Thorgal : Le feu écarlate, par Dorison & Rosinski
CYRILLE M
VF : Le Lombard
Le feu écarlate est le trente-cinquième tome de la série Thorgal, créée par Grzegorz Rosinski et Jean Van Hamme. Le scénario est de Xavier Dorison, et les dessins et couleurs sont de Rosinski.
Prenez gardes, lecteurs, vous pourriez être brûlés par quelques flammes révélatrices lors de l’article qui suit.
Previously on Thorgal (résumé des épisodes précédents) : lors du dernier épisode scénarisé par Van Hamme (le 29), Thorgal devait la vie à Manthor, une sorte de Docteur Fatalis habillé de rouge. Ce dernier demande à Jolan de le servir pendant un an pour payer cette dette, tandis que Thorgal doit calmer Aaricia et apprendre à aimer un nouveau fils, Aniel, qu’il a eu avec Kriss de Valnor pendant qu’il avait perdu la mémoire. Jeune enfant muet de cinq ans, Aniel est enlevé par d’étranges étrangers, les magiciens rouges. Ces derniers sont persuadés qu’il est la réincarnation de Kahaniel, le père de Manthor.
Tout ceci se déroule lors des épisodes 30 à 34, où Yves Sente tenter de recentrer la série sur Jolan mais n’y parvient finalement pas, le héros originel étant trop emblématique pour être mis de côté.
Entre le père Van Hamme, puis celui de substitution Sente, Thorgal et ses enfants sont donc abandonnés tant dans la réalité que dans leurs aventures : tout ceci est bien une saga familiale aux destins chaotiques et aux relations compliquées. Ce qui est souvent l’apanage des longues séries populaires, comme Dallas, les pièces de Shakespeare (jamais lues), Star Wars ou plus récemment Game of Thrones.
Sente n’arrivant pas à relancer la machine mais simplement à dérouler des aventures qui suivent une nouvelle mythologie, celle de l’Entremonde de Manthor, Dorison est appelé à la rescousse. Xavier Dorison est un scénariste expérimenté, auteur notamment d’une série très agréable à suivre, W.E.S.T., un western mêlant science et mysticisme, un peu à la manière de la série télé Wild Wild West. Mais il a également approché les mondes de Van Hamme via le premier épisode de XIII mystery, un spin-off de XIII.
En plus de la série principale, Yves Sente scénarise également le spin-off Kriss de Valnor. Mais l’éditeur décide de changer l’équipe complète et demande donc à Dorison de reprendre la série : il écrira le tome 6, L’île des enfants perdus, en 2015. Et logiquement, il reprend Thorgal en 2016.
Ce nouvel album, le sixième depuis que l’un des pères fondateurs est parti, ne conclut toujours pas la nouvelle quête commencée au tome trente, celle où Manthor et sa magie rouge guident le destin de nos héros. Van Hamme avait offert ce personnage à ses remplaçants, mais pour le moment, aucun ne parvient à conclure facilement une saga qui manque cruellement de panache.
Le constat est simple : reprendre une série aussi emblématique et vendeuse ne peut qu’être malaisé. Comme tous les créateurs ayant pris leur essor dans les années 60 et 70, réussir à écrire comme Van Hamme, tout comme écrire comme Goscinny ou Charlier, est impossible. Même dans ses pires albums, la concision et la compression d’une histoire de Thorgal ne sont jamais maladroites, chaque aventure ne dure que quarante-huit planches, sans rien oublier, sans omettre de détails. Mais pas sans erreurs : les tomes 22 à 26 de Thorgal multiplient les incohérences difficilement rattrapées, se montrent paresseux et routiniers. Seul le tome La cage propose une écriture fine et réfléchie : il faut que Thorgal revienne près des siens après plusieurs années passées à vivre auprès de Kriss de Valnor, imaginez le malaise.
