NINJAK par Matt Kindt et collectif
Par KAORI
VO : Valiant Entertainment
VF : Bliss Editions
1ère publication le 03/06/20 – MAJ le 18/12/21
Cet article portera sur le personnage de Ninjak, et plus particulièrement sur la série écrite par Matt Kindt et parue en 2016. La série est illustrée entre autres par Clay Mann, Butch Guice, Stephen Segovia, Juan José Ryp, Diego Bernard ou encore Andres Guinaldo. Une grande partie de la colorisation est assurée par Ulises Arreola.
Ninjak est un personnage très populaire de l’univers étendu Valiant.
Créé en 1993 par Mark Moretti et Joe Quesada, après une première apparition dans la série BLOODSHOT en février 1993, il aura droit à sa première série de février 1994 à novembre 1995, soit 28 numéros plus un « annuel », dans la maison d’édition nommée à l’époque Valiant Comics, à travers le personnage de Colin King.
Une seconde itération se présentera via Acclaim Comics, après l’effondrement de Valiant Comics, dans une série présentant un héros totalement différent, Denny Meechum, créé par Kurt Busiek et Neil Vokes, de mars 1997 à février 1998.
Avec la renaissance de l’univers Valiant, presque 25 ans plus tard, nous avons droit à un reboot de la plupart des personnages emblématiques. Ninjak n’échappe pas à la règle. Après une première apparition, cette fois-ci dans la série X-O MANOWAR, dans le numéro 5 paru en septembre 2012, celui-ci, de nouveau sous l’identité de Colin King, aura droit à deux séries successives : NINJAK, série de 27 numéros, écrits par Matt Kindt, à l’exception du tout dernier, et NINJA-K, série de 14 numéros écrite par Christos Gage. S’ajoute à cela un numéro « prélude », NINJAK #0, toujours écrit par Matt Kindt, qui fait le lien entre ces deux séries.
Certains se posent peut-être la question de comment je suis arrivée à lire NINJAK, un ninja espion, a priori assez loin de mes lectures habituelles.
Il se trouve que mon entrée dans le monde Valiant s’est fait, comme souvent avec moi, d’une manière un peu particulière. J’ai regardé par la fenêtre, et j’ai vu ARCHER ET ARMSTRONG. Je suis entrée : coup de cœur. J’ai continué par la pièce suivante qui m’a mené à Faith, rencontrée via Archer, mais je ne m’y suis pas arrêtée. Par contre, elle m’a elle-même menée à UNITY. Salle plaisante, je m’y suis arrêtée. Et au cours de ma lecture, j’ai décidé d’aller dans une pièce adjacente : NINJAK.
Pourquoi ça ?
Le côté mystérieux, solitaire, m’a intrigué. Et j’ai bien fait d’aller fouiller, puisqu’on comprend facilement que le personnage de Ninjak tire ses sources de personnages très populaires.
Présentons-le brièvement : Colin King, millionnaire vivant seul dans un château, fin stratège, à la pointe de la technologie, expert en arts martiaux, solitaire et ayant été élevé par le majordome de ses parents : bien sûr, impossible de ne pas voir l’ombre du Chevalier Noir (Batman, au cas où…).
Super-espion britannique, travaillant pour les Services Secrets de Sa Majesté, conduisant de belles cabriolets et usant de ses charmes et de son assurance pour contrer les méchants : un double de 007, sans conteste.
Pourtant, il m’évoque, par sa psychologie et son environnement, un autre personnage dont je parlerai plus tard. Car en effet, la partie la plus intéressante est que sa psychologie n’est pas mise de côté, au contraire, elle tient un rôle important, tout en filigrane, dans la série de Matt Kindt. Aspect qui sera laissé de côté dans la série suivante, NINJA-K, où Christos Gage sera d’avantage concentré sur le fil conducteur que représentent ses prédécesseurs et donc, davantage sur l’action.
En plus de l’aspect psychologique, Matt Kindt a fait preuve d’une certaine dose d’originalité afin de maintenir plus ou moins constant l’attrait de son lecteur pour l’histoire.
