Encyclopegeek :YOKO TSUNO par Roger Leloup
Un article de MATTIE-BOY
VF : Dupuis
1ère publication le 20/11/19 – MAJ le 28/07/20
Je continue mes articles sur les classiques de chez Dupuis qui étaient publiés dans Spirou magazine. Après NATACHA, SODA et LE FLAGADA, voici YOKO TSUNO. Qu’est-ce donc ? Une des premières séries franco-belges mettant en scène une héroïne, débarquée la même année que Natacha dans les pages de Spirou.
Cette série de Roger Leloup est très orientée SF (je devine donc déjà l’absence d’intérêt de notre rédac chef…) (tu devines trop bien…Ndr) Sa structure même est d’ailleurs assez particulière. Les histoires de la japonaise Yoko alternent entre aventures terrestres et aventures spatiales. Les aventures terrestres sont indépendantes les unes des autres, les aventures spatiales moins. Elles ne sont pas à suivre à proprement parler, mais les albums 1, 3, 6 et 13 constituent une sorte d’arc sur les Vinéens (des extraterrestres à la peau bleue qui ont fui leur planète suite à un désastre et vont s’arranger, avec l’aide de Yoko, pour retourner y vivre et prendre contact avec des survivants.) Au milieu de ça, vous avez le tome 8 « Les titans » et le tome 10 « La lumière d’Ixo » qui sont aussi des aventures spatiales mais plus indépendantes. Par la suite, les albums orientés SF ne constitueront plus vraiment des arcs narratifs mais des personnages récurrents reviendront, donc ne pas lire l’arc des vinéens peut poser problème pour la compréhension de la suite des aventures.
D’ailleurs la réédition de Yoko Tsuno en intégrale est sujette à polémique. En effet, au lieu de publier dans l’ordre chronologique les aventures de l’héroïne, l’éditeur a choisi de grouper les histoires liées. Par exemple le tome 1 comprend les albums 1,3 et 6 qui sont 3 aventures spatiales. Et le tome 2 « aventures allemandes » les albums 2, 7 et 14. Curieux choix, même si d’après le sommaire, je pense que ça ne devrait pas poser trop de problèmes pour la compréhension. Mais je saute des étapes. De quelles sortes d’aventures s’agit-il et qui sont les personnages ?
Yoko est une ingénieure en électronique d’origine sino-japonaise. A la base, elle avait été envisagée comme un personnage secondaire avant que les quelques planches réalisées par Leloup donnent l’envie à l’éditeur de lancer une série avec une héroïne. Les premiers récits courts « Hold-up en hi-fi » et « l’ange de Noël » sont sortis en 1970 dans les numéros 1963 et 1706 de Spirou. Suite à l’accueil favorable des lecteurs, Leloup reçoit le feu vert pour réaliser un album long. Aujourd’hui ces premiers courts récits sont édités dans le tome 4 « aventures électroniques » qui est presque un hors-série, et sont agrémentés de 2 autres courts-récits réalisés en 1971 pour constituer un album.
Je rappelle qu’à la même époque, François Walthéry avait déjà esquissé son personnage de Natacha (dès 1965) mais qu’il faudra lui aussi qu’il attende 1970 pour que soit publié le premier album de l’hôtesse de l’air. 1970 était donc l’année des héroïnes de BD. Finalement, Yoko débarque dans sa première aventure, tout de même accompagnée de ses 2 comparses présents dans presque toutes ses aventures : Vic Vidéo et Pol Pitron. Le premier est réalisateur à la télé et c’est un personnage un peu générique sans grande personnalité (envisagé d’abord comme le personnage principal de la série pourtant), le second est caméraman, et c’est un peu le comic-relief, le copain maladroit et grognon qui a peur de son ombre, mais avec un bon fond.