Dans l’épisode précédent, Kah-Aniel, Thorgal arrivait enfin à Bag Dadh, où une tyrannie douce règne, où la révolte gronde, où les fanatiques de la magie rouge aimeraient prendre le pouvoir. Au-delà du parallèle avec le printemps arabe de 2011, il devient évident que Sente essaie de moderniser la série : les mots doux et niais que s’échangeaient Thorgal et Aaricia sont remplacés par la première trahison consentie du beau ténébreux envers sa femme, tombant sous le charme d’une magnifique bagdadhienne. Pour ajouter un peu de suspense, tout l’épisode se concentre sur la ville de Bag Dadh, et aucun autre protagoniste de la série n’apparaît, un procédé souvent utilisé dans Walking Dead par exemple.
Tous ses changements n’émancipent pas la série pour autant. Elle semble au contraire se perdre, transformant un héros indéfectible et on ne peut plus rigoriste en simple aventurier soudainement plus impitoyable.
Les horreurs ont toujours fait partie des histoires de Thorgal, les viols, les massacres, l’âpreté des hommes et leurs besoins servant souvent de ressort pour que le héros puisse les surpasser, comme dans l’épisode Louve ou dans Les archers. Mais désormais, Thorgal semble répondre au mal par le mal, trahissant sa droiture : tout comme les comics passèrent au grim’n’gritty, Thorgal tente de devenir une série pour adultes plus que pour adultes et adolescents : l’émerveillement disparaît au détriment d’un réalisme plus déprimant.
C’est ainsi que le nouvel épisode affiche un Thorgal clairement combattif, attifé d’armes et prêt à en découdre avec la terre entière pour ramener son fils qu’il ne connaît qu’à peine. Dorison tente de faire partir la série dans une nouvelle direction en concluant partiellement la quête de la recherche de Aniel et surtout, de ne pas fournir de nouvelles pistes pour d’éventuelles intrigues secondaires. Ainsi, Le feu écarlate est auto-conclusif et centré sur toute l’énergie qu’il faut à Thorgal pour sauver son fils d’une secte. Mais tout n’est pas fini, loin de là.
Je ne sais si l’actualité a inspiré Sente, car à la fin de Kah-Aniel, Aniel est devenu un messie pour une secte assoiffée de pouvoir, a retrouvé miraculeusement la parole, a grandi de cinq ans en une journée, et ne voit plus que la mission qui lui est allouée. Tout comme les autres enfants de Thorgal, il a des pouvoirs paranormaux. Le sien est de transformer l’eau en feu, ce qui s’avère donc une arme parfaite pour renverser le pouvoir en place.
La première planche du Feu écarlate est splendide : Thorgal est enfermé dans une cage de fer sphérique, hérissée de pointes vers l’intérieur, et plongée dans l’eau. Une torture insoutenable, mais magnifiquement dessinée et écrite, happant immédiatement le lecteur.
Mais la suite ne se montre pas à la hauteur. Trop facilement, l’histoire devient rapidement une course contre la montre pour sauver Aniel de lui-même avant qu’il ne détruise la ville complètement, ne maîtrisant évidemment pas ses pouvoirs naissants.
Depuis Le Sacrifice, Rosinski est totalement passé à la couleur directe. Il s’occupe des couvertures des spin-offs, et sa colorisation prend de plus en plus le pas sur le dessin. Déjà, l’épisode précédent montrait des signes de dispersion, une netteté perdue, l’élégance remplacée par une représentation trop chargée pour quelques cases dans une planche. Dans ce nouveau tome, le feu, le sang et la désolation de Bag Dadh écrasent tout, rendant cette histoire aussi claustrophobique que le Black Hawk Down de Ridley Scott. Le Feu écarlate est un cauchemar rouge du début à la fin, appuyé par un dessin surchargé d’ombres gloutonnes qui annihilent quasiment les décors.
