The Walking Dead 2 – Cette vie derrière nous par Robert Kirkman & Charlie Adlard
Par Présence
VO : Image
VF : Delcourt
Ce tome fait suite à Days gone bye (épisodes 1 à 6) qu’il vaut mieux avoir lu avant pour pouvoir reconnaître les différents personnages. Il comprend les épisodes 7 à 12, initialement parus en 2004, écrits par Robert Kirkman, dessinés et encrés par Charlie Adlard, Cliff Rathburn ayant ajouté les trames grises. Comme dans le premier tome, Kirkman a réalisé le lettrage.
Le récit s’ouvre avec un souvenir de Lori Grimes concernant sa relation avec Shane, alors que Rick Grimes était dans le coma depuis plus de 3 semaines. Au temps présent, le petit groupe de Rick Grimes enterre proprement ses morts, décédés lors d’une attaque de zombies la veille. Le temps est venu de lever le camp et de chercher un endroit plus sûr, plus éloigné d’Atlanta qui a entièrement succombé à l’infestation de zombies. Le groupe se compose de 12 personnes dont Rick Grimes, sa femme Lori et son fils Carl. Sur la route enneigée, alors qu’ils poussent une voiture sur le bas-côté, ils acceptent 3 personnes supplémentaires qui erraient par-là : Tyreese, Julie et Chris. Lori émet des réserves à l’idée d’accepter des inconnus sans précaution.
Après avoir parcouru encore quelques kilomètres, le petit groupe découvre une résidence clôturée appelée Wiltshire Estates. Cela semble être un endroit idéal pour s’installer quelques temps, voire pour passer l’hiver. Il n’y a plus d’habitants et les placards sont plein de conserves. Il n’y a qu’à faire un tour pour vérifier qu’il n’y a pas de zombies dans les parages et ils pourront retrouver un peu de confort. Entretemps, Lori informe Rick qu’elle a la certitude d’être enceinte, ce qui engendre bon nombre de questions et d’angoisses à commencer par celle de la santé de la mère et du fœtus pendant la grossesse.
En ouvrant ce deuxième tome, le lecteur fait une première découverte : Tony Moore (le dessinateur américain des épisodes précédents) s’en est allé et il a laissé sa place à Charlie Adlard, un artiste anglais ayant fait ses armes dans l’hebdomadaire 2000 AD. Le premier constat est immédiat : le ton goguenard du premier tome a entièrement disparu pour laisser la place à une narration visuelle beaucoup plus premier degré, dépourvue de toute trace humoristique, de tout second degré. Adlard dessine lui aussi dans une veine descriptive, avec un léger degré de simplification dans les contours. Les traits de contours sont assez fins, pas très réguliers, comme s’ils n’étaient pas tout à fait assurés, ce qui donne une impression un peu croquée sur le vif, et ce qui rend les dessins plus vivants. L’artiste donne du poids à ses cases avec des aplats de noir aux contours irréguliers, qui montrent la noirceur de la situation dans laquelle évoluent les personnages.
La disparition de la dérision sous-jacente apparaît le plus clairement dans les visages, car ils sont représentés de manière sérieuse. Les sourires ont disparu, ils ont été remplacés par des expressions fermées, de l’inquiétude, et de l’angoisse, avec une pointe de déprime. Ce changement d’orientation fait sens avec le fait que les personnages prennent conscience que la situation va perdurer et que la vie va devenir beaucoup plus dure sur le plan matériel. Le lecteur observe également que le dessinateur aime bien les cases avec une tête de personnage en gros plan en train de dire quelque chose, et que les personnages ont souvent la bouche grande ouverte. En fonction de sa sensibilité, le lecteur peut apprécier ce virage vers une narration plus sérieuse, plus empreinte de gravité. Il peut aussi regretter la perte de qualité dans la mise en scène, ces gros plans sur les émotions manquant régulièrement de nuances sur l’état d’esprit du personnage, et il ne s’agit pas que d’un retour vers l’essentiel des choses.
La représentation des zombies a elle aussi effectué un virage vers un ton plus horrifique, encore qu’Adlard ne se vautre pas dans les détails gore. La peau décomposée est juste représentée par quelques tâches. Les zombies ont perdu leur essaim de moucherons omniprésents dans le tome précédent. La représentation des zombies devient plus conceptuelle que descriptive. À l’opposé, Charlie Adlard effectue un travail significatif sur les tenues vestimentaires, ordinaires et pratiques. Il joue avec la profondeur de champ, tantôt montrant toute l’étendue de la résidence Wiltshire Estates, ou du ranch par la suite. Au contraire, il peut se concentrer sur un plan rétréci pour montrer le peu de marge de manœuvre dans certaines situations. Il n’hésite pas à dramatiser certaines scènes avec un angle de vue accentué (Rick Grimes prenant un individu à la gorge en gros plan comme si le visage du lecteur était à 30 centimètres) ou en interposant un objet au premier plan (la croix d’une tombe).