Au départ, Yoko devait porter le nom de Yoko Shirisho. Mais sur les conseils de Maurice Tillieux, Leloup va lui trouver un nom plus court. Il s’inspirera pour ça de la ville de Tsuno au Japon. Selon les mots de l’auteur, ce nom lui plaisait pour les raisons suivantes : « Tsu avait une résonance chinoise et No rappelait le théâtre japonais, bref c’était idéal pour une héroïne japonaise à laquelle je voulais donner des origines chinoises ».
Je propose de vous parler des albums que je préfère, comme je l’avais fait avec SODA ou Natacha, mais la particularité cette fois, c’est que je suis obligé d’en inclure davantage puisqu’il est difficile de sauter des épisodes du cycle des vinéens. Globalement pour moi la série est bonne jusqu’au tome 18 Les exilés de Kifa. En réalité je n’ai pas lu tous les suivants donc je ne pourrais me prononcer sur leur qualité. Comme beaucoup de séries de l’époque, je me suis arrêté à un moment et je suis surtout attaché aux albums que j’ai connus dans mon enfance, et pas les derniers en date (pareil avec Spirou ou Natacha dont j’ai laissé tomber les sorties récentes) Et puis vous savez que j’aime bien quand les séries se terminent. Donc quand ça ne se termine pas…bah j’arrête de les lire.
Mais comme les albums sont globalement indépendants, on peut s’arrêter à mi-parcours sans problème.
Les aventures spatiales de Yoko Tsuno peuvent s’apparenter aux épisodes du Capitaine Flam ou de Star Trek, dans le sens où ce sont des scénarios très travaillés avec des notions de science (des installations météorologiques de contrôle du climat, des dispositifs de communication, des voyages spatiaux qui prennent des semaines et autres trucs qui peuvent dérailler et créer des dangers plus techniques et intéressants que des bastons spatiales génériques), des personnages avec de vraies motivations, et rarement de grand méchant cruel qui veut être méchant juste pour être méchant. Bien que les histoires puissent parfaitement être lues par de jeunes lecteurs (pas de sang ni gros mots, nous sommes chez Dupuis dans Spirou magazine), la teneur des histoires et les concepts scientifiques pourraient rebuter les trop jeunes. C’est une lecture qu’on peut redécouvrir adulte en comprenant mieux les enjeux et qui ne prend clairement pas les lecteurs pour des idiots.
Les aventures terrestres sont d’ailleurs dans le même esprit, même si forcément elles sont moins orientées science-fiction.
Commençons par le cycle des vinéens que je considère étendu dans les tomes 1, 3, 6 et 13.
Tome 1 : Le trio de l’étrange
Tout commence avec Vic et Pol qui cherchent à monter une émission pour leur chaîne de TV. Ils rencontrent la jeune électronicienne Yoko qui cherche du boulot dans des circonstances amusantes, et l’engagent comme technicienne pour leur chaine de TV. Leur premier travail ensemble consiste en une émission sur la spéléologie, et c’est en explorant des grottes que notre trio va se faire aspirer par un siphon sous-marin naturel, débarquer dans des installations souterraines et se retrouver entourés de personnages étranges à la peau bleue. Ce sont les vinéens. Et ils sont sur terre (ou plutôt dessous) depuis 400 000 ans. C’est là que Yoko et ses amis rencontrent les vinéennes Khany et Poky (la fillette) qui vont devenir de grandes amies par la suite.
Dans cet album qui est surtout une grosse introduction, Yoko apprendra la tragédie qui a poussé les vinéens à quitter leur planète (un réchauffement cataclysmique dû au rapprochement de deux soleils qui les a d’abord poussés à vivre sous la surface de Vinéa) pour se réfugier sur terre, et devra affronter des personnages qui ne voient pas d’un bon œil l’intrusion d’êtres humains dans leur cité. C’est un bon tome pour débuter la saga. Mais il ne faut pas s’arrêter là.
