JUSTIFIED Saison 4 à 6
Un article de CYRILLE M
En tant que Serial Watcher, ma quatrième victime est une série télé produite par la chaîne FX, qui a duré en tout 6 saisons de 13 épisodes chacune, de 2010 à 2015.
Telles les quelques secondes de suspension avant que les duellistes ne fassent parler leurs pistolets, rien ne viendra gâcher un éventuel visionnage en lisant les lignes suivantes.
JUSTIFIED est une série télé créée par Graham Yost et réalisée par Michael Dinner, Bill Johnson, Peter Werner et bien d’autres. Les rôles principaux sont tenus par Timothy Olyphant (Marshal Raylan Givens), Nick Searcy (Chef Marshal Art Mullen), Natalie Zea (Winona Hawkins), Joelle Carter (Ava Crowder), Walton Goggins (Boyd Crowder), Jacob Pitts (Marshal Tim Gutterson) et Erica Tazel (Marshal Rachel Brooks).
La bande annonce en VO de la saison 4…
Mais vous saviez déjà tout cela puisque vous aviez lu l’excellent article de JP consacré aux saisons 1 à 3 de JUSTIFIED. Nous sommes donc toujours en terrain de polar, basé sur du Elmore Leonard (jamais lu mais je devrai), et chaque saison forme toujours un arc, une histoire complète en treize épisodes de quarante-deux minutes.
Comme j’essaie de rattraper mon retard abyssal, j’ai pu me rendre compte qu’avant d’être le showrunner de la série du jour, Graham Yost avait scénarisé deux épisodes d’une mini-série que je considère désormais comme nécessaire, BAND OF BROTHERS. Elle relate le parcours de la Easy Company, une compagnie aéroportée des USA pendant la seconde guerre mondiale en Europe, depuis son entraînement en 1942 jusqu’à la fin de la guerre à l’été 1945. Il a également réalisé et écrit des épisodes de sa sœur jumelle, THE PACIFIC, qui s’attarde sur le front japonais.
Little Jay : Ouais, alors, Big C, ça vaut le coup de continuer après la saison 3 ? Après tout, je disais bien que c’était une excellente série sans en avoir vu la fin, ce qui gêne souvent les spectateurs. Une fin ratée peut faire revoir à la baisse tout le reste…
Big C : Je ne vais pas ménager de suspense et dégainer immédiatement : bien sûr que la fin est réussie ! Et oui, toute la série est du même acabit et mérite largement d’être vue. Il est tout à fait possible que je la classe dans mon top 10 personnel. Car un second voire un troisième visionnage ne me dérangerait pas, pour toutes les qualités que tu cites dans ton article : décor et environnement différents des séries habituelles, personnages travaillés et réalistes, pas de manichéisme, acteurs et actrices de haut niveau, intrigues prenantes, scènes d’action souvent bien menées (mais pas toujours), écriture solide, humour latent et critique sociale sincère.
Little Jay : Mais quels sont les vilains des saisons 4 à 6 ?
Big C : Minute papillon ! Arrivée à la saison 4, JUSTIFIED commence à traîner un nombre conséquent de personnages secondaires, et ceux-ci reviennent sporadiquement ou non, tels Wynn Duffy (joué par Jere Burns), finalement très gentleman et très malin, Johnny Crowder (joué par David Meunier) désormais sur une chaise roulante après s’être fait tiré dessus au shotgun par Bo Crowder, ou encore Loretta McCready jouée par Kaitlyn Dever, que vous pouvez admirer dans la mini-série UNBELIEVABLE (qu’il serait dommage de rater).
Dans la saison 4, un de ces personnages prend de l’importance : Shelby Parlow (joué par Jim Beaver). Ce dernier a été sauvé par Boyd Crowder du braquage de la mine et est désormais le shérif du comté de Harlan, grâce au soutien de Boyd, plus charismatique que jamais lorsqu’il doit haranguer les foules, ses foules : les habitants de ce Kentucky appauvri.
Mais de nouvelles têtes entrent en scène. Je ne vais pas toutes les citer, en plus du révérend Bob Saint Cyr (joué par Joseph Mazzello) qui parle aux serpents, il y a Colton « Colt » Rhodes (joué par Ron Eldard), un homme de main angoissant derrière une dégaine avenante (et qui, lors d’un épisode tendu, donne le nom de Gérard Depardieu (jeune) si jamais quelqu’un devait l’incarner dans un film), et surtout le Constable Bob Sweeney (joué par l’attachant Patton Oswald, vu par exemple dans MARVEL Agents of S.H.I.E.L.D), un personnage un peu plus léger, souvent source d’humour, mais qui a ses moments épiques et une importance capitale dans la vie de Raylan Givens.
