Giantkiller par Dan Brereton
Un article de PATRICK 6
VO : DC Comics + Image Comics
VF : Huginn & Muninn
1ère publication le 27/03/20 – MAJ le 02/07/23
Cet article portera sur le comics GIANTKILLER écrit, dessiné et peint par Dan Brereton publié par Huginn & Muninn.
C’est une mini-série initialement publiée par DC Comics entre août 1999 et janvier 2000, étalée sur 6 numéros (plus un one-shot « Giantkiller A to Z: A Field Guide to Big Monsters »), écrite et dessinée par Dan Brereton. L’ensemble a été réédité sous forme d’un TPB en 2006 par Image Comics, et plus récemment dans nos contrées.
Pour mon anniversaire un certain Bruce m’a offert la BD GIANTKILLER, tout en me glissant dans l’oreille : « C’est un ouvrage de référence pour tous les fans de GODZILLA , tu vas aimer ! Et puis surtout tu vas me pondre un article là-dessus, ça te fera sortir de ta léthargie rédactionnelle… » Je ne parierais pas ma chemise sur ce dernier point mais, quoi qu’il en soit, je me suis quand même fendu des lignes ci-dessous. (Maintenant si vous voulez que j’écrive sur quelque chose, vous connaissez le mode d’emploi).
Une météorite frappe un volcan, le Mont Diablo, situé à San Francisco, provoquant l’ouverture d’un portail dimensionnel vers un autre monde. Rapidement la région est envahie de gaz toxiques autant que mortels. Des monstres géants ne tardent pas à faire leur apparition, ravageant tout sur leur passage. L’armée, impuissante à les repousser, ne peut qu’interdire aux humains la zone contaminée. Les armes conventionnelles restant sans effet sur les Kaijus, les scientifiques se tournent vers une expérimentation inédite : croiser l’ADN des monstres avec celui des humains ! Leur brut est de créer un super soldat, une sorte de Captain America horrifique, tueur de géant !
D’office l’ouvrage se démarque des publications habituelles de l’éditeur américain. Point de supers slips ici, mais des Kaijus en veux-tu en voilà ! En effet, ce comics se présente comme une fusion entre l’Orient et l’Occident, avec, de toutes évidences, une prédominance de l’influence nippone (difficile de se tromper sur ce point vu que les Kanjis ont trouvé leur chemin jusque sur la couverture !) Les monstres gigantesques, chers à la Pop-Culture nipponne, sont largement représentés, le tout saupoudré de film de samouraï !
Brereton, franc partisan du métissage culturel, convoque tout aussi bien les 7 SAMOURAÏS qu’HELLBOY Concernant ce dernier la référence est évidente, d’une part pour la similitude de leur physique, et d’autre part, à l’instar du personnage de Mignola qui doit combattre ses comparses infernaux, GIANTKILLER a, lui aussi, plus de points communs avec les monstres qu’il doit exterminer qu’avec ses créateurs humains !
Le Giantkiller a été créé par un scientifique américain d’origine japonaise, le docteur Steven Azuma. Son but : inventer une créature de 3 mètres de haut, plus petite que les autres Kaijus, mais plus puissante qu’eux. Après l’avoir nommé Jack, le scientifique (son « Sensei ») élèvera sa créature selon les principes du Bushido, le code de l’honneur des Samouraïs. Il sera de plus doté d’un Katana, taillé dans les dents d’un Kaiju.
Dans la droite lignée des films de la Toho, le comics enchaîne les combats ultra dynamiques, et se présente un peu comme un jeu vidéo où le protagoniste doit affronter des monstres toujours plus puissants, jusqu’au boss de fin… En chemin, Jack (initialement surnommé « Yōchū », traduisez « La larve » en japonais) découvrira que ses créateurs lui ont caché une partie de la vérité. Il réalisera également qu’il entretient une étrange connexion avec une mystérieuse jeune femme aux pouvoirs surnaturels, Jill, qu’il croise régulièrement sur les lieux de batailles…
Vibrant hommage aux films de kaijū eiga, ce comics n’est rien de moi qu’une déclaration d’amour aux monstres nippons (et plus particulièrement à GODZILLA). Les codes du film de genre sont tous respectés, même dans leurs travers les plus outranciers.
L’auteur ne cherche nullement le réalisme (ni au niveau de l’histoire, ni à celui des dessins). Ainsi les traits des visages sont souvent anguleux, les yeux trop grands, les personnages semblent régulièrement figés dans leurs attitudes. Si le style du dessinateur peut, parfois, paraitre un peu caricatural, son trait souligne cependant l’excentricité des personnages et faisant ressortir leur côté Freaks.
L’ouvrage est entièrement réalisé en peinture, dans des couleurs assez vives et expressives, parfois criardes (pour les aquarelles passez votre chemin, la nuance n’est pas de mise ici). Le récit n’en reste pas moins très fluide et agréable à lire.