Tome 3 : La forge de Vulcain
L’existence des vinéens finit par être remarquée par des humains lorsqu’une plateforme de forage offshore heurte une installation sous-marine des extraterrestres qui régulent la circulation du magma sous terre pour leurs besoins de survie. Yoko, Vic et Pol prennent donc l’avion pour se rendre en Martinique, sur les lieux de la découverte, dans l’espoir de retrouver leurs amis. Et c’est ce qui se produit. Seulement voilà : un danger menace les humains à présent. Le magma en fusion libéré par la plateforme de forage risque de rejoindre la nappe de pétrole, et à présent notre trio de héros aidé de Kahny doit tout faire pour prévenir la catastrophe en réparant les installations de la « forge » des vinéens. Seulement il y a un autre problème : un vinéen haut-placé désire le cataclysme qui lui permettrait de prendre le contrôle des îles environnantes et ainsi s’approprier des territoires. Nos héros craignent que cela déclenche une guerre avec la surface et doivent donc faire échouer ce plan.
C’est un album assez technique dont le principal objectif est d’enrayer une machinerie mortelle qui pourrait provoquer des explosions sous-marines susceptibles d’engloutir des îles. L’ajout du méchant de l’histoire sert surtout à rendre cet objectif plus difficile à atteindre puisque nos héros doivent procéder de manière clandestine et expliquer aux vinéens qu’ils ont un fou dangereux en leur sein auquel ils doivent cesser d’obéir. Un très bon second chapitre sur les vinéens.
Tome 6 : les 3 soleils de Vinéa
Cet album inaugure les aventures spatiales. Dès les premières pages, Yoko et ses amis se retrouvent rapidement dans une base spatiale vinéenne en orbite autour de Saturne. De là, ils entreprennent un voyage de 2 mois en léthargie vers une autre base non loin de Vinéa…que Khany espère retrouver entière. Et il s’avère que les deux soleils qui étaient sur le point de se heurter se sont éloignés grâce à l’explosion du noyau de l’un d’eux dont la force d’expansion a entrainé Vinéa sur une orbite plus large. Mais il reste à savoir si les radiations et les gazs en expansion n’ont pas empoisonné l’atmosphère de la planète, et s’il reste un espoir qu’elle soit viable.
Cet album raconte la redécouverte d’un monde longtemps abandonné par les générations précédentes de vinéens. Nos héros vont rencontrer des survivants mais ceux-ci seront un brin plus primitifs, dépourvus de la technologie que les anciens vinéens maitrisaient. Et ils placent leur foi en un étrange guide suprême qui a fait bâtir des installations de contrôle du climat un peu partout, redonnant vie à la planète. Le guide suprême est en réalité un amalgame de mémoires numériques des anciens savants de Vinéa reliées à des ordinateurs. Il y a hélas un problème : le destin de la planète, une fois redevenue viable, devait être confiée à un homme que personne n’arrive plus à contacter et qui réside dans un lieu inaccessible aux savants. Eh oui après tout les machines peuvent tomber en panne aussi et nos héros vont devoir découvrir ce qui se passe. Il n’y a pas vraiment de méchant dans cette histoire, si ce n’est des dysfonctionnements dangereux, mais ça ne rend pas l’histoire moins palpitante puisque la redécouverte de ce monde extraterrestre demeure passionnante.
Tome 8 : les titans
Avant de parler du tome 13 que je considère comme une suite de l’arc des vinéens avec de nouvelles découvertes sur leur peuple, on peut aussi parler du tome 8 qui est une nouvelle aventure spatiale se déroulant sur Vinéa mais qui n’a pas vraiment de rapport direct avec le peuple vinéen.
Cet album a longtemps été mon préféré. Parce que…euh…y’a des monstres géants insectoïdes, yeah ! Euh…ahem…en gros durant les siècles où la surface de Vinéa n’était plus habitée, il y a eu des changements géologiques majeurs et nos amis vont découvrir un peuple d’insectes géants pensants qui maitrisent une technologie avancée. Yoko va entrer en contact avec Xunk « le faible », un titan assez mal intégré à sa colonie. Le récit est là aussi dépourvu de véritables méchants, il s’agit surtout de l’histoire d’un contact entre deux peuples très différents avec quelques conflits et malentendus qui seront résolus avec diplomatie.
