THE END OF THE F***ING WORLD par Charlie Covell
Une cavale de KAORIVO/VF : Netflix
THE END OF THE F***ING WORLD est une série anglaise créée par Charlie Covell. Elle est constituée de 16 épisodes de 25 minutes et fut produite entre 2017 et 2019 par SyFy pour la saison 1 puis par Netflix pour la saison 2. La saison 1 est une adaptation assez libre du comics THE END OF THE FUCKING WORLD de Charles Forsman. La saison 2 est une création originale de Charlie Covell.
Pas de spoilers majeurs dans cet article. Juste un langage un peu moins châtié que d’habitude.
The end of the fucking world… La fin de ce putain de monde… Qu’est-ce que ça vous évoque ?
Au vu du titre, je me suis imaginée une série pré ou post-apocalyptique.
Au vu du couple d’ados qui semblait porter la série, je m’imaginais deux gamins subversifs, dans la violence et le sexe, le vulgaire et la rébellion. J’étais loin de m’imaginer que j’allais tomber sous le charme de ces deux désaxés, en mal de vivre et qui ne trouvent de réconfort que dans la présence de l’Autre. Une putain d’histoire d’amour comme on n’en fait pas assez.
Bande-annonce de la saison 1
James est un lycéen de 17 ans apathique, qui se présente comme un psychopathe et ne ressent d’émotions que lorsqu’il tue des animaux grâce au couteau de chasse que son père lui a offert quand il avait 13 ans. Malheureusement, James ne se satisfait plus des animaux et se dit qu’en tuant un humain, cela le rendra peut-être plus vivant. Effrayant portrait de ce garçon qui s’est plongé la main dans un bain d’huile bouillante quand il avait 9 ans, pour ressentir une émotion. James vit seul avec son père, un brave homme qui trouve le réconfort dans la nourriture et qui ne semble pas voir l’état psychologique quelque peu inquiétant de son fiston.
Alyssa est une lycéenne de 17 ans elle aussi, provocatrice et borderline, brute de décoffrage. Une ado qui va péter son téléphone juste parce qu’elle n’en peut plus de voir tout autour d’elle des lycéens zombifiés par leur écran au réfectoire, incapables d’avoir une discussion en face à face. Alyssa cherche une proie, elle aussi. Une proie qui lui apportera les plaisirs charnels qui lui permettront de se sentir en vie. Une nymphomane en quelque sorte. Elle vit avec sa mère, son beau-père et leur paire de tout jeunes jumeaux. Son beau-père la traite comme un déchet quand il n’essaye pas d’abuser d’elle tandis que sa mère fait tout pour ne pas contrarier son mari.
Alyssa est cash, dit ce qu’elle pense sans filtre. James est taciturne et incapable de manifester la moindre émotion. La rencontre entre une nymphomane et un psychopathe. Rien de bien réjouissant, n’est-ce pas ? Et pourtant…
Sur un coup de tête, et suite à une violente dispute entre Alyssa et son beau-père, les deux jeunes gens prennent la fuite à bord de la voiture du père de James. Elle, décidée à retrouver son père, lui, décidé à commettre son premier meurtre en la personne d’Alyssa. Et c’est là que tout va partir en c***lles… Chaque décision va les mener un peu plus loin dans la panade, à force d’accident de voiture, de rencontre malheureuse, de choix hasardeux et d’actions irréfléchies. Ces deux-là vont s’enfoncer malgré eux dans un marasme d’emmerdes comme on en fait peu. Poursuivis par la police, ils vont devenir les Bonnie and Clyde nouvelle génération. Une version diablement attachante…
Car si au premier abord Alyssa saute sur tout ce qui bouge, on finit par se rendre compte qu’elle est bien plus blanche qu’elle ne le prétend. James, quant à lui, commence peu à peu à se laisser bousculer par cette fille dérangée qui lui fait découvrir ce qu’il n’aurait jamais imaginé. Le « psychopathe » commence à ressentir des émotions, des sentiments. À sourire même. Jusqu’à ce que, par la force des choses, James ne soit contraint à commettre l’irréparable. Une nymphomane pas si nympho que ça. Un psychopathe pas si psychotique que ça… un couple d’ados en détresse qui cherchent comme vivre dans un monde qui ne leur a rien épargné…
La série est constituée d’épisodes relativement courts, d’une durée de 25 minutes en moyenne, ce qui permet un visionnage rapide. Elle se découpe en deux saisons, distantes de deux ans.
