolé, tu as ce que tu mérites

Marilyn Manson est en un sale état, malade, triste et fatigué (il a perdu coup sur coup ses parents, auxquels , tout Antechrist fut-il, il était attaché). Pourtant il est vivant  20 ans après ses débuts. Son talent n’est plus à démontrer. Mais quelle est son influence sur la culture populaire. Le cynisme est désormais un virus répandu par les réseaux sociaux. Lady Gaga, Bieber, Miley Cyrus font désormais de la musique de merde en singeant ses provocations.  Comment choquer plus que Sarkozy, Berlusconi et Trump ? Comment bousculer un occident désormais mortifié par le terrorisme ?

Curieusement la relève de Marilyn Manson se trouve d’avantage dans le domaine du Rap que du rock : Eminem, avec qui il a collaboré à maintes reprises ou les mutants flippants de Die Antwoord.

Un jeu d'influence évident

Yolanda de Die Antwoord : un jeu d’influence évident. Le groupe accusera SUICIDE SQUAD de plagiat. Source : The Independent / Capture d’écran

Mine de rien, Manson accompagne nos vies depuis deux décennies. On le trouve dans les BO de From Hell, Resident Evil, Lost Highway, Spawn mais surtout Matrix dont certaines thématiques collaient avec l’esprit du chanteur : la dictature du conformisme, la préformation des rebelles par le système et l’écrasement des machines sur l’humain.

En tant qu’acteur, ses prestations ont été remarquées dans Le livre de Jérémy (une adaptation de J.T Leroy) et chez Quentin Dupieux (Wrong Cops) aux côtés de Eric Judor.  Johnny Depp s’inspire de lui pour jouer Willy Wonka dans Charlie et la chocolaterie. Il double un personnage inquiétant dans Area 51, un jeu Playstation 2 qui eut son heure de gloire.  Son avatar dans Celebrities Deathmatch, des matchs de catch entre pop-stars sur MTV était très apprécié.   Il aura été célébré dans le monde de la mode par JP Gauthier et même égérie de Saint Laurent !

Des milliers de pages Devianart lui sont dédiées sur Internet. Et le chanteur dispose d’une dizaine d’actions figures à son effigie (dont du McFarlanne Toys) ainsi que des masques d’Halloween. Côté comics, il apparaît dans Emily the Strange et est une source d’inspiration évidente pour le Joker de Jared Leto et Lee Bermejo.  Il a également inspiré la version animée de The Riddler, son personnage de vilain  à la folie non homologuée collant parfaitement à l’univers gothique de Batman.

Emily the Strange : jamais rien compris à cette BD
(C) Dark Horse

Une figure de la culture populaire en action (par Yasushi Nirasawa ).

Une figure de la culture populaire en action (C) par Yasushi Nirasawa


Sous les traits de The Riddler.

Aussi fascinant et repoussant que le serpent, Marilyn Manson est la dernière icône américaine d’un rock désormais bien policé et chiant à mourir. Son influence a largement dépassé la sphère de son médium et de ses attaques de la religion catholique. Voici un chanteur qui à cheval entre deux siècle plus religieux et puritains que jamais, se sera défini comme l’antéchrist, c’est à dire ne se soumet à aucune religion, aucun dogme, si ce n’est sa propre morale, ses propres valeurs. On rêverait de son équivalent dans le rock musulman qui déclarerait comme lui : je déteste la religion car elle nous apprend à nous satisfaire de l’incompréhension du monde.

Quant à Manson, méfiez vous de lui et de sa respectabilité. Si vous avez lu cet article de bout en bout, vous l’aurez compris : il n’est pas celui que vous croyez ; il est pire !

Création pour le blog de lartiste Edwige Dupont. On reparle delle bientôt.

Création pour le blog de l’artiste Edwige Dupont

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La BO du siècle : Tiré du film Spawn, la meilleure vidéo pour résumer Marilyn Manson : glamour et décadence

79 comments

  • Jyrille  

    J’ai oublié de dire que je trouve que Kylo Ren / Ben a un vrai physique marylinmansonien, non ?