Il faut reconnaître que le travail du dessinateur est rendu plus compliqué par un tome plus bavard, le scénariste ayant beaucoup de choses à faire raconter aux personnages. Il souhaite en donner pour son argent au lecteur (ce tome prend une fois et demi plus de temps à lire qu’un comics ordinaire de superhéros) et en caser le plus possible pour développer son histoire et retenir l’attention du lecteur, afin d’assurer la survie de sa série. Effectivement la narration prend un ton plus sombre, les personnages se rendant compte au fur et à mesure de tout ce qu’ils ont perdu, que le retour à la normal n’est pas pour demain, et que subvenir aux besoins élémentaires est redevenu une tâche à plein temps. Il faut trouver de la nourriture, trouver un abri, assurer la sécurité en s’assurant de l’absence de zombies, réfléchir à la manière d’assurer la santé de chacun et de soigner les blessés.
Malgré tout, le lecteur constate que le réalisme reste relatif. Au cours de ce tome, l’un des protagonistes fait justement observer qu’il n’est pas possible de savoir si la condition des individus transformés en zombies ne serait pas réversible. Les autres estiment que la probabilité est nulle, mais qu’effectivement ils ne s’étaient pas posé la question. Ils ont immédiatement assumé les conventions relatives aux zombies. Le lecteur un peu tatillon peut trouver que les survivants devraient se protéger les muqueuses à l’approche de zombies, en cas de mode de contamination similaire à celui d’un virus. Cela semble une précaution élémentaire. Kirkman explique bien que ces zombies ne sont pas très rapides, et les dessins le montrent de manière claire. Tout de même, le lecteur se demande pourquoi les survivants achèvent les zombies au pic et la hache, plutôt que de se servir d’outils avec un manche plus long (par exemple une pioche, ou une pelle comme dans le premier tome) pour éviter de recevoir des projections sur eux. Enfin, comme il est de coutume avec les zombies, ceux-ci continuent d’avancer malgré des muscles atrophiés, l’absence de vascularisation, l’absence de nourriture pour fournir des nutriments à leur corps. Ce qui est montré évoque plus des créatures surnaturelles mues par une force de nature magique, que des cadavres en état de fonctionnement.
Encore plus que dans le premier tome, Robert Kirkman donne l’impression d’avoir adopté un mode de narration tellement simple qu’il en devient simpliste. L’histoire est rigoureusement linéaire. Le caractère des personnages reste superficiel, souvent dicté par une motivation basique et unilatérale. Certes, les protagonistes en sont réduits à se préoccuper d’assouvir leurs besoins basiques : se nourrir, s’abriter, se protéger. Mais la situation de Lori Grimes nécessite de pouvoir se projeter dans l’avenir à plusieurs semaines à l’avance. Pour que sa grossesse parvienne à son terme dans des conditions satisfaisantes, il est nécessaire qu’elle s’inquiète (avec l’aide de son mari) de son état de santé et de celui du fœtus. Or il semble que l’incertitude du lendemain empêche d’envisager plus loin que les 12 prochaines heures au mieux. En outre, le scénariste semble être très attaché aux moments choc, comme s’il s’agissait de maintenir l’attention du lecteur à tout prix par des révélations brutales, comme dans une comédie de situation bon marché.
Ces révélations donnent l’impression d’arriver à un rythme régulier, comme une mécanique bien réglée. Cette fréquence est bien sûr dictée par le mode de parution en épisode mensuel. Kirkman prend la précaution d’asséner un suspense insoutenable en fin de chaque épisode pour s’assurer du retour du lecteur le mois suivant. En cela, il ne fait que respecter les contraintes du feuilleton sérialisé. Mais il éprouve également le besoin de théâtraliser ces moments de la manière la plus dramatique qui soit. Lorsque Lori informe son mari qu’elle est enceinte, elle lui tourne le dos, le visage et une partie de sa silhouette mangée par l’ombre qui figure le poids de cette terrible révélation. En choisissant ces mises en scène appuyées jusqu’à la caricature, Kirkman et Adlard donnent l’impression que ces adultes sont redevenus le jouet des leurs émotions, comme si l’effondrement la civilisation les avait ravalés à l’état d’adolescent en proie aux dérèglements hormonaux irrépressibles. Le lecteur peut choisir entre penser que les auteurs font le choix d’exagérer parce qu’ils s’adressent à un public assez jeune, ou qu’ils en rajoutent au-delà du nécessaire plombant ainsi leur narration. Mais…
D’un autre côté, le lecteur remarque également des regards appuyés qui laissent présager des catastrophes à venir, comme par exemple le petit Carl avec un regard noir et la main hésitant à prendre son revolver à sa ceinture. Il remarque également que sous une apparence simpliste le récit touche à des questions politiques très délicates. Après la mort d’un personnage à la forte aura dans le tome précédent, les autres se rangent assez facilement à l’avis de Rick Grimes, avec une régularité élevée, sans pour autant devenir des moutons. Cela peut sembler une évidence, mais Kirkman met ainsi en scène que ce petit groupe a choisi un chef de manière tacite. Pour pouvoir progresser et survivre, cette petite communauté a besoin d’un individu qui exerce une forme de commandement, pour l’instant assez consensuel, sans qu’il soit besoin d’organiser les prises de décision de manière formelle. Il y a là un mode de fonctionnement qui ressemble à une évidence, mais les réactions ponctuelles de quelques-uns montrent que cette autorité déléguée n’est acceptée que tant qu’elle apparaît utile sur le moment. Plusieurs personnages n’entendent pas se contenter de cette vie en communauté dictée par les besoins du groupe, et veulent pouvoir disposer d’une latitude d’action pour pouvoir satisfaire des besoins personnels.