Cerné par le dessin et les bibles de la série (graphisme et cohérence du monde de Thorgal), Dorison doit revenir aux fondamentaux, non pas créer de nouveaux personnages ou de nouvelles histoires de dieux jaloux, mais bien élaguer et finir une quête bien trop longue, qui aurait pris deux tomes dans les mains Van Hamme. Il dépasse de quelques planches (cinquante et une au lieu de quarante-six ou quarante-huit), ne parvient pas à transcender les scènes émouvantes par ses dialogues, et utilise des artifices qui feront soupirer tous les habitués de Marvel : Kriss de Valnor n’est pas morte mais est devenue reine, les croisés attaquent la ville à l’aide de vaisseaux volants venant de l’autre côté de la « grande eau ». Comme souvent, on rappelle les meilleurs moments de la série. C’est presque du fan-service. Et surtout, ce n’est pas nouveau : Van Hamme lui-même a commencé à user de la mythologie de Thorgal en s’auto-citant dès le tome 17, La Gardienne des clés.
Pour autant, les auteurs ne déméritent pas tant le savoir-faire est réel et présent. La modernisation de la série prend une bonne voie malgré un déséquilibre encore flagrant, et il faut espérer que les prochaines destinations de ses personnages deviennent plus lumineuses.
La vraie question qui me taraude n’a cependant rien à voir avec une nouvelle équipe créative ou un tournant difficile à prendre. Les icônes franco-belges de la bd sont actuellement traitées de diverses façons pour différentes qualités : la collection Spirou vu par est une suite de one-shots dessinés et scénarisés par des auteurs différents, chacun donnant sa vision des personnages, concept identiquement réservé à Lucky Luke par Mathieu Bonhomme puis Guillaume Bouzard, tandis que de nouvelles équipes reprennent Blake et Mortimer, pour deux séries différentes, une parodique et une classique. Dans le monde de Van Hamme, on multiplie les spin-offs.
Mais qu’en est-il de Thorgal ? A-t-elle une raison d’exister encore comme une série régulière alors qu’elle n’a pas fourni de vraie bonne histoire depuis une vingtaine d’années ? Doit-on transformer ses personnages jusqu’à la trahison pour que la bête puisse encore vivre et faire vivre ?
N’étant pas assez impliqué dans ce personnage, j’ai donc demandé à trois amoureux de la série de nous en parler afin de conclure cet article. Merci à eux.
Mlle R., de Lombry : Thorgal, c’est le plus beau, je le kiffe, je l’aime, c’est mon homme idéal. L’âge n’a pas de prise sur lui, il est même carrément dans la mode avec sa barbe fournie depuis quelques épisodes ! Et puis il nous fait voyager, dans l’espace et le temps. Là, ça y est, il est arrivé aux Romains, qui, après les vikings, sont d’autres beaux spécimens de pervers dans l’histoire de l’humanité ! Etant moi-même prof d’histoire, j’adore. D’ailleurs j’en parle parfois à mes élèves. Ceux qui se moquent ? Je demande à leurs camarades de les appeler Jolan ou Aaricia pour une semaine, c’est radical !
M. F., de Févry-Haies-Les-Haches : De tous les personnages de Van Hamme, Thorgal est mon préféré. Vous avez remarqué comme ils sont tous sur le même moule ? XIII, Largo Winch, Thorgal, tous des gars costauds mais pas trop, blancs, carrés, beaux gosses, mystérieux… Bref, des personnages typiques des années 70, hérités de James Bond. C’est évident pour Largo et XIII. Mais Thorgal, lui, c’est un paria, personne ne vient l’aider à part les dieux eux-mêmes ! C’est un élu, une force supérieure. Et puis bon, franchement, qui dessine mieux que Rosinski, à l’heure actuelle ? Et je parle des auteurs vivants hein ? Personne ! Absolument personne.