    A part ça, sous-T-Rex aussi, oui, pourquoi pas, mais je n’écoutais pas T-Rex à l’époque. Suede a toujours fait sous-Bowie mais avec une identité plus marquée, je me suis arrêté à leur second album qui était très bien. De vrais bons musiciens. Placebo c’est autre chose, ils sonnent autant Bowie que Cure et punk, leur discographie tient la route jusqu’au troisième album, par la suite ils auront quelques bons titres de-ci de-là sur chaque album mais c’est tout. Leur premier album est de loin leur meilleur. Ils sont plus originaux que des sous-Bowie uniquement pour moi. Quant à la différence entre Antechrist et Mechanicals, beaucoup d’autres artistes l’ont fait, Bowie compris. Springsteen, Daho, Radiohead, même Matmatah…

    Complètement d’accord avec toi pour les surprises du rock que tu cites, mais ce n’est pas le seul critère pour moi. C’en est un effectivement.

    Les pochettes de Gainsbourg : oui !

    Enfin, pour les clips de DM, je suis d’accord. Quand j’ai vu I feel you, je me suis dit « tiens ils jouent avec des instruments ? » Mais même si je suivais un peu le Top 50, mon amour des clips date d’avant, et surtout, le Top 50 était trop commercial. Avoir MCM et MTV par la suite m’a réconcilié avec les heures passées devant les clips.

    J’en ai cités quelques-uns sur la page précédente, je t’en mets un ici, pour exemple : https://www.youtube.com/watch?v=EN9auBn6Jys

      • Jyrille  

        Je n’aime pas Matmatah mais ils ont incroyablement changé de style entre leurs albums, tu serais étonné. D’ailleurs je devrai peut-être y faire plus attention, ça sonnerait presque comme les Innocents sur leurs derniers singles.

      • Bruce lit  

        Je ne connaissais pas du tout ce duo. C’est pas mal. Le clip est bien élaboré, y’a pas. Je vais transmettre à ce petit coquin de Pat 6.

        • Jyrille  

          Je n’ai pas poussé plus loin l’écoute de ce groupe. Le clip est de Gondry, le seul réalisateur de clip que je connaisse bien.

  • Wolfcreek  

    Bravo Bravo Bravo

  • Kaori  

    Sacré article pour un sacré artiste 🙂

    Marilyn Manson, au début, c’était ce personnage effrayant et interdit, issu des films d’horreur, provocateur…

    Quand est-ce que j’ai commencé à comprendre et apprécier le personnage ? Je ne sais pas. Vraiment. J’ai dû lire ou entendre quelque part que le garçon était en réalité bien plus intelligent qu’il ne le laissait paraître. Si je devais le rapprocher d’un artiste récent, j’irai vers Lady Gaga. Bien plus profonde et douée que ce qu’elle ne laissait paraître à ses débuts.

    MM, c’est un peu comme Kurt Cobain, Gainsbarre, tous ces artistes-génies-inadaptés : fascinants, agaçants et attachants à la fois…

    Merci pour ces informations sur sa vie : une enfance sacrément traumatisante ! Et j’aime apprendre la biographie de ces artistes torturés. Où en est-il en 2019 ?

    Concernant l’oeuvre : ce n’est pas un style musical vers lequel je me suis tournée. Au départ, la musique comme les clips me mettaient très mal à l’aise. Aujourd’hui, j’éprouve un peu plus de curiosité, même si ce n’est pas une musique que j’écouterai toutes les semaines 😉

    Concernant les clips, je suis une enfant du boulevard des clips. Je passais mes après-midis à regarder M6, ainsi que pendant mes petits-déjeuner… J’éprouvais, et j’éprouve toujours, dans une moindre mesure, une véritable fascination concernant les clips. Un bon clip ne fait pas un bon titre, mais un bon clip fait d’un bon morceau une oeuvre inoubliable.
    Je garde une affection particulière pour des clips comme BACHELORETTE ou IT’S ALL SO QUIET par exemple. (mais BACHELORETTE est vraiment mon préféré…)

    Jyrille : j’ai eu beaucoup de plaisir à voir que tu parlais du clip de RUNAWAY TRAIN ici 😉 .