De la même manière, les pérégrinations de ce tome posent à 2 reprises la question du périmètre du groupe. Faut-il accueillir et intégrer tous les individus moins bien lotis que le groupe ? Lori Grimes fait remarquer à son époux qu’il fait peut-être preuve de trop de confiance vis-à-vis d’inconnus. De même, le responsable du ranch fait observer qu’il ne peut pas accueillir tout le groupe pour une durée indéterminée car il ne dispose pas d’assez de ressources (en particulier alimentaires) pour subvenir aux besoins de tous, et qu’il préfère privilégier les membres de sa famille. Dans la forme, Robert Kirkman met en scène ces questions avec ses gros sabots, avec une dramaturgie dans l’excès. Mais dans le fond, il questionne la nature même d’une société si petite soit-elle, son fonctionnement, sa raison d’être, la légitimité de son chef (ou de son meneur), les conséquences de ses choix. La première fois, le lecteur se dit que le scénariste n’a pas fait exprès et qu’il a eu de la chance. La deuxième fois, il se dit que ce récit vaut le coup d’être lu malgré sa narration criarde. La troisième fois, il commence à penser que cette narration primaire ne reflète pas forcément l’intelligence de l’auteur.
Ces épisodes ne remettent juste en cause la notion d’altruisme, ils obligent à regarder en face la raison de l’existence de toute forme de société, à se poser des questions plus fondamentales que les réactions épidermiques des personnages. De manière sous-jacente, la question des armes à feu se repose également. La sécurité reste une préoccupation majeure, mais elle doit s’apprécier au regard du risque encouru en armant tout le monde, avec les accidents dramatiques qui peuvent survenir. À ce stade du récit, il reste nécessaire d’armer le plus grand nombre, mais les conséquences des erreurs sont bien réelles. À chaque apparition de zombies, le lecteur se demande quel genre de métaphore ils représentent. Robert Kirkman n’est pas George Romero, et il semble ne servir des zombies qu’au premier degré : des individus morts errant au gré du hasard, et attirés par les vivants. Il représente le risque de mort arbitraire (être au mauvais endroit au mauvais moment) pouvant s’abattre sur n’importe qui (sauf peut-être sur Rick Grimes au vu de la déclaration d’intention de l’auteur, contenue dans le premier tome). Ils représentent donc la mort inéluctable qui attend chacun d’entre nous à plus ou moins court terme.
À l’issue de ce deuxième tome, le lecteur reste partagé entre 2 ressentis. D’un côté, ce n’est qu’un récit de survie, pas si réaliste qu’il veut en donner l’impression, avec des personnages qui restent assez superficiels (difficile de souvenir du nom de tous les membres de la communauté de Rick Grimes), avec une intrigue tellement linaire qu’elle réserve finalement peu de surprises, et une mise en scène manquant de nuance. D’un autre côté, Charlie Adlard n’embellit ni la situation ni les personnages et place le lecteur dans un monde assez réel et consistant. Robert Kirkman attaque de front le concept même de société et ses principes de fonctionnement qui n’ont rien d’évident ou d’immuable, sans jamais donner de cours ou de leçon. 4 étoiles du fait de cet arrière-goût irritant pour un récit dont l’ambition en mériterait peut-être 5.
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La BO du jour : il s’en passe des choses dans cette ferme !
@Matt : arriver à poster malgré un hébergeur saturé, c’est plus de l’amour, c’est de la rage ! Merci Matt. Pour de vrai 🙂 Voila ce que c’est d’être un blog anti-Trump. Illuminati moi ? Même pas chez Bendis…
@Présence : un petit reproche ? Je trouve que l’iconographie de cet article n’est pas des plus parlante. Pour le reste, on ne peu pas dire que ce soit le coup de foudre isn’it ? Moi je peux te citer sur le bout de doigt le nom du groupe de l’époque sans l’avoir relu depuis 10 ans.
Pour rebondir sur les remarques d’hier, je dirai que WD est à l’image de notre époque. Finalement un espèce de reality show où tout peut arriver (sauf la mort de Rick Grimes). L’humanité qui s’est passionnée pour l’éviction des Loft-kohmachin, qui a besoin de désigner par SMS la prochaine starlette de la chanson, ne peut que se passionner pour ce comic book qui, pardon Présence, offre plus que le film de Zombies normal. Il y a un vrai suspense, des personnages qui sortent subitement du casting, et une vraie évolution des personnages.
Comme le dirait Thierry Araud, les personnages passent du mobile home du camping, à l’âge de bois (la ferme), puis de l’acier avec les autres hébergements. Je n’ai jamais vu WD comme un manifeste politique et j’ai suffisamment critiqué la série pour ça. Pour autant, pour peu que l’on s’attache aux personnages, il est possible tout simplement que la série ne soit qu’un Live through this ce qui n’est pas répréhensible en soi.
Je dois dire enfin, que décidément tu fais acte d’une certaine mauvaise foi en notant de manière égale ce volume et la nouvelle torcherie de Millar lue ce matin Chrononauts…Parce que là, en terme d’écriture simpliste quoi Présence….