M. H., de Pas-Les-Pots : J’ai arrêté la bd. Totalement. C’est un truc pour les gamins, et bon, ça va, j’ai largement passé l’âge. D’ailleurs même mes gamins ont passé l’âge, et ça ne les a jamais intéressés ! Il faut vivre avec son époque, regarder les séries HBO et Showtime, arrêter de nous faire croire que les héros existent et partagent de hautes valeurs morales, plus personne n’y croit. Mais bon, je dois avouer que je continue Thorgal. Ne le dites à personne. C’est la honte, mais c’est plus fort que moi. Cette bd, c’est plus que des dessins et une histoire, c’est une drogue, une drogue dure.
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La BO du jour
Plutôt que choisir la facilité avec la vieille chanson potache de Charlie et Lulu, la BO du jour prend le temps de nous faire écouter un autre vieux groupe qui sort a lui aussi sorti un album en 2016 autour du thème du feu : Fires Within Fires de Neurosis.
Elle semble au contraire se perdre, transformant un héros indéfectible et on ne peut plus rigoriste en simple aventurier soudainement plus impitoyable. Et voilà : on revient au coeur du problème d’hier ! Thorgal qui saute les nanas sous sa tente pour passer le temps, ça fait sans doute Grant Morrison mais est-ce du progrès 😉
Thorgal tente de devenir une série pour adultes plus que pour adultes et adolescents : l’émerveillement disparaît au détriment d’un réalisme plus déprimant. et perd ainsi totalement de son charme pour les mêmes raisons que chez Marvel : cette volonté sous prétexte de réalisme de salir nos héros m’est insupportable. Progresser c’est…BAISER ??? Gasp…..
Doit-on transformer ses personnages jusqu’à la trahison pour que la bête puisse encore vivre et faire vivre ?
Voilà pourquoi j’ai revendu tous mes spinoff et conclut MON Thorgal avec Le Sacrifice. Malgré les dessins superbes de Rosinski. Ca me rappelle un peu le Asterix de Uderzo en solo tout ça….Je me rande donc derrière cette charmante Mlle Pas les pots !
En ce qui concerne ta seconde remarque, je ne pensais pas à la trahison de Thorgal, mais plus à l’ambiance sombre de ce dernier tome, plein de tortures et de sang.
La première planche du Feu écarlate est splendide. – Les autres aussi visiblement, il y a là un exemple graphique de ce que je peux rechercher dans une BD. Avalant des kilomètres de comics industriels, je recherche des artistes avec une plus forte identité graphique dans la BD franco-belge. C’est un attendu implicite également du fait de la différence de rythme de parution comme l’évoquait Artemus Dada. 1 an pour une cinquantaine de planches doit permettre un résultat plus consistant que 1 mois pour 20 pages.
Doit-on transformer ses personnages jusqu’à la trahison pour que la bête puisse encore vivre et faire vivre ? – N’ayant pas d’attache affective pour le personnage, j’aurais pour le coup un avis très pragmatique. Si ça peut permettre de faire vivre Grzegorz Rosinski, ça ne me choque pas trop. Évidemment j’aurais préféré qu’il continue à réaliser d’autres projets plus personnels, tels que La vengeance du comte Skarbek, également avec Yves Sente. Il y a un autre paramètre contre lequel on ne peut pas lutter : les chiffres de vente. Si ça continue de vendre, il n’y a pas de raison d’arrêter. Pour te rassurer avec un autre exemple, après la décès de Robert Goscinny, j’ai arrêté de lire Astérix et Lucky Luke, parce que la saveur de leurs albums était intrinsèquement à sa personnalité.
Amen : je suis d’accord avec tes remarques, Présence. Il est vrai que le dessin de Rosinski est splendide partout, mais la première planche a une composition bien au-dessus de la suite. Quant à mes interrogations pas trop poussées, tu as évidemment raison, puisqu’une armada de lecteurs se rue sur chaque nouveau tome.