    Enfin, merci Bruce, on voit bien ici que c’est ton domaine. Ce qui fout une sacrée pression pour nous les novices ou simples amateurs 😉

    • Jyrille  

      J’avais oublié Kaori ! Mais tu as raison pour les clips, j’ai moi-même grandi en les regardant à longueur de temps, d’abord sur RTL, puis sur MTV et MCM. Premier souvenir d’une énorme claque, d’un changement dans ma vie (tout comme mon premier Corto Maltese ou ma première lecture de Watchmen) : Ashes To Ashes de David Bowie. Bachelorette est un super clip, il doit être de Michel Gondry, comme beaucoup d’autres de Björk. Le monsieur en a fait plusieurs pour les Chemical Brothers et les White Stripes. C’est le réalisateur de Eternal Sunshine of the Spotless Mind et la Science des rêves, je te laisse vérifier ses autres films. Les clips de Spike Jonze aussi ont eu beaucoup de retentissement (Sabotage des Beastie Boys, Praise You de Fat Boy Slim) et il y en a d’autres : j’ai oublié celui qui a fait Smack My Bitch Up de Prodigy par exemple mais c’est un chef d’oeuvre. Tout comme le Stan de Eminem (qui vient de rentrer dans le dictionnaire… Stan, pas Eminem) est plus un film musical qu’une chanson.

      • Kaori  

        Bon, je ne suis pas très électro. Le seul Fat boy slim dont je me rappelle c’est celui qui montre l’évolution de l’homme qui finit en train de bouffer des burgers…
        Quant à Bowie, je n’ai jamais vu aucun de ses clips !

        STAN, avec Dido, est un superbe court-métrage en effet, une totale mise en scène de la chanson. J’adore.

        Merci pour les références, j’irai voir ça 🙂

  • Bruce lit  

    @Kaori
    Merci de ce retour. Manson est loin d’être un artiste con-sensuel (enfin sensuel, il ne l’est plus du tout.).
    Avec la formule du top 10 du vendredi, il est très probable qu’il revienne sur ce site très prochainement.
    En 2019, Manson fait de très bons disques en continuant de se ridiculiser sur scène. Au moins il fait de nouveau de très bons clips, un médium auquel je suis très attaché comme Cyrille et toi.
    J’ai de la sympathie pour Lady Gaga, la femme. J’ai bien aimé son rockumentaire sur Netflix qui laisse entrevoir ses névroses sans fard. J’arrive encore à écouter quelques chansons de son premier album. Après, c’est cauchemardesque à mon sens.

    @Cyrille : tiens j’ai réécouté du Eminem ce WE, les 3 premiers albums que j’aimais beaucoup. Après , les mélodies deviennent très fades, on sent moins d’énergie. J’ai découvert que le voyou de service avait chanté avec Rihanna et Beyoncé et c’est juste épouvantable !
    Bjork ; Non !

    • Jyrille  

      Cela fait longtemps que je n’ai pas écouté du Eminem. Il faudra que je retente. Et que je regarde enfin 8 Mile. Après ENCORE je crois qu’en effet rien n’est bon.

      • Bruce lit  

        J’ai écouté ENCORE ce matin et ça sonne vraiment face -B du EMINEM SHOW.

        • Jyrille  

          Possible, je ne m’en souviens plus trop…

    • Kaori  

      Comment ça « Bjork : Non ! » ??

      Je ne sais pas comment vous faites pour écouter tous les albums de tous les artistes que vous pouvez à peu près apprécier… C’est un truc totalement hallucinatoire pour moi…

      Lady Gaga, je connais quelques titres, mais je serais bien incapable de dire de quel ou quel album c’est tiré. Je ne peux pas dire que j’aime son style musical. J’avais bien aimé PAPARAZZI, les autres, ben, ouais, ça bouge, ça se chante, musique festive quoi (j’avais détesté POKER FACE). Rien de profond. Puis je l’ai vue un jour à une émission (TARATATA sans doute), en piano-voix. Là, c’est carrément autre chose… Elle a une puissance vocale hallucinante…
      J’ai bien aimé la voir dans A STAR IS BORN. Elle a un côté touchant.

      Eminem, ben à peu près pareil, sauf que j’aime plus de titres, mais je n’ai toujours aucune idée d’où ça sort. Parce que ce n’est pas le genre d’albums que j’achète.

      Et puis, je suis tout à fait capable d’apprécier un artiste pour sa personne mais pas du tout pour ce qu’il fait. Je ne sais pas si la réciproque est vraie, par contre… Quoique… Bjork est complètement givrée, ça ne m’empêche pas d’aimer certains titres !