Au vu des élections du jour, j’apprécie le double sens des légendes : Peut on lui faire confiance ? Et maintenant, on fait quoi chef ? Finie la rigolade !
Merci en tout cas d’alimenter le débat avec des critiques avec lesquelles je suis en désaccord mais construites.
Pour le plaisir de l’argumentation – Vos remarques (celles d’hier et celles d’aujourd’hui) me font prendre conscience du degré de partialité de mes articles. Effectivement, je n’ai pas accroché à la série.
Les personnages – Ce n’est pas le coup de foudre, et j’ai éprouvé des difficultés à me souvenir des noms des personnages, au point que j’ai du rechercher qui était qui en début du troisième tome. Je pense que je suis confronté au même phénomène que toi (Bruce) avec les personnages de Sunstone Lisa Williams & Allison Carter. J’ai l’impression de ne pas avoir d’atomes crochus avec eux. Je n’éprouve pas d’empathie pour eux, c’est mon ressenti tout personnel.
En relisant ton commentaire, je me demande si je ne fais pas un blocage avec toute forme de projection dans les personnages justement parce que je sais qu’ils peuvent disparaître au tournant d’une page.
L’iconographie – J’ai procédé de la même manière que pour les autres articles : rassembler le plus d’images possibles, pour ensuite sélectionner celles qui collent avec mon propos. Il m’en reste donc 16 que je n’ai pas utilisées. D’un autre côté, on peut voir une forme de cohérence dans mon choix qui va dans le sens de mon appréciation tiède pour Adlard.
Manifeste politique – C’est la dimension qui me plaît le plus dans le récit. Je n’ai pas l’impression que Kirkman mette en avant ses opinions politiques (que je ne connais pas d’ailleurs), mais plutôt qu’il sonde les mécanismes de la société. Je le trouve très bon dans ce registre.
Juste un récit de survie – Je n’ai rien contre, mais visiblement ce ne doit pas être ma tasse de thé. Pour continuer dans le registre des trucs qui fonctionnent encore, j’en suis toujours à me demander comment les douches peuvent fonctionner dans le tome 3.
« Tout peut arriver, sauf la mort de Rick », hé oui, c’est bien tout le problème de The Walking Dead, une remise à plat avec sa disparition relancerait un peu le suspense et donnerait de l’incertitude et du piment à ce récit qui se repose quand même beaucoup sur ce personnage plus qu’irritant à mes yeux.
La mort de Rick ? Sonia, tu n’es qu’une vile anarchiste ! Et dire que ça travaille dans la fonction publique….
C’est bien un paradoxe de suivre une série dont on n’aime pas le héros :). Mais je trouve qu’effectivement la série sans Rick donnerait un nouveau souffle à la série…tout en risquant de la faire durer plus longtemps….
Pfff. J’ai la gueule de bois moi… Les USA vont élire une star de télé-réalité. C’est quoi l’avenir ? Nabila présidente de la république ? Il a fait des études à science-po Donald Trump ? Oh et puis ça devait arriver ce bordel. Les politiciens sont tellement obnubilés par leur nombril et leur starification qu’ils sont devenus archinuls. A ce stade là, effectivement, pas besoin de faire science-po.
Désolé, c’était plus fort que moi, et ça n’a quasiment rien avoir avec l’article de Présence, excepté… qu’on est entouré par les zombies putain ! Il fallait le faire quand même pour élire ce type !!! Il n’y a que les zombies pour faire un truc pareil !!!
Bon, du coup, notre cher Présence devient le bouc-émissaire du jour ! 😀
Comme Bruce, j’ai du mal avec les jugements relatifs (mais je l’ai déjà dit). Si TWD est meilleur qu’une série maisntream, alors pour moi il mérite une meilleure note. J’aurais même un jugement inverse, à savoir que je serais plus tolérant envers un auteur qui a de l’ambition mais qui se plante, qu’envers un faiseur qui fait un truc sans ambition et qui, en plus, est moyen.
Ce n’est qu’un avis personnel, pas un état de fait dictatorial, hein. mais c’est vrai que j’ai du mal à comprendre l’inverse.
Putain…je viens de voir aussi le résultat. Ah j’aurais pas cru…
On peut se dire qu’au moins ce n’est pas chez nous mais ça ne présage rien de bon…
Juste un mot sur les jugements relatifs : pour moi ça dépend juste de l’état d’esprit, de ce que tu cherches à lire. Si j’ai juste envie de lire ou voir un film d’action bien troussé, je ne vais pas lui reprocher de ne pas avoir un fond philosophique. Doit-il donc être moins bien noté qu’une œuvre d’auteur profonde et traitant intelligemment de problèmes de société ?
Toi qui a bien aimé Shanna de Frank Cho, tu lui mettrais quoi du coup comme note, sachant que tu ne mets pas toujours 5/5 à Alan Moore ? 3/5 ? Même si t’as bien aimé ?
Tout pareil que Matt sur les jugements relatifs.
Au fil des années qui passent, et pour en avoir discuté avec plusieurs reprises avec Tornado, je suis incapable de faire autrement. Comme l’indique Matt, j’utilise la notation en étoiles comme un indicateur de mon plaisir de lecture, en fonction de mon état d’esprit du moment, donc avec une composante émotionnelle qui échappe à l’analyse rationnelle.