Ah sinon, Goscinny s’appelait René 😉
Petite anecdote : les gens que je cite sont réels, je me suis totalement inspiré des propos qu’ils m’ont déjà tenus sur cette série, qu’ils adorent.
Bah écoute je ne sais pas si le dernier est sérieux ou si tu le connais, mais je ne m’entendrais surement pas avec lui. Ce genre de mépris général pour la BD et de jugement porté sur ceux qui aiment, je me serais passé de le lire.
C’est totalement du second degré…
Ah…
Ben par écrit ça transparait moyen. Comme souvent quand on ne connait pas la personne en question.
Confondre Robert et René, faut vraiment que je les prenne ces vacances !
En outre, « l’identité graphique » ne passe pas que par le dessin en tant que tel ; mais aussi par le cadrage des différentes cases, par la mise en récit séquentielle (storytelling), par le rythme, etc.
Sans oublier le placement des bulles, les onomatopées, et surtout la quantité de texte par case/pplanche.
J’ai par exemple lu dernièrement deux séries, écrites par la même scénariste (française), de « franco-belge » presque illisibles (j’insiste sur le presque) à cause de la quantité de texte dans chaque bulle de dialogue.
Plutôt que de favoriser un découpage (type gaufrier alternant avec des cases panoramiques par exemple) et de fragmenter ainsi les discussions de ses personnages (avec des cadrages différents), on a des cases panoramiques et des dialogues « interminables ».
Qui, si on les lit à haute voix (merci Flaubert) semblent encore plus interminables. [-_ô]
De ce point de vue, tu as raison Artemus, et je le dis même dans l’article : c’est du beau boulot de faiseur, c’est maîtrisé du point de vue narratif. Mais le fond n’est jamais très intéressant.
Moi je persiste à dire que l’attitude première de thorgal est proche de celle d’un religieux fanatique persuadé d’être détenteur d’une vérité, prétentieux. Un vrai tyran de la droiture au point que c’est un mec qui ne ressent aucune compassion envers ceux qui souffrent, sauf s’il s’agit de sa famille chérie. Ce n’est pas un héros bon, mais un donneur de leçons. Pour un vrai héros bon et compréhensif, faut aller voir du côté de Peter Parker.
Mais en effet, je ne pense pas que la solution soit de le changer en Conan qui baise tout ce qui bouge pour autant. Il aurait pu, comme je le disais hier, prendre conscience que sa doctrine de droiture quasi religieuse n’était pas appropriée et ainsi faire passer une critique de cette conception du héros sans peur et sans reproche d’un autre siècle qui lorgne vers la bêtise dogmatique.
Mais pour ma part, je me suis arrêté au cycle de Qa donc je ne peux juger moi-même de cette « évolution » du personnage.
Oui tu as raison quelque part puisque c’est ta perception du personnage.
avec ce nouveau regard, je dois dire que Thorgal a en effet un coté psycho-rigide mais super bien contrebalancé par le fait que ça lui revient souvent en pleine gueule.
les valeurs qu’il a communiqué à sa famille les met souvent au ban de pas mal de société, ils ont du mal à s’intégrer et le seul moment où ils sont heureux, c’est quand ils sont seuls sur leur île… du coup cette famille devient de plus en plus dysfonctionnelle et très éclatée également.
Ensuite, Thorgal même s’il est sévère, est quand même rempli d’empathie pour son prochain. il n’est pas indifférent à la souffrance et ça l’empêche d’être vraiment imbuvable…^^
Enfin, sur le point précis de la religion, il est assez tolérant façon Corto Maltese, il n’a pas vraiment d’opinion et tolère celle des autres intervenants…ça aussi l’empêche d’être carrément fanatique. juste très sévère et austère. 🙂
par contre c’est inintéressant de relever ce point dans la personnalité de Thorgal qui fut moulé en son temps sur le même modèle que Tintin, Alix et tous ces héros bien plus vecteur d’action que d’émotion.