      Merci pour les news concernant Manson 🙂

      • Jyrille  

        Oh ben c’est une maladie. On est obligés d’écouter des disques, des albums, de s’intéresser. Sinon on tombe malade.

      • Bruce lit  

        C’est physique : je ne peux pas la voir et ce depuis les Sugarcubes. Quant à sa musique, j’ai quitté une fois un cinéma qui diffusait ses hurlements en attente de ma séance. Certains ont la phobie des serpents et des araignées. Moi c’est Bjork.

        • Jyrille  

          Rien à voir : je viens de réécouter le REIGN IN BLOOD de Slayer et il me semble bien que le premier titre a été samplé par Public Enemy pour son titre She Watch Channel Zero.

          • Bruce lit  

            Plausible. Rubin a pas travaillé avec eux ?

          • Présence  

            Il suffit de taper She Watch Channel Zero sur google pour avoir la confirmation : cette chanson comprend bien un sample de Angel of Death. Tu as l’ouïe fine.

          • Jyrille  

            Merci Présence ! C’est possible, Bruce, ce qui est sûr, c’est que Anthrax et Public Enemy était signés sur le même label à l’époque, Def Jam (d’où leur « reprise » de Bring The Noise »).

          • Présence  

            Renseignement pris auprès de wikipedia, Rick Rubin a été le producteur exécutif de l’album Yo! Bum Rush the Show de Public Enemy et de It Takes a Nation of Millions to Hold Us Back. Il fait des producteurs dont je m’intéresse à la carrière après avoir découvert son travail sur les albums de Johhny Cash pour le label American Recordings.

          • Bruce lit  

            Rubin est un producteur étonnant ; capable de produire aussi bien Slayer ou System of a Down que Shakira.

          • Bruce lit  

            Cependant, et malgré ces 648 millions de vues (!) , je n’ai jamais aimé la production de Rubin sur ce morceau de Shakira : cette voix super en avant et une orchestration quasiment fantôme reléguée dans le canal droit. Comment peut-on à ce point flinguer la rythmique d’un morceau dansant ?

          • Jyrille  

            Merci pour les précisions. Il me semblait bien qu’il était derrière les American Recordings. Quoi qu’il en soit, Rubin est un grand nom dans le domaine. Je pense qu’ils devraient tous (les producteurs) avoir cette ouverture d’esprit. Etre capables de produire n’importe quel style de musique.

            Personnellement je suis fan de Steve Albini. Et j’adore les masterings de Andy Wallace (Jeff Buckley, At The Drive-In…).

        • Kaori  

          @Bruce : 🙂 tu m’auras au moins bien fait rire !!

          Je ne connais pas les Sugarcubes 😉

          • Bruce lit  

            Tu ne perds rien à ne pas les connaître.

          • Eddy Vanleffe....  

            lire les commentaires ont tendance à donne raison à Matt , c’est hallucinant ce que vous détestez comme trucs… 😉
            j’avais un cousin avec lequel on écoutait Björk, j’aimais bien jusqu’à ce que je réalise que c’était pas mon truc… je garde quand même les deux premiers
            la fin des années 80 c’était une époque qui semble s’être perdu dans un brouillard que le temps semble vouloir effacer les groupes comme Silencers, House of love, Sugarcubes…
            Thanos a fait son snap

          • Jyrille  

            J’adore Björk. Je n’ai jamais trop écouté les Sugarcubes et j’ai récupéré assez récemment la version des trente ans du premier album de House Of Love (45 titres, des lives, des remixes… pas tout écouté encore). Il a toujours des titres très efficaces que je garde plutôt par nostalgie, mais une nostalgie plus personnelle, plus précise que celle que j’ai pour les Guns par exemple.

  • Bruce lit  

    Manson avait déjà repris 5 to 1.
    C’est vachement bien , un peu mollasson sur le deuxième couplet, mais il fait honneur à la chanson fétiche de Jimbo.
    Merci.

    • Jyrille  

      Moi je ne suis pas convaincu. C’est bien la première fois qu’une reprise de Manson ne m’inspire pas.

      • Bruce lit  

        Je trouve la prise de voix remarquable. On sent Manson très impliqué.
        Pour l’orchestration, il faut que je réécoute.

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