N’ARRETEZ PAS LA CAMERA ! (One cut of the dead)

One cut of the Dead par Shin’ichirō Ueda

Par : 6 PATRICK FAIVRE.

Première publication le 22/10/18-MAJ le 02/03/23

Une affiche « fait main » pour un film qui l’est tout autant ! © Asmik Ace.  Source : https://www.imdb.com/title/tt7914416/

Une affiche « fait main » pour un film qui l’est tout autant ! © Asmik Ace.
Source : Imdb 

La scène : nous sommes à Tokyo et j’entends depuis de long mois des critiques absolument dithyrambiques sur le film Japonais : カメラを止めるな !, Kamera o tomeru na ! (traduisez « N’arrêtez pas la caméra ! »). A l’international le film a été intitulé ONE CUT OF THE DEAD, sans doute pour faire écho aux films de Romero ou à SHAUN OF THE DEAD.

Ayant un penchant pour ce genre de film j’ai donc décidé de faire fi de mon lamentable niveau de Japonais et d’assister à une séance du film au multiplex du coin ! Ce long métrage étant sorti fin juin 2018 je m’attendais, 4 mois plus tard, à ne le trouver que dans une petite salle miteuse et à moitié déserte. Quelle ne fut pas ma surprise de constater qu’il était encore projeté sur un très grand écran et devant une salle pleine à craquer ! Voilà ce que l’on appelle un franc succès ou je ne m’y connais pas.

Mais remettons les choses dans l’ordre et voyons d’abord la genèse de ce futur film culte :
Ce long métrage a été écrit et réalisé par Shin’ichirō Ueda. Lui et son équipe sont des étudiants de l’école d’art dramatique Enbu Seminar de Tokyo. Leur budget était dérisoire puisqu’il s’élevait à 27.000 $ ! (Un budget quasi équivalent à celui du BLAIRWITCH PROJECT). De plus le film a été tourné en un temps record de 8 jours !

Le réalisateur a bien révisé les leçons de ses aînés horrifiques et il sait qu’avec de telles contraintes de temps et de budget il n’a que deux pistes possibles :
1-Celle de BLAIRWITCH qui consiste à ne rien montrer (et pour cause il n’y a rien à voir) en jouant sur la suggestion.
2-Celle qui consiste à utiliser le manque de budget du film pour en faire le moteur même de l’action. En clair : faire une comédie !
C’est cette dernière voie qui sera finalement retenue, l’humour, l’imagination et un scénario totalement délirant compenseront la pauvreté des moyens.

Le film sort dans un premier temps en novembre 2017 dans une seule salle d’art et essai à Tokyo et uniquement pour une semaine ! Plus confidentiel tu meurs !
Heureusement un bouche à oreille très efficace attire l’attention de l’entreprise Asmik Ace Entertainment qui achète les droits de distribution et se charge de diffuser le film à grande échelle quelques mois plus tard…
Résultat : aux dernières nouvelles le film aurait engrangé autour de 15 millions de $ au Japon ! Pas mal pour une production totalement fauchée dont personne ne voulait initialement !


Un film vraiment pas comme les autres !

Raconter ce film n’est pas une mince affaire si on veut éviter d’en spoiler l’intégralité !
Quoi qu’il en soit l’histoire commence ainsi : Une équipe de tournage s’est fixée comme mission de tourner un film de Zombie en un seul plan-séquence ! Comme si l’objectif n’était pas assez difficile le film sera diffusé en direct sur une chaine du câble : le Zombie Channel ! Pression maximale pour l’équipe de tournage qui n’a pas le droit à l’erreur !

Pour arranger le tout les relations entre les deux acteurs (service minimum question casting) et le réalisateur sont extrêmement tendues. Il faut dire que les comédiens sont loin d’être convaincants. Ils n’hésitent pas à en faire des tonnes et jouent comme des savates au grand désespoir du réalisateur. Même lui a du mal à assumer son mantra : « Travaillons pour pas cher, rapidement, et moyennement » !