Pour ma part je ne parlais pas de religion au sens propre. Mais de la dévotion de Thorgal à ses principes. Comme un végétarien qui te regarderait de travers parce que tu oses manger de la viande.
Après je n’ai pas lu assez de Thorgal pour voir si les auteurs ont réussi à faire passer cette obligation éditoriale d’époque en un trait de caractère intéressant (le fait que ça lui revienne dans la gueule, je ne l’ai pas trop constaté du coup) ou si on a toujours la sensation d’être sermonné par le personnage.
D’ailleurs c’est marrant comme mes lectures de ces derniers jours s’articulent autour de ce thème. (c’est pour ça que j’ouvre beaucoup ma gueule. Hein ? Comment ça trop ?)
J’ai lu la première partie du run de Starlin sur Adam Warlock et au milieu des affrontements cosmiques il y a une vraie réflexion sur le fait que selon son vécu, sa perception du monde et ses convictions, chacun s’imagine être un héros, même celui qu’on perçoit comme méchant au premier abord. Et au final si Adam Warlock devient le vrai héros c’est parce qu’il est le seul à s’interroger assez, à se remettre en question, à ne tirer aucun plaisir (juste du soulagement) d’une victoire quand elle implique la mort d’autres personnes. Alors que ses adversaires sont tous enfermés dans leurs principes dogmatiques, persuadés de détenir la vérité.
Dans mes bras Matt, j’avais été sensible au même discours de Warlock celui veut que chaque être humain se représente comme le héros de sa propre vie.
Évidemment si on ne fait que se poser des questions, on finit par ne plus rien faire (ce qu’Adam Wrlock manque de faire d’ailleurs). Donc évidemment que le héros doit faire quelque chose. Mais le simple fait qu’il s’interroge et soufre de la complexité du monde le rend plus vertueux que celui qui est fier d’imposer ses convictions aux autres.
C’est également le thème central de Watchmen. Chacun des superhéros impose son point de vue par la force. Au final, seuls Laurie Juspeczyk et Daniel Dreiberg apparaissent comme des héros parce qu’ils finissent pas abandonner la posture du superhéros et tenter l’aventure d’une vie au même niveau que celles du reste de l’humanité.
Et d’une certaine manière le Wonder Woman de Morrison fait le procès de la « société parfaite » des amazones qui se croient supérieures au reste du monde alors qu’elles deviennent presque nazies dès qu’un étranger échoue chez elles.
En fait c’est dans l’autre sens que ça marche. Diana est en procès pour avoir osé pénétrer dans le monde des hommes, mais par cette approche c’est finalement l’aveuglement des amazones qui est mis en lumière. C’était pas mal du tout. Et la mise en page très sympa. Yannick Paquette nous croque d’ailleurs une Wonder Woman massive et majestueuse, belle mais costaude, un design très réussi.
Apparemment Morrison voulait en faire une trilogie mais le récit fonctionne comme une intro, le premier contact de Diana avec les hommes. Elle y est d’ailleurs encore un peu naïve et prétentieuse, mais comme une enfant au final.
Merci beaucoup pour tes réflexions Matt, tu as raison : Thorgal est un bloc et il se fissure peu de fois. Mais plus loin dans la série, il a parfois de meilleures réactions, la plus belle étant la dernière case du Sacrifice. Et même parfois il fait preuve d’humour. Ici, c’est juste ce côté soldat ultime, badass, qui m’énerve, car je ne le vois pas du tout comme ça. Et comme le remarquaient hier Tornado et Bruce, ce sont tout de mêmes des défauts mineurs et explicables si on a un minimum de mansuétude.
Si je parle de la religion, c’est que c’est souvent un domaine d’interrogation sur lequel se greffe par excellence une sorte de conviction qui prend sa source dans notre côté rigoriste (moral, vertu etc…).