Pire encore, je vois bien que mes goûts changent au fil des années. C’est encore Tornado qui me l’avait fait remarquer : aujourd’hui je ne noterais probablement pas de la même manière un comics de superhéros de base (au hasard le début des Avengers de Brian Michael Bendis) que lorsque je l’ai lu la première fois il y a 8 ans. Donc même mon référentiel de notation est évolutif avec le temps qui passe.
Ensuite tous les ouvrages ne peuvent pas répondre aux mêmes critères. Je mettrais toujours 5 étoiles à Weapon X, même s’il ne me dit rien sur les mécanismes sociaux des métropoles occidentales, ou à Ant-Man de Nick Spencer, même si le principe d’un gugusse en costume moulant qui peut rétrécir reste idiot et sans connexion avec la vie de tous les jours. C’est comme ça que je me retrouve à mettre 4 étoiles à ce tome de Walking Dead pour son regard analytique sur la dynamique de groupe, et à Chrononauts pour sa dimension divertissement décomplexé.
Toujours aussi incohérent, je vais continuer à profiter de l’offre de Bruce de me prêter les tomes de Walking Dead pour les lire, même si je ne m’attache pas aux personnages (on verra bien par la suite) parce que le jeu politique sur l’évolution de la société que forme ce groupe me plaît et me fascine.
Les personnages-
Sur ce coup là,, Kirkman est particulièrement honnête avec son lecteur puisque son manifesto est toujours respecté une décennie après le début de la série. de quoi s’agit ‘il ? Tout simplement d’inventer le quotidien post apocalyptique ! Là où les films de zombies montrent la crise et l’urgence de la survie, Walking Dead montre les lents et sinueux mécanismes de la reconstruction de la société. Il n’occulte ni l’approvisionnement en eau, ni l’électricité (qui semble particulièrement inquiéter Présence). certains tomes sont d’ailleurs totalement dénués d’action. les personnages jacassent entre eux. Un peu comme les Xmen de Claremont autour de la vaisselle. C’est sûrement ce qui me plait le plus : cette caméra sans arrêt du côté du personnage.
Présence, tu devras reconnaître que la régression de Scott Summers en tant que boy scout puis anti héros doit beaucoup à Rick Grimes qui lui, ne vit pas dans un monde où l’on ressuscitée. Enfin si, mais pas dans le bon sens du terme….
Pour le coup ce côté « lent » façon Claremont pourrait m’intéresser aussi. Mais ce genre de choses ne peut se faire que dans une série super longue. Et…c’est le cas de WD. Sauf que je n’ai aucune envie de me plonger dans une nouvelle continuité qui va durer des décennies et que je ne relirai jamais du début.
Pour le coup, même dans un univers bordélique comme celui de Marvel ou des X-men, ça reste possible de lire des histoires isolées sans tout se taper du début. j’ai pas la sensation que ce soit le cas de WD.
« ça reste possible de lire des histoires isolées sans tout se taper du début. j’ai pas la sensation que ce soit le cas de WD. » Disons que tu trouveras tout ce que Marvel tente d’importer en terme de personnages confrontés en terme de choix impossibles sans y laisser une partie de leur âme sans reboot, crossovers ou toutes les autres conneries….
Quand même, on parle d’un mensuel avec la même équipe créative aux commandes depuis une quinzaine d’années. Pas d’annuals, de teamup, de changement radical de direction ou de plantage monumental avec ce gros balourd de Jason Latour pour Wolverine et les Xmen.
La continuité de WD est simple, facile à lire, facile à aimer. Il ne m’en faut pas plus.
Ouais mais si tu sais faire abstraction du bordel éditorial chez Marvel pour lire par exemple Weapon X sans te soucier de l’avant ou de l’après, ça marche aussi très bien. Et c’est bien plus facile à relire que 24 tomes d’une série. ça demande un effort pour oublier ce qui nous déplait chez Marvel mais après ce sont des récits dans lesquels on peut se replonger avec plus de facilité.
Mais je parle de marvel mais c’est valalble pour d’autres choses. Je sais que je ne lis que très peu de longues séries. Je vise les séries en quelques tomes. Je ne suis pas du tout partisan du « plus c’est long, mieux c’est car on ne veut pas quitter les personnages ». Pour moi, il fait qu’il y ait une fin. Scalped déjà je trouve que 10 tomes ça fait long. Y’a intérêt que ce soit super ! (j’ai pas encore commencé, j’avoue…)^^
Shanna : 5 étoiles sur la zone. Parce dans son genre c’est carrément parfait et vachement bien foutu.
GoG par DnA 2,5 étoiles. Parce que pour moi (donc avis perso), c’est moyen comme truc. Bordélique et indigeste.
Le principe me parait simple : C’est bon, c’est moyen ou ce n’est pas bon.
Par contre je trouve qu’il faut une toile de fond à tout. Je ne suis pas d’accord sur le principe que tout se vaut. Ce peut être carrément un traité de philosophie (Promethea) ou juste une métaphore politique (Civil War), un méta-commentaire vertigineux (Watchmen) ou juste un trip pulp conceptuel (Shanna). Ce peut être aussi un simple divertissement racé qui véhicule des thèmes séculaires (Jeff Loeb/Tim Sale). Mais si ce n’est que du divertissement bête, c’est juste bête et ça ne peut pas prétendre à être intéressant. Si c’est intelligent, c’est forcément qu’il y a une toile de fond, ou au moins un concept. Même s’il est modeste.