En effet, stipulons d’abord qu’il ne nous propose pas une simple « origin story » sans saveur.
Il va user de plusieurs points d’entrée. Le premier, assez classique, est celui du flashback. Le premier épisode commence en effet par un gros plan sur un homme aux yeux bandés, sortant un sabre de son fourreau, près à affronter un certain nombre d’adversaires, entouré de grues (l’oiseau). Combat qui se reflète dans un œil bleu brillant et grand ouvert : celui d’un enfant qui assiste fasciné à un film d’arts martiaux dans un cinéma. Nous comprenons donc aisément qu’il s’agit là de la première rencontre entre le jeune Colin et ce qu’il deviendra plus tard. Ce sera d’ailleurs le seul indice laissé pour faire lien entre le jeune garçon et sa future carrière de ninja. Pas de récit de recrutement, ni d’explicitation. Nous ne saurons rien non plus des raisons pour lesquelles Colin King a décidé de travailler pour le MI-6, à l’exception d’un très court dialogue avec sa « tutrice ». De plus, bien qu’introspectif et classiquement narré à la première personne, le récit ne dévoile rien des plans du héros. Ses pensées, ni trop présentes, ni pas assez, sont ancrées dans l’action et présente un parfait équilibre entre ce qui se passe à l’image et ce qui se dit dans la tête du personnage.
Le deuxième point d’entrée se présente dans le découpage du récit. En effet, Matt Kindt fait le choix de découper son récit à la fois dans la longueur, en différents arcs, mais aussi à l’intérieur des numéros…
Pour bien comprendre : la série est découpée, comme dans tout comics, en plusieurs arcs, un arc étant constitué de plusieurs épisodes. Dans ces 27 numéros, nous trouvons 6 arcs : L’armurerie, comprenant 5 épisodes, La guerre des Ombres (4 épisodes), Opération : au-delà (4 épisodes), Le Siège de King’s Castle (4 épisodes) et enfin Les Sept Lames de Maitre Darque formé de 4 épisodes mais encadré par deux épisodes indépendants.
Au cours des 5 premiers arcs, Matt Kindt va ajouter une histoire parallèle, appelée « Les dossiers perdus », ou « The Lost Files », qui elle aussi se poursuivra sur la durée de l’arc. Et pour chacun de ses arcs ou dossiers perdus, nous aurons droit à un dessinateur différent, marquant de son empreinte chacun de ses récits qui semblent indépendants.
Car c’est là où se situe la malice. Le fait de changer d’équipe pour chaque récit nous amène à penser que ce sont des histoires indépendantes, sans réel lien avec la trame principale, si ce n’est d’apporter des détails sur le passé de Colin King, ou d’un personnage secondaire rencontré au cours de l’arc principal. Or chacune des parties finit par se rejoindre à la fin de l’arc, montrant que tout est pensé à l’avance. Pour tout dire, je pensais même au départ que ces dossiers perdus étaient écrits par un autre auteur. Mais non, seul le tout dernier épisode n’a pas été écrit par Matt Kindt (on se demande d’ailleurs à quoi il sert, mais passons…).
Le troisième point se passe dans les 7 premiers numéros, à l’exception du numéro 4 consacré à la némésis de Ninjak : chaque 2ème page de couverture présente l’arsenal de Ninjak : des dessins représentants son attirail, légendé. Lors de ma première lecture, absolument pas intéressée, j’ai sauté cette page pour les premiers numéros. Jusqu’à ce que, décidant de savourer un peu plus mal lecture, je pris le temps de lire les annotations sous les noms des différents gadgets. Et là, surprise ! Ce n’était absolument pas l’explication du fonctionnement de ces gadgets, comme je le pensais, mais des courtes phrases d’analyse psychologique sur l’agent Ninjak, avec des mots noircis au feutre. Une manière d’expliquer la personnalité de Colin King, sans trop en dire, pour maintenir le suspense.
Ces différents éléments (les flashbacks, les détails de son analyse psychologique, les récits de son passé) font qu’il est facile de s’attacher au personnage.