Ce qui est très intéressant dans cette histoire et dont je ne vous ai pas encore parlé plus tôt, c’est que Roger Leloup est un humaniste très intéressé par la technologie mais qui a aussi un esprit critique dessus. On retrouve donc souvent dans ses histoires des arguments pour et contre la science, et pour et contre les activités humaines. Ainsi, même s’il présente de nombreux avantages de la technologie, Yoko ne cesse de dire que la survie d’un peuple ne peut pas être confiée à un ordinateur dépourvu d’émotions. De même, la faculté de compassion de l’être humain, sans doute sa seule qualité (là c’est moi qui parle…) est mise en avant dans des histoires comme celle-ci où la société des titans, proche de celle des insectes, est montrée comme cruelle avec le rejet immédiat des maillons faibles. Mais en même temps, les titans de cette histoire vont se méfier des humains pour une raison valable après avoir constaté ce que les humains font aux insectes terriens.
On se retrouve ainsi avec des histoires qui nous font réfléchir sur nos qualités et défauts, et sur la science sans conscience. C’est pour ça que je dis que ça me fais penser à du Star Trek parfois. Car Star Trek, ce n’est pas une dystopie. Dans le futur de Star Trek, la technologie a permis des choses merveilleuses et la fin des guerres, le rapprochement des peuples, etc. Mais elle engendre aussi des problèmes éthiques, des chocs culturels entre civilisations et des problèmes d’organisation.
Tome 13 : les archanges de Vinéa
Ce tome est pour moi le chapitre final de l’arc des vinéens. Cette fois nos héros vont découvrir une autre branche du peuple vinéen qui s’est réfugiée sous les eaux dans des citées. Eparpillé par le cataclysme de jadis, ce peuple extraterrestre ne cesse au fil des aventures de se réunir pour se reconstruire. Hélas, dans cette histoire, la tribu sous-marine est dirigée par une reine assez belliqueuse qui garde une rancœur envers des dirigeants de cités vinéennes qui n’existent plus. Elle vole des enfants placés en animation suspendue qu’une caste d’androïdes (les archanges) sont chargés d’élever. La reine les kidnappe afin d’en faire des serviteurs guerriers. Le personnage de la reine est aveuglé par la rancœur de vieux conflits, mais là encore le scénario l’explique par la nature même de la reine qui est en partie une machine qui vit depuis trop longtemps et a perdu de vue les vrais objectifs de survie de son peuple.
Tome 2 : l’orgue du diable
Bon allez, on revient un peu en arrière pour parler de quelques aventures terrestres. Je ne les trouve pas inférieures du tout, mais aborder la saga vinéenne m’a forcé à parler de beaucoup d’albums spatiaux qui sont moins indépendants les uns des autres. Je n’ai donc plus trop de place dans cet article pour aborder les albums terrestres.
Cet album nous propose une enquête en Allemagne. Yoko y rencontre Ingrid Hallberg, une organiste qui deviendra son amie et qu’on retrouvera dans d’autres albums. Leur rencontre se fait dans des circonstances sinistres : Yoko la sauve de la noyage après que quelqu’un ait tenté de l’assassiner. Comme ce genre de sauvetage a tendance à rapprocher un peu les gens, Ingrid se confie à Yoko et ses amis : son père a été assassiné et elle cherche à retrouver un message qu’il lui aurait laissé avant sa mort. Mais quelqu’un d’autre cherche à effacer ses traces. Au centre de cette enquête, un projet de restauration d’un orgue étrange dont les sons ont un effet très particulier sur les gens.