Le tout début de la saison nous ramène trente ans en arrière, lorsqu’un type tombe littéralement du ciel avec un énorme sac postal. C’est le point de départ de l’intrigue principale, celle de la recherche de Drew Thompson. Comme rien n’est jamais simple, il y a d’autres intrigues, qui finissent souvent par se croiser ou fondre en une fin commune, Boyd Crowder étant le pendant indéboulonnable du Marshal Raylan.
La saison 4 propose donc de nombreuses variations, et demande pas mal d’implication pour ne pas être perdu dans toutes ces histoires. Les trois ou quatre derniers épisodes ne laissent aucun moment de répit et les péripéties s’enchaînent, tout en laissant la part belle à une tension digne des meilleurs polars. Tout le monde peut y passer, tout peut arriver, et c’est ici que la série ressemble encore plus à un western. Elle est d’ailleurs souvent qualifiée de neo-western, tout comme les films COPLAND et LOGAN de James Mangold pourraient entrer dans cette catégorie.
Little Jay : Et quid des épisodes racontant une histoire à côté ?
Big C : Il y en a toujours un peu, mais rien n’est gratuit ou presque, tout revient à un moment ou un autre, et ces intrigues secondaires sont narrées en parallèle des principales. Dans la saison 5, il y a notamment un épisode où Raylan traque un hacker informatique, non sans mal. La confrontation entre Raylan, l’homme du passé et des choses simples et directes, face à un petit génie trop malin pour lui ne manque pas d’humour et permet de ramener la série à l’ère contemporaine.
Little Jay : Hé attends, t’es déjà à la saison 5, mais elle parle de quoi ?
Big C : J’ai tendance à penser que malgré ses qualités, elle reste la moins bonne de toutes. Et ce malgré les présences d’actrices charmantes : la rousse Alicia Witt dans le rôle de Wendy Crowe et la blonde Amy Smart (excellente actrice, la preuve dans les films THE BUTTERFLY EFFECT (L’EFFET PAPILLON) et les deux CRANK (HAUTE TENSION)) dans celui de Alison Brander, une assistante sociale. Cette fois-ci, Raylan aura affaire à la famille Crowe, directement venue des marais de Floride. Ce sont les cousins de Dewey Crowe (joué par Damon Herriman), l’ancien suprémaciste ami de Boyd, présent depuis la saison 1. J’adore ce personnage, complètement crétin, qui prend toujours les mauvaises décisions, mais qui est attachant et ne cherche finalement pas grand-chose, simplement à s’élever de sa condition. L’arrivée de ses cousins et de sa cousine ne l’enchante pas du tout.
Malgré tout, la saison enchaîne les suspenses, les voyages au Mexique et en Floride, et on ne voit pas le temps passer. Entre quelques respirations comiques, le ton se durcit et les derniers épisodes ne sont pas avares en coups de théâtre. Ceux-ci préparent le final, la dernière saison.
Little Jay : Enfin !
Big C : Oui et non. Car comme toute bonne série, j’étais vraiment triste d’abandonner ses personnages. Et il y en a pléthore dans JUSTIFIED. Une de ses premières qualités étant pour moi l’écriture de ses personnages secondaires, même ceux qui ne durent que quelques épisodes, tels Glen Fogle (joué par Pruitt Taylor Vince) dans l’épisode Harlan Roulette de la saison 3, ou Penny (jouée par Danielle Panabaker), croisée plusieurs fois par Raylan.
La saison 6 envoie du lourd, rien que dans le casting, nous avons Sam Elliott dans le rôle d’Avery Markham, l’un des opposants de Raylan, et Mary Steenburger dans le rôle de Katherine Hale, l’amante de ce dernier, pas en reste pour les coups fourrés. Cependant, ce final devait conclure l’histoire de Boyd Crowder, la confrontation entre Raylan et son meilleur ennemi sera définitive. La saison démarre donc sur l’enquête menée par Raylan pour mettre Boyd hors-circuit, mais diverge rapidement sur le rachat musclé de propriétés par les hommes de main d’Avery, tous anciens militaires.