De plus, l’auteur a pris soin d’en faire un personnage nuancé : ni tout blanc, ni tout noir. Ses actions sont discutables (c’est un assassin hors-pair et un mercenaire, puisqu’il est payé pour réaliser des contrats), pour autant, il laisse sa conscience guider ses choix, notamment dans les contrats qu’il doit accomplir. Il ne tue pas seulement pour l’argent.
Mais là où le personnage prend encore plus de saveur, c’est dans ses erreurs. Dans les choix qu’il fait lorsqu’il se laisse prendre par l’émotion. Des choix dangereux, aux conséquences souvent dramatiques, mais tellement cohérents au vu de son profil psychologique : un adulte à l’enfance traumatique. Un individu qui n’aurait jamais connu l’affection dans son enfance. Incapable de catégoriser comme il le fait pour chacune de ses missions, il prend les pires décisions qui soit, irréfléchies et spontanées, allant totalement à l’encontre du système qu’il s’est forgé.
Au fil du récit, le personnage, qui n’a jamais compté que sur lui-même, ne faisant confiance à personne, se retrouve dans des situations qui lui font prendre conscience que parfois, il n’y a pas d’autre choix que de faire confiance. Il réalise pour la première fois qu’il n’est pas seul et qu’il peut compter sur ses amis.
C’est particulièrement présent dans le 4ème arc, dont je vous parlerai plus tard…
Mais commençons par le commencement…
1. L’armurerie
Le premier tome pose les bases du personnage et surtout de son passé. Clay Mann se charge des dessins de la trame principale, encré par son frère jumeau Seth, dans un style réaliste, moderne, très lumineux grâce au travail de Ulises Arreola.
Seul le numéro 4 de cet arc échappe à la règle, puisqu’il est axé sur Roku, l’ennemie de Ninjak. Le travail d’illustration sera donc confié à Juan José Ryp et son style plus horrifique pour la naissance de Roku, tandis que les parties dans le présent sont toujours assurées par Clay Mann et son frère. Nous trouvons également des illustrations enfantines réalisées par Marguerite Sauvage (Cocorico-FAITH ) qui illustre le souvenir d’un conte pour enfants.
Le récit parallèle raconte quant à lui les débuts de Colin King 10 ans plus tôt (à l’exception du 4, encore une fois) en tant qu’agent du MI-6, sa relation avec son agent de liaison, ses erreurs de débutant qui conduiront au drame que l’on devine (et pour lequel Colin refusera d’endosser sa part de responsabilité). Nous retrouvons avec plaisir Butch Guice (CAPTAIN AMERICA ), apportant de la profondeur et de la noirceur, loin du brillant du récit principal. La colorisation est toujours assurée par Ulises Arreola qui réussit le pari de s’adapter à chaque style, pour un rendu parfaitement en équation avec le style du dessinateur et l’atmosphère recherchée.
2. La Guerre des Ombres
Le deuxième tome reprend là où s’est arrêté le premier. Colin a dépassé ce qu’on attendait de lui pour des raisons restées obscures jusqu’à présent. Nous en apprenons un peu plus sur les vraies motivations de Colin et ce qui se cache réellement derrière cette mission. Cet arc, par son côté « méchant du mois », m’a un peu moins emballé, notamment parce que les antagonistes sont quand même très folkloriques, notamment Sanguine avec ses métamorphoses chirurgicales, mais surtout Fakir et ses bras supplémentaires, qui repoussent quand on les lui coupe… Cela donne une dimension trop irréaliste, loin de l’univers de l’espionnage ou des ninjas… Le côté « monster of the week » est accentué par le fait que chacun de ces affrontements est réalisé par un dessinateur différent : Paul Allen, Juan José Ryp, Stephen Segovia et Clay Mann. L’ensemble est cependant toujours saupoudré de nouveaux flashbacks de Colin, une manière supplémentaire de montrer que rien n’est laissé au hasard dans la psychologie du personnage.
La partie « Dossiers perdus » est consacré à la réalisation de la vengeance de Colin, qui se déroulera dans un temple de moines tibétains, où l’initiation dont « profitera » Colin expliquera les capacités hors-normes dont il fait preuve dans le récit se déroulant au temps « présent ».