L’action se déroulera dans un entrepôt désaffecté de la seconde guerre mondiale. Le choix de ce lieu se révélera une « drôle » d’idée puisqu’il a servi naguère à des expériences visant à ramener les morts à la vie ! Et de fait le tournage va être bientôt interrompu par l’intervention de vrais Zombies ! Ceux-ci se mettent aussitôt en tête de bouloter l’équipe du film…

Bon raconté comme ça le film évoquera immanquablement aux inconditionnels de Romero son DIARY OF THE DEAD, puisque, là aussi, il était question du tournage d’un film de zombies interrompu par une réelle attaque de morts vivants !
A la nuance près que le réalisateur Américains avait opté pour un Foundfootage traditionnel. Le film Japonais quant à lui, s’il adopte tous les codes du film tourné caméra sur l’épaule, ne se donne cependant pas la peine d’expliquer la présence de cette caméra subjective que les acteurs semblent ne pas voir !
De plus n’est pas Romero qui veut et l’on sent bien que le film tourne rapidement vers le n’importe quoi, entre réalisation douteuse et interprétation calamiteuse (l’actrice principale passera la moitié du film à hurler en courant dans tous les sens – de préférence dans des endroits sans issue).
On rigole devant ce nanar tourné à l’arrache, mais on n’est cependant pas certain que la nullité du projet soit volontaire ! Mention spéciale pour le moment où une main vient nettoyer le sang qui coule sur l’objectif de la caméra en plein milieu d’une scène d’action !

 Oh oui baby fait l’amour à la caméra ! © Asmik Ace.  Source : Variety https://variety.com/2018/film/asia/japan-zombie-comedy-one-cut-of-the-dead-crowds-and-controversy-1202915106/

Oh oui baby, fais l’amour à la caméra ! © Asmik Ace.
Source : Variety

Et puis soudain… la 37éme minute de film arrive ! Après une apocalypse d’hémoglobine bon marché et de tripailles en plastique le générique de fin défile, l’écran devient noir et l’on pense le film terminé ! Les spectateurs se regardent médusés et décontenancés se demandant s’ils doivent exiger le remboursement ou mettre le feu au cinéma ! Et puis Paf ! Le film redémarre ! Cette fois ci finie l’image bavante de la vidéo, puisqu’elle laisse place à un « vrai » film (traduisez : ciao les images dégueulasses et le mal de mer à la clé). Le réalisateur sait filmer et il va le prouver !

Cette deuxième partie va lever le voile sur la genèse de ce projet. Une sorte de Making of intégré au film en lui-même et donnant la part belle aux relations interpersonnelles des différents protagonistes (ah les rapports humains revus et corrigés à la sauce Japonaises…tout un poème). Alors que l’on commence à s’habituer au ton surréaliste et déjanté de cette partie, voici que le film redémarre à nouveau ! Offrant encore un nouveau regard sur le déroulement de l’action !

Cette troisième partie va tout simplement démonter le faux navet que venons de voir en nous expliquant que nous avons été dupés et que les choses ne sont pas ce qu’elles paraissent ! Le cinéma est le royaume de l’illusion rappelons-le…
(Il y aura t-il un 4ème redémarrage ? Pour le savoir, il faudra voir le film !).

 Bon alors on est dans quelle partie du film déjà ?  © Asmik Ace.  Source : I09 https://io9.gizmodo.com/japanese-zombie-comedy-one-cut-of-the-dead-is-shaun-of-1829240605

Bon alors on est dans quelle partie du film déjà ?
© Asmik Ace.
Source : I09 

C’est bien là le génie de ce film sans budget : prendre le contrepied de ce qu’on attend de lui. Si la première partie du film joue à fond la carte du Foundfootage cheap raté (entre réalisation inexistante et acteurs approximatifs) la suite va nous montrer l’envers du décor et expliquer la raison des aberrations que nous avons vues précédemment.

Les gags surréalistes et délirants se mettent à tomber comme à Gravelotte et l’on sent l’hystérie collective monter peu à peu (aussi bien à l’écran que dans la salle).
Impossible de ne pas rire devant le grotesque de l’action et le comique de situation !

Au final ce film est un petit bijou minimaliste ou l’on passe de surprise en surprise sans pouvoir deviner sur quel terrain (glissant et sanguinolent) le réalisateur veut vraiment nous amener !
Imagination débridée, créativité et sens de l’humour déjanté, ce film est la meilleure comédie horrifique depuis SHAUN OF THE DEAD !

Après tout ça vous allez me dire : bon ben OK mais il sort quand ton film en France ? Très bonne question ! Je n’en ai aucune idée, mais j’espère que cela se produira le plus tôt possible car il serait vraiment dommage que nous, misérables mangeurs de grenouilles, passions à côté de l’un des films les plus drôles de ces dix dernières années !