Il s’agit d’une intrigue policière qui n’a aucun élément de SF, même si certaines installations d’un vieux château sont toujours expliquées avec un grand souci technique du détail par l’auteur. Et le récit baigne dans une atmosphère de vieux château inquiétant.
Tome 7 : la frontière de la vie
Un album dans lequel les amis de Yoko ne sont pas avec elle (il y en a quelques-uns comme ça.) Cela dit, elle retrouve Ingrid rencontrée dans le tome 2.
Yoko est convoquée par son amie à Rothenburg, petite ville allemande qui, comme décrite dans la première phrase de l’album, a défié le temps et les guerres du passé pour offrir au présent le romantisme intact d’une cité du XVIème siècle. Yoko est ici pour aider son amie qui souffre d’une étrange maladie. Son cousin pense même qu’elle est victime d’un vampire puisqu’elle a une blessure au bras et qu’une partie de son sang a été remplacé par une substance artificielle. Quelqu’un s’adonne à de biens étranges expériences à l’insu de nos héroïnes. En effet, une silhouette masquée ne tarde pas à s’introduire chez Ingrid pour revenir lui voler du sang.
Après une course-poursuite dans les rues pittoresques de la ville, Yoko va enquêter pour découvrir ce qui se trame. Il s’avère que l’intrigue implique un complexe scientifique clandestin sous la ville, une petite fille supposée morte durant la guerre et des secrets de famille complexes. Je ne vous en révèle pas plus, c’est une histoire très prenante et mystérieuse joliment écrite et dessinée. Cet album en particulier a fait l’objet d’une abondante documentation photographique pour les décors et il s’en dégage un cachet bien particulier. Une des meilleures aventures « terrestres » de la série.
Pour les réfractaires à la SF (mais non, je ne vise personne !) qui seraient quand même curieux de découvrir cette série et ses scénarios travaillés, je ne peux que leur conseiller « l’orgue du diable », « la frontière de la vie » et « la proie et l’ombre ».
Je pourrais continuer en vous parlant d’autres bons albums, mais il faut bien faire des choix. Sachez en tous cas que mis à part peut-être 2 ou 3 albums, les 18 premiers valent le coup. Je me suis surtout focalisé sur les aventures spatiales car c’est un peu le sel de la série, mais les aventures terrestres sont de très bonne facture aussi (la proie et l’ombre, le dragon de Hong Kong, la spirale du temps, la fille du vent)
Concernant le dessin, si on pourra regretter que les personnages paraissent souvent un peu rigides (à la manière des personnages de BLAKE & MORTIMER dessinés par E.P Jacobs), les décors sont absolument magnifiques et avec un souci du détail presque documentaire. Que ce soit les installations techniques très fouillées et au design scientifiquement correct (les explications sur la présence de spires qui génèrent des champs magnétiques par exemple) ou les décors de la vieille Allemagne avec ses châteaux et vieux villages dans les aventures terrestres, c’est un vrai plaisir pour les yeux. La seule ombre au tableau comme je le disais c’est que Roger Leloup n’a pas la maitrise du mouvement d’un François Walthéry par exemple qui rendait ses personnages très animés. Ici les personnages sont souvent raides comme des piquets. Mais ce n’est pas bien grave. D’ailleurs au passage, Yoko n’est pas du tout sexualisée. Elle n’est pas vilaine hein, mais j’entends par là que l’auteur ne cherche pas particulièrement à la mettre en valeur ni à la rendre sexy (contrairement à Natacha dont le sex-appeal était déjà plus mis en avant.)
En tous cas, cette série mérite d’être redécouverte, surtout que je pense qu’elle s’adresse au final davantage aux adultes malgré un ton tous publics, car les considérations éthiques, les concepts scientifiques et autres sujets sensibles passeront au-dessus d’un lectorat trop jeune. C’est une série féministe (sans être bêtement féministe : il y a beaucoup de personnages féminins forts et intelligents, mais aussi des garces.) qui propose de la SF intelligente dans des scénarios très travaillés. Je recommande.