C’est le retour de Loretta McCready, et comme toujours, les nouveaux personnages secondaires sont savoureux. Je noterai ceux de Caprice (jouée par Ashley Dulaney), une prostituée plus intelligente que son décolletée, et Choo-Choo (joué par Duke Davis Roberts), un colosse sentimental ayant des séquelles mentales due à une explosion de son temps dans l’armée. Ces deux paumés partagent une scène d’une rare justesse, la série s’attardant sur leurs problèmes respectifs. Par ce genre de moments, JUSTIFIED assoie donc son versant social, ne laissant personne n’être qu’un cliché ou un rôle. C’est également le cas de Boon (joué par Jonathan Tucker), qui se prend pour un vrai cow-boy, et apporte des sueurs supplémentaires à Raylan et aux spectateurs. Tueur et tireur émérite, il ne trouve pas sa place dans ce monde moderne et court vers les ennuis, tout en étant un autre danger de haute volée.
Mais la part du lion revient à Boyd et Ava Crowder. Ava vit les pires moments de son existence et devra se battre pour sa survie. Elle apparaît à la fois impitoyable et fragile, rien à voir avec les femmes fortes qui émaillent les fictions depuis une dizaine d’année (ou plus si on commence avec le TERMINATOR de James Cameron). Nous sommes aussi démunis qu’elle devant ses déboires, tout concorde pour que nous ne la jugions jamais.
Quant à Boyd, qui sera resté complexe jusqu’au bout, son incarnation par Walton Goggins demeure une leçon d’écriture. Son look, très sérieux mais pourtant décontracté, la chemise constamment boutonnée jusqu’en haut, et son élocution, toujours littéraire et au vocabulaire élaborée, en font une occurrence unique dans le bestiaire des gangsters. Dans une scène mémorable, il soliloque face à un de ses otages, lui expliquant sa personnalité, ses raisons d’être, pourquoi Boyd est Boyd et pourquoi il agit ainsi. Ce pourrait être indigeste et pompeux, c’est naturel et glaçant.
Les derniers épisodes renouent avec le neo-western et plus que jamais, tout peut arriver. Avant de trouver une conclusion parfaitement troussée qui explique clairement la fin de la série. C’est la saison la plus sombre, l’humour étant très peu présent. Après tout, il s’agit de plusieurs destins qui se jouent ici.
Musique
Little Jay : Franchement, tu as besoin de parler de la bande son ?
Big C : C’est un principe, n’essaie même pas. La musique est composée par Steve Porcaro, le clavier et fondateur du légendaire groupe de requins de studios, TOTO. Je n’ai pas grand-chose à en dire, elle s’inclut parfaitement dans le décor et fait le boulot. Côté chansons, par contre, c’est la grande inconnue. Evidemment pas mal de country, de blues, mais à part J.J. Cale, la plupart des noms me sont inconnus. Rien de vraiment marquant pour ma part à l’exception de la chanson du générique, qui écrase un peu tout sur son passage. Par contre ce doit être un régal pour les amateurs.
Outro
Little Jay : Finalement, pas besoin de te poser la question.
Big C : Bah non. JUSTIFIED, c’est du polar de grande classe, et même si parfois la réalisation est un peu plate et la photo ne rend pas toujours hommage aux décors, c’est du tout bon à tous les niveaux. Chaque seconde compte. Comme l’attitude de Raylan, elle va droit au but et ne cherche pas à compliquer les choses sans raison. Du polar et du western comme on l’aime, avec ces Marshals dont le boulot principal de ramener les fugitifs constitue sans doute le dernier héritage de cette époque de fin de dix-neuvième siècle des Etats-Unis.
Je ne comprends pas qu’elle ne soit pas plus connue ni plus consacrée. Mais non, je ne citerai aucune autre série…
La BO du jour : un titre de Hanni El Khatib, une sorte de nouveau standard du stoner et du blues rock à la Black Keys, utilisé au début de la saison 5.
Si un jour JUSTIFIED passe sur Netflix, il passera en tête de mes priorités. JP et toi m’avez convaincu de m’y lancer. J’attends avec impatience.
La BO ; du bon Black Keys / White Stripes Like. C’est une formule qui a ses limites, mais ça fonctionne.
Cool ! En attendant, je te conseille fortement d’y mater UNBELIEVABLE. Une mini-série de huit épisodes, d’après une histoire vraie, sur un violeur en série.
On est d’accord pour la BO. Ca passe bien.
Non.
Pour l’instant je suis d’humeur trop sombre et déprimée pour voir encore des gens mutilés et violés. Je vais me chercher des comédies. Plus tard sans doute.
Je comprends.
Ah ah ah ! Tu m’as eu, Cyrille ! Tu m’as piqué Little Jay pour te faire un « self teamup »!
Les 3 dernières saisons dorment sur le disque dur d’un PC de la maison…
Forcément, tu me donnes envie de m’y remettre.