Sur le papier l’idée de cet ouvrage est aussi originale qu’inattendue. Même si le concept d’humains à l’ADN de kaiju a déjà été utilisé, notamment au cinéma dans GODZILLA FINAL WAR , ce comics a cependant tout pour accoucher d’un chef d’œuvre ! Malheureusement, à l’arrivée, le résultat escompté n’est pas tout à fait au rendez-vous…
Le début de l’ouvrage est assez déconcertant puisqu’il s’ouvre sur des dessins pleine page, accompagné d’un bref texte décrivant, un par un, les 26 kaijus que le Giantkiller va rencontrer tout au long de l’histoire… Cette introduction est un peu fastidieuse (et surtout un peu scolaire) et risque d’en perturber plus d’un. Il me parait plus pertinent de la laisser de côté et d’y revenir à la fin de l’histoire.
Tout occupé qu’il est à produire un hommage respectueux à l’univers intronisé par GODZILLA, l’auteur oublie un peu de développer ses personnages, sacrifiant la psychologie des protagonistes sur l’hôtel de l’action pure. Un choix qui peut se justifier par la brièveté du récit (6 numéros seulement) mais finalement cette option nuit grandement à la crédibilité de l’histoire.
Ainsi Jack ne se pose pas réellement de question sur ses origines, il n’interroge que peu son statut de « traitre » à son espèce. Son questionnement ne s’étalera à peine sur quelques cases, avant que, bien sagement, il retourne étriper ses (demi) frères Kaijus comme ses maîtres le lui demandent ! De la psychanalyse accélérée en somme.
Par ailleurs le scénariste a parfois recours à des ellipses narratives déconcertantes (les mauvaises langues appelleront cela de la paresse scénaristique). Par exemple, en début du récit Jill est suivi par un agent du FBI qui, inexplicablement, résiste aux vapeurs toxiques. Il se transforme ensuite sans raison en kaiju, sans que cette métamorphose en monstre n’apporte quoi que ce soit à l’histoire ! Cette piste semble avoir été tout simplement abandonnée en cours de route, sans raison apparente.
Ensuite graphiquement, bien que les pages soient superbement peintes, nous sommes loin de la qualité des estampes japonaises, bien au contraire le style du dessinateur est assez oldschool et les poses autant que l’expression des personnages semblent un peu scolaires. A la décharge de l’auteur, son style un peu désuet sert finalement plutôt bien l’atmosphère du comics en lui donnant un charme délicieusement kitsch et rétro.
Enfin, en ce qui concerne la conclusion du récit, je n’ai rien contre les fins ouvertes, mais ici elle semble sortir de nulle part et paraît tellement saugrenue qu’on regrette que l’auteur ait tenu à ajouter un épilogue aussi abracadabrantesque !
Bref, exactement comme dans les mauvais films de GODZILLA (et dieu sait qu’il y en a eu) Dan Brereton semble penser que les monstres se suffisent à eux même, l’histoire passe un peu au second plan, le tout étant de voir de magnifiques kaijus se mettre copieusement sur la tronche. Un peu comme avec les supers slips en somme. L’idée étant de donner aux lecteurs l’impression de regarder un film de monstres sous acide.
De ce point de vue, la réussite est totale.
La BO pour les monstres effrayants super flippants :
J’adore totalement et inconditionnellement le style de Dan Brereton et je vais me jeter sur cet opus…J’ai bien aimé les NOCTURNALS aussi et compte bien me dénicher les THRILLKILLER que Urban a planqué sous un vocable à la con MULTIVERSITY TERRE Cinquante-douze…
j’ai encore le vieux SRPERMAN-BATMAN WORLD FINEST édité à l’époque chez Soleil (ça remonte de dingue… )
Lu il y a un moment en VO. Un peu anecdotique dans la bio de Dan Brereton, mais tellement conforme à son amour pour les monstres : les NOCTURNALS, une équipe de héros constitués de monstres « classiques ». THE PSYCHO, où un flic décide de se métamorphoser pour affronter les supervilains qui peuplent son univers. Le WORLD’S FINEST écrit par Walt Simonson, récit parfait pour Halloween. Je crois même qu’il rend visite au Punisher durant sa période Franken-Castle.
C’est marrant, en ne le survendant pas, tu me donnes envie de le lire, comme on peut avoir envie de se faire un nanar.
Je ne suis pas un grand fan de Brereton mais il a un style bien à lui et reconnaissable. Je suis même intrigué du Superman/Batman évoqué par Eddy.
Je m’en vais essayer de choper ça en numérique.
J’ai vu passer la chose mais j’attendais justement un retour critique. Je ne suis pas sûr de vouloir investir actuellement dans un livre d’images manquant cruellement de scénario. J’ai lu et aussitôt revendu le bouquin Sup/Bat dont parle Eddy au-dessus pour justement ce manque d’épaisseur. Les seuls dessins et la présence de monstres ne me suffisent pas.