 La joyeuse équipe du film !  © Asmik Ace.  Source : Wikipedia https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Fichier:Casts_%26_Film_director_from_%22ONE_CUT_OF_THE_DEAD%22_at_CINECITTA%27_Kawasaki_(2018-07-14).jpg

La joyeuse équipe du film !
© Asmik Ace.
Source : Wikipedia

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Toi aussi, tu veux briller lors de tes soirées geeks ?
Alors clique sur l’article de Patrick Faivre ci dessous. Tu y apprendras l’existence de One Shot of the Dead, un petit film japonais tourné avec 27 000$, qui trionmpe au box-office nippon depuis des mois et qui serait le meilleur film de zombie depuis Shaun of the dead.  A découvrir chez Bruce Lit.


La BO du jour :

18 comments

  • matt & Maticien  

    Joie (non division) que d’apprendre que Shaun of the dead peut être égalé. tu illumines ce début de semaine. Évidemment nous allons tous te demander où et quand voir ce film? sinon, tu nous invites pour une projection à Noël ?

    j’ai compris ce que recelait la seconde partie du film mais j’ai du mal à me oe représenter.

  • JP Nguyen  

    Alors, alors…
    film de zombie ? Non, pas pour moi.
    comédie ? Allez, pourquoi pas ?
    aussi bon que Shaun of the dead ? J’avais pas aimé.
    Avec des twists et un mélange nanar-mise en abyme ?
    Hmmm…

    Patrick, tu as des pouvoirs ! Tu m’as donné envie de voir un film de zombies !!!
    Chapichapo, Patrick-San !
    Oui, je dois travailler mon japonais…

  • Présence  

    Wouah !!! Un import japonais maintenant. Le site ne connaît plus de limite, avec même le titre en hiragana et katakana.

    J’imagine bien le dilemme cornélien pour choisir une structure d’article qui ne dévoile pas tout, alors qu’il y a plusieurs changements de point de vue radicaux enchâssés les uns dans les autres.

    $27.000 : mais on n’a plus rien pour ce prix là !

  • Patrick 6  

    @ M & M : One shot of the Dead est limite plus drôle que Shaun of the Dead, mais côté formel comme tu l’as compris il n’entretient que de lointains rapports avec son aîné.
    Par contre BREAKING NEWS : je viens d’apprendre que le film est annoncé en France pour mars 2019 ! Youpi.

    @ JP : Avec mon gant de l’infinie il m’a été très facile de te donner envie de voir un film de zombies ! Je suis tout puissant après tout. Snap.

    @ Présence : Oui un titre en hiragana, katakana… ET en Kanji ! La vache les trois alphabets en une seule phrase, comment voulez-vous que je m’en sorte ? :))
    Et autrement oui en indiquant qu’il y avait plusieurs redémarrages je me suis demandé si je ne spoilais déjà pas la moitié du film ^^
    Mais bon vu qu’on le voit dans la bande annonce…
    Si si pour $27.000 on peut encore avoir quelque-chose : un film ^^

  • Tornado  

    Bon, on va dire que c’est mal barré :
    1) Le Found-footage, je supporte pas. Je déteste les trucs à la « Blair Witch » et « Cloverfield ».
    2) « l’actrice principale passera la moitié du film à hurler en courant dans tous les sens – de préférence dans des endroits sans issue » : Oh punaise, ça aussi je supporte pas. J’ai détesté le film « The Host » à cause de ça (les personnages hystériques qui hurlent tout le temps).
    3) La bande-annonce, elle fait pas envie… Ça a l’air d’être filmé avec les pieds et hyper prétentieux. Genre « nous on fait un film sans artifices on est des fous ».

    Et puis… il y a cet article là, qui arrive à te donner envie de voir le film quand même !
    Patrick semble effectivement posséder un pouvoir secret parce que je veux voir le film maintenant. Comment il a fait ? Bon, je vais aller relire l’article…

  • Jyrille  

    Tu donnes bien envie Patou ! Merci en tout cas de nous tenir au courant avant le monde entier d’un tel engouement, j’ai l’impression d’être très privilégié pour le coup.

    Tomber comme à Gravelotte : on n’a pas déjà parlé de cette expression ? En tout cas je connais bien, j’habite à quelques kilomètres de ladite Gravelotte…

    La BO : sympa mais j’ai jamais été fan des Sisters.