Molière, La Fontaine, Walt Disney, Charles Chaplin, Steven Spielberg. Tous sont ou furent des auteurs qui développait un texte et un sous texte. Ils créaient des oeuvres. Ils avaient une vision et un concept.
Un simple divertissement creux, bête, bourrin. Pourquoi pas ? La connerie, c’est la décontraction de l’intelligence comme disait Gainsbourg. Seulement, au moment de juger, tout ne se vaut pas. C’est mon avis.
Ouais mais tu dis « c’est bien…dans son genre » C’est donc bien une sorte de relativisme. Tu ne vas pas juger un trip pulp conceptuel comme tu juges une métaphore politique.
Et même un truc bête peut être amusant ou joli. Si c’est bête, moche et pas drôle, ok…y’a des moments où ça ne passe plus.
C’est bien dans son genre = relativisme. Oui. Mais ce n’est pas ce que je dis ! 🙂
Ce que je pense, c’est qu’il n’y a aucune raison d’être plus sévère avec un genre qu’avec un autre.
Dans son genre, c’est bien, c’est moyen, ou ce n’est pas bien. Pareil pour une création d’auteur. pareil pour un simple divertissement. J’ai le même barème pour les deux.
Je trouve injuste d’être plus sévère avec un création plus ambitieuse que les autres. Au contraire, j’aurais le réflexe inverse en étant éventuellement plus généreux parce que l’enjeu est plus complexe.
Et c’est là où je pense que tout ne se vaut pas.
Est-ce que un album des Village People vaut un opéra de Wagner ? Je prêche par l’absurde mais voilà quoi…
On a le droit d’aimer les deux, et d’ailleurs sur le long terme je pense que je préfèrerais écouter les Village People 😀 ! Mais je sais que les deux n’ont pas la même valeur.
Alors je pourrais mettre 5 étoiles aux deux. Ou même 2,5 étoiles si j’estimais que ça ne vaut pas plus. Mais je ne serais pas plus sévère avec Wagner parce que je m’attends à du lourd, tandis qu’avec les Village People je m’attends à du léger.
Ma comparaison est peut-être tirée par les cheveux, mais en tout cas elle illustre parfaitement mon incompréhension sur les jugement de valeur relatifs.
Le pire c’est en musique. Je ne supporte pas qu’on condamne un album parce qu’il n’est pas « musicalement correct ». Et qu’on en encense un autre où les musicos jouent comme des patates, mais avec le bon état d’esprit qui plait au rocker. C’est de la mauvaise foi, ça.
Pour parler de Village People sur mon joli blog Tornado, c’est que vraiment l’élection de Trump t’a tornadé….
Ah non, ça je suis d’accord c’est vrai.
Je dis juste que c’est souvent un réflexe, comme quand on est déçu d’un film que tout le monde encense parce que justement on s’attendait à du lourd. C’est inconscient mais je suis d’accord que c’est injuste.
Par contre la formulation « c’est bien pour ce que c’est » a du sens pour moi. Il s’agit de juger l’oeuvre en fonction de ses ambitions. Je m’y perds un peu parce que sur l’article de civil war tu disais qu’il n’y avait pas de raison d’être plus gentil avec un divertissement, mais c’était juste qu’on avait trouvé Jyrille et moi que pour un divertissement, ça tenait bien la route. Mais on peut aussi ne pas tomber d’accord^^
Et bien voilà, pour moi CW le film est certes au dessus du tout venant des adaptations ciné en termes de super-slips, mais en lui-même le film est moyen. Il est plein de défauts, de fautes de goût, de scènes racoleuses, de raccourcis faciles. Donc même si ce n’est qu’un divertissement et qu’il est au dessus de la moyenne, en lui-même il est moyen. Je ne vais pas lui filer 5 étoiles parce que les autres films sont nuls et qu’il est mieux.
Mais ce n’est qu’un avis personnel et ce n’est qu’une discussion. 🙂 Je changerais d’avis si après discussion je trouvais que j’avais tort. Promis.
Tiens, pour terminer, j’ajouterais que je me retiens constamment de ne pas descendre une oeuvre si elle n’est pas comme j’aurais voulu qu’elle soit, même si ce n’est pas facile. Sinon, je mettrais 1 étoile à tous les Star Wars (comics + films) qui sont sortis depuis le rachat de Disney ! 😀
Ouais mais ce raisonnement est plus complexe que tu le dis. Par exemple juger une scène clichée peu originale et prétendre qu’elle serait mieux sans tel ou tel élément, est-ce que ça signifie qu’on la critique parce qu’elle n’est pas comme on voudrait ? Ou qu’on a l’esprit critique et qu’on veut mettre en valeur des fautes de script ? Parfois la frontière est floue.
