NICKY LARSON ET LE PARFUM DE CUPIDON de Philippe Lacheau
Une érection de Eddy Vanleffe.
1ère publication le 21/03/19- MAJ le 06/10/19
NICKY LARSON ET LE PARFUM DE CUPIDON est un film français de Philippe Lacheau basé sur le manga CITY HUNTER de Tsukasa Hôjô, sorti le 6 février 2019.
Nous les fans, nous aimons râler.
Nous les français, nous aimons râler.
Imaginez donc les fans français.
C’est une sorte de réflexe, lorsque quelque chose de nouveau apparaît, on râle d’abord, on réfléchit ensuite.
En matière d’adaptation cinématographique, il faut bien dire qu’on nous a bien souvent distribué des trucs faits avec le cul. C’est bien souvent en larmes-et pas d’émotions-que nous avons pris l’habitude de quitter les salles obscures. Souvenez-vous des Schtroumpfs dans les chiottes, des Asterix vulgaires, du Spirou Voleur, du Superman briseur de menottes dans Lois et Clark, du Captain America avec son casque de moto, Spider-Man version filet de pêche et brushing et je vais m’arrêter là, parce qu’il va bien falloir un jour entrer dans le vif du sujet…
Mais depuis que les effets spéciaux permettent une plus grande suspension d’incrédulité, les producteurs s’en donnent à cœur joie et semblent même avoir trouvé la poule aux œufs d’or de ce début de millénaire puisqu’on avoisine la centaine de films sortis ou en production adaptés d’un comics depuis 2000. Évidemment, en France nous n’avons pas voulu être en reste et nous avons démontré la force de notre industrie cinématographique en lançant le titanesque chantier de…BENOIT BRISEFER.
Alors oui, nous sommes des râleurs, car nous les avons vu vomir sur l’héritage de Peyo, déféquer dans les mots de Gosciny, prendre des champi avec le cow-boy de Moebius Eric et Ramzy en Dalton…Non je n’ai plus la force. C’est vrai donc, que quand un réalisateur français prend les commandes d’une adaptation de bd, nous n’avons plus confiance.
Au secours! Une comédie française.
©2019-Sony-Les films du 24
Aussi quand il y a un an, la nouvelle tomba sur les prompteurs, ce fut la déflagration d’un épouvantable «shitstorm». «On a violé mon enfance!» pouvait-on lire un peu partout. D’autres s’insurgèrent sur le bien-fondé d’une telle idée. -Quoi?!! Philippe Lacheau spécialiste de la comédie Panzer-adolescente, va adapter CITYHUNTER? Il n’est même pas japonais! En plus ça va être l’adaptation bouffonne du Club Dorothée puisqu’il va reprendre la traduction de l’époque. Traître!
Pourtant déjà sur l’affiche, on sentait que les codes visuels étaient respectés à la lettre. La note d’intention était plutôt rassurante, mais… non. Philippe Lacheau avait touché un truc qu’il ne fallait pas. Il avait collé son pied sur une mine que seule la sortie effective du film pouvait désamorcer, ou faire tout péter. La guerre était en marche! Les critiques se faisaient déjà les dents impatients de réduire le film en poussière. La première bande-annonce montrait comme prévu la bande à Fifi cabotiner avec plaisir et ce fut l’estocade pour les fans qui allait pendant toute l’année se déchaîner sur la boite à gros mots qu’est Twitter. Pourtant, de quoi avait-on donc si peur?
CITY HUNTER a déjà été adapté une première fois à Hong-Kong en 1993 par Jacky Chan. Doit on ajouter quelque chose? Cette adaptation est sans doute le film le moins fidèle à une franchise que j’ai jamais vu de ma vie. Jackie, ne voulant pas faire l’apologie des armes et passer pour un pervers, réduit les scènes de flingues et les scènes olé-olé à leurs portions congrues. De fait, cette version n’est qu’une kung-fu comedy de plus, customisée à la gloire de sa star parmi toutes les autres de son catalogue. Nicky/Jackie ne font allusion que de loin en loin au manga d’origine allant jusqu’à faire disparaître la moitié du casting de l’animé. N’apparaissent alors que Nicky, Laura, la flic Hélène et sa sœur, faisant l’impasse donc sur le célèbre Mammouth au profit d’un joueur de cartes magicien…Je ne déconseillerais pas la vision de ce film, mais oubliez un peu qu’il s’agit d’une adaptation du manga, cela vaudra mieux.
A Hong-Kong, une autre particularité existe aussi couramment, parfaitement ancrée dans les mœurs de la ville portuaire. Quand on a pas les droits…Ben on s’en fout et on fait une adaptation pirate. Ce fut le cas deux fois pour CITY HUNTER qui connut donc un semblant d’adaptation sur SAVIOUR OF THE SOUL avec Andy Lau, que je n’ai pas vu et surtout avec MR MUMBLE de Michael Chow en 1996, qui malgré des libertés flagrantes, s’offre le luxe d’être cent fois plus fidèle à son modèle que la seule itération live officielle de l’époque. Ce petit film a d’ailleurs toute ma sympathie avec ses blagues honteuses à base de travelos et d’alcool et son Mammouth plus vrai que nature. Rire gras et même un chouia d’émotions sur la fin. Les gars avaient compris quoi!