    • Présence  

      Ben ça alors ! Non seulement je n’aurais pas imaginé que quelqu’un emploie l’expression tomber comme à Gravelotte dans un article, mais en plus je ne savais même pas qu’il s’agit d’une ville. Quel apport inattendu à ma culture.

      • Jyrille  

        On y trouve un musée dédié à la guerre de 1870 qui a été entièrement refait et déplacé il y a quelques années. Je devrai y retourner pour voir…

        • Patrick 6  

          Ok le nouveau grand jeu : sortir une expression désuète et surannée par article ! Comme par exemple : « A cheval donné on ne regarde pas les dents », « Crier haro sur le baudet » ou « Avoir une trichine dans le jambonneau » ^^ Qui s’y colle ?

          • Présence  

            Avoir une trichine dans le jambonneau – Je ne la connaissais pas, jamais entendue, jamais lue.

            Je relance avec : Comme un emplâtre sur une jambe de bois.

  • Patrick 6  

    @Tornado : C’est la surprise de ce film : tout pour être la pire des bouses (tous les voyants du nanard sont au rouge vif) et pourtant non c’est exactement le contraire !
    Ils sont fort ces Nippons.

    @Jyrille : et donc ça tombe sévère à Gravelotte
    (Mis à part les morts de 1870) ?
    Par contre en effet il me semble que nous avons déjà évoqué les Sisters… Il est temps pour toi de changer d’avis ^^

  • Patrick 6  

    L’éternel problème des Found footages c’est que (la plupart du temps) on sait comment le film va finir avant même le début de la séance ! Forcément le suspens en prend un coup ^^
    Dans le cas du présent film c’est exactement le contraire : on a aucune idée de la conclusion du film.

  • Matt  

    Ha ha ha !
    Bien chouette ce film.
    Et pourtant comme dit Tornado, c’est « filmé avec les pieds et hyper prétentieux. Genre « nous on fait un film sans artifices on est des fous ». »
    Et il a parfaitement raison^^ Avant que le film redémarre et nous parle justement du film dans le film.

    Il faut tenir le coup les 30 premières minutes qui sont en effet un vrai navet/nanar de found footage mal foutu…volontairement. Et puis on voit le vrai film en fait, les coulisses.
    Je ne m’attendais pas à ça. C’est malin.

    C’est surtout un film qui parle de cinéma en fait, et de la passion d’en faire. ça m’a rappelé les galères quand on faisait des courts métrages amateurs avec un pote^^ Et évidemment tout l’aspect comédie repose sur cette idée en apparence prétentieuse de filmer un truc en un seul plan séquence avec 3 sous en diffusion directe, vu que ça oblige chacun à improviser malgré les embrouilles pas possibles et les acteurs à la ramasse (l’alcoolique, le mec avec son problème de transit…)
    Un film qui donne le sourire à la fin.

  • Matt  

    Tiens d’ailleurs je n’ai pas analysé en détail pour me rendre compte si le plan séquence du début est réellement le résultat de ce qu’ils ont filmé dans la dernière partie du film.

    Parce que si c’est le cas, ils ont vraiment du se faire chier à faire n’importe quoi exprès (le caméraman qui se case la gueule, tout ça) tout en s’arrangeant pour ne pas en montrer suffisamment pour que les 30 premières minutes puissent malgré tout passer pour un court métrage.
    L’art de se faire chier pour un résultat volontairement naze^^ Faut le faire.

  • Patrick 6  

    Alors si je n’abuse la première partie n’est en réalité pas un vrai plan continu mais a été filmé en 6 fois !
    Pour la seconde non elle n’est pas raccord avec la 1ère partie car tout simplement ils n’avaient pas assez de caméra pour tout filmer simultanément ^^ et donc en faisant attention on voit que certaines scènes durent plus (ou moins) longtemps d’une version à l’autre.

    Mais autrement pour l’essentiel nous sommes d’accord : la seconde partie est nettement plus drôle que la première 😉

  • Jyrille  

    Je viens de voir le remake français par Michel Hazanavicius et ma foi c’est pas mal du tout, très réjouissant (même si j’ai peu ri). Un film sur le cinéma, très bien mené, dont il faut au minimum saluer la performance technique (autant, pour moi, que les Baby Sitting de la bande à Fifi).

    • Bruce lit  

      J’ai trouvé ça très chiant au bout d’une demi heure. Oui pour la performance technique. Pour le reste c’est ennuyeux et répétitif.

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