Les dessins sont confiés à Stephen Segovia et Juan José Ryp. L’ensemble forme un tout avec le tome 1, permettant la réalisation de la vengeance de Colin et de sa mission pour le MI-6.
3. Opération : Au-delà
Le troisième arc franchit un cap puisque cette fois-ci nous passons étonnamment dans l’univers mystique, avec la magie et les esprits. C’est surtout l’occasion de faire connaissance avec deux personnages de l’univers Valiant : Shadowman et Punk Mambo.
L’intrigue n’est pas indispensable, le récit n’apporte pas d’informations prépondérantes, cependant cette opération aura des conséquences dans les tomes suivants, notamment le 5ème arc intitulé The Fist and The Steel.
L’art est confié à Doug Braithwaite pour la partie principale, et à Juan José Ryp pour la partie « dossiers perdus » qui s’attache à la légende de la Pie (Magpie).
4. Le Siège de King’s Castle
Après ce voyage dans l’Au-delà, nous arrivons au tome 4 où Colin se retrouve totalement piégé : épuisé par sa précédente mission, il réalise trop tard que son château est piégé. Pris sous les décombres, il s’en sortira pour se rendre compte que tous ses comptes ont été vidés, et que, accusé de meurtres, il est désormais sur la liste noire : ennemi d’état. Il s’agit bien évidemment d’une vendetta. Le scénario n’est pas nouveau. Pourtant, Matt Kindt réussit à rendre chaque rebondissement intéressant, haletant. L’ingéniosité du personnage est mise en avant et l’intensité monte jusqu’à la confrontation finale, ajoutée à un twist qu’on n’avait pas forcément vu venir, augmentant d’un cran l’émotion… La meilleure scène étant pour moi celle où Colin se retrouve face à sa partenaire de Unity, Livewire, trouvant difficilement les mots pour exprimer sa gratitude et se confier sur ses difficultés en termes d’interactions sociales…
Tout cela mis en valeur par l’illustration de Diego Bernard qui revient au style moderne, réaliste, brillant et lumineux déjà rencontré avec Clay Mann dans le premier arc.
La deuxième partie nous narre les missions d’un couple d’agents secrets qui ne trompe pas le lecteur : M. et Mme King. L’art est confié à Khoi Pham pour un rendu sans fioriture, n’entrant pas dans les détails, puis à Andres Guinaldo qui reprend un style plus classique. Cette partie apporte bien évidemment des éléments importants sur le passé de Colin King, trouvant là encore une conclusion qui rejoint l’histoire principale.
Vous l’aurez compris, cet arc est à mes yeux le meilleur de la série.
5. The Fist and the Steel
Il est à noter en VF, les arcs 5 et 6 ont été réunis dans un seul et même tome.
Cet arc nous surprend de nouveau. Il est en effet intéressant d’en souligner la structure : Matt Kindt nous prend à contre-pied : cette fois, le récit principal se fait dans le futur, avec un Ninjak assez âgé mais toujours en action, accompagné de son ami et ancien coéquipier Gilad, le Guerrier Eternel.
On peut s’amuser de la relation de vieux partenaires aux modes tout aussi expéditives mais aux styles radicalement opposés, ce qui apporte une dose d’humour rafraîchissante.
Le récit dans le présent se trouve, lui, en deuxième partie ! Une fois encore, les deux parties finiront par se rejoindre. C’est un arc plutôt auto-contenu, avec toutefois le même fil rouge en filigrane, faisant le lien avec les épisodes suivants. L’action dans le futur se consacre à la recherche d’un ancien ennemi de Ninjak (plusieurs, en réalité), tandis que ce dernier lutte contre une étrange maladie dans le temps présent.
La première partie est assurée par Khari Evans avec l’aide de Eric Nguyen, Ulises Arreola toujours à la colorisation, tandis que la seconde partie est dessinée par Andrés Guinaldo et colorisée par Chris Sotomayor.