En ce moment, je suis sur une série beaucoup plus légère : Silicon Valley, une satire du monde des GAFA, des startups et autres licornes de la tech. J’aime bien, ça me détend pas mal. Toi qui bosse dans l’informatique, ça pourrait te plaire…
Etant donné que tu avais fait le premier article, et que tu m’en avais donné l’aval, je ne me suis pas gêné ! ^^ J’espère que tu vas mater la suite bientôt.
J’ai terminé JUSTIFIED pendant le confinement, tout comme SILICON VALLEY. Je n’en avais vu que les quatre premières saisons, j’ai pu voir les trois dernières. C’est une série que j’adore en effet ! Evidemment que ça me parle, même si je suis assez éloigné de cet univers, certains trucs me parlent. Maël a vu les premières saisons avec moi, il rigolait beaucoup. Tu en es où ?
Ardu de faire une chronique sur une seconde partie de série…
J’ai pas regardé la première…
Je ne suis pas friand de l’ambiance Cowboy/pick-up en général.; En revanche je sais que les séries américaines savent très bien attirer grâce à des personnages hautement charismatiques et des intrigues en tiroirs.
Si ça tombe sous mon radar, je tenterai le coup.
En effet, j’ai un peu renâclé avant de l’écrire, mais comme JP m’avait dit que je pouvais utiliser sa voix, c’était l’occasion de refaire un duo Little J / Big C ! Mon article est un peu sec, un peu rentre-dedans, car je ne voulais pas paraphraser JP. Du coup, je vous oblige un peu à lire ou relire son article pour vous imprégner de la série.
Bon, je n’ai pas vu les premières saisons.
Je m’y mettrai un jour je pense.
Juste pour dire que Walton Goggins, c’est l’acteur emblématique pour incarner les méchants en toute crédibilité. Je ne me rappelle plus dans quel film ou série je l’ai vu (y en a eu tellement, et il reste toujours pour moi « le gars du SHIELD »), mais ses performances me glacent à chaque fois !!!
Oui, je compte bien me faire THE SHIELD en entier bientôt. Je n’ai vu que quelques épisodes des premières saisons.
Il a fallu que j’aille relire l’article de JP Nguyen pour me souvenir de quoi parle cette série : heureusement le lien dans ton article fonctionne.
Je ne vais pas ménager de suspense et dégainer immédiatement : cool, on peut ne lire que ce paragraphe sans lire la suite. C’est pratique ces conclusions en début d’article. Ça me rappelle Pierre Desproges qui ouvrait un de ses spectacle en en faisant un résumé critique pour les journalistes pressés qui ne souhaitaient pas rester. 🙂
Tout concorde pour que nous ne la jugions jamais. – Une réussite extraordinaire quand les auteurs parviennent à nous faire prendre fait et cause pour les personnages, sans aucun recul, en abolissant le réflexe de jugement.
La musique est composée par Steve Porcaro, le clavier et fondateur du légendaire groupe de requins de studios, TOTO. Rien que le nom de ce groupe provoque un réflexe conditionné de fuite en ce qui me concerne. Pour les plus curieux, il est possible d’avoir la liste de toutes les chansons de chaque saison, épisode par épisode :
https://www.tunefind.com/show/justified
Merci de tes retours Présence ! Je te comprends pour TOTO mais crois-moi ça ne s’entend pas du tout ici. C’est de la musique de film.
Je me souviens de cette introduction de Desproges, il faudrait que je la revoie. Merci de la rappeler !
Ah et tunefind est une mine, j’y vais toujours en regardant une série et avant d’écrire dessus.
Merci pour cette introduction à la (deuxième partie de la) série. Ça a l’air bien cool.
Pour le BO de la série et ce que tu en dis : « Côté chansons, par contre, c’est la grande inconnue. Evidemment pas mal de country, de blues, mais à part J.J. Cale, la plupart des noms me sont inconnus. Rien de vraiment marquant pour ma part à l’exception de la chanson du générique, qui écrase un peu tout sur son passage. Par contre ce doit être un régal pour les amateurs« .
Alors voilà que je me dis en moi-même que je vais venir me la pêter, parce que je m’y connais assez bien en rock americana, que le lien fourni par Présence tombe à pic. Alors je suis le lien, je regarde la liste des chansons et… Pfiou… J’y connais que dalle ! 😀
Je pensais y trouver des trucs comme Little Feat, Poco ou des titres de southern rock, mais apparemment il n’y a que du contemporain que je ne connais pas du tout. Rien que pour ça, ça me donne envie de mater la série !
Ahah 😀 Excellente raison en tout cas !