Sur cette base, que pouvait faire Philippe Lacheau de si honteux, lui qui clamait son amour du manga sur toute les ondes possibles et imaginables? Mais voilà, non seulement nous sommes méfiants, mais en plus nous sommes puristes.
Des blancs qui adaptent du manga, ça fait penser à GHOST IN THE SHELL et ses polémiques de «white washing». Comme si ça gênait les japonais d’incarner des blancs dans des films dont les intrigues semblent se situer en Europe germanique comme dans FULL METAL ALCHEMIST ou L’ATTAQUE DES TITANS. Ils s’en foutent et ils ont bien raison.
C’est au contraire intelligemment que Fifi va reprendre les noms du Club Do, permettant une adaptation en douceur et sur plusieurs niveaux, capitalisant sur des identités déjà connues. C’est d’une logique limpide en fait. En plus, on a de la chance, les noms trouvées à l’époque faisaient appel à une sorte d’inconscient collectif américanisé qui passe relativement bien. Enfin mieux que Nicolas de L’ACADÉMIE DES NINJAS..
Non, la seule crainte pour celui qui ne pratique pas la mauvaise foi comme un sacerdoce, était qu’il loupe l’un des éléments clés de l’univers de Hôjô. Là encore, on nous assure que le créateur, aujourd’hui pour réputé pour surveiller ses créations, a adoubé le projet.
Il ne nous reste plus qu’ à croiser les doigts et à espérer.
En plus, il y a déjà eu une adaptation de manga réussie menée par un frenchie, il y a longtemps…longtemps…non Je ne parle de pas de LADY OSCAR de Jacques Demy (quoique que je pourrais…) mais bien de CRYING FREEMAN de Christophe Gans, lui même venant après la version pirate hong-kongaise DRAGON FROM RUSSIA. Décidément l’histoire se répète de manière bizarre.
Car oui, pour ceux qui en ont marre et qui veulent sauter des lignes, NICKY LARSON ET LE PARFUM DE CUPIDON est réussi. Oh putain oui!
Il ne suffit pas de dire qu’ils aient tout mis, parce que ça veut tout et rien dire et qu’il ne faut pas à ce jour encore déflorer le suspens, mais voilà le fan du manga trouvera absolument tous les ingrédients du manga, redistribués au compte-goutte mais de façon continue tout au long de cette heure et demi de pur délire d’action comédie. Une recette qui donnerait des leçons au Marvel Cinématic Universe. S’il faut, il est vrai un temps d’adaptation pour voir Nicky en Lacheau, son faux jeu s’accorde très rapidement à cet humour tout en rupture de ton permanente cher à l’animation japonaise, mais quasiment impossible à restituer avec des acteurs. Le point fort, c’est que vous pouvez presque re-story-boarder le film en entier avec des pages du manga. C’est là que l’on pourra voir la minutie qui était déjà à l’œuvre lors de l’écriture. Non content de nous redonner un collage de scènes iconiques et marquantes (parce que putain oui!), Fifi l’a fait au service d’une histoire originale capable de tenir debout par-elle même.
A partir de là, il ne suffisait comme un chef pâtissier, que d’apposer un élément de décor de ci de là ou d’incorporer un ingrédient supplémentaire pour relever ou mettre en valeur une autre saveur. Là encore le réalisateur s’éclate à caser des références invisibles au Club Do. Invisibles en ce sens que si on ne les captent pas, cela ne nuit pas à l’histoire, ni à l’humour. C’est juste une collection de clin d’œils malins et complices. L’histoire est une mission relativement classique pour notre nettoyeur préféré . Il est engagé pour veiller sur un parfum dont le pouvoir serait de rendre fou amoureux ceux qui vous respirent. Comme on pourra le deviner, personne ne respirera la personne qu’il faut et le spectacle se retrouvera plongé en plein vaudeville empli de quiproquo.
La bande à Fifi n’oublient pas le grand public et offrent alors un spectacle tenant tout autant d’un Pierre Richard que d’un film des frères Farrelli, rythmé à un train d’enfer et enluminé par dessus le marché par certaines musiques jazzy-kitsch du dessin animé, parce que là où il y a de la gêne, il n’y a pas de plaisir on vous dit.
J’ai souligné à quel point dès l’écriture, le travail fut très recherché pour savoir doser et recaser les séquences iconiques. Quand fut attaquée la phase de préproduction, cela sauta directement au stade de la maniaquerie. On baigne à présent dans une industrie qui prend un soin incommensurable sur la conception des décors, des costumes ou des contextes. On ne comparera pas LE PARFUM DE CUPIDON au SEIGNEUR DES ANNEAUX ou même BLACK PANTHER, mais dans son propre registre, le truc atteint des sommets. Que ce soit l’appartement, l’immeuble, les musiques, les voitures, les maquillages, on assiste à une sorte de miracle permanent consistant à rendre réel le dessin, rendre réel le rêve avec une méticulosité de maquettiste tout en étant non pas ostensible, mais au service d’une ambiance, d’une histoire, d’une allégeance à un auteur.