—–
La BO du jour :
J’ai relu des tomes de Valerian et Laureline, et je dois dire que malgré l’aspect un peu vieillot des premiers albums, je préfère le début de la série (8 premiers tomes) pour ses scénarios plus fous et originaux. Après ça vire vraiment dans le voyage temporel plein de paradoxes et les personnages qui évoluent pas mal au XXeme siècle. Et ça m’attire moins.
Pareil, c’est une lecture d’évasion… avec des étoiles, des peuples tous bizarres… je kiffe!
Merci pour cet article !
Ça me donne une furieuse envie de relire la série, que j’avais tellement aimé enfant & ado !! 😀
Très joli résumé !
Ceci-dit, je ne pense pas que la profondeur de réflexion de Roger Leloup, quant à ses préoccupations personnelles, puisse poser de réels problèmes de lecture à de jeunes lecteurs : au pire, ça leur passera par dessus la tête. Mais l’esthétique si propre des cases et la maitrise du rythme (intrigue/action/humour) ne peut que les sensibiliser très agréablement aux valeurs classiques qui déterminent une BD de -grande, dans ce cas précis !- qualité. À noter que, si les décors sont omniprésents et très finement détaillés, ils ne parasitent à aucun moment la lecture : on tourne les pages sans avoir besoin de s’apesantir (peu de dessinateurs sont capable d’atteindre cet équilibre). Le travail de colorisation (studio Leonardo ?!) aussi participe au rendu, presque photo-réaliste mais très efficacement compensé, pour le coup, par le côté « poupées » des personnages. On obtient, toutes proportions gardées, peu ou prou -et avant l’heure, en Europe- le genre de dynamique quasi exclusive au Manga, avec ses oppositions personnages à la limite de la vraisemblance anatomique posés sur fonds hyper-travaillés et documentés.
Tiens, en guise de complément, un avis (remanié) sur l’oeuvre de Roger Leloup (déjà posté chez des voisins.).
Yoko Tsuno a longtemps été une frustration enfantine: je n’avais pu qu’en feuilleter quelques pages, par-ci, par-là; mais d’album, nenni. C’est donc laaaargement mature ( ! ) que je me suis décidé à satisfaire ma curiosité; et je ne l’ai jamais regretté. Alors, oui: Roger Leloup a, dans ses plus récentes publications, abordé des thématiques probablement plus personnelles et, surtout, semble les avoir explorées dans une optique beaucoup moins classique: il est manifeste que le soucis de vendre au plus grand nombre n’est pas sa priorité (bien que je ne m’inquiète en rien de la fidélité de ses lecteurs.).
Mais pour qui aime les histoires bien écrites, distrayantes et inventives – ainsi que proches de la perfection graphique factuelle sur un assez grand nombre d’albums -, alors c’est une bonne idée de se plonger dans les aventures mouvementées et riches d’émotions de cette héroïne au caractère bien trempé, qui tranche dans le vif en paroles autant qu’en actes et dont la rectitude morale, remarquable, est heureusement adoucie par sa réelle vulnérabilité émotionnelle.
De » Le Trio De L’Étrange » à » Le Dragon De Hong-Kong « , je me suis, je dois dire, pas mal amusé – exception faite pour le laborieux » Les Archanges De Vinéa « – et ai même plusieurs fois été au bord des larmes. Le drame est toujours traité avec beaucoup de délicatesse et de dignité : autre rare qualité de la BD.
Par la suite, il me semble que l’auteur s’est éloigné du cadre « réaliste » de la construction de ses scénarios précédents pour donner à ses aventure une légèreté très – trop ?! – légère ( ! ); presque enfantine par moments. Il m’a semblé aussi y avoir une sorte d’urgence pour Roger Leloup à étoffer la partie Vinéenne de l’univers de Yoko; quitte à en mettre un peu beaucoup à la fois ( Les Exilés De Kifa, par exemple.).