Et pour prouver que parfois c’est difficile de s’émanciper des impressions que les gens nous renvoient, regarde comme tu es tout énervé contre les comics de super héros old school à cause des fans qui les encensent (éh, je te cite hein ! Je dis pas que tu n’es pas objectif, j’ai bien compris ce que tu reproches légitimement à ces comics, mais je t’ai vu râler sur les fans !)^^
Tout ne se vaut pas. – Bien sûr ! Mais…
La beauté est dans l’œil de celui qui la contemple, et la valeur aussi. L’exemple Wagner / Village People me semble pertinent parce qu’il permet de travailler sur des extrêmes et donc de faire apparaître des points de vue. En ce qui me concerne, à la longue j’écouterais plutôt Wagner, non pas parce que c’est meilleur ou que ça présente plus de valeur, mais parce que ça correspond plus à mes goûts.
Récemment j’ai offert un libre d’Idriss Aberkane à mon fils, scientifique qui aime bien citer la maxime selon laquelle la vérité est un miroir brisé dont tout le monde détient un morceau, et selon laquelle chacun pense que son morceau est plus grand que celui des autres. Comme le souligne Matt, on ne peut pas exiger d’une œuvre qu’elle soit tout à la fois dans tous les domaines culturelles et scientifiques. Je n’attends pas la même chose d’un Tintin que d’une BD humoristique de type Léonard par Turk & de Groot. Aujourd’hui mon plaisir de lecture est plus grand à la lecture d’un album de Léonard le génie qu’à celui d’un Tintin. Non seulement ça dépend de ce que je recherche (un moment d’amusement, c’est-à-dire mon horizon d’attente), mais aussi de mon histoire personnelle (j’ai souvent relu tous les Tintin, alors qu’il me reste des Léonard à découvrir). Mais il y a de cela 3 décennies, je prenais plus de plaisir à relire un Tintin. Donc les références du lecteur que je suis dépendent de mon état d’esprit du moment, mais aussi de l’âge auquel j’effectue ma lecture.
Mon niveau d’exigence augmente aussi avec mon expérience de lecture. Comme me l’a déjà fait observer Tornado, un comics que j’ai pu trouver génial il y 10, 20 ou 30 ans pourra m’apparaître aujourd’hui convenu parce que j’ai découvert qu’il était issu d’un genre que je ne connaissais pas auparavant, et dont j’ai découvert de meilleurs ouvrages depuis. Il est vraisemblable que j’aurais attribué une notation plus sévère à ces 2 premiers tomes de Walking Dead si Bruce et Thierry Araud ne m’avaient pas, avant, pointé du doigt leurs qualités.
Pire encore, mon ressenti entre Wagner et Village People dépend de ma propre culture. Est-ce que j’aime la musique pop et le classique m’horripile ? Ou est-ce que mes parents m’ont appris à apprécier le classique, et je ne supporte pas cette musique pop qui est plus spectacle que musique ?
Il est également possible d’adopter un point de vue culturel dans une perspective historique. Les œuvres de Walt Disney comprennent des thèmes universels, mais elles sont également le produit d’une culture blanche, d’un système de production capitaliste et d’un mode de pensée occidental. Si je n’appartiens pas à ce segment de l’humanité ainsi défini, il est possible que je relativise la valeur de ces œuvres qui prône des valeurs qui ne sont pas les miennes.
La mondialisation a permis d’accéder à des éléments culturels plus diversifiés qui ont également eu pour effet de relativiser d’énormes pans des autres cultures, et de leur apporter un éclairage contextuel très différent. Il me semble que nous avons également eu cette discussion au sujet des œuvres d’art moderne. Leur appréciation n’est pas accessible à tout le monde, à commencer par moi. Ici la notion de valeur débouche sur un autre thème difficile à manier qui est celui de l’élite qui a acquis la culture nécessaire pour comprendre et apprécier.
Au vu de ces nombreux paramètres, je dois humblement avouer que je tente d’objectiver ma lecture, tout en le pondérant par mon ressenti émotionnel. Mes critères sont personnels, certains relativement objectifs, d’autres entièrement subjectifs. Dans ce contexte, je me félicite de la pluralité de ce site qui offre des points de vue différents du mien, qu m’ouvre à d’autres perspectives, d’autres critères, d’autres passions (comme par exemple les points de vue de Bruce et Thierry sur Walking Dead). 🙂
Mais oui les amis, c’est ça qui est bien, et qui est sain : On ne partage pas toujours les mêmes avis, les mêmes idées, mais on échange avec respect et bienveillance. Et au final on s’enrichit de ces différences.
Et puis personne n’est parfait. Cette histoire de miroir est une métaphore très efficace pour le coup ! 🙂
Certes, certes, vous avez tout dit.
C’est sûr que c’est plus agréable de causer ici que sur certains forums où on se fait traiter d’inculte quand on dit ne pas aimer tel ou tel truc.
Tiens au fait Tornado pour en revenir à l’épisode de WD qui t’a choqué hier, je dirais qu’il y a un épisode de la première saison de Masters of horror que je n’ai pas osé regarder. Le dernier, « Imprint » de Takashi Miike réputé pour être sacrément éprouvant. Je ne peux donc pas dire que c’est une horreur sadique sans l’avoir vu mais il se traine un peu cette réputation…en plus d’être WTF.
Je ne sais pas si je vais oser…
Si ça se trouve, c’est exagéré ce qu’on lit dessus. Ou pas…
Tiens, si jamais ça t’intéresse, un tour d’horizon sans (trop) de spoilers sur chaque épisode :
http://www.clubdesmonstres.com/mastersofhorror.htm
Il y a à boire et à manger mais bon…ça peut t’intéresser.
Imprint a été carrément interdit aux USA. ça fait un peu flipper. Je ne suis pas sûr de franchir le pas et mettre le DVD de mon coffret dans le lecteur un jour…
Il y a même un épisode sur les zombies qui vont voter dans une satire politique !
Je connaissais l’exemple du miroir brisé que je sors souvent à mes agents lorsque l’on me demande de prendre partie pour tel ou tel collègue. Par contre dans ma tête, c’était un proverbe chinois = une maxime dont personne ne sait la provenance.
Merci pour ces conseils. Je n’ai jamais vu cette série justement parce qu’elle a été diffusée à une époque où je craignais encore trop les films d’horreur trop hard. Mais avec ma femme qui est une fan, j’ai été obligé de m’adapter… 😀
C’est rare de lire des critiques négatives ou irritées de ta part, Présence, je pense donc que c’est une très bonne idée de t’avoir fait écrire sur cette série. L’article est fantastique, et il dénote de tes chroniques habituelles car tu cherches la petite bête. C’est je pense d’abord à cause de Adlard et de son parti-pris réaliste et sans humour, et également du fait que cette série est devenue un phénomène et qu’il faut bien parfois être une voix dissonante au milieu du plébiscite, comme l’a souligné si justement Matt.
Je dois dire que je suis en tous points d’accord avec toi. Il faut savoir que j’ai lu les huit premiers tomes en une traite, et l’expérience n’a pas été renouvelée, ni aucun tome relu. Comme toi, je ne suis pas abasourdi par le trait de Adlard, et comme toi j’ai beaucoup de mal à apprécier la linéarité de TWD, et elle ne varie jamais. Cependant, même cette simplification a du sens : dans un monde où tout est incertain, tenter de faire des flashbacks, de montrer des actions lointaines, des personnages situés ailleurs et qui rencontreraient le groupe de départ ne pourraient que donner une certain confort au lecteur. Le confort de savoir que l’histoire est une histoire pensée, qui mène quelque part, qui nous familiarise avec de nouvelles situations avant qu’elles n’arrivent. Alors que dans la vie, cela n’est pas comme ça. On reste le prisonnier de son corps, et c’est ce qui arrive au groupe de Grimes. Avec ce procédé, souvent ennuyeux, la tension reste toujours présente. J’avoue que ça marche très bien.
Mais comme tu le soulignes, tout l’intérêt de TWD tient dans cette spectroscopie de la société et de l’interaction entre des personnages devant une situation radicale. La raison du succès de Walking Dead doit être là-dedans, et c’est très malin de la part de Kirkman : la peur, la vraie, n’est pas de se retrouver en face de zombies, cela fait longtemps qu’ils ne nous font plus peur, mais bien celle de se retrouver dénué de tout, de devoir reconstruire un confort à partir de presque rien. Et nous adorons sentir ce frisson, nous confronter à l’inconnu, qui n’a rien de noir ou perdu au fond d’une maison, mais a lieu en plein jour, devant un désert d’habitations délabrées et de nature hostile. A ce propos, je vous conseille le film The Gray (Le territoire des loups en VF), un survival très bien fait et très émouvant. Et graphiquement splendide.
« du fait que cette série est devenue un phénomène et qu’il faut bien parfois être une voix dissonante au milieu du plébiscite, comme l’a souligné si justement Matt. »
Oui enfin, je ne dis pas non plus qu’il faut faire exprès d’aller à contre-courant par principe^^ Mais en effet se montrer critique plutôt que de suivre le mouvement reste toujours intéressant.
M’étant acquitté de mes obligations professionelles, familiales et figurereplayiennes, je peux sortir de ma retraite de commentateur.
Je trouve, d’après les scans, que le dessin de Adlard s’est amélioré au fil de la série. Ici, il semble un peu fragile, mal assuré, tandis que sur les tomes plus récents, le trait fait plus affirmé.
Je crois que je m’en étais arrêté à ce tome 2, il y a des années, lorsque j’avais fait essayer la série à un pote et qu’il me les avait prêtés (oui, c’est fourbe, comme manipulation : offrir des BD qui nous intéressent pour pouvoir se les refaire prêter…) Ceci dit, j’avais vu juste, il a accroché à la série alors que moi, pas… Je ne conteste aucunement la richesse de la série, surtout avec ses analyses sociologiques régulièrement décryptées par Bruce et Thierry Araud dans leurs articles… C’est simplement que ça ne m’attire pas. Il fut une époque où j’aurais sans doute volontiers plongé dans cet univers sombre et un peu désespéré mais là, non, ce n’est pas (plus) ce que je recherche… Et puis, faisons un peu de provoc, vus de loin, les persos ont un charisme de moule (désolé, ça fait du bien de troller, des fois…)
Merci, je me sens un peu moins seul. Mais je crois que cette série sera pour moi la preuve que la curiosité est un vilain défaut. Je n’ai pas été assez fort pour ne pas céder à la tentation d’emprunter la suite à Bruce…
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