Qui aurait pu imaginer un jour en regardant CLEM que son actrice allait brandir le maillet de Laura dans un film sans se ridiculiser?
Au rang également des petits plaisirs, le fait d’avoir déniché un Mammouth «fac-similé» de l’original. Non vraiment Lacheau nous gâte tout en se faisant plaisir d’une manière si flagrante qu’il est difficile de ne pas rentrer dans le délire par contagion.
Des défauts?
Oui, il y en a ou plutôt des regrets.
Les comédiens ne jouent pas forcément super bien. Loin de moi de distribuer oscars ou razzies, mais parfois les voix manquent de naturel.
Le seul manque que je pourrais pointer en tant qu’intégriste de la série, c’est n’avoir bien sur restituer la dimension de «la cliente» au sein du film.
Il est à remarquer dans le manga que le drama de chaque histoire et le destin de chaque cliente, va dans le sens de refuser un destin tracé ou de celui de l’émancipation. Escamoter cet aspect, c’est peut-être donner le bâton à tous ceux qui sont persuadés que le manga est beauf, sexiste voir même comme je l’ai vu récemment, une pièce à conviction dans le dossier que l’on nomme la «culture du viol»
Heureusement, l’équipe ne va pas trop loin et le tout reste bon enfant et moins «gras» qu’il n’y paraît sans se censurer.
Le scénario s’attardera même sur la relation très particulière entre Laura et Nicky. Outre l’amour inavoué, ils ont surtout une complicité forgée dans un passé très noir empli d’une douleur commune qu’ils portent tous deux. Et sans spoiler le film, penser à poser la bobine quelques secondes, le temps que Laura évacue sa douleur le visage contre la vitre de la voiture dans un silence que respecte son compagnon, est l’une des plus belle marque de compréhension du matériel original que j’ai pu voir récemment.
En conclusion NICKY LARSON ET LE PARFUM DE CUPIDON ne révolutionnera pas votre vie de cinéphile. Ce n’est pas le meilleur film de l’année, probablement pas non plus la meilleure comédie, mais en terme d’adaptation, le film se place directement au dessus de la plupart des films Marvel, mû par la volonté de bien faire, bien doser et une notion de respect qu’il faudrait parfois arrêter de négliger dans l’idée de vendre des peluches.
Un jeu équilibriste où le réalisateur ne s’est jamais ramassé.
Vous voyez, le truc qui se passait quand l’ombre du phénix apparaît dans le lac à la fin de X2, ou cette séquence où à contre sens de la foule en fuite, Peter enlève sa chemise pour dévoiler le symbole araignée? Ben ici, c’est ça pendant 90 minutes.
Si le film fonctionne au box-office, il est possible qu’une suite voit le jour. Philippe Lacheau lâche une info sur une histoire introduisant Cat’s Eye…
Putain! Tu m’as teasé mec. Imaginez que le bougre ose raconter la fin de ce manga au nez et à la barbe des adaptations animées calamiteuses.
Respect pour le manga original.
Respect pour le Club Dorothée, première interface qui a sans doute contribué à ce que la France soit le deuxième pays consommateur de manga au monde.
Respect pour son public.
Respect.
——
Avions nous raison de nous méfier de cette adaptation frenchie de Niky Larson ? Et pourquoi aurions nous tort de nous en priver, Eddy Vanleffe martèle ses arguments chez Bruce Lit.
En BO, on va oser un petit AMV sur Footsteps in the night, l’un des thèmes emblématiques de la série… et du film.
@JP : Eddy est parti en vacances, il ne te répondra pas dans l’immédiat
Un peu pareil que JP. Non c’est pas genial, c’est quand meme du fan service souvent artificiel, beaucoup plus en hommage au club Do que City hunter. On a quand meme un peu du mal a croire aux scenes plus serieuses, on sent bien la bande a Fifi plus a l’aise avec la comedie. le reste semble forcé comme…ben…un fan film. En gros l’intention est la, c’est rigolo mais surtout en tant que comedie de Lachaud qui met ses potes enscene et fait des ref aux annees 90 avec aussi la presence de Pamela (ou ce qui en reste)
On peut dire que c’est une adaptation correcte du dessin animé en VF mais le cote serieux est un peu mal foutu et forcé. Et je comprends mal que Eddy qui dit aimer largement plus le manga et sa profondeur soit comblé par une sorte de piece de theatre ou des fans jouent le dessin animé. Je dis ca dans le sens ou ca semble forcé avec des acteurs pas adaptés, sauf pour Elodie Fontan que j’aurais gardé si j’etais directeur de casting. Mais les autres…non.
Apres ca reste sympa et fait avec les meilleures intentions j’en suis sur, mais ca me donne cette impression que tout le monde ne peut pas jouer ce qu’il veut.
Imaginez Bruce qui voudrait jouer Cyclope^^