À croire que Brereton est vraiment le spécialiste des monstres géants puisque c’est lui qui illustre le retour du Punisher à la fin de son parcours sous la forme de Frankencastle, dans l’île aux monstres de Jack Kirby ! Et donc lorsque Marvel ou DC veulent du gros monstre, ils appellent Brereton !
La BO : Jamais aimé ce titre. Ni l’album idoine à l’exception du fantastique ASHES TO ASHES.
Dan Brereton, je ne supporte pas son style. Vraiment ça ne m’accroche pas. Alors si en plus le scénar est faiblard, je passe.
Bonsoir Patrick.
Album passé sous mes radars. Comme Eddy, pas forcément intéressé au départ, j’en suis venu à me dire à la fin de ton article (précis, allant à l’essentiel, j’aime) que pourquoi pas. Après tout finalement sur ce type de récit on sait où on met les pieds. Un peu de lecture purement récréative cela ne fait pas de mal.
J’aime beaucoup le travail de Dan Brereton présenté ici. J’avoue ne pas connaitre du tout ses travaux. En fait je le connais que de nom, l’ayant très peu croisé dans mes lectures (où du moins dans souvenirs précis quand je vois sa bio).
La BO : un Bowie que je connais mal. Peu écouté.
Il se trouve que j’ai lu cet album sur le trajet d’un Birthday Saint-Patoche.
J’adore le travail de Huginn et Muninn qui restitue le format comics USA. C’est bien ce genre d’initiative, on aurait pu croire à du Delirium. Aucun problème avec le dessin mais trop éloigné du Kaiju pour en apprécier la saveur. Et j’ai également trouvé que le scénario se perdait sur des pentes ateurisantes pour faire dans le bourrin.
Très content de te relire Mr 6, un article parfait sur le fond et la forme.
La BO : instant classic. Je suis tombé amoureux de ce titre dès que je l’ai écouté à l’adolescence. Il ouvre la voie à tellement de choses. Ce n’était que logique qu’il soir repris par la suite par NIN.
Un article de Patrick 6 !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Vibrant hommage aux films de kaijū eiga, ce comics n’est rien de moi qu’une déclaration d’amour aux monstres nippons (et plus particulièrement à GODZILLA). Les codes du film de genre sont tous respectés, même dans leurs travers les plus outranciers. – Un comics fait sur mesure pour toi en quelque sorte.
L’ouvrage s’ouvre sur des dessins pleine page, accompagné d’un bref texte décrivant, un par un, les 26 kaijus que le Giantkiller va rencontrer : pas des plus engageants ou des plus dynamiques comme début.
Exactement comme dans les mauvais films de GODZILLA Dan Brereton semble penser que les monstres se suffisent à eux même : bon, ben concernant Dan Brereton j’en resterais à ses Nocturnals et à Thrillkiller avec Howard Chaykin.
Mais pourquoi diable voudrais-je donc que tu m’écrives un article ? Je ne suis pas rédac-chef ! 😀
Est-ce que tu avais lu I KILL GIANTS ? hicomics.fr/catalogue/9782811223984-i-kill-giants/
Je n’avais jamais entendu parler de ça mais ça a l’air sympa. Pas fans des peintures mais ce n’est pas laid non plus. Je jetterai un oeil si je peux.
« un film de monstres sous acide » As-tu lu BIG GUT AND RUSTY ? glenat.com/glenat-comics/big-guy-rusty-le-garcon-robot-9782344017968
Quoiqu’il en soit, merci pour la présentation et ma culture ! Toujours un plaisir de lire tes bons mots.
La BO : excellent album, très bon titre. Je ne connaissais pas cette version live, je préfère la studio.
@JP : Le secret du bon vendeur : donner l’impression de ne pas avoir envie de vendre ^^
La prochaine fois que je veux te convaincre de lire quelque chose je me contenterai d’en lister les défauts ^^
@Tornado : « manquant cruellement de scénario » la formule est sévère, mais pas totalement fausse 😉 Autrement la lecture reste malgré tout agréable.
Concernant la BO j’ai tendance à être d’accord avec toi : ce n’est ni son meilleur album, ni son meilleur morceau ! Cependant c’est le titre qui colle le mieux avec l’article 😉
@Bruce : J’ai bien reconnu tes empreintes digitales sur les pages …Mais quoi qu’il en soit merci à toi 😉
Par contre j’ignorais que NIN avait repris ce morceau de Bowie ! Je vais écouter ça !
@Jyrille : Hum non je ne connais pas KILL GIANTS, tu me le conseilles ?
Par contre oui je connais Big Guy & Rusty, si là aussi le scénario est light (en tous cas pas ce que Miller a pondu de mieux) mais le dynamisme incroyable des planches emporte tout !
@Tous : Merci 🙂
Oui, je te conseille I KILL GIANTS mais ce n’est pas du tout pareil que Big Rusty ou ce GIANTKILLER… Je n’ai pas vu le film qui en est tiré.
Alors c’est pas mon délire mais tel que tu le décris, ça attise ma curiosité et ça donne envie de le lire merci