Thorgal échappe à cela et il a donc un coté assez ouvert…
LOUVE est un de mes tome préféré…la personnalité du héros implose. il ne peut plus appliquer sa morale, il doit juste défendre sa famille et « boudiou! »
On est loin de la scène de Kriss de Valnor agressée…
ce site est une mine d’or pour moi X-men, Claremont, Thorgal et rock n’roll… un paradis!
Je n’ai pas encore lu les deux derniers tomes de Thorgal, et j’ai rapidement arrêté d’acheter les spin-off (je n’en ai que trois). Je suis attristé de lire que la série s’étiole à ce point, même si je trouve que ça commence à prendre l’eau depuis trèèès longtemps, malgré quelques sursauts. Je suis d’accord (un peu avec tout le monde, notamment avec Matt) sur le fait que les auteurs ont raté le train en marche. Thorgal aurait pu évoluer d’une meilleure manière.
D’accord aussi avec Eddy : Thorgal se prend des revers de bâton à chaque fois qu’il déconne, à commencer par la mort de Tjall, par exemple.
Bien content de lire un peu de Cyrille ! 🙂
« Je suis attristé de lire que la série s’étiole à ce point, même si je trouve que ça commence à prendre l’eau depuis trèèès longtemps »
Et pourtant c’est même pas chez Soleil 😉 (je rigole, je rigole)
Merci beaucoup Tornado ! J’avais oublié cet article et finalement je le trouve pas trop mal et un peu marrant (j’espère que vous avez un peu souri). J’attends avec impatience ton avis sur ces deux derniers tomes !
Au fait, Présence, Bruce, pas un mot sur la BO ? Ca ne vous parle pas ?
Rien à voir, je viens de finir le premier tome de Injection de Warren Ellis : c’est super ! Tornado c’est pour toi !
Je ne connais absolument pas ce groupe. Musicalement c’est ok, j’ai un peu de mal avec la voix.
Ils existent depuis plus de vingt ans, tu peux piocher…
@Jyrille – Il s’agit d’un groupe que je n’avais écouté. Je viens de le faire grâce au lien inclus, ce n’est pas ma tasse de thé.
Au moins tu auras essayé, c’est déjà bien ! Merci !
Étant donné que je ne suis pas cette série, je n’ai pas de préférence sur la continuation ou non de la série. Ou en fait, si quand même : je trouve dommage que les éditeurs ne sachent pas s’arrêter. Pour un personnage comme Thorgal, qui semble vivre, vieillir, avoir des gosses, à un moment ce serait bien de lui écrire une fin, heureuse ou pas.
Sinon, entre le teamup avec Tornado et cet article, Cyrille, on sent que tu t’amuses quand tu écris! Et je note l’annonce des spoilers dans une formule en lien avec l’oeuvre chroniquée : tu as de mauvaises influences, Cyrille! 😉
Tout à fait d’accord avec ta première partie. Quant à la seconde : ahahah ! Tu as raison, tu es une de mes premières influences 😀
Je viens de lire le dernier tome sorti, le 36. Dernier album dessiné par Rosinski, et il était temps. C’est une catastrophe à tous les niveaux : histoire, personnages, narration, dessin…
Ah ? Qui s’en charge ? Teamup ?
Houla. J’ai du mal à être méchant malgré toute la déception…
Je l’ai acheté aussi. Je voulais finir la série avec Rosinski (je n’ai pas lu les spin-off avec Kriss, Louve, la Jeunesse, tout ça…). Je n’irais donc pas plus loin, et c’est très bien comme ça (mais c’est dommage de ne pas finir la série en bonne et due forme, hélas).
Bien d’accord. Je voulais aussi avoir le dernier tome de Rosinski. Moi je dois avoir six tomes de Louve mais rien de la Jeunesse ni de Kriss. C’est parce que Zoé les lisait (ou je lui lisais) au début. On a fini la série, on ira pas plus loin, et Zoé est passée à Orelsan et les rappeurs (de merde) maintenant…