La première saison suit la cavale de Bonnie and Clyde… pardon, de James et Alyssa. Elle se finit en beauté, sur une image qui ne laisse pas beaucoup de doutes sur la conclusion de cette histoire. La série aurait pu s’arrêter là, là où finit le comics. Pourtant, une saison 2 a vu le jour. Et un peu à la manière de la saison 2 de THE LEFTOVERS, elle commence avec des personnages que l’on n’a jamais vus auparavant. La fin du premier épisode nous permet de faire le lien avec la saison 1 d’une manière surprenante et très intéressante.
J’avais peur que cette saison ne soit la saison de trop, la saison inutile. Et au final, je me suis rendue compte qu’elle était la saison nécessaire pour conclure cette histoire comme il le fallait. Elle est triste, profonde, et permet d’entrer en empathie avec le personnage d’Alyssa, qui n’en finit plus de nous toucher. Je ne pourrai malheureusement pas en dire plus sous peine de spoiler allègrement la série dans son ensemble.
La série est portée par Alex Lawther (BLACK MIRROR), remarquable dans le rôle de James. Parfait dans son impassibilité et sa fragilité. Grand dadais tout maigre, dont on se demande comment il tient debout.
Alyssa est interprétée par Jessica Barden. Ce qui est sûr, c’est qu’elle en a dans le pantalon, et Jessica Barden lui rend parfaitement hommage. Elle est à la fois forte et fragile, aussi gaie qu’une porte de prison, aussi dangereuse qu’une vipère et pourtant on s’aperçoit vite que ce n’est encore qu’une petite fille…
Les rôles secondaires sont quasiment tous des ratés, comme les ados. Le père de James est totalement dépassé, la mère d’Alyssa s’est longtemps retrouvée affublé du qualificatif « de merde » par la rédactrice de cet article, le beau-père d’Alyssa aurait bien sa place sous les barreaux, quant à son père, s’il parait aux premiers abords le personnage le plus positif et attachant de la série, la fin de la saison 1 nous montre qu’il ne faut pas se fier aux apparences.
Il reste les flics. Enfin une flic. La seule qui voudra aider ces ados qu’elle comprend. Interprétée par Gemma Wheland (GAME OF THRONES), avec ses airs de gentille Scully, c’est un des rares rôles d’adultes sympathiques.
La série se caractérise par un humour noir assez mordant, pas adapté à tout public. Nous avons regardé la série avec nos deux ados, et la scène la plus compliquée à gérer n’a pas été une scène sanglante, mais celle « du chien », où, secouée de rires nerveux, je devais essayer de consoler ma jeune ado sensible sans qu’elle ne me voie rire… Pas facile, la vie de parents, je vous le dis ! L’épisode d’après, nous l’avons commencé sans elle. Plus de rires du tout à ce moment-là, mais une grande émotion…
La série n’est pas non plus avare en propos choquants, notamment de la bouche d’Alyssa, qui, aussi bien dans les gestes que dans les paroles, dépasse allègrement les règles de la bienséance. Cela apporte un humour qui peut mettre mal à l’aise, mais qui permet de dédramatiser pas mal de situations.
On peut aussi se dire que ces deux ados ne pourraient pas être plus idiots, à toujours prendre les pires décisions possibles ! Chaque fois qu’un choix se présente à eux, on peut être qu’ils vont faire le mauvais… Mais malgré cela, ce qui domine, c’est les sentiments, l’attachement, le lien qui se créée peu à peu.
Et c’est avec l’épisode 4 de la saison qu’on le ressent vraiment, à travers la « séparation ». Un épisode juste beau, poétique. Cette façon qu’ont ces deux êtres de chercher un autre chemin, un moyen de s’en sortir, l’un sans l’autre. Une facette d’Alyssa enfin positive, et un James complètement perdu. Et ces deux-là qui se retrouvent là où ils se sont quittés, parce qu’ils ne sont plus rien l’un sans l’autre. Certainement l’épisode qui m’a rendue accro à cette série hors du commun.
Il y aurait certainement beaucoup d’autres chose à dire, mais j’ai promis qu’il n’y aurait pas de spoilers, alors je vais conclure ici.
Je pensais être assez vite agacée par ces adolescents en pleine crise de rébellion. Et je me suis retrouvée profondément attachée à ces presque adultes déglingués par la vie et qui cherchent juste une porte de sortie pour grandir sereinement… Une vraie découverte. Un vrai mal nécessaire.
BO : Évidemment…
« @Surfer ! Yes ! Et je t’encourage à regarder la saison 2 ensuite, même si elle déstabilise un peu au début…
La scène de l’épisode 4, c’est la scène dans la chambre avec le propriétaire de la maison ? »
Oui