6. Les Sept Lames de Maîtres Darque
Le dernier arc aurait pu conclure la série. Il nous emmène jusqu’à une confrontation avec Maître Darque, un vilain renommé de l’univers Valiant, mais surtout à celle avec Roku, la némésis de Ninjak. Là encore, Matt Kindt, par sa conclusion, surprend. Oh, c’est cohérent, voire même prévisible, mais c’est tellement loin des décisions que prennent les héros ordinaires. Cet acte finit de mettre Ninjak dans la case des héros torturés, ou même anti-héros. Une ligne est franchie, laissant le lecteur sous le choc.
Le récit en lui-même n’est pas des plus passionnants, loin de là, avec un certain nombre d’incohérences et de personnages peu crédibles, d’autant qu’il n’y a pas de récit parallèle pour nous sortir du cadre de la mission. On nous présente une révélation qui n’en est pas une, et si ce n’était pour l’aboutissement du conflit Roku/Ninjak, cet arc n’aurait pas grand intérêt.
A une exception près : l’épisode qui précède le nouvel arc : Silent Standalone Issue. Un épisode qui, comme son nom l’indique, se déroule dans le silence, à l’exception de deux phrases, terribles, résumant la situation émotionnelle dans laquelle se trouve Ninjak à ce moment-là.
Ce numéro est assez fascinant pour moi, parce que ce n’est que bien après que j’ai réalisé ce silence… L’action y est prenante. Une demande de promesse laissée sans réponse, une mission sans parole, directe, violente, désespérée. Le final, et la chute, n’en sont que plus intenses… Un très bel épisode réalisé par CAFU (Carlos Alberto Fernandez Urbano), une fois de plus sublimé par le coloriste Ulises Arreola.
Les numéros 23 à 26 sont confiés à Marc Laming (#23) et Stephen Segovia. La bonne surprise vient de la petite bande dessinée comique qui retrace toute la vie dramatique de Colin King dans le numéro 24. Le contraste entre les événements et le style du dessin est à la fois surprenant et drôle. Une chouette originalité. Impossible cependant de savoir à qui attribuer cette petite œuvre. Ryan Lee y est mentionné en tant que dessinateur aux côtés de Stephen Segovia, mais rien ne permet d’affirmer si c’est son œuvre.
Le tome se termine finalement par une histoire totalement indépendante, scénarisée par Kevin Maurer et dessinée par CAFU. Une histoire sans grand intérêt, avec des ennemis une fois de plus très folkloriques. Une mission comme une autre de Ninjak, histoire d’appuyer le retour à la normale…
La série de Matt Kindt sera suivie par celle de Christos Gage, NINKA-K, en 2017.
Celui-ci prendra le parti de se concentrer sur le programme « Ninja », permettant ainsi de découvrir les premiers ninjas du MI-6 : A, B, C, D etc.
La première partie de cette série est intéressante, centrée sur un ancien ninja décidé à éliminer le MI-6 et à mettre un terme au programme Ninja. Pourquoi ? C’est évidemment tout l’intérêt de cet arc, qui aurait pu renverser totalement le statu quo. Malheureusement, la conclusion laisse sur la fin. Et si l’histoire qui se noue entre Ninjak et Livewire rappelle celle contée par Brubaker dans Captain Amerca puis Winter Soldier, impression accentuée par ce fond d’espionnage et de personnage à la personnalité trouble, violentée et violente, la comparaison s’arrête malheureusement là.
La série se conclue avec ce qui aurait pu être une fin correcte, bien qu’un peu frustrante, mais une image postée par Valiant récemment semble indiquer que Ninjak pourrait être de retour en 2020. Mais, ça, c’était avant…
Ainsi s’achève cette petite rétrospective du ninja espion qui a conquis le cœur de nombreux lecteurs.
En espérant qu’il revienne, je l’espère, à des aventures plus réalistes…
En attendant, impossible de se quitter sans la phrase la plus prononcée de 2020 : prenez soin de vous (bloody hell) !
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B.O. du jour : Récit d’une enfance au moins aussi difficile que celle de Colin King. Mais tout va bien !
OK! Tu m’as bien vendu le truc! Ayant grandi avec pas mal de nanards des années 80 sur le thème fantasmé des ninjas, plus tout ce qui fait écho à ce qu’on connait déjà ( Batman, James Bond…), bin je suis preneur! Et j’aime les dessins montrés en exemple! Colin a un costume qui m’évoque bougrement Gambit, ce qui n’est pas non plus pour me déplaire. Carton plein donc!
La BO : un riff éternel qui fonctionnera toujours, même pour moi qui n’aime pas ces sales gosses!
C’est un vrai plaisir que de pouvoir ainsi se replonger dans cette série et de l’apprécier avec d’autres yeux. Ce qui m’a fait venir à cette itération de Ninjak, c’est bien sûr Matt Kindt, un incroyable scénariste (en particulier Mind MGMT).
Pour la première histoire, j’avais également apprécié la manière dont Kindt sait mettre en lumière l’intelligence tactique de Colin King face à ses ennemis. Comme toi, je me sus délecté des pages de Kindt sur les armes de Ninjak.
Ce n’est qu’en lisant ton article que je me suis aperçu que Clay Mann n’est autre que le dessinateur de Heroes in Crisis : je n’avais pas fait le rapprochement. Pour La guerre des ombres, j’avais bien aimé découvrir comment était née la relation entre King et Neville Alcott. Opération : Au-delà – Comme toi, pas un récit très intéressant, uniquement réalisé pour ramener le personnage principal d’une autre série Valiant.
Le Siège de King’s Castle : j’ai été moins emballé que toi. Il redresse la barre par rapport au précédent en ramenant Ninjak dans un milieu plus urbain et plus moderne, où ses capacités de combattant et ses appareillages technologiques font plus sens. Les dessins sont d’un niveau satisfaisant, malgré quelques fluctuations. The fist and the steel : original sauf si tu as lu sa série Bloodshot. Kindt donne l’impression qu’il ne s’est pas foulé en reprenant une de ses propres idées déjà utilisées dans la série Bloodshot, et en se contentant d’un futur alternatif sans conséquence sur la ligne temporelle du présent. Mais Khari Evans ne se contente pas du minimum syndical. Du coup on a un récit bien structuré, aux nombreux rebondissements inventifs, avec une articulation originale entre temps passé et temps présent, rendu visuellement vivant, grâce à la bonne complémentarité entre dessins et couleurs
Les Sept Lames de Maîtres Darque : comme toi je n’ai pas trouvé le récit passionnant. L’épisode silencieux est agréable, sauf pour la progression de Ninjak dans un boyau qui insiste sur son étroitesse, tout en donnant l’impression d’une grande liberté de mouvement pour le personnage, ce qui apparaît un peu incohérent. Arrivé à la fin des épisodes 22 à 26, j’avais l’impression qu’il s’agissait surtout d’une pige pour prolonger la série en attendant qu’elle soit reprise par une autre équipe artistique, plutôt que d’une création artistique.
Je pense que mon ressenti est proche du tien : le run de Kindt est brillant sur la forme, mais à force d’entraîner toujours plus loin déracine complètement le personnage et son univers, là où Bloodshot restait ancré, ou même Dr Mirage qui se passe pourtant exclusivement dans le surnaturel et en grande partie dans les mondes des morts.
Bref : une lecture appréciable, mais pas grand chose qui en reste alors qu’il y avait des passages viscéraux et prometteurs.
Matt Kindt est une des grands scénaristes mainstream; il a une science du découpage très aérée, décopréssée mais dense en information qui donne toujours une lecteur très agréable.
L’univers Valiant a les défauts de ses qualités, au départ on a l’impression que les personnages ne sont ques des mash-up des persos Marvel (d’abord fondé par Jim Shooter, cet univers est très influencé par ses idées de Marvel et son New universe voulant rendre le super héros réél et donc peu enclin au folklore).
Bloodshot= wolverine+Punisher
Archer and Armstrong= Hawkeye+Hercules
X-O Manowxar= Iron Man+Thor
Harbinger= X-Men
etc…
pourtant c’est presque le point fort de cet univers, créer des repères faciles à assimiler très vite et donner tout ça développer à des scénaristes « bâtisseurs » chevronnés.
La refonte de ces dernières années a été très habile en mettant en avant une armada de scénaristes « valeurs sûres » pourtant peu connus du grand public Fred vanlente, Matt Kindt, Christos Gage, Joshua Dysart ont eu à coeur de tout reconstruire brillamment.
ils ont fait de l’univers Valiant l’alternative la plus longue contre les big two.
bravo à eux.
Bon je suis partagé…
Je crois avoir ça dans mes cartons en ayant toujours différé la lecture
Le +
Matt Kindt dont Présence est fan
Le fait que Dame Kaori et moi ayons bcp de goûts en commun
-Certaines planches laissent augurer de jolies bastons
Le –
-Le nom de code du personnage que je trouve ridicule
-Le volet espionnage : si il y a de la technologie et des gadgets, sans moi.
Très bon choix de bon. Sans aucun doute l’un de leurs 5 meilleurs morceaux.
Le volet espionnage : je trouve que justement, c’est beaucoup moins axé technologie et gadgets que dans UNITY par exemple. Ca soulève d’ailleurs quelques incohérences au sein de l’univers : alors que Colin se soignait grâce à tous ses gadgets dans UNITY, dans NINJAK, il mise tout sur le pouvoir de l’esprit et du corps (méditation toussa toussa).
Gadgets ? Pour moi ce sont juste des armes qui font partie de sa panoplie, un peu comme Batman.
J’avoue que j’ai du mal à me rendre compte si c’est prépondérant ou pas. Ce qui est sûr, c’est que ça n’a absolument pas gêné ma lecture. On ne détaille pas ses faits et gestes.
Bon, je ne cherche pas à te convaincre, mais je serais curieuse d’avoir ton point de vue après lecture quand même 😉 .
Et bien, voilà un article complet. Je sais tout sur NINJAK, sans en avoir lu ! 😀
Ça a l’air bien et j’aime bien le concept. Cependant je ne pense pas acquérir cela car je refuse désormais de rentrer dans un nouvel univers partagé. J’ai déjà eu du mal à ressortir de celui de DC et surtout de Marvel, alors c’est au dessus de mes forces…
La BO : Un des meilleurs titres des Stones (le pire pour moi étant HONKYTONK WOMAN dont j’ai été écoeuré à travers les multiples reprises dans tous les concerts de blues insupportables de ma région…).
Hey Manu ! Mon top 5 des films de ninjas ringards des années 80 :
– AMERICAN WARRIOR
– AMERICAN WARRIOR 2 : Le Chasseur
– LA FUREUR DU JUSTE
– L’HOMME AU KATANA
– LE NINJA BLANC
Et voilà, je vais encore procrastiner avec cette liste! Merci Tornado!
@Bruce : Tu as bien fait de mettre un titre des Stones que je ne connaissais pas. Il est sur le Steel Wheels ?
@Bruce et Tornado : Jumpin Jack Flash a beau être un superbe morceau, je ne le mettrai sûrement pas dans mon top 5 des Rolling Stones. Sans doute dans mon top 20 cependant. Ou top 30.
@Manu : toujours au rendez-vous 😉
Contente si je t’ai vendu le truc !
@Présence : non je n’ai pas lu son Bloodshot.
Je ne connaissais pas Matt Kindt avant Valiant. J’aime sa façon de traiter ses personnages.
Pour Clay Mann, j’ai oublié de faire le lien avec Heroes in Crisis ? J’aime bien ce style « esthétique mais pas trop » (contrairement à Greg Land qui m’a beaucoup déçue sur Ultimate). On sent en effet la passation vers une équipe artistique différente. Dommage.
@Chip : on est d’accord, visiblement.
@Eddy : fine analyse, intéressante, cette comparaison ! Je partage ton avis, c’est une alternative aux Big Two, plus constante, plus intelligente, moins mainstream.
@Tornado : ha ha , je ne sais pas faire dans la demie-mesure. Il faut toujours que je rentre dans les détails… Et je ne sais pas faire d’analyse comparative 😉
Pour l’univers partagé, moi qui ne lit pas les autres récits, je trouve que ça se lit sans problème. Ok tu as des personnages secondaires qui apparaissent, mais pas besoin de connaitre leur histoire, on te les présente brièvement.
C’est que j’apprécie dans l’univers Valiant : même si tout est connecté, et que certains événements ont forcément parfois des répercussions dans la série que tu lis, ça ne t’oblige pas à aller lire les autres séries.
Je suis arrivée sur NINJAK parce que je trouvais le personnage intéressant et mystérieux. Mais les séries peuvent se lire indépendamment des autres sans problèmes.
L’univers est suffisamment jeune et bien écrit pour rester digeste, aéré. Et le nombre de personnages reste gérable !
Clay Mann me fait parfois penser à Olivier Coipel dans la légèreté de certains contours, et à d’autres moments à Ariel Olivetti avant qu’il ne passe à l’infographie.
Je ne connais rien de l’univers Valiant et encore moins du personnage !
Il va falloir, qu’à l’occasion, j’essaie de lire un truc de cet éditeur. Cela va me changer de Marvel ou DC.
Et pourquoi pas commencer par la série que tu nous présentes ? Je suis passionné de culture asiatique, ces histoires de Ninja espion ont tout pour me plaire.
En tout cas ton bel article donne envie 😉
La BO : un classique incontournable, Keith Richards nous sort encore un rift d’anthologie en ayant retiré une corde à sa guitare.
Merci Surfer 🙂
Par contre, je t’arrête tout de suite, à ma (grande) déception, la culture asiatique est peu présente dans le run de Matt Kindt. Le volet historique est davantage creusé dans la série suivante, NINJA-K, par Christos Gage.
Toujours se relire avant de poster un message. Ça prend un peu plus de temps, mais ça évite souvent des messages drôles mais parfois aussi gênant 😉
Un RIFF pas un rift. Décidément la saisie prédictive des téléphones n’a pas que du bon ! Il va falloir que je désactive cette fonctionnalité de merde! C’est bien d’aller vite mais si on fait des fautes à chaque mot… C’est pas mieux !
Sans doute voulais-tu parler d’un Drift Continental Surfer…
A nouveau, un bel effort de synthèse et une chronique très incitative mais…Ninjak, quoi ! C’est vrai qu’en français, ça sonne bof bof…
Je suis sûrement fatigué mais je n’ai pas vu l’autre personnage que l’article devait évoquer :
« Pourtant, il m’évoque, par sa psychologie et son environnement, un autre personnage dont je parlerai plus tard. »
Je ne connais pas vraiment les Bliss Comics (j’ai lu l’intégrale de Harbinger, j’ai les deux ou trois premiers FAITH (que j’aime beaucoup) et ai vu la très médiocre adaptation de BLOODSHOT avec Vin Diesel) mais je sais que Matt Kindt est un auteur à suivre parce que Présence l’a dit. Pour le moment, je n’ai lu que ses deux tomes de ETHER (article à faire de ma part) mais j’ai acheté le premier tome de MIND MGMT ainsi que son DU SANG SUR LES MAINS, qui sont donc dans ma bibliothèque à lire.
Déjà, ton titre est excellent. Ensuite, le nom même m’interpelle : qui n’aime pas les ninjas, sérieux ?
De tous les dessinateurs que tu cites, je ne connais que Juan Jose Ryp, qui a fait des albums avec Warren Ellis (No Hero notamment).
Les annotations présentant la psychologie de Ninjak via ses armes est très originale, je ne crois pas avoir vu ça avant.
Mais tu les as lus en VO ou VF ?
Merci pour la présentation et le tour d’horizon, tu donnerais presque envie d’essayer en fait. Tu n’as pas dit de quel personnage il te semble le plus proche, à part James Bond et Batou, ou j’ai loupé un truc ?
La BO : j’adore, mais je l’avais vue venir avec le titre, évidemment 😀
POur moi Ninjak=Elektra+Batman avec une pincée de Nick Fury voire même de K’un L’un il me semble….
la sauce prend bien parce Matt Kindt maîtrise très bien son sujet et possède un écriture